Une lecture intéressante, avec un message fort et une manière de le transmettre peu habituelle. On reconnaît bien l'écriture de
Christelle Dabos, ce décalage particulier, ce phrasé souvent énigmatique, mystérieux, cette histoire pleine de métaphores, cette impression que rien ne fait sens et qu'en même temps tout est sensé, ce jeu sur les mots, ce jeu de la langue, vraiment une très belle écriture, très travaillée, très intelligente. C'est quelque chose que j'aime vraiment avec cette autrice : son écriture. Elle est facilement identifiable, c'est sa signature en un sens.
Toutefois, mon avis est plus mitigé concernant l'histoire de ce livre. Encore une fois, le message est très bon, c'est excellent que ce problème soit soulevé et remis au goût du jour, c'est excellent de montrer cette réalité des collégiens, c'est excellent de reconnaître que non, l'école ce n'est pas facile, oui beaucoup y sont malheureux, oui on se cherche, oui on perd une part de notre innocence, oui on découvre des cruautés, oui on nous force à grandir parfois trop vite, oui il faut grandir, non on n'est pas souvent bien accompagné, oui ça dépend de nous, oui une main peut aider, oui des mots peuvent blesser, oui on est souvent seul, oui c'est dur. Cependant, j'ai eu du mal avec toutes les métaphores justement, avec l'impression que tout était insensé tout en l'étant fondamentalement. J'avais envie que l'autrice dise les choses, qu'elle pointe les problèmes en mettant les vrais mots dessus, j'avais envie qu'elle appelle un chat un chat. Ici, on passe par des moyens détournés pour nous montrer une vérité. C'est un principe qui fonctionne très bien dans l'art, un principe qui peut même se révéler plus efficace que le fait de dire les choses frontalement, mais ici j'ai eu du mal. Je ne saurais dire exactement pourquoi mais à plusieurs reprises j'avais vraiment envie que les mots soient prononcés – écrits –, j'avais envie qu'une véritable voix soit donnée à ces enfants, qu'ils puissent s'exprimer. Au lieu de quoi on passe par tout un tas de moyens détournés. Je ne dirais pas que c'est sans effet, le principe est efficace, j'ai ressenti des émotions à la lecture, j'ai été en colère, frustrée et je me suis identifiée. Mais il manquait quelque chose à mes yeux, il manquait certains mots. À la réflexion, je me dis que certains mots auraient sans doute choqués, qu'ils sont peut-être trop forts pour un lecteur plus jeune, mais d'un autre côté, ce livre est un « roman ado » donc, pour moi, des mots – même choquants – auraient permis de mieux parler à cet ado, de peut-être lui donner les mots justement.
Dans cette lecture je pense que le plus important reste le message, du côté des personnages c'est moins intéressant. Ils ne sont pas mauvais, mais je ne me suis attachée à personne. le but étant – je suppose – de pouvoir s'identifier à chacun d'eux, donc si vous cherchez une belle histoire divertissante, passez votre chemin. C'est plutôt un livre qui amène une réflexion, qui est certes un récit intéressant, mais qui amène à plus, pas juste à quelques heures de lecture dans un fauteuil pour se sentir bien. Un livre farfelu – je n'ai pas d'autre mot – qui nous plonge dans des souvenirs quand on est sorti du collège, pour ma part, je l'ai trouvé parlant mais pas suffisamment, mais ainsi j'imagine qu'il peut s'adresser à un plus grand public. Bref, je suis contente de l'avoir lu et contente d'avoir replongé dans la virtuosité de l'écriture de l'autrice, j'ai apprécié le message, j'espère qu'il sera vu par beaucoup et compris, j'espère qu'il aidera, mais ce n'est pas mon genre de lecture, donc je n'ai pas été emballée outre mesure.