Les Edts de l'Olivier et A.Desarthe, aucune hésitation, ce sera un bon moment de belle lecture.
Pas de grands mots, pas de grands gestes, tout se passe apparemment en douceur dans ce roman. Une nouvelle vie est proposée à un couple plus très jeune et leur jeune ado: un poste de professeur d'université aux U.S est proposé au père , la mère suit, comme elle l'a toujours fait et comme si elle était Mme Nobody, pas d'élan, ni de besoin d'être quelqu'un. Et puis Lester, l'ado, un peu trop sage, en pleine crise de mysticisme.
Ils arrivent dans une Amérique d'avant Trump, pleine de préjugés, de libido réfrénées, et chacun commence à se révéler. Pas forcément joli-joli, mais au moins la vie est moins plan-plan, d'autant plus que l'attentat du Bataclan à Paris interpelle le monde .
Tous ces sujets sont abordés en douceur avec une certaine mélancolie, mais aussi avec une ironie mordante qui transparaît dans tout le roman.
Ce n'est peut-être pas le roman de cet auteur que j'ai le plus apprécié, mais je ne manquerai pas le prochain, c'est certain.
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Hector, professeur de philosophie, décroche un poste temporaire dans une université américaine, en Caroline du Nord, où il s'envole donc avec sa femme Sylvie et Lester, leur fils, qui souhaite désormais se faire appeler Absalom Absalom. le trio va devoir, classiquement, prendre ses marques et s'attacher de nouveaux repères dans ce pays si familier et si différent, dans le même temps, de leur vie parisienne.
Mais là n'est pas le propos. Ce déracinement de quelques mois, un an peut-être, ouvre une immense parenthèse dans le cours de leur existence. Loin de chez eux, ils se retrouvent loin d'eux-mêmes et se révèlent, à eux-mêmes comme aux deux autres. Ce sont donc trois personnages très différents, riches et complexes, qu'il s'agit de croquer. Non par le portrait mais par leur biais, quelques failles discrètes qui font sens, toutes ces fragilités qui déterminent un être. Si j'ai dévoré le roman, je ne trouve pas les personnages d'une égale importance, ou d'un même intérêt.
Hector, le père, est finalement assez plat. Archétype du professeur d'université, mûr mais séduisant, chérissant son propre charme, père de famille à la présence incertaine. Il n'est, essentiellement, que le révélateur des deux autres, de Sylvie surtout.
Car tel est, à n'en pas douter, le personnage principal : Sylvie. Elle ne travaille pas mais combat fermement le statut comme les tâches de la femme au foyer. Non par conviction, elle est mue depuis toujours par un détachement abyssal des contingences matérielles, pour lesquelles elle ne présente ni intérêt, ni totale compréhension. Personnage lunaire, lunatique aussi, souvent mélancolique, parfois piquante, inadaptée et farouche malgré un statut bourgeois, Sylvie est terriblement attachante. de loin le personnage le plus fouillé, à croire qu'elle était le sujet initial du livre. Elle offre à l'auteur l'occasion de parler des femmes, avec une voix nouvelle, inédite, poignante. Ni mélodramatique, ni caricaturale. Tout en finesse, par les bords, effleurant chaque pensée ou sentiment limite, comme les doigts de Sylvie glissent sur l'argile dans son cours de poterie, sans trouver l'inspiration. Des questions existentielles, elle s'étouffe et se nourrit alternativement. Offrant parfois de magnifiques fulgurances :
"Pour quoi suis-je faite ? s'interrogea-t-elle. A peine la question l'avait-elle effleurée qu'elle repartit là où elles se trouvaient toutes, serrées les unes contre les autres, à l'abri des réponses."
Lester, enfin, ou Absalom Absalom, est un adolescent de quatorze ans volontiers mystique, à l'intelligence acérée, dont on devine aussi une face plus sombre, désabusée. le personnage est moins fouillé - j'ai pu le regretter. Il reste ainsi, et c'est peut-être la réponse la plus juste, dans le flou des tourments adolescents, à mi-chemin entre précocité et isolement, étrangeté et inquiétude.
Si le roman se déroule dans une Amérique en pleine campagne électorale, offrant au regard intellectuels et artistes persuadés que la Maison Blanche sera occupée quelques mois plus tard par Hillary, ce n'est pas tant une fresque américaine - parmi d'autres - qu'un faisceau de lumière jeté sur la France. Car, là aussi, le décalage géographique joue le rôle de catalyseur de ce que nous sommes, de notre mode de vie. La famille arrive aux Etats-Unis quelques mois avant les attentats du 13 novembre, qu'ils vivront à distance, avec une violence que la distance n'amoindrit pas mais déforme, diffracte. Ces pages du roman sont d'une puissance incroyable, d'une dureté redoutable ; elles tirent de belles larmes littéraires.
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Sylvie part avec son mari Hector et son fils Lester (Absalom Absalom comme il se re nomme) 1 an aux Etats Unis, Lui travaille, elle, a choisi de ne rien faire, Rien du tout. Elle élève son fils et se promène dans la vie, sans vraiment se poser, sauf pour les cours de poterie où elle va créer, je vous laisse découvrir quoi. Façon pour elle de ne pas être blessée ? surement, c'est une force et une faiblesse. Son ado de fils perçoit tout, sent tout et en vient pour la protéger, à réciter des mantras, puis à créer un groupe d'ados, devenant une sorte de gourou. Et ses parents ne perçoivent rien. Déjà parce qu'Hector qui aime sa femme, passe son temps pourtant à la tromper avec les belles professeurs de l'université. Problème du quotidien. Une année de parenthèse où, loin de la France, les tempéraments vont s'exprimer pour revenir dans leur normalité, Il ne se passe pas tant de choses que cela dans ce livre mais quelle plaisir de lecture ! La langue est savamment travaillée et est fluide, intelligente. C'est drôle aussi, avec des personnages complexes mais tellement attachants que le moment de lecture est un régal.
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On fait connaissance avec la famille Vickery au moment où elle s'envole pour les US. Une parenthèse dans leur vie parisienne car Hector, le père, philosophe et poète, a accepté un poste d'enseigant dans une université de Caroline du nord.
Sylvie, son épouse, suit le mouvement.
Lester, leur fils de quatorze ans, veut désormais se faire appeler Absalom Absalom, premier symptôme d'une crise mystique qui échappe complètement à ses parents.
Avec ce déplacement, le regard des trois personnages sur le monde et les uns sur les autres va se transformer.
Le livre fait la part belle à Sylvie, une femme authentique, énigmatique, qui n'essaye pas de paraître aux yeux des autres, et a choisi comme règle de vie le non-agir.
Dans cette nouvelle vie, Hector va se transformer en french lover, ce que Sylvie découvrira à l'occasion d'une panne de machine à laver ( scène tout à fait cocasse). Pour autant, elle ne changera rien à sa façon d'être, légèrement perturbée mais confiante dans la solidité de son couple.
Lester va se transformer en gourou pour adolescents.
Et Sylvie, à la fois passive et réceptive, va s'investir dans le modelage d'objets du quotidien en céramique ( légumes et chaussures)
au travers d'anecdotes racontées avec une certaine légèreté, Agnès Desarthe invite le lecteur à réfléchir et à se poser diverses questions sur l'amour parental, la perte, l'amour conjugal qui dure, la liberté, le rapport aux autres.
Je me suis attachée à cette Sylvie qui est à la fois femme libre et entretenue.
Ce livre nous offre une drôle de petite musique qui reste en tête après l'avoir refermé. Il faut persévérer dans la lecture car le début peut dérouter avant que se mette en place ce tableau familial tout à fait singulier et attrayant.
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très fouillé riche et interessant psychologiquement. Pas si facile à lire que ça mais vraiment très enrichissant. s'apparente à un bon Salter. Ne pas le lire si vous aimez des choses simples et fluides.
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"Hector avait une femme. Elle s'appelait Sylvie. Ensemble ils avaient un fils. Il s'appelait Lester."
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Hector a été nommé professeur à Earl University en Caroline du Nord. Sylvie s'adapte à sa nouvelle vie américaine en fréquentant L'alliance française. Lester débute son année scolaire à la P.W. Julian High School. .
L'histoire se déroule en 2015. La famille Vickery se retrouve loin de ses proches au moment des attentats de Paris. Elle se trouve également parachutée dans l'Amérique pré-Trump.
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Le personnage principal de ce roman, c'est Sylvie.
Elle est contemplative.
Elle peut sembler absente à elle-même et n'exister qu'à l'intérieur de la bulle de sécurité qu'est son mari.
Mais détrompez-vous.
Elle est très intelligente et n'est certainement pas la personne la plus faible de cette histoire.
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Il y a des moments légers mais ce roman est tout sauf à prendre à la légère.
Chaque personnage est pétri de désirs, de volontés et de sentiments qui lui sont propres. Il y a cependant un attachement et un détachement féroce entre eux. Cette phrase peut sans doute vous sembler paradoxale et pourtant elle mesure à elle seule les montagnes russes dans lesquelles s'est embarquée cette famille parisienne.
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Tout est mené avec brio, ironie et intelligence.
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