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EAN : 9781507770320
48 pages
CreateSpace Independent Publishing Platform (28/01/2015)
3.17/5   9 notes
Résumé :
"Défense et illustration de la langue française" par Joachim Du Bellay. Joachim Du Bellay était un poète français de l’école de la Pléiade (1522-1560).
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Ce manifeste rédigé par Du Bellay en 1549 (mais auquel ont sans doute dû coopérer un certain nombre de poètes de la Pléiade) est une oeuvre charnière de notre littérature: face au latin, qui était alors la langue de la culture par excellence, la langue des doctes et des savants, ce texte, comme l'indique clairement son titre, veut promouvoir le français et en démontrer l'efficacité et la beauté. La langue de Ronsard n'est en rien inférieure à celle de Virgile!

Dans la première partie, Du Bellay défend donc le français contre tous ceux qui le dédaignent et, ce qui pourrait sembler de prime abord paradoxal, propose d'enrichir son lexique en créant des mots tirés du latin et du grec.

Dans la deuxième partie, plus offensive, il condamne à la fois les genres poétiques médiévaux (virelais, rondeaux, ballades...) et préconise l'emploi du sonnet, forme "moderne" d'inspiration italienne; il appelle également à écrire des épîtres et des satires à l'imitation des auteurs latins, Horace en tête, ainsi que des comédies et des tragédies (Molière, Corneille et Racine, au siècle suivant, ne se le feront pas dire deux fois!)
Pour du Bellay, la France doit devenir à terme une terre de référence culturelle... (On connaît le premier vers d'un célèbre poème de cet auteur: "France, mère des arts, des armes et des lois...")

Mais par-delà ses préconisations et ses rejets, cet écrit de combat, à l'importance historique indéniable, milite surtout pour une littérature d'inspiration à la fois plus haute et plus personnelle que celle qui avait cours à la fin du Moyen Âge et au début de la Renaissance - et notamment celle des "Grands Rhétoriqueurs" pour lesquels la poésie se réduisait le plus souvent à un simple exercice de style privé d'âme et d'émotion, à une sorte de jeu versifié... (Ne retrouvera-t-on pas, d'ailleurs, mutatis mutandis, cette même critique, deux siècles plus tard, lorsque les Romantiques condamneront tout un pan de la littérature néo-classique du Siècle des Lumières?)






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Acte de naissance du mouvement de la Pléiade et témoin de l'idéologie humaniste, le livre de la Défense et illustration de la langue française est aussi un acte politique d'unification du royaume français.


Ses fondements sont ceux de l'humanisme et expriment un fidèle attachement aux sources antiques grecques et latines du savoir. Joachim du Bellay recommande l'étude et l'imitation de ses meilleurs auteurs mais limite cet apprentissage dans le temps de formation du nouveau poète. La littérature antique ne doit plus être considérée comme fin mais comme moyen. On peut s'en nourrir mais il faudra ensuite lui faire connaître le processus alchimique de transsubstantiation. Parvenu au point d'innutrition des sources antiques, celui que nous ne pouvions jusqu'alors pas encore appeler un poète aura fait siennes ses références et elles seront si bien assimilées qu'elles se mettront à s'exprimer en lui avec leur langage propre ; le poète pourra alors prendre la plume et s'atteler au travail créatif. Cessant d'être asservi au passé, le poète pourra construire la littérature moderne.


Pour guider son nouveau poète, Joachim du Bellay se livre à une critique de la littérature de son époque, qu'il juge inconsistante et sans caractère, et préconise, à l'aune de la Pléiade, la création poétique avivée de néologismes et de nouveaux tours littéraires. Mais surtout, il recommande l'abandon du latin au profit de la langue vulgaire, c'est-à-dire du français.


A l'époque de la publication de son livre, le latin était encore la langue de référence de l'élite mais son utilisation commençait déjà à être contestée dans d'autres pays et surtout en Italie, avec Pietro Bembo et Sperone Speroni. Privilégier l'utilisation du français conduisait alors à s'inscrire dans la continuité de ce mouvement et à renforcer l'unité nationale française particulièrement menacée dans l'affrontement entre le roi François Ier et Charles Quint. Joachim du Bellay juge sans doute également que la cohésion sociale et culturelle se fera dans l'adoption d'une langue commune et le français, entre le latin et les patois foisonnants, pourrait susciter l'unanimité.


On lira ce court texte comme une curiosité performative à la fois au niveau littéraire, pour le renouvellement poétique affranchi de ses références antiques, mais aussi au niveau politique, pour l'affermissement de la cohésion nationale par l'utilisation généralisée et légitimée d'une langue commune accessible au clerc comme au peuple.
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Citations et extraits (11) Voir plus Ajouter une citation
Il me semble (lecteur ami des Muses françaises) qu’après ceux que j’ai nommés, tu ne dois avoir honte d’écrire en ta langue ; mais encore dois-tu, si tu es ami de la France, voire de toi-même, t’y donner du tout, avec cette généreuse opinion, qu’il vaut mieux être un Achille entre les siens, qu’un Diomède, voire bien souvent un Thersite, entre les autres.
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O combien je désire voir sécher ces Printemps, châtier ces Petites jeunesses, rabattre ces Coups d’essai, tarir ces Fontaines, bref, abolir tous ces beaux titres assez suffisants pour dégoûter tout lecteur savant d’en lire davantage. […] Je supplie à Phoebus Apollon que la, France, après avoir été si longtemps stérile, grosse de lui, enfante bientôt un poète dont le luth bien résonnant fasse taire ces enrouées cornemuses, non autrement que les grenouilles quand on jette une pierre en leur marais.
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Ne craignez plus ces oies criardes, ce fier Manlie, et ce traître Camille, qui, sous ombre de bonne foi, vous surprennent tous nus comptant la rançon du Capitole. Donnez en cette Grèce menteresse, et y semez encore un coup la fameuse nation des Gallogrecs. Pillez-moi, sans conscience, les sacrés trésors de ce temple Delphique, ainsi que vous avez fait autrefois : et ne craignez plus ce muet Apollon, ses faux oracles, ni ses flèches rebouchées. Vous souvienne de votre ancienne Marseille, seconde Athènes, et de votre Hercule gallique, tirant les peuples après lui par leurs oreilles, avec une chaîne attachée à sa langue.
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Pour conclure ce propos, sache, lecteur, que celui sera véritablement le poète que je cherche en notre langue, qui me fera indigner, apaiser, éjouir, douloir, aimer, haïr, admirer, étonner : bref, qui tiendra la bride de mes affections, me tournant çà et là, à son plaisir.
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Bien te veux-je avertir de chercher la solitude et le silence ami des Muses, qui aussi (afin que ne laisses passer cette fureur divine qui quelquefois agite et échauffe les esprits poétiques, et sans laquelle ne faut point que nul espère faire chose qui dure) n’ouvrent jamais la porte de leur sacré cabinet, sinon à ceux qui heurtent rudement. […]
Encore te veux-je avertir de hanter quelquefois, non seulement les savants, mais aussi toutes sortes d’ouvriers et gens mécaniques comme mariniers, fondeurs, peintres, engraveurs et autres, savoir leurs inventions, les noms des matières, des outils, et les termes usités en leurs arts et métiers, pour tirer de là ces belles comparaisons et vives descriptions de toutes choses.
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Vidéo de Joachim Du Bellay
Joachim du BELLAY – Anthologie intime de l'Olive lue par Jacques Roubaud (1971) Une cassette audio enregistrée par Jacques Roubaud après 1971 à l'attention de sa mère.
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