J'ai assisté récemment à la projection/rencontre du beau film de
Marc Dugain : L'ECHANGE DES PRINCESSES. Un échange de bon procédés, de ventres à féconder, entre la fillette du roi d'Espagne promise au jeune Louis XV et la jeune fille du régent de France, négociée pour l'héritier du trône ibérique.
Un film à la photo splendide, on croirait assister à une successions de tableaux léchés, une photo magistrale et des plans très travaillés au service d'une direction d'acteur ciselée.
Un film qui nous montre au plus près les ravages d'une éducation princière qui produit des pervers narcissiques à l'empathie proche du clou rouillé et des femmes qui ne sont bonnes qu'à écarter les cuisses et enfanter, des mâles de préférences, au pire des filles, pour avoir une quelconque marge de négociation à l'avenir.
Un beau film, douloureux et maîtrisé, qui confirme la double casquette du bonhomme, cinéaste et écrivain de talent.
De cette expérience filmique, Dugain a tiré un livre hors cadre, indéfinissable, carnet de bord intimiste et autobiographique.
Marc Dugain est l'un des écrivains les plus singuliers de l'édition française. Négligeant soigneusement la micro-fiction psychologisante nombriliste et germanopratine, Dugain embrasse
L Histoire à bras la plume pour nous livrer une oeuvre puissamment romanesque.
Dugain parle peu de lui, ou alors par la bande, par les obsessions qui traversent ses romans : l'enfance ; les Etats-Unis ; le secret, d'état ou non ; son grand-père, gueule cassée, via son fameux (et splendide) premier livre
LA CHAMBRE DES OFFICIERS.
C'est pourquoi cet INTÉRIEUR JOUR se distingue dans sa bibliographie.
Il est difficile de définir précisément ce court opus. Un document, un journal de tournage, un recueil de réflexions plutôt fines sur
L Histoire, un recueil d'anecdotes émouvantes, voire bouleversantes, sur la vie familiale, riche en tragédies, de
Marc Dugain.
Le tout porté par une plume à la fois fiévreuse, presque rageuse (Dugain ne mâche pas ses mots, il les lâche plutôt) quand il aborde des sujets de sociétés généraux ; sensible et subtile quand il se fait plus intime.
Il embrasse en quelques 150 pages, une grande variété de thèmes allant de la noblesse française décadente fin de siècle pré 1789 à la sclérose en plaque de son père en passant par les affres de la production d'un film en costume, guère bankable, sur la sexualité des cours européennes au temps de Louis XV.
Et c'est passionnant.
De bout en bout.
Guère habitué à cet exercice de mise à nue , Dugain ne finaude pas, ne développe pas ses codes auto-complaisants que l'on peut parfois retrouver dans ce genre d'exercice.
La question lui fut posée à
Marc Dugain s'il renouvellerait ce genre de prose auto-centrée. Il répondit non. Ce sera la dernière fois a t-il dit. Si on parle que de soi, on finit par (se) mentir.
Une chose est sûre. Dans INTÉRIEUR JOUR,
Marc Dugain ne ment pas.
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