TOUT ENFANT DANS LA LANDE
A SES VISION
La fée déguisée en feuillage, tout en elle sent la mer, lac
et ressac. La mer ? d'une enjambée on la franchit. Après la
lumière l'onde est devenue verte. On ne discute pas avec les
morts.
Apportez la lumière ? Viennent trombes, pics, vals et char-
dons. Le dernier couac est celui du pendu. Hamlet, Hamlet,
c'est moi (to be or not to be). Trombes, sacs, ressacs, carnages,
espoirs tout nus.
La mare est rouge et sue du sel.
Je l'adore.
Jadis elle se fit construire un palais dans la lande. Feux
follets, lutins, nains dans la ville temple, dans la montagne
chaude des bruits et la sarabande s'exténuent jusqu'au silence du coq.
C'était au temps de la grande prêtresse Lune.
XII-45.
Troisième Yeuse.
Troisième Yeuse.
Un nom était de trop ; nous le tirâmes au sort. Le crépuscule
marqua ses morts, et, parce que j’entrais en toi, tu me donnas ton nom. La
neige de la douleur luisait sur toutes les rampes ; la neige de tes couleurs sortait
en moi ; les murs se rapprochaient ; et désormais entre nous deux, un seul cœur
fila le sang. La mort avait le pied, son pied de neige, croché derrière une
ombre...
... Alors vint le dégel. Il sera, m’as-tu dit, comme cette ombre mauvaise de
demi-lune que je vois dans tes yeux ; il viendra à l’heure H où les corps se
reforment, où les visages prennent cette teinte éperdument fatale de la neige
piétinée. Enfin vint le dégel... et nos visages étaient sanglants... Je me levais
au fond de toi et je naquis...
(L’ombre sagittaire)
Première Deuxième Yeuse.
Première Yeuse.
Il neigeait toute ma vie sur la douleur, et voilà, au fond de moi
je reconnus cette neige, au fond de toi, je la buvais, au fond de nous était un
corps ; j’étais le froid et je savais... Ton nom grandissait, ta voix brûlait, le feu
sortait du sang...
Deuxième Yeuse.
C’est le bonheur, me dis-je, la neige de mon bonheur ; mais
derrière encore sortait l’océan, et mes démons, et les démons, Le feu de neige
apparaissait sur les cités des loups, à l’heure maudite des fées perdues et des
pierres ; et j’étais là, mon cœur percé, la rose de ta douleur broyée sur le
visage...
Seize ans
J’ai dominé toute une station de vie
Ma première enfance est entrée dans la pierre
Mes premières larmes sont sorties avec les passereaux
J’ai vu un Dieu, j’ai vu les hommes
Et mes yeux ne se cherchent même plus
Hier je suis allé sur la montagne qu’habita la lune
Et je suis revenu le cœur plein de tristesse
Il ne me reste plus qu’un souvenir et une guitare brisée
Un saule pleureur se dépouille et m’habille de larmes
Qu’est-il de plus triste au monde que de partir sans chanter