C'est le premier roman de l'auteure qui s'est inspirée de la vie de sa grand-mère pour écrire l'histoire de Simha, jeune fille de quatorze ans qui vit à Casablanca au Maroc. Alors qu'elle pense assister à une fête, elle se retrouve dans un mariage, le sien, celui que ses parents ont préparé sans l'en informer et la jeune fille ne se doute absolument de rien jusqu'au moment où elle se rend compte qu'elle ne rentrera pas dans la maison familiale avec ses parents et ses frères et soeurs.
A Paris, Anna qui n'est autre que la petite fille de Simha, est en pleine séparation. Elle a deux enfants, une ado avec son premier conjoint et un petit garçon de l'homme avec qui elle vivait jusqu'à présent. C'est la seconde fois que sa vie vole en éclats, on ne s'habitue pas à ces choses là, elle est totalement déboussolée.
C'est en allant acheter une cuisine qu'elle a tout un coup un flash, alors que le vendeur lui fait l'éloge de la modernité, de l'ergonomie, de la fonctionnalité, elle revoit Simha, alias Mimi, sa grand-mère, dans sa cuisine, une pièce qui comprenait en tout et pour tout, une table basse, des bassines et un petit barbecue installé sur le balcon. C'était le temps du bonheur, de l'insouciance, Anna se demande pourquoi elle ne voit pas Mimi plus souvent, ne l'appelle jamais, pire, ne pense pas souvent à elle. Elle a quitté Casablanca pour faire ses études de journalisme en France et sa grand-mère est passée au second plan.
Elle ressent tout à coup un manque, elle revoit son enfance et a besoin de repères, sa grand-mère n'a jamais bougé, elle est restée mariée toute sa vie avec son grand-père, a habité le même appartement, y a élevé ses enfants, dont le père d'Anna. Sa grand-mère c'est la continuité, la solidité, la force, la fiabilité, des qualificatifs qu'Anna ne connait pas, elle est déracinée, deux enfants de deux pères différents et maintenant une nouvelle séparation, mais qu'est ce qui ne va pas chez elle ! Elle ressent l'irrépressible besoin de partir, de retrouver ses racines, d'aller se ressourcer quelques jours chez cette grand-mère qu'elle a négligée, elle sait que Mimi pourra la réconforter, elle est le pilier, le mur porteur et Anna est totalement désorientée et se sent totalement seule dans cette nouvelle épreuve.
C'est à Casablanca que
Judith Elmaleh nous emmène, chez mimi, cette grand-mère au destin surprenant, qui n'a pas du avoir une vie toujours facile. C'est là que le mot résilience prend tout son sens. Mimi a vécu sans jamais se plaindre, sans jamais dévoiler quoi que ce soit à personne. On découvre avec émotion la vie de cette femme, de son mariage à quatorze ans jusqu'à sa vie de femme, d'épouse, de mère et Anna ouvre la boîte de Pandore, celle que la famille avait vivement cadenassée, pour enfin libérer un secret trop longtemps gardé.
Quel beau roman, cette histoire est bouleversante, la vie de Mimi a été douloureuse et pourtant elle n'a jamais failli a aucun de ses devoirs. Quelle femme courageuse, on ne peut que l'admirer même si on ne comprend pas toujours. Mon côté féministe me dit qu'elle aurait du ! mais à cette époque, les femmes n'avaient pas leur mot à dire, c'était une autre génération, les femmes n'étaient pas libres et Mimi a subi comme beaucoup d'entre elles.
J'aime énormément le récit et l'écriture de l'auteure, j'aime quand elle nous embarque dans le passé de sa grand-mère ou encore dans son passé à elle, j'imagine les odeurs et les couleurs du Maroc, la famille autour de la table pour le shabbat, les plats épicés, les bruits de la médina et du Mellah. Ce livre m'a fait voyager et je me suis tout de suite attachée à Mimi qui, il faut bien le dire, a un fichu caractère. J'aime beaucoup les interactions entre la grand-mère et sa petite fille, il n'y a pas de langue de bois, Mimi est cash et si elle a du mal à se livrer, elle y va quand même, peut-être parce qu'elle a senti que c'était important pour Anna qui doit aller de l'avant et se reconstruire.
Les retrouvailles et les discussions intergénérationnelles sont très intéressantes et on se rend compte que Mimi s'adapte à l'époque, elle ne juge pas, elle est très attachée à sa petite fille et cet amour filial qu'elle lui porte ça n'a pas de prix.
Ce roman est un vrai « page turner » on ne peut pas le lâcher, l'écriture est fluide, c'est plein de bienveillance et d'humanité. C'est un livre qu'on referme en poussant un gros soupir de bonheur avec le sentiment d'une mission accomplie. C'est un livre coup de coeur que je vous recommande vivement.
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