Ce petit conte fantastique se lit très rapidement.
C'est l'histoire d'une rencontre entre deux génies, un prodige du violon et l'un des meilleur luthier de la Venise du 18ème siècle.
C'est aussi une histoire d'amour fatale des deux personnages pour une chanteuse d'opéra.
L'écriture de
Maxence Fermine est efficace et toujours agréable (j'ai lu
Amazone et
Neige).
Ce petit livre semble s'inscrire dans la tradition des contes fantastiques du 19ème siècle tels que les ouvrages de Gauthier,
Maupassant ou
Goethe, etc.
L'auteur utilise les temps classiques du récit ce qui donne une dimension mystérieuse à l'histoire enchâssée de l'aventure du luthier Erasmus à Venise.
En effet, c'est à Venise que le luthier rencontre la belle Carla et sa voix prodigieuse qui fait l'admiration des vénitiens, il en tombe amoureux, elle lui inspirera la création du mystérieux violon noir, le son du violon imite la voix de Carla et revêt les formes de son corps.
L'instrument prend vie et détient le pouvoir de transformer les êtres qui en jouent, de les vampiriser, en extraire le meilleur, leur supplément d'âme pour les tuer, Carla et le violoniste de génie Johannes Karelsky mourront de l'avoir côtoyé.
Ainsi la musique devient la vie.
Le violon noir agit à l'insu de son créateur qui voulait recréer la vie à travers son instrument.
Le violon semble emprisonner les êtres, c'est comme si une force supérieure voulait châtier le créateur de l'instrument ainsi que les êtres qui lui sont chers.
le violon noir dérobe le génie de tous ceux qui le côtoient ou s'essayent à l'utiliser, il brise la belle voix cristalline de la belle Carla, efface mystérieusement les partitions composées par le violoniste Karelsky, pour son opéra , son génie restera méconnu, lui le prodige, acclamé enfant à l'instar de Mozart, dans toutes les cours d'Europe.
Le génie est transcendé par une force supérieure.
Toute tentative de création est mise en échec par
le violon noir.
Le violon noir est un monstre échappant à son créateur. Il détient le pouvoir de vie et de mort sur les êtres et les choses.
Il n'est pas sans évoquer le pouvoir destructeur de Thanatos. Il est le diable, Méphistophélès, ou un vampire...
Ce récit onirique entremêle rêve et réalité ; le luthier avait rêvé de Carla et de sa voix avant de la rencontrer réellement. le violoniste Karelsky en avait rêvé également avant que le luthier lui raconte son aventure à Venise : "cette voix était celle de son opéra"
Bien que dévastée par la guerre et rongée les eaux, la ville de Venise est décrite de manière poétique : "Venise, dit Karelsky en s'adressant au médecin-chef, ce n'est pas une ville, c'est un songe posé sur le bord de la mer." ou encore : "Venise est belle. elle regorge d'or, de bijoux et de tableaux, de palais, de silence et d'eau.
Ce sont quelques unes des impressions du violoniste Karelsky arrivant à Venise.
Amazone était une oeuvre où la musique était déjà présente, le jazz, ici, c'est la musique classique qui prend vie et résonne au son du violon.
Fermine utilise des métaphores littéraires pour évoquer le son.
Existerait-il une correspondance entre les sens ?