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3,61

sur 2303 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Ce qui me frappe le plus en ce qui concerne les Trois Contes, c'est leur diversité. On a en effet affaire à Trois Contes complètement, radicalement différents les uns des autres : Un coeur simple est une nouvelle dans la plus pure tradition naturaliste ; La Légende de Saint-Julien l'Hospitalier est un conte, fait à la manière de certaines légendes régionales ; quant à Hérodias, c'est une oeuvre à sujet antique, dont la principale ambition est similaire à celle de Salommbô.
L'autre chose qui me frappe en ce qui concerne ces trois contes, c'est le peu d'ambition qu'ils traduisent ; on est loin de romans aussi ambitieux que Salommbô, fresque historique douce-amère sur la guerre entre les Carthaginois et les Mercenaires, ou L'Education Sentimentale, roman expérimental sur l'échec constant des jeunes hommes vers 1830, l'ennui de vivre et l'inutilité de la vie.
Mais, malgré leur peu d'ambition et même si ce ne sont pas des monuments, ces Trois Contes restent célèbres, lus et relus, comme L'Education Sentimentale, comme Madame Bovary, comme Salommbô.
Car ces récits simples ont quelque chose d'universel, dans leur ton, dans leur style, dans leur simplicité, dans leur intelligence.
Et, si certains rappellent par certains côtés les romans précédents, ils ont toutefois d'assez importantes différences, pour que, par exemple, Hérodias, malgré un sujet similaire ne sombre pas dans Salommbô, c'est-à-dire dans un bazar mélodramatique et sans intérêt.
Trois petits contes qu'on n'oubliera pas.
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Chaque conte de ce recueil illustre une caractéristique de l'art de Flaubert : Hérodias reprend la prose descriptive splendide et savante de salammbô, le cadre antique, l'exotisme oriental, et va même plus loin dans ce sens que ne fait Gautier ; Un coeur simple, scène flaubertienne de la vie de province, fait beaucoup penser à Madame Bovary, mais vue de la cuisine, de l'office, de la ferme de Catherine Leroux ; La légende de Saint Julien l'Hospitalier enfin rappelle La Tentation de Saint Antoine, ce goût, chez ce réaliste, pour les vies de saints. Seul son quatrième grand thème, celui de la bêtise, tellement présent dans Bouvard et Pécuchet ou l'Education Sentimentale, ne se traduit pas ici par un quatrième conte qui en donnerait la forme brève. En l'état, ce recueil est l'oeuvre d'un très grand artiste.
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Je reconnais que je ne suis pas parvenu à goûter pleinement Hérodias : la nouvelle réclame peut-être une culture que je ne possède pas. J'avais beau connaître l'histoire de Jean-Baptiste, je sentais que Flaubert y développait des considérations qui ne résonnaient pas.
Mais, Un coeur simple et La légende de St Julien l'hospitalier m'ont époustouflé : de beauté mais plus encore de densité. Flaubert, en quelques pages, parvient comme dans ses grands romans à saisir l'essence des lieux et des âmes qui les habitent. Ils ne se privent même pas de nous laisser traîner sur quelques lignes de descriptions qui sont de véritables dentelles d'ornement.

Lisant ces Trois contes, j'ai rapidement eu envie d'essayer de comprendre quel était leur principe d'unité. J'ai pensé d'abord à une tentative de réponse à la grande question philosophique de « ce qui qui nous rend humain » par une réflexion sur notre rapport au monde animal (apprivoisé par Félicité, chassé par Julien). Mais Hérodias (décidément) m'a fait comprendre que je faisais fausse route. Arpentant les pages de cette dernière, avec difficulté donc, peut-être trop concentré sur ma quête pour entendre pleinement Flaubert, j'ai alors cru percevoir que la figure trinitaire, quoique transformée, de Dieu surplombait ces trois contes : le père, à travers les deux parents, dans La légende de Saint Julien l'hospitalier ; le fils, mais en l'espèce une fille, dans Hérodias ; et le Saint Esprit, ici incarné en perroquet plutôt qu'en colombe, dans Un coeur simple.
J'ai voulu en avoir le coeur net, et j'ai cherché à m'éclairer sur le choix de la réunion de ces Trois contes en un seul volume. Et j'ai découvert que cette hypothèse existait déjà, mais qu'elle était peut-être la moins pertinente, à tout le moins la plus critiquée… pauvre de moi, médiocre analyste, mais heureux lecteur.

Je vous salue Flaubert, plein de grâce. Et implore votre miséricorde pour être un si piètre admirateur.
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"Il sagit d'une pauvre servante qui s'appelle Félicité et qui sert la même maîtresse pendant un demi-siècle, en sacrifiant sans rancune sa vie à celle des autres...le dernier objet dans la chaîne sans cesse diminuante des attachements de Félicité, c'est Loulou, le perroquet. Quand il meurt lui aussi, Félicité le fait empailler. Elle garde la relique adorée près d'elle et finit même par dire ses prières agenouillée devant lui." Julian Barnes dans "Le Perroquet de Flaubert".
Il précise : "Mais le but d'Un Coeur Simple est ailleurs : le Perroquet est un exemple parfait et maîtrisé du grotesque flaubertien". Puis, plus loin," Félicité + Loulou = Flaubert?"
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j'ai relu ces 3 textes à l'occasion du confinement suite à un choix selon mon ressenti.Je me suis régalée en retrouvant le plaisir des mots posés si délicatement et en nombre extraordinairement agréables ;c'est sur je vais relire salammbô !
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Magnifique leçon d'histoire du christianisme. Flaubert remonte dans le temps, décrivant à trois époques différentes l'impact de la religion sur la vie d'êtres humains que tout semble opposer. Ceux qui ont pu lire d'autres textes de Flaubert comprendront qu'il s'agit ici pour lui d'un exercice de haute voltige, puisqu'habitué à de longs romans, il s'est prêté ici à l'écriture délicate du conte. Il nous croque pourtant des portraits terriblement attachants, des paysages et des époques dignes des fresques du Louvre. Il nous fait voyager. Dans le temps, dans l'espace.
Un régal.
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Trois contes ciselés comme des gemmes précieuses.
Je pensais préférer celui sur Hérodias (l'Antiquité, la légende) mais c'est "Un coeur simple" qui m'a laissée le souffle court - et pourtant le sujet ne m'intéresse pas du tout !
La précision des phrases cisèle (c'est vraiment le mot qui convient) la réalité et, en même temps, on sent la possibilité/le risque pour cette réalité de déborder les mots comme si ceux-ci étaient impuissants à la limiter. L'Art avec un grand A. Une impression, une émotion, rarissime. C'est comme un poème.
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Encore un souvenir scolaire concernant ce livre : une lecture, en fin de cours, de "La légende de Saint Julien l'Hospitalier". Je me souviens, qu'à l'époque (au siècle dernier, dirons-nous), ce récit m'avait marqué par le mélange de mystère et de merveilleux dans lequel il baignait. J'ignorais alors qu'il faisait partie d'un triptyque intitulé "Trois contes" publié par Flaubert en 1877, qui constitue en fait sa dernière oeuvre romanesque publiée de son vivant, puisqu'il est mort en 1880.
Le recueil réunit trois contes ou nouvelles assez différentes d'inspiration : une nouvelle contemporaine "Un coeur simple", une légende médiévale "La légende de Saint Julien l'Hospitalier", et enfin une évocation biblique "Hérodias".
"Un coeur simple", relate la vie de dévouement de Félicité, une fille de province placée chez madame Aubain, une bourgeoise, mère de deux enfants, Paul et Virginie. Elle passe toute sa vie dans cette maison et dans cette famille qui devient la sienne. Elle participe aux joies et aux douleurs (la mort de Virginie, puis celle de son neveu Victor, et enfin celle de Madame Aubain) et reporte toute son affection sur Loulou, un perroquet que lui a laissé Madame Aubain, mais Loulou meurt aussi, et sur les conseils de sa maîtresse, Félicité le fait empailler. Quand elle meurt à la fin de la nouvelle, elle s'imagine que c'est Loulou qui l'emporte au ciel...
"La légende de Saint Julien l'Hospitalier" renoue avec les contes du Moyen-Age où un christianisme naïf se mêle au merveilleux : Julien, fils d'un petit seigneur local, grand chasseur devant l'Eternel, reçoit un jour la prédiction par un cerf qu'il avait massacré avec sa biche et son faon, qu'il allait tuer son père et sa mère. Pour échapper à cette funeste prophétie, il part au loin, se marie, et ne pense plus au terrible présage. Un soir alors qu'il est à la chasse, deux vieillards se présentent au château et se présentent comme les parents de Julien. L'épouse de ce dernier, ravie, les invite, les fait manger et leur propose sa propre chambre pour se reposer. Julien rentre de la chasse, bredouille et plein de rage. Voyant des formes dans le lit de sa femme il les poignarde tous les deux. Prenant conscience de son erreur, il quitte le château et part mendier sur les routes. Devenu passeur au bord d'un fleuve, il transporte un jour un lépreux en guenilles à qui il donne tout ce qu'il a, jusqu'à la chaleur de son corps. C'est alors que le lépreux se transforme en une merveilleuse clarté (Jésus-Christ) et l'entraîne au ciel avec lui
"Hérodias" reprend l'épisode biblique de la mort de Jean-Baptiste (appelé ici Iaokannan). Hérode Antipas a épousé sa nièce et belle-soeur Hérodias, ce qui amène Iaokannan à l'accuser d'inceste. Par l'intermédiaire de sa fille Salomé qui exécute une danse que nous qualifierons de lascive (en étant gentil), elle finit par obtenir la tête du prophète, qu'elle se fait servir sur un plateau.
Ces "Trois contes" représentent peut-être l'apogée de Flaubert en ce qui concerne la qualité de l'écriture : travaillée à l'extrême, d'une grande précision, elle colle à merveille au propos, tour à tour familière, poétique, dramatique, à la limite du fantastique, sensuelle, d'une grande puissance d'évocation.
Dernière oeuvre romanesque de l'auteur les "Trois contes" font un peu aussi figure de testament, dans la mesure où tous trois rappellent d'autres grandes réalisations : "Un coeur simple", par sa peinture de moeurs provinciales rappelle "Madame Bovary", La "Légende de Saint Julien l'Hospitalier" nous remet en mémoire la "Tentation de Saint Antoine", par son alliance insolite entre merveilleux et imaginaire chrétien, enfin "Hérodias" renoue avec les fulgurances antiques de "salammbô".
Pour moi un des meilleurs "Flaubert", égal à "Madame Bovary", et supérieur à 'L'éducation sentimentale" ou à "salammbô"...
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Je reconnais que j'ai eu du mal à ouvrir un Flaubert, même très longtemps après le traumatisme scolaire provoqué par Emma Bovary.
Il m'a semblé que trois courts contes, dont on disait le plus grand bien, pouvait me réconcilier, non pas avec Emma mais du moins avec Flaubert. Certes, un "Coeur simple" était souvent évoqué comme un modèle du genre.
J'ai beaucoup aimé. J'ai aimé chacun de ces trois contes au sujet, à l'époque, à la narration si différents. Bien sûr que des similitudes existent.
J'ai tellement aimé que j'ai, derechef, entamé avec délectation Salammbô.
Je recommanderai donc bien ce petit livre pour commencer Flaubert, notamment à tous les anciens traumatisés par Emma.
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Pour le plaisir du style!
Pour la Normandie de Un coeur simple,
pour le perroquet évoqué souvent par les auteurs qui s'intéressent à Flaubert (entrevu dans Oscar Wilde et le jeu de la mort que je viens de terminer)
Pour Saint Jean Baptiste dans Hérodias et les belles fresques que j'ai vues récemment à Avignon....
Pour le plaisir de redécouvrir un classique et s'apercevoir qu'il n'a pas pris une ride!
Lien : http://miriampanigel.blog.le..
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