Qui ne l'a jamais imaginée, au détour d'un mauvais rêve, cette scène où l'on se rend compte que l'on a oublié de se chausser en partant de la maison et que c'est, vêtu de ses chaussons, que l'on se présente à notre entourage scolaire, ou professionnel? Qu'ils soient fantaisistes avec leur forme de panda, leurs pattes griffues, ou plus classiques, type charentaises, les chaussons témoignent d'un pan de notre intimité, un moment où nous sommes détendus et donc vulnérables et, les exposer au reste du monde, hors du cocon douillet, ben c'est la honte! Heureusement, tout cauchemar finit par prendre fin et c'est, soulagé, que l'on se réveille de ce genre de rêve… Mais pas le héros des “Pantoufles”, non, non, non! Enfermé dehors en pantoufles et complet-veston, avec une réunion importante à la clé, notre homme n'a d'autre choix que d'aller affronter ses pairs et gare aux moqueurs! Monsieur a de la répartie et de quoi élever le port des pantoufles en extérieur au rang de philosophie de vie, vous voilà prévenu!
Avec ses 113 pages, “
Les pantoufles” est un petit roman divertissant qui se lit d'une traite. C'est avec légèreté et humour que
Luc-Michel Fouassier déploie son petit manifeste d'anticonformisme. En prenant pour toile de fond des parisiens toujours pressés, happés dans un quotidien qui les pressurise, l'auteur offre un contraste saisissant avec son personnage qui découvre, bien malgré lui, les vertus du lâcher prise et de la lenteur. Ce qui n'était qu'un malencontreux accident, se transforme peu à peu en mouvement de résistance et en engagement politique! L'idée est cocasse, farfelue, mais fonctionne plutôt bien!
Ce qui m'a légèrement laissée en marge en revanche, c'est le style, volontairement lourdingue, du ton et donc de l'écriture... Préparez vous à balayer tout le champ lexical de la chaussure et des expressions liées aux pieds avec des jeux de mots appuyés du narrateur: “dans leur petit soulier”; “faire des pieds et des mains”, “tu foules aux pieds”, “je lève un peu le pied”, “traîner mes guêtres”. Ce qui aurait pu être drôle utilisé avec parcimonie, devient vite agaçant à mes yeux… Par ailleurs, notre protagoniste a un goût prononcé pour les allitérations et ne se prive pas non plus de ce côté là: “Il avait indubitablement un petit côté Agassi, agaçant”; “Vous y êtes déjà allé, à Dubaï (tu parles si je bâille!)?”; “peinard, les panards dans des pantoufles”. Bref, je manque sans doute d'humour, mais je n'ai pas trouvé tout ça très subtile et c'est malheureusement ce qui ôte le charme du roman… Mais nul doute que ce petit roman pimpant saura trouver des amateurs!