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EAN : 9782384820238
205 pages
Philippe Rey (04/05/2023)
3.88/5   20 notes
Résumé :
Un premier roman en forme de road trip, dans les pas d'une grand-mère et de sa petite-fille. Un grand bol de vie, tendre et juste.

La santé fragile de Léopoldine conduit ses enfants démunis à envisager son placement en Ehpad. Mais sa petite-fille Chloé n'est pas du même avis. N'écoutant que l'amour qu'elle porte à sa grand-mère, et avec pour bagage l'innocence aveugle de son jeune âge, elle entraîne sa " Léo " dans un road trip hasardeux. Peut-être ch... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (8) Voir plus Ajouter une critique
Avez-vous déjà été quitté ? C'est l'abandon soudain de son mari Jacques et des décisions familiales la concernant qui vont jeter Léopoldine dans « La dernière échappée ». À ses côtés, sa petit-fille Chloé prend les choses en main : hors de question de placer sa grand-mère chérie dans un mouroir. Durant « La dernière échappée », Chloé et Léo vont faire chacune le deuil de l'être qui les a quittées, mais aussi se dire ce qu'il reste à se confier lorsque la fin approche. Ici, pas de conflit de générations, entre les deux c'est l'harmonie parfaite, elles se comprennent sans rien se dire. Mais, lorsqu'elles se parlent, c'est pour exprimer l'essentiel. Léo a toute une vie à raconter et un secret à révéler qu'elle a gardé pour elle durant soixante-six ans…. « Toutes les nuits de ma vie, j'ai entremêlé et serré plus fort ce que je ne peux ni défaire ni refaire. Les couches de culpabilité s'empilent depuis si longtemps que je ne suis plus qu'un amas de fautes. »

Léo est une femme de « l'ancienne génération », mariée tôt, mère tôt, tout est arrivé trop tôt, presque sans qu'elle s'en rende compte ou qu'elle ne le décide vraiment. Alors qu'elle a veillé sur sa famille si longtemps, Léo a encore des choses à dire à son mari avant que son souvenir ne s'efface définitivement, avant « La dernière échappée ». « Je sais très bien qu'il n'y a rien après la mort et que personne ne monte nulle part, mais j'avais besoin de m'expliquer. Il fallait que je te dise tout haut pourquoi je m'en vais, pourquoi je quitte notre maison. D'abord, ce qui est sûr, c'est que ma petite-fille ne m'abandonnera pas, elle. Oui, parce que j'ai franchement tous les droits de t'en vouloir. Quoi qu'on en dise, tu t'es fait la malle en douce. Ni au revoir, ni merci, ni rien. Soixante-six ans de mariage et pas un mot. Mais moi ça ne me va pas du tout que tu sois parti sans que je puisse te dire le fond de ma pensée. Une vie entière que j'ai passée à n'être que pour toi. J'aurais préféré naître tout court si on m'avait demandé mon avis. Une existence régie par la tienne, rythmée par tes départs, tes absences et tes retours. Tu trouvais ça tout à fait normal, n'est-ce pas ? Que tout s'organise ainsi. Là, tu rétorquerais sûrement que rien n'était pour toi vraiment, mais tout pour nous, pour la famille, parce que c'est comme ça que cela doit être. J'aurais bien aimé t'y voir. Tenir la maison, vous nourrir tous, être disponible et disposée pour toi et tes enfants. Sans week-end ni congés. Sans rémunération non plus.Être dans le monde m'a manqué, Jacques. Même si j'ai essayé, jamais je ne te l'ai dit ainsi, c'était trop pénible à avouer. J'aurais voulu participer à la vie en dehors de vous. Avoir des collègues, des décisions à prendre, des dossiers à remplir et à envoyer à des gens qui les attendent. J'aurais tant aimé avoir à penser à des choses plus spécifiques que la routine du quotidien. Rien ne m'a jamais excitée. C'est la joie de me sentir vivante qui m'a manqué, celle d'être utile par ma tête.Alors oui, d'accord, je ne travaillais pas comme certaines femmes ou comme celles d'aujourd'hui, mais j'avais la sensation d'en faire dix fois plus que toi, figure-toi. Je n'ai jamais calculé, mais j'aurais pu. Compter l'attente déjà. Sous toutes ses formes. Attendre mes règles chaque mois, attendre un enfant, puis deux, et trois, attendre de pouvoir récupérer un corps qui fonctionne, attendre que tu rentres pour dîner, que tu partes pour faire le ménage, attendre que les enfants reviennent de l'école, qu'ils grandissent pour enfin attendre la ménopause. Et là, attendre encore, la fin des fins. Qui a fait attention à celle qui toute sa vie a attendu que d'autres vivent ? Ma seule carrière fut de devenir une épouse dévouée. »

Chloé a vingt-deux ans, elle est de la « nouvelle génération ». Elle est blasée, cynique, et déjà lasse de cette vie. Dans sa famille, elle a toujours l'impression de déranger. Les relations avec son père Sylvain, fils de Léo sont médiocres… Elle pense qu'il la tolère depuis qu'il a refait sa vie, elle lui en veut terriblement « C'était ma faute s'il n'était pas heureux. Mon existence l'empêchait de s'accomplir. » Alors, quand son père veut décider de placer Léo dans un EPHAD, le sang de Chloé ne fait qu'un tour ! Elle ne laissera pas enfermer dans un mouroir la seule personne qui compte encore pour elle. L'heure de « La dernière échappée » a sonné : à elles, la vie de château et l'heure, peut-être, d'écrire un nouveau chapitre. Pour Chloé, reprendre goût à la vie et trouver sa place sur le grand manège de l'existence : « Je n'ai aucune idée de la place que je peux avoir sur ce spectre gigantesque. Je n'ai pas à fuir mon pays pour éviter la mort et je pourrais même boire l'eau potable au fond des toilettes. Rien n'est tracé pour moi et, de toute façon, je ne peux suivre aucune trace. Plus je constate les privilèges qui sont les miens, moins je sais quoi faire de moi. Je ne sais pas où aller. Il faut que je comprenne ce pour quoi je suis faite sinon les décennies à venir vont être longues. » Pour Léo, penser un peu à elle : « de toute façon, la maternité n'est qu'un immense désert sans route, ni panneaux. Plantée là, un enfant accroché au corps et une conscience aiguë de la responsabilité accrochée à l'enfant. Ma volonté de bien faire était aussi puissante que mon absence d'instinct. Juste la certitude que cette vie moelleuse, cette vie toute rose n'avait que moi. Je leur ai donné tout ce que j'ai pu, sans mesurer ce qu'ils m'ont pris. Et toi (cf: Jacques) jamais tu n'y as fait attention. »

Dans « La dernière échappée », c'est la relation petite-fille/grand-mère qui est mise en lumière. La première est en début de parcours et complètement perdue, la seconde en fin de parcours et ressent la nécessité de faire la paix avec son passé et de prendre ce temps pour enfin se reconnecter à elle-même. le road trip prend vite des allures de confidences. Elles se disent des choses essentielles. Léo donne à Chloé des conseils précieux pour traverser l'existence, ceux qu'on ne peut livrer que grâce à l'expérience.

Ce qui m'a semblé magistral dans « La dernière échappée », c'est la capacité de Léa Frédeval à nous faire endosser d'abord la peau de Léo, puis celle de Chloé et inversement. Quel que soit votre âge ou votre vécu, l'empathie est immédiate pour l'une et pour l'autre. En Chloé, je vois mes filles, et donc un peu de moi à leurs âges, la spontanéité des actions, le cynisme, le côté sans filtre : elle ne mâche pas ses mots. « Han, mais oui, tu veux dire que ton père n'est pas mort au bon moment ? C'est vraiment dégueulasse de sa part de ne pas avoir prévenu, à cause de lui vous n'avez pas eu le temps de vous organiser dans vos vies toutes pourries. Non, vraiment, c'est pas cool ! » Elle ne sait pas très bien ce qu'elle va pouvoir faire de sa carcasse, elle n'a aucune confiance en elle. En Léopoldine, je vois le destin de beaucoup de femmes qui ont sacrifié leur vie personnelle sur l'autel de leur famille. Une maison à gérer, un quotidien à huiler, pas le temps de réfléchir. Quand vient le temps de penser un peu à soi, et que ce même temps est compté, on peut s'octroyer un peu de vérité vis-vis de soi-même. La vie est passée en un souffle, les souvenirs se donnent le droit de remonter à la surface. Plus besoin de se cacher, plus besoin de se mentir, Léopoldine peut encore confier à quelqu'un, sa petite fille, qui elle est vraiment. « J'ai vécu une vie. La mienne, je l'ai donnée à d'autres. Elle s'est remplie de tout sauf de moi. Et maintenant regarde : je suis avec ma petite-fille, loin de ma maison et de mes enfants qui ne me cherchent même pas. C'est triste, non ? »

L'écriture de Léa Frédeval est d'une délicatesse rare. Toute en nuance et en subtilité, elle avance lentement dans le coeur de ces deux femmes. Elle décrit la vie avec une justesse et une pertinence hors du commun pour ses 33 ans (elle est née en 1990), la jeunesse désabusée, la sagesse de la vieillesse. « La dernière échappée » ferait d'ailleurs un excellent film tant sa plume est cinématographique, et ses dialogues percutants. Elle a tellement de choses à dire Léa… sur la jeunesse fatiguée avant d'avoir vécu et la peur de l'avenir par le prisme de Chloé, puis sur la vie sacrifiée aux convenances, une existence qui passe trop vite. Il est saisissant de constater autant de maturité dans l'expression des émotions. J'en prends pour exemple l'expression de la colère. Celle de Léopoldine par exemple : « Ma colère est un moteur. Un moteur alimenté régulièrement, qui tourne depuis toujours et ne demande qu'à s'emballer. C'est grâce à elle que j'ai tenu toute une vie. Elle me protège. Elle attaque pour prouver que je suis capable de me défendre. Je sais bien que ce n'est pas facile pour ceux qui m'entourent, que c'est même injuste, mais je n'ai jamais réussi à faire autrement. Si je la fais taire, je m'abîme. Et pour ce qui est de m'abîmer, les autres s'en chargent déjà assez. Je suis comme ça et si ça ne convient pas, à dégager. », puis l'analyse de Chloé face à cette colère : « Mais il me faut prendre soin de cette colère, l'inviter à s'évacuer ou à se transformer de temps à autre pour en faire une alliée. Je crois que Léopoldine n'a pas fait attention et a laissé sa colère grandir seule, sans compagnie et, rebondissant violemment car coincée à l'intérieur, elle a fini par la blesser avec la vivacité d'une hargne sourde. » Comment ne pas adhérer à l'analyse de Léopoldine, puis à celle de sa petite-fille dans cette confrontation de points de vue ? Personnellement, je me reconnais dans chacun de ces commentaires.

Vous l'aurez compris, « La dernière échappée » est un énorme coup de coeur parce qu'il renferme l'essence même des vérités de l'existence, qu'il fait cohabiter la jeunesse et la vieillesse sans jugement de valeur, avec l'intention subtile de les confronter afin que chacun en tire la substantifique moelle. La relation entre Léopoldine et Chloé est un reflet assez saisissant de celle que j'aie pu vivre avec ma propre grand-mère. Sans doute est-ce aussi la raison pour laquelle ce roman m'a tant touchée. Mais je pense aussi à mes filles qui ont la vie à affronter, qui sont surprises par tant de décisions à prendre, par la violence du monde, par l'agressivité des mots et par cette perte de repères qui rend chaque choix extrêmement ardu. Je veux leur transmettre les mots de Léa, à travers ceux de Léopoldine : « Ta vie, c'est ta vie. Les autres, les gens, ne penseront qu'à eux. Même s'ils t'aiment, le choix final ils le feront pour eux, et toi, ma petite, tu passeras après. Tu dois être ton premier choix, tout le temps. Ça ne veut pas dire être égoïste, ça veut dire que tu as compris que la vie est courte et que tu n'en auras pas d'autre. Souviens-toi : il n'y a que toi qui comptes. » Tout simplement sublime de la première à la dernière ligne.
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Ce doux roman, c'est la croisée de deux deuils. le deuil de soixante ans de vie commune pour Leopoldine, dont le mari Jacques l'a quittée dans son sommeil, et le deuil d'un amour de jeunesse pour Chloé sa petite fille qui vient de se faire larguer par Camille son premier amour. Deux détresses qui vont s'unir pour une dernière échappée et fuir l'inéluctable: le chagrin pour la plus jeune, le placement en Ehpad pour l'aïeule. Quelques jours hors du temps où les deux femmes vont se livrer et engager une dernière course contre la fatalité.
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Repéré chez Aude @audebouquine et chez Virginie @thehappyfamilyvoyageetlit, je me doutais que ce roman me plairait mais je ne pensais pas être autant touchée.
Il est tout en sensibilité mais ne verse pas dans la sensiblerie et il est mélancolique sans être triste. C'est le tendre portrait de deux femmes à l'opposé de leurs vies, liées par le chagrin mais surtout par un amour infini. A travers la vie de Léopoldine, c'est la chronique douce amère de la vie de famille et des renoncements qu'elle entraîne. A travers la peine de Chloé, c'est la crainte de l'avenir qu'il explore, les peurs de l'entrée dans la vie d'adulte, la prise de conscience de la finitude des siens. C'est percutant sans être larmoyant et quel que soit son âge on s'y retrouve,en tant que mère, ou en tant que fille. En tant que femme tout simplement.
On a du mal à imaginer que nos grands parents ont été jeunes. On a du mal à réaliser que derrière leurs corps meurtris par les ans se cachent des jeunes gens qui ont vécu les mêmes joies, les mêmes peines que les nôtres. Merci à Lea Fredeval de nous ouvrir les yeux sur cette réalité avec tendresse et réalisme.
Un très joli livre idéal pour les vacances
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C'est la couverture très colorée donnant une impression de gaieté qui m'a fait de l'oeil. La partie supérieure représente deux femmes de dos assises dans une voiture décapotable qui rappellent l'échappée du film Thelma et Louise.
Et c'est vrai que ce livre décapote !
D'abord par les thèmes qu'il traite, la vieillesse, et le deuil ne sont pas forcément des thèmes accrocheurs. En lisant le résumé, la dichotomie entre la couverture et les thèmes abordés m'a interpellée.

Les chapitres assez courts sont racontés tour à tour par Chloé et Léopoldine et accompagnent le rythme de l'histoire.
Chloé est une jeune femme désabusée qui a mis sa vie en pilotage automatique. Elle ne trouve pas sa place dans la société et ne sait ni où aller ni quoi faire d'elle même. A vingt deux ans, elle travaille dans un restaurant, vient de se faire plaquer par son petit ami Camille et dit de sa grand-mère Léopoldine, qu'elle est « une racine ».

Le roman s'ouvre sur l'enterrement du grand-père, Jacques, et la question qui fâche: comment faire comprendre à Léopoldine, 86 ans, qu'il est plus raisonnable pour elle d'aller s'installer dans une résidence seniors que de rester seule chez elle. Ses trois enfants pensent qu'elle y sera mieux. Elle aussi le sait parce qu'elle sent son corps qui flanche, sa tête qui se vide mais elle n'est pas encore prête à laisser sa maison et son jardin, à laisser les autres décider pour elle, elle qui a dedié sa vie à ces mêmes autres.

Alors, un beau jour, elles prennent la fuite ensemble. Elles n'iront pas très loin ni bien longtemps, juste le temps pour Léopoldine de se délester d'un secret porté depuis plus de soixante ans, de se confronter à ses regrets, de détricoter sa jeunesse et sa vie de femme mariée et d'apprendre à sa petite fille que sa vie doit être toujours son premier choix. Et pour Chloé d'accepter un futur sans celui qui était son amoureux depuis le collège, de réguler ses peurs et de prendre conscience que sa grand-mère n'est pas éternelle.

Je remercie les Éditions Philippe Rey et Masse critique Babelio pour cette lecture.
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Touchée en plein coeur par le premier roman de Léa Frédeval qui m'a fait vivre le dernier voyage de deux héroïnes magnifiques, touchantes au-delà des mots. 

Ici, nos Thelma et Louise s'appellent Léopoldine et Chloé. L'une a 86 ans, l'autre 22. L'une a la mémoire qui flanche, l'autre le coeur brisé en mille morceaux. Toutes deux fuient une réalité trop difficile pour elles : l'inéluctable dépendance liée à l'âge et à une santé périclitante pour l'une, et pour l'autre, l'inévitable constat que l'amour, même après 10 ans de bonheur sans heurts, peut repartir comme il est venu. Elles embarquent en catimini avec, au fond de leur valise, leurs regrets, leurs espoirs. Pendant leur périple, elles vont se confier l'une à l'autre, se dévoiler. Nous sommes avec elles quand les coeurs s'ouvrent, les langues se délient. 

Sous la plume alerte et sensible de l'autrice, les récits alternées de l'une et de l'autre se font justes, authentiques. 

J'en ai savouré chaque étape, de cette dernière échappée, chaque souvenir évoqué en compagnie de Camille et Thérèse, chaque discussion autour de la maternité, de la famille, des amours passées et gâchées, de la vie en somme. 

Merci aux Éditions Philippe Rey et à Babelio pour cette très belle découverte 

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Une vieille voiture. Deux femmes. Et le départ d'une échappée pour retrouver un sens. Un sens à cette vie qui a défilé sans que Léopoldine ne s'en rende compte. Un sens à cette vie qui débute pour Chloé, sa petite fille.
Deux générations et un dernier voyage ensemble pour se souvenir, se raconter et se confier les secrets et conseils de grand-mère.
A la « Thelma et Louise », Chloé emmène sa grand-mère, à la santé fragile, dans un road trip sans réelle destination. Partir pour elle, c'est s'opposer au placement en EHPAD de Léopoldine. Partir, c'est aussi surmonter sa solitude qui l'étouffe.
En passager, Léopoldine se laisse conduire sur les routes de campagne, le long de l'océan. Elle dort pour la première fois, à plus de quatre-vingts ans, dans un château, une auberge de jeunesse ou encore un bungalow humide. Elle ferme ses yeux et se souvient des années qui ont filé, de son premier amour, de cette vie qu'elle a le sentiment d'avoir subi.
Les kilomètres s'enchaînent et elle raconte des bribes de sa vie jusqu'ici cachées. Elle donne ses derniers conseils sur la vie et le chemin qu'on décide de prendre.
En conductrice, Chloé tente de reprendre le contrôle de cette vie dont elle a perdu le goût. Elle suit sans plan, les routes et se laisse aller au gré des rencontres et des confidences de sa grand-mère. Elle redécouvre sa grand-mère, panse son chagrin et tente de calmer ses peurs.
Une histoire douce et pleine de sensibilité. Des mots poétiques qui font sens et emportent.
L'auteure raconte avec beaucoup d'émotion, le très beau lien qui unit une grand-mère et sa petite-fille. On se retrouve dans l'amour qu'elles se portent mutuellement.
Un magnifique road-trip, accompagné de deux personnages touchants, à découvrir.

Lien : https://www.quandleslivresno..
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Citations et extraits (13) Voir plus Ajouter une citation
« Je sais très bien qu'il n'y a rien après la mort et que personne ne monte nulle part, mais j'avais besoin de m'expliquer. Il fallait que je te dise tout haut pourquoi je m'en vais, pourquoi je quitte notre maison. D'abord, ce qui est sûr, c'est que ma petite-fille ne m'abandonnera pas, elle. Oui, parce que j'ai franchement tous les droits de t'en vouloir. Quoi qu'on en dise, tu t'es fait la malle en douce. Ni au revoir, ni merci, ni rien. Soixante-six ans de mariage et pas un mot. Mais moi ça ne me va pas du tout que tu sois parti sans que je puisse te dire le fond de ma pensée. Une vie entière que j'ai passée à n'être que pour toi. J'aurais préféré naître tout court si on m'avait demandé mon avis. Une existence régie par la tienne, rythmée par tes départs, tes absences et tes retours. Tu trouvais ça tout à fait normal, n'est-ce pas? Que tout s'organise ainsi. Là, tu rétorquerais sûrement que rien n'était pour toi vraiment, mais tout pour nous, pour la famille, parce que c'est comme ça que cela doit être. J'aurais bien aimé t'y voir. Tenir la maison, vous nourrir tous, être disponible et disposée pour toi et tes enfants. Sans week-end, ni congés. Sans rémunération non plus.
Être dans le monde m'a manqué, Jacques. Même si j'ai essayé, jamais je ne te l'ai dit ainsi, c'était trop pénible à avouer. J'aurais voulu participer à la vie en dehors de vous.
Avoir des collègues, des décisions à prendre, des dossiers à remplir et à envoyer à des gens qui les attendent. J'aurais tant aimé avoir à penser à des choses plus spécifiques que la routine du quotidien. Rien ne m'a jamais excitée. C'est la joie de me sentir vivante qui m'a manqué, celle d'être utile par ma tête.
Alors oui, d'accord, je ne travaillais pas comme certaines femmes ou comme celles d'aujourd'hui, mais j'avais la sensation d'en faire dix fois plus que toi, figure-toi. Je n'ai jamais calculé, mais j'aurais pu. Compter l'attente déjà. Sous toutes ses formes. Attendre mes règles chaque mois, attendre un enfant, puis deux, et trois, attendre de pouvoir récupérer un corps qui fonctionne, attendre que tu rentres pour diner, que tu partes pour faire le ménage, attendre que les enfants reviennent de l'école, qu'ils grandissent pour enfin attendre la ménopause. Et là, attendre encore, la fin des fins. Qui a fait attention à celle qui toute sa vie a attendu que d'autres vivent? Ma seule carrière fut de devenir une épouse dévouée. »
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Ma colère est un moteur. Un moteur alimenté régulièrement, qui tourne depuis toujours et ne demande qu'à s'emballer. C'est grâce à elle que j'ai tenu toute une vie. Elle me protège. Elle attaque pour prouver que je suis capable de me défendre. Je sais bien que ce n'est pas facile pour ceux qui m'entourent, que c'est même injuste, mais je n'ai jamais réussi à faire autrement. Si je la fais taire, je m'abîme. Et pour ce qui est de m'abîmer, les autres s'en chargent déjà assez. Je suis comme ça et si ça ne convient pas, à dégager.
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Ta vie, c'est ta vie. Les autres, les gens, ne penseront qu'à eux. Même s'ils t'aiment, le choix final ils le feront pour eux, et toi, ma petite, tu passeras après. Tu dois être ton premier choix, tout le temps. Ça ne veut pas dire être égoïste, ça veut dire que tu as compris que la vie est courte et que tu n'en auras pas d'autre. Souviens-toi: il n'y a que toi qui comptes.
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Quand ils se séparent, les parents disent tous la même chose : rien ne changera. Ils jurent qu'ils aimeront les enfants de la même manière et que la famille demeurera intacte. Mais aucun ne sait vraiment comment cela va se passer. La tendresse dans son regard a peu à peu disparu. Le père refuse de reconnaître dans la jeune femme l'enfant qu'il aimait autrefois. Certain de ne plus devoir s'occuper de moi, que je sais et doit le faire seule désormais, il se cache derrière l'idée qu'il me serait inutile. Comme un poids. Mais c'est moi qui lui pèse. Je fais partie du passé, je suis la preuve tangible d'un autre vie, d'une autre histoire avec une autre femme. Son présent à lui, c'est cette famille toute neuve. Moi, je suis périmée dans son cœur. J'ai longtemps attendu que mon papa revienne, qu'il ressente le manque de moi. Je suis passée par toutes les émotions. D'abord la colère d'être mise de côté. Puis la tristesse de disparaître sans remous. Je suis en train d'accepter que plus rien ne sera comme avant. Je fais le deuil de quelqu'un qui vit.
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Il existe deux manières d'être seule. Celle que j'ai connue n'est pas celle que j'aurais souhaitée. Élever ses enfants jour après jour aux côtés d'un homme qui n'est pas vraiment là, ça grignote et fait disparaître les contours. On devient la femme de, la mère de. Je l'ai accepté. Cette solitude s'impose comme seul horizon possible. C'est une fidèle compagne que je traînais derrière moi sans y prêter vraiment attention.
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