Dernier roman écrit par
Garcia Marquez, une longue nouvelle plutôt. Traduction sans faille par Annie Morvan.
Il s'est inspiré de l'oeuvre de Kawabata, Les belles endormies (et flûte, si j'avais su j'aurais lu celui-ci en premier.)
Garcia Marquez a l'art merveilleux de raconter des histoires, des histoires incarnées dans des personnages auxquels on s'attache parce qu'il sait leur donner vie.
Difficile toutefois de s'attacher à ce, pardonnez-moi, vieux con, narcissique et ouin-ouin, qui se lamente sur la perte de sa jeunesse. Sujet quand même un peu téléphoné, vu que le bonhomme fête ses 90 ans. Persuadé que la mort le guette au tournant de sa nouvelle décennie, ce mufle érudit, snob et content de lui (journaliste de quelque renommée) décide de rajeunir en se trempant dans un bain de sang. Ou sa métaphore plus mercantile : en se payant une nuit avec une petite fille.
Oui, c'est dégueulasse.
Ce vieux mâle solitaire nous raconte donc l'année précédant son 91ème anniversaire, au cours de laquelle il prend l'habitude de partager le lit d'une gamine endormie qu'il peut tripoter à loisir.
Oui, si c'est autobiographique c'est dégueulasse.
Sauf que...
Sauf que son personnage est si pitoyable, si caricatural, qu'on sent la parodie sous la lamentation.
Le personnage n'a jamais connu l'amour ("J'ai passé tous les jours de ma vie sans femme ni fortune"), ni même le sexe non commercial ("Je n'ai jamais couché avec une femme sans la payer").
Mais il voudrait y croire, à l'amour, avant de mourir. Il croit la domestique qui lave son linge amoureuse de lui, depuis qu'il l'a sodomisée par surprise (Non non messieurs : en général ça n'est pas le truc infaillible pour rendre les femmes folles d'amour). de même, il se croit donc éperdument amoureux des gamines quasi-interchangeables avec lesquelles il passe la nuit, et qu'il nomme d'un même prénom, Delgadina, tiré d'une chanson populaire (lui, le critique musical habitué à disserter sur les différentes versions des suites de Bach.)
A la fin du roman, on ne sait toujours pas si tout s'est passé en vrai ou dans sa tête, au milieu de son appartement délabré empli de livres et de musique. Dans sa tête passent aussi les chroniques hebdomadaires qu'il rédige encore, malgré sa démission, passent ses souvenirs...
Et il est affligé d'hémorroïdes.
Cheh.