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Annie Morvan (Traducteur)
EAN : 9782253137474
157 pages
Le Livre de Poche (17/05/1995)
3.76/5   365 notes
Résumé :
Une femme prise en auto-stop par l'autobus d'un asile d'aliénés se retrouve enfermée. Un Colombien fait le siège du Vatican avec le cadavre imputrescible de sa fille, qu'il voudrait faire béatifier. Dix-sept Anglais sont empoisonnés à Naples par une soupe aux huîtres...
Le romancier de L'Amour aux temps du choléra, prix Nobel de littérature, se montre aussi souverain dans la brièveté que dans l'épopée. Chacune des nouvelles de ce livre nous entraîne en quelqu... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (42) Voir plus Ajouter une critique
3,76

sur 365 notes
"Le fantastique n'a d'intérêt que parce qu'il surgit du réel et l'enlace."
(S. Rushdie)

Pero qué pasa ? C'est bien du Marquez, et en même temps, comme s'il manquait quelque chose.
Comment dire... ?

Garcia Marquez est un romancier avec un don de Dieu. Un écrivain qui a réussi à créer son propre univers, quelque part entre le fantastique et le réel - et c'est uniquement à vous de voir si vous vous y sentez à l'aise ou pas. Même si, chez certains auteurs, on peut parfois rencontrer une sensation de "déjà vu" ou "déjà lu", ceci ne peut tout simplement pas arriver avec Marquez. Il a toujours su rester que lui-même.
Mais il n'a jamais eu la prétention de devenir un maître incontesté en matière d'histoire courte; et il ne l'est jamais devenu.
Rien qu'en lisant la préface des "Douze contes vagabonds", on peut se rendre compte de la genèse longue et un peu laborieuse de ce recueil. Ce qui peut en partie expliquer ma petite déception.

Dans l'ensemble c'était une belle lecture, mais on est un peu loin du réalisme magique; de l'atmosphère verte et étouffante de Macondo, ou des mirages fantasmagoriques créés par la chaleur qui fait onduler l'air de la côte aride des Caraïbes. Ici, pas de Buendia, ni d'anges qui vivent dans un poulailler...
Les "Douze contes vagabonds" parlent de gens qui sont loin de leur pays : d'un ex-président, en passant par une ex-prostituée, jusqu'aux gens qui ont une mission à accomplir ou de simples touristes.
J'ai plutôt envie de qualifier ces histoires de "tragi-comiques". Au fond, il s'y passe très peu de chose, et leur force se trouve dans la poésie du texte. Mais de penser que Marquez va se contenter d'un beau texte, ce serait le sous-estimer. Il rajoute à chaque histoire une chute surprenante, un peu dans la veine d'Ambrose Bierce.

Parfois le dénouement était un peu évident, ou même décevant ("Epouvantes d'un mois d'août"), mais on se rattrape vite avec les histoires comme "Maria dos Prazeres" (qui parle du dernier client d'une très vieille poule de luxe), ou cette aventure d'un homme qui passe un long voyage en avion à côté d'une belle endormie. Amplement suffisant pour en faire une bonne histoire !
Le thème de "Un métier de rêve" fait penser à Borges; et vu que l'histoire se finit avec un hommage ouvert à celui-ci, ce n'est pas une coïncidence.
Mais ce n'est qu'à la fin que je suis tombée sur deux merveilles - "La lumière est comme l'eau" (la seule qui donne dans le "vrai fantastique" - il suffit de casser l'ampoule, et vous pouvez nager dans la lumière !) et la très fataliste "La trace de ton sang dans la neige", qui vous apprend que la bureaucratie française peut changer bien des destins.

Les "Douze contes" sont assez intimistes - les héros apparaissent et disparaissent dans la foule anonyme - Paris, Naples, Barcelone, Rome - et on les oublie presque aussitôt. Il n'y a pas cette démesure des "Cent ans de solitude", cette tension irréelle de la "Chronique d'une mort annoncée", la prosodie exaltante de "L'automne du patriarche", ni la folie onirique de "Candide Erendira". Peut-être parce que nous sommes en Europe ?

Mais finalement, j'ai trouvé ça bien. C'est peut-être le livre idéal si vous n'avez encore rien lu de Marquez, et si vous souhaitez commencer en douceur. Dans le sens inverse, il reste cette petite sensation de quelque chose qui manque.
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L'écrivain voyage, conte et raconte ses contes. Je l'imagine dans son hacienda, l'ombre qui apporte un brin de fraîcheur à sa cerveza muy fresca. L'écrivain se pose ainsi, reprend des notes de jeunesse, évoque ses souvenirs, retriture de vieux textes. Gaby, après tout c'est notre troisième rencontre, je peux me permettre quelques familiarités, ce n'est pas un prix Nobel qui va m'intimider... enfin si, ce genre de prix ou d'honneur me fait un peu trembler, d'appréhension ou de peur... Gabi, Ô Gabi, donc aurait pu m'emmener dans son hacienda du côté d'Aracataca ; non, il commence par me promener aux abords du lac de Genève, à la rencontre d'un pauvre type, oh pardon monsieur le président, d'un ex-président déchu. Puis je file en Italie, en France, en Espagne... Rome, Paris, Barcelone... bref, je fais le tour de la Méditerranée, il y a moins de poussière qu'en Amérique du Sud, cependant...

Cependant, c'est l'heure de ma sieste, la sacralité de l'instant quand je pose mon regard sur la belle endormie. Elle est sublime, même quand elle dort je vois son sourire, sa pureté, sa crinière brune, son âme comme lorsque je transperce de son regard le mien. Je suis à l'écoute des effluves de son parfum de jasmin, comme des rythmes de son coeur, le sang coule et la trompette me réveille au son de l'Espagne.

Alors, entre deux bières ou deux verres de rhum, pour agrémenter deux nouvelles, je respire ces senteurs andalouses, celles du jasmin, celles de ces orangeraies qui longent la poussière de ma route. Celle qui traverse le désert de Monegros, celle qui suit la trace de ton sang dans la neige... En douze contes, je vagabonde avec l'auteur, des rencontres imaginaires, des nuances gothiques, des grands noms de la littérature, hommage à ses maîtres, de Kawabata à Neruda, en passant par Borges. Je prends mon temps, baigné dans cette irréalité littéraire, des êtres solitaires errant dans la poussière, comme sorti d'un rêve, comme plongé dans l'absurdité du monde. Je rêve de cette femme, je rêve de ce verre, je pense à ma vie, je pense à Gaby oh Gaby tu veux que j'te chante la mer...
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« En Espagne, à Madrid, une ville ancestrale aux étés torrides et aux vents glacials, sans mer ni fleuve, et dont les aborigènes terriens n'avaient jamais maîtrisé l'art de naviguer dans la lumière. »

Un recueil de Douze contes vagabonds. Des contes qui sont différents de ce que j'ai l'habitude de lire. Des contes magnifiques, qui demandent du temps pour en apprécier les subtilités. L'écriture est drôle, poétique, fleurie. En revanche le fond est lourd, sombre, politique aussi, et pour autant, il y a de la magie qui fait qu'on ressort de la lecture avec malgré tout, une touche d'espoir. L'espoir de ne pas commettre deux fois la même erreur, l'espoir de rencontrer une voiture blanche ou de faire un doux rêve, mais certes, pas de trouver un téléphone. C'est agréable de faire un petit tour d'Europe, de découvrir la vie de ces voyageurs, voyageurs du temps pour certains agrippés au charme d'une autre époque, de temps révolus et des voyageurs de l'espace, passant d'un continent à l'autre, d'un monde à un autre. J'avoue avoir beaucoup apprécié « La lumière est comme l'eau ». Comme toujours j'aime quand un auteur renvoie à ses compères, « Un métier de rêve ». Donnant la parole à P. Neruda sortant de sa sieste :
 ''J'ai rêvé de cette femme qui rêve'', dit-il. (...) ''J'ai rêvé qu'elle rêvait de moi, dit-il. - Ça, c'est du Borges'', répliquai-je. Il me regarda, déçu : ''C'est déjà écrit ? - Si ça ne l'est pas, il l'écrira un jour. Ce sera un de ses labyrinthes.'' 
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Pour qui a vécu l'expérience unique en son genre de l'immersion intense dans la narration longue et les phrases sans fin des romans de Garcia Marquez, ces Douze contes vagabonds sont d'abord une surprise: il sait faire court! et le fait merveilleusement bien, avec un art consommé de la nouvelle, exercice particulièrement difficile à réaliser.

Pas pour l'ami Gabriel, dont la prose est aussi réjouissante en format court que dans les méandres infinis de Cent ans de solitude ou L'automne du patriarche, bien que l'auteur nous avoue lui-même avoir longuement peaufiné pendant de nombreuses années ces douze histoires, pour certaines initiées plusieurs décennies avant la parution du recueil.
C'est ainsi une sorte de testament ou autobiographie littéraire que ces douze contes, qui nous emmènent à la fois sur les terres d'une vieille Europe latine sillonnée par l'auteur dans ses jeunes années et dans ces contrées oniriques teintées de mystère propres à l'auteur.
On y croise un vieux dictateur à la rue, des figures de femmes hors des normes par leur beauté, leur caractère ou leur parcours, une barque fendant les flots dans un appartement et jusqu'à un cadavre immortel dans une valise, le tout maculé de traces de sang dans la neige.

Un recueil magique, condensé de l'univers de ce poète de l'humanité, qui se déguste comme un alcool vieilli jusqu'au nectar.
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Douze contes tous aussi différents les uns des autres dans le style incontestable de Gabriel Garcia Marquez. Il faut trouver la réponse à l'écriture et au choix des contes dans le prologue qu'a écrit l'auteur. Je cite : "Lorsque j'ai commencé "Chronique d'une mort annoncée", en 1979, j'ai constaté qu'entre un livre et un autre je perdais l'habitude d'écrire et qu'il m'était de plus en plus difficile de me remettre au travail. Alors, entre octobre 1980 et mars 1984, je me suis imposé la discipline d'écrire chaque semaine un récit pour des journaux de différents pays, afin de garder la main...
... les douze contes de ce livre. Au mois de septembre 1991 et après deux autres années de travail discontinu, ils étaient prêts à être publiés... Comme j'avais décrit les différentes villes d'Europe où ils se déroulent en faisant appel à ma mémoire et de loin, j'ai voulu mettre à l'épreuve la fidélité de souvenirs vieux de presque vingt ans, et j'ai fait un rapide voyage de reconnaissance à Barcelone, Genève, Rome et Paris.
Ni les unes ni les autres n'avaient plus rien à voir avec le souvenir que j'en avais... Et pourtant, je tenais la solution. J'avais enfin trouvé ce qui me manquait pour terminer mon livre et que le seul cours des ans pouvait me donner : la perspective du temps.
À mon retour, après ce voyage heureux, j'ai récrit tous les contes du début à la fin en huit mois fébriles au long desquels je n'ai eu nul besoin de me demander où finit la vie et où commence l'imagination ...
Prologue écrit à Cartagena de Indias, avril 1992.
— de préférence à une analyse des contes qui sont très courts, j'ai choisi d'évoquer les motivations qui ont amené Gabriel Garcia Marquez à les écrire.
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Citations et extraits (53) Voir plus Ajouter une citation
Neruda s'endormit à l'instant et se réveilla dix minutes plus tard, comme les enfants, au moment où nous nous y attendions le moins. Il apparut dans le salon, en pleine forme, le monogramme de l'oreiller imprimé sur sa joue.
"J'ai rêvé de cette femme qui rêve", dit il.
Matilde voulut qu'il raconte son rêve.
"J'ai rêvé qu'elle rêvait de moi, dit-il.
- Ca, c'est du Borges", répliquai-je.
Il me regarda, déçu :
"C'est déjà écrit ?
- Si ça ne l'est pas, il l'écrira un jour. Ce sera un de ses labyrinthes."
A six heures du soir, aussitôt monté à bord, Neruda prit congé de nous, s'assit à une table écartée et commença d'écrire des vers limpides, trempant sa plume dans l'encre verte avec laquelle il dessinait des fleurs, des poissons, des oiseaux en guise de dédicaces à ses livres. Au premier coup de sirène, nous cherchâmes Frau Frida et la trouvâmes sur le pont des secondes au moment où nous allions repartir sans lui avoir dit adieu. Elle aussi venait se réveiller de la sieste.
"J'ai rêvé du poète", nous dit elle.
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Appelés d'urgence, les pompiers forcèrent la porte du cinquième étage et trouvèrent l'appartement inondé de lumière jusqu'au plafond. Le canapé et les fauteuils tapissés de peau de léopard flottaient dans le salon à différents hauteurs, parmi les bouteilles du bar, le piano à queue et son châle andalou qui voletait comme une grande raie couleur d'or. Les ustensiles ménagers, dans la plénitude de leur poésie, volaient de leurs propres ailes dans le ciel de la cuisine. Les instruments de la fanfare militaire, que les enfants utilisaient pour danser, flottaient à la dérive parmi les poissons multicolores échappés de l'aquarium, seules créatures vivantes et heureuses dans le vaste marécage éclaboussée de lumière.
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La vie entière n’aurait pas suffi à Billy Sánchez pour déchiffrer les énigmes de ce monde fondé sur le génie de la radinerie. Il ne comprit jamais le mystère de la lumière de l’escalier qui s’éteignait avant que l’on arrive à l’étage, pas plus qu’il ne découvrit comment la rallumer. Il lui fallu presque toute une matinée pour apprendre que sur chaque palier il y avait une petite pièce avec des cabinets, et il s’était résigné à les utiliser dans les ténèbres lorsqu’il découvrit qu’on pouvait allumer en poussant le verrou de l’intérieur afin que personne n’oublie d’éteindre en sortant. La douche, qui se trouvait à l’autre extrémité du couloir et qu’il s’entêtait à utiliser deux fois par jour comme dans son pays, se payait à part et comptant, et l’eau chaude, contrôlée par la direction, était coupée toutes les trois minutes.


La trace de ton sang dans la neige.
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Je ne le vis qu'une seule fois, au Boccacio, la boîte de nuit à la mode de Barcelone, quelques heures avant son épouvantable mort. Il était persécuté par une bande de jeunes Suédois qui voulaient l'emmener à deux heures du matin finir la soirée à Cadaqués. Ils étaient onze et on avait quelques difficultés à les distinguer les uns des autres, car garçons et filles se ressemblaient tous : superbes, avec des hanches étroites et de longues chevelures dorées. Lui ne devait guère avoir plus de vingt ans. Sous ses boucles d'acier bruni, il avait le teint olivâtre et terne des Caribéens habitués par leurs mamans à marcher à l'ombre, et un regard d'Arabe capable de tourner la tête à n'importe quelle Suédoise et peut-être même à plusieurs Suédois.
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Son souffle avait la tiédeur de sa voix et sa peau exhalait un parfum léger qui ne pouvait être que celui de la beauté. C'était incroyable : au printemps précédent, j'avais lu un magnifique roman de Yasunari Kawabata sur les vieillards de la bourgeoisie de Kyoto qui payaient des sommes énormes pour passer la nuit à contempler les jeunes filles les plus belles de la ville, nues et droguées, tandis qu'ils agonisaient d'amour dans le même lit. Ile ne devaient ni les éveiller, ni les toucher, ni même songer à le faire, car l'essence même de leur plaisir était de les regarder dormir. Cette nuit-là, en veillant sur le sommeil de ma belle, je fis mieux que comprendre ce raffinement sénile : je le vécus dans sa plénitude.
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Vidéo de Gabriel Garcia Marquez
Troisième épisode de Dans les pages avec la romancière américaine Joyce Maynard. Elle est venue nous parler des livres qu'elle aime, de Gabriel Garcia Marquez, du Petit Prince et de musique.
Bon épisode !
"L'hôtel des oiseaux" est publié aux éditions Philippe Rey, Arthur Scanu à la réalisation
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>Littérature (Belles-lettres)>Littérature espagnole et portugaise>Romans, contes, nouvelles (822)
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