Rosa est une jeune femme de vingt deux ans, qui vit à Leipzig en Allemagne. Mère depuis peu, elle s’enfuit du domicile conjugal, laissant derrière elle son fils Moritz et Tom, son compagnon.
Sa première destination est un train vers Berlin, puis ses errances la conduisent à Francfort, New York et ailleurs. Car Rosa fuit. Elle fuit sa maternité, son enfance envolée, sa vie de femme qu’elle ne veut pas assumer. Elle fuit son corps qui déborde de lait, de sang, qui la ramène sans cesse à ce statut de mère dont elle ne veut pas, qu’elle n’arrive pas à aimer. Elle voudrait être une jeune femme de son âge, sans attaches, sans problèmes, alors elle fuit aussi loin qu’elle le peut, mais sans jamais pourtant se défaire de ce qu’elle est.
Heike Geissler écrit là un premier roman qui a été très remarqué en Allemagne et couronné par le Prix Alfred Döblin. Elle nous plonge entièrement dans la tête de son héroïne. Tout au long des 243 pages qui composent son histoire, le lecteur ressent ce que ressent Rosa, il est comme une petite souris niché dans son univers, qui voit tout, entend tout. A la limite parfois du désagréable. Car tout n’est pas joli joli dans cet être déchiré par mille contradictions. On suit sa pensée jusqu’aux rêves qu’elle fait, des cauchemars qui la renvoient à sa faute, au déni de sa vie. Sans jamais juger, l’auteur met pourtant son lecteur dans une position presque voyeuriste. J’ai été à la fois emballée par cet embarquement sans concession dans la vie de cette jeune femme touchante et si paumée que l’on a envie de lui venir en aide, et parfois assommée par toutes ses turpitudes. Car rien ne lui ai épargné, ni les mauvaises rencontres, ni les espoirs déçus. Parce que rien ne peut aller quand on va aussi mal, quand on est autant en lutte contre soi-même.
Ce roman hypersensible ne plaira sans doute pas à tout le monde. Car il explore sans concessions une face sombre de la maternité, déjouant par la même tous les clichés d’un bonheur sans failles que la société d’aujourd’hui se plait à exalter. Oui, il y a des femmes qui n’y arrivent pas. Qui ne ressentent pas cet amour dont on parle tant, cet amour évident pour leur enfant. Difficile à croire, peut-être. A lire en tout cas, c’est certain. Mais c’est aussi une belle leçon de compréhension, d’amour pour ceux qui se cherchent en se perdant. Oui, une belle leçon de tolérance pour la souffrance d’autrui.
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