Parce qu'elle lit un jour La Pastora. del monte al mito de Jose Calvo,
Alicia Gimenez Bartlett décide de consacrer un livre à celle qui fut le "maquis" le plus recherché d'Espagne, la mystérieuse Teresot Pla Merenguer, guerillera accusée de 29 assassinats, bandolera, née Teresa et morte Florencio en 2004.
Avec
Donde nadie te encuentre, la romancière espagnole abandonne son héroïne Petra Delicado pour retracer le parcours du dernier maquis d'Espagne, dépeinte comme une hyène assoiffée de sang terrée dans le Maestrazgo, et dont personne ne sait si elle est "mâle ou femelle".
Barcelone, octobre 1956, deux hommes partent à la recherche de la Pastora, l'idéaliste Lucien Nourissier, psychiatre français intéressé par ce "cas clinique", et le très cynique journaliste Carlos Infante. Mais dans ses terres reculées des Pyrénées catalanes, l'Omerta règne et personne ne se risque à évoquer ni les années de guerre, ni les faits des maquisards. L'Opération Val d'Aran, reconquête d'Espagne du mois d'octobre 1944 a été un échec et la politique de terreur exercée par la guardia civil sur les populations rurales n'a fait que renforcer le mutisme de ses habitants. Nos deux personnages auront toutes les peines du monde à retrouver l'énigmatique maquis.
Roman noir polyphonique sur la relation toujours intéressante qui unit deux hommes que tout sépare dans une même quête de la vérité,
Donde nadie te encuentre offre également le beau portrait d'un être marqué par sa différence et par sa marginalité. le récit à la première personne de la Pastora, dans lequel elle raconte son enfance misérable, sa condition de bergère et sa vie avec les maquis dans les montagnes d'El Ports est bouleversant.
Mais la puissance du roman réside surtout dans l'évocation de l'Espagne de l'après-guerre et des combat des maquis, qui tentèrent d'établir un gouvernement provisoire dans le val d'Aran pour renverser le régime de Franco dès 1944.
Thème rarement évoqué dans la littérature ( à l'exception de Ines et la joie de Grandes) ou dans le cinéma (Et vint le jour de la vengeance de Zinnemann, le Labyrinthe de Pan de Guillermo del Toro), le combat des maquis est ici au coeur du récit.
Alicia Gimenez Bartlett dépeint (enfin) l'apartheid économique, politique et social dont fut victime toute une partie de la population espagnole, celle qui compta parmi ses membres les exilés, les prisonniers et les vaincus.