Merci à Babelio et aux Editions Accès de m'avoir permis de découvrir comment, dans un livre pour enfants, on pouvait aborder un thème qui l'est rarement dans la littérature enfantine, celui du handicap visuel.
Deux couleurs dominent : le gris qui semble représenter notre monde, auquel Léa n'a pas accès du fait de son handicap et le vert, (couverture, illustrations, texte), la couleur de l'espoir peut-être ? L'espoir que le monde s'ouvre à celles et ceux qui ne voient pas du tout ou qui voient mal. Mais aussi celle de l'imagination. La petite Léa est aveugle, bien que le mot ne soit pas prononcé.
Sandra Giraud, l'autrice et illustratrice, a préféré dire que « les yeux de Léa ne voient pas comme ceux de tout le monde », la montrer accompagnée d'un chien d'aveugle et en train de lire en braille.
Les enfants ne connaissant a priori pas ce langage, un petit livret d'initiation au braille a été ajouté. Il est également possible d'accéder à une version sonore de l'histoire grâce à un QR code sur la quatrième de couverture.
Léa a un ami, Marcus, qui lui rend visite, mais il ne leur est pas facile de trouver un jeu auquel ils peuvent participer tous les deux. le petit garçon ne baisse pas les bras pour autant et finit par trouver une idée : une partie de colin-maillard va les mettre à égalité! Il se met un bandeau sur les yeux et c'est Léa prend les rênes et l'entraîne dans son monde imaginaire, peuplé d'animaux et de végétation fictifs.
Les yeux bandés, Marcus perçoit des sons auxquels il n'aurait probablement pas prêté attention dans d'autres circonstances. Cela l'inquiète mais Léa est là, accompagnée de son chien Neptune : les rôles sont inversés !
Cet album s'adresse aux enfants à partir de 5 ans et c'est là que, pour moi, le bât blesse. En effet, je trouve le texte limité en richesse langagière et en quantité pour des enfants de cet âge-là. Je suis assez farouchement opposée de manière générale au « nivellement par le bas » ; un enfant peut monter haut si on l'accompagne. Ce n'est apparemment pas la conception de cette maison d'édition qui choisit délibérément (c'est indiqué sur la quatrième de couverture), je cite : une utilisation parcimonieuse des pronoms et des substitutions, des structures langagières faciles à comprendre, une seule scène par double page etc…
Il est alors étonnant voire paradoxal d'avoir ajouté ce livret en braille car il suppose de déjà connaître l'alphabet et de savoir orthographier les mots pour pouvoir lire les exemples du bout des doigts. La marche est grande entre le texte du livre et celui du livret.
Néanmoins, ce livre est un support intéressant pour aborder avec des petits le sujet de la cécité, pour, je cite à nouveau, « ouvrir les yeux sur la différence ». Quelles solutions pour s'accepter les uns les autres et vivre ensemble en harmonie ? Une partie de colin-maillard peut alors prendre un intérêt inhabituel, permettant aux enfants de se mettre temporairement dans la peau d'un non-voyant et de prendre conscience du handicap que cela représente mais aussi des aptitudes que cela permet de développer. Voilà de quoi entamer un dialogue avec l'enfant lecteur. A vous de jouer !