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EAN : 9782070388875
352 pages
Gallimard (13/04/1994)
3.7/5   64 notes
Résumé :
L'été de ses quatorze ans, au début des années 20, alors qu'il est apprenti dans l'imprimerie locale, une naine, à la fois méprisée et crainte, est tombée amoureuse de Jean, le narrateur. Le cadre de ce roman fortement autobiographique est une petite ville agricole de la Provence chère à l'auteur, et plus précisément la place principale flanquée, côté soleil, des demeures des notables et, côté ombre, des petites maisons des " dames du Nord ", éternelles observatrice... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (10) Voir plus Ajouter une critique
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Jean, 14 ans, dépenaillé, crasseux et boutonneux, vaque à ses occupations dans l'imprimerie où il a été recruté pour faire les sales boulots, lisant à ses heures perdues tous les livres qui lui tombent sous la main, perdu dans des fantasmes érotiques qu'il nourrit en épiant les voisines, des femmes mûres de préférence. Car l'été est chaud, très chaud dans ce village des Alpes de Haute-Provence de l'après guerre, les femmes se mettent à l'aise à l'ombre des pas de portes, prennent le frais sur les terrasses, et les commérages vont bon train...

Surtout depuis que les dames du Nord, ainsi nommées car elles viennent des impasses obscures du village s'installer sur la place ensoleillée bordée d'érables, grandes commères, ont découvert que la Naine, aussi laide que méchante, est tombée amoureuse du Jean dont l'insouciance s'horrifie d'une telle malédiction...

Et quand la Sanson, sorte de sorcière que tous craignent, s'en mêle, les morts s'accumulent au passage de la maudite Naine, qui ne tire certainement sa méchanceté que de la sinistre farce que lui a fait l'existence...mais jalouse et frustrée elle sème la désolation.

Dans sa langue truculente Pierre Magnan nous régale encore une fois avec son sens aigu de l'observation des moeurs de ce temps jadis, pas si éloigné du notre sur beaucoup de points, alliant cruauté et tendresse, causes réelles et fantasmées, superstition, réalisme et fantastique dans ce récit qui emprunte beaucoup à son propre vécu. Un régal.
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Ce livre, La naine, est-ce un roman ? Sans doute oui. Il est rempli d'étrangeté. À forte connotation autobiographique, l'auteur Pierre Magnan écrit en préambule de ce récit les mots suivants : " Tous les protagonistes de ce roman ont emprunté les traits physiques de personnages qui ont existé. Ces êtres étaient les meilleures gens du monde, absolument dénués de passion, de méchanceté comme d'imagination. Il ne leur est rien arrivé d'autre que de naître, prendre le soleil et mourir. L'histoire dont je les ai chargés, je l'ai forgée de toutes pièces. "
Ici l'auteur édifie une ville imaginaire ou qui fait semblant de l'être, aux apprentissages bien réels, sous le soleil de Provence, qui pourrait très bien être Manosque. Il invite le narrateur, un adolescent de quatorze ans à nous en approprier les rues, les coins, recoins, ses secrets, ses envoûtements et surtout ses personnages comme tout droit sortis d'un conte un peu gothique...
Nous sommes au début des années vingt, les cicatrices de la Grande Guerre sont encore dans les mémoires, à vif...
Jean, qui s'appelle en réalité Chrysostome, est embauché comme typographe dans l'imprimerie locale où il est exploité, se voyant confier les tâches les plus ingrates. Il est sale, voire crasseux, malchanceux et malhabile, un visage empli d'acné à faire peur aux filles. À ses heures perdues, il découvre la littérature, le Rouge et le Noir, Eugénie Grandet, l'Annonce faite à Marie... Il aime faire de la lecture un rempart contre le mépris, peut-être un peu comme certains d'entre nous ici...
Il découvre aussi l'érotisme en épiant quelques voisines d'âge déjà mûr qui prennent le soleil en tenue très légère derrière les paravents de leurs balcons ou de leurs jardins...
C'est l'été de ses quatorze ans, une saison brûlante à bien des égards...
Une jeune fille, naine, qu'on appelle La Naine ou bien encore Nène, laide et méchante, vendeuse de chapeaux dans une boutique qu'elle tient avec sa soeur, aime follement Jean. Mais la réciproque n'est pas vraie...
Nous découvrons cette ville mythique et mystique à travers les déambulations érotiques de Jean, sans cesse pourchassé par la naine, éperdument amoureuse, jalouse aussi de ses pérégrinations. C'est à la fois cocasse, coquin, mystérieux et douloureux à la fois..
Cette ville pleine de mystères est comme faite pour que les pas se perdent dans ses calades. Et puis tout là-haut sur la place principale, il y a les dames du Nord souvent en cercle, elles savent tout avant les autres, parfois mieux que les autres, elles semblent un peu tirer les ficelles des vies de cette ville, font, défont, refont l'histoire à coup de chuchotements... Parfois elles avancent en procession.
Il y a ici toute une galerie de portraits saisissants, à commencer par La Sanson, sorte de sorcière qui, un jour, intime au garçon l'ordre d'aimer la naine. Cette injonction est presque une menace...
Il y a l'Agassonne, il y a Germaine, il y a Gentiane, il y a l'avocate, il y a Victor et son père l'Orfeo Bellatroce et bien sûr il y a la naine, des personnages qu'ont croirait parfois possédés par une malédiction...
Ah! La naine... Tissant sa toile autour de Jean, le traquant comme un oiseau de proie. Son regard d'amour qu'elle jette parfois sur lui, implorant la pitié, mélange de douleur et de force maléfique...
Dès lors, cette ville est prête à voir se déverser sur elle tous les sortilèges possibles dans les méandres de ses rues et l'errance de ses habitants... Les vivants et les morts qui se côtoient, se frôlent sans cesse...
Et puis un jour, un cirque maudit, hanté par la tragédie, revient à cette ville...
J'ai aimé la langue, le style ample, riche de Pierre Magnan, son côté lyrique, truculent. Il y a ici une poésie du sublime et du tragique. Ce sont des mots gorgés de soleils, d'effluves et d'épines.
J'ai aimé ce roman d'apprentissage, conte cruel, fable d'une éducation sentimentale espiègle, tendre, triste, douloureuse, effleurant par moments le fantastique...
Jubilatoire !
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L'auteur Pierre Magnan né en 1922 décédé en 2012.

Il situa tous ses écrits en Provence, la terre où il était né et où il rencontra Jean Giono et Thyde Monnier.

Ce livre est magistralement écrit, pour qui aime la langue française on peut dire qu'il en connait toutes les ficelles et surtout qu'il utilise un vocabulaire vraiment très riche avec des mots qui (pour certains) m'étaient inconnus (j'ai donc dû prendre mon dictionnaire) ; mais quel plaisir de lecture que ce livre qui se situe dans les années 1920/1930.

Jean, que tout le monde appelle ainsi, mais qui se prénomme Chrysostome, est à l'été de ses quatorze ans et nous fait vivre avec lui la vie d'une petite ville de Provence avec ses notables qui ont des demeures situées au soleil, et "les dames du Nord" qui vivent côté ombres.

Ces dames se retrouvent le soir sur le pas de leur porte observatrices et commentatrices des faits et gestes de tout un chacun.

Rien n'échappe aux regards affutés de ces commères.
Vraies ou fausses un tas d'histoires circulent.
On y découvre La Sanson une espèce de sorcière discrète à qui l'on prête des pouvoirs extraordinaire de vie et mort sur chacun ; la naine affreuse petite chose de 88 cm de hauteur qui va se prendre d'amour pour Jean et le poursuivra de ses assiduités jusqu'à commettre, du moins tout le laisse à penser, des actes irréparables.

Cette histoire en grande partie autobiographique,l'auteur dit :
' L'histoire .... je l'ai forgée de toutes pièces .
De même serait il vain de vouloir juxtaposer une réalité quelconque sur les lieux que je décris.
Mon personnage principal dit : "J'avais édifié une ville mythique planant au-dessus de la vraie et c'était en elle que je me consolais."
C'est exactement ce que j'ai fait.

Quelques mots désuets dont j'ai du chercher le sens :
- catharsis
-dysphorie
- l'ombre ocellée
- nos Erinyes en deuil
- le calame
- la manustupration
- coryphées du destin .

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Utilisant les lieux de sa jeunesse et des personnages qui y vivaient, Pierre Magnan invente une histoire un peu folle. On peut la situer vers les années trente ou quarante.
Une ville où tout le monde s'épie, où tout le monde sait tout sur tout le monde. Et là, vit une naine, Madeleine, qui tombe amoureuse de Jean, en réalité Chrysostome, apprenti typographe de quatorze ans. Elle mettra tout en oeuvre pour parvenir à ses fins. Superstitions et maléfices envahissent la ville.
L'ambiance est parfaitement rendue. La description des personnages est peut-être un peu longue avant qu'on ne plonge véritablement dans l'histoire. Mais tout est assez finement détaillé.
Ressort de ce roman l'importance de l'imagination qui aide à supporter la réalité quand celle-ci ne correspond pas à nos attentes.
Globalement, c'est une lecture surprenante et plutôt agréable.
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C'est une histoire étrange et tragique, comme le sont souvent les histoires des hommes. Un conte crépusculaire peuplé de femmes extraordinaires, où les hommes sont soit des pantins, soit des ombres fugitives. Sauf le narrateur, Jean. Il a 14 ans, il est pauvre, indolent à la limite de la paresse, et a pour seules passions l'observation des femmes (et les rêves érotiques qu'elle suscite) et la lecture. Pour son malheur, il attire l'attention du personnage le plus pittoresque et le plus dérisoire de sa petite ville : une naine grotesque, risée des habitants, qui est tombée follement amoureuse de lui. Devant le dégoût horrifié de Jean à son égard, elle va faire appel aux mystérieux pouvoirs de la Sanson, terrifiante sorcière locale qui tient la population sous sa coupe. Et c'est alors que le drame va sa jouer...Avec un très grand talent et beaucoup de poésie, Pierre Magnan brosse une galerie de portraits de personnages à à la fois ordinaires dans leurs préoccupations quotidiennes, et fascinants dans leur individualité. Comme la Naine, laide, obstinée, et criminelle ; les Dames du Nord, qui commentent impitoyablement la vie de leurs concitoyens comme un choeur antique ; l'irréprochable Agassonne, prête à tous les sacrifices pour sa fille malade, et qui recèle des trésors de sensualité ; l'Avocate, vivante oeuvre d'art, aérienne, enchanteresse, qui mourra dans d'atroces circonstances ; et tant d'autres... On sent à travers l'écriture ciselée de l'auteur toute une vie d'observation de ses frères et soeurs humains. Un regard à la fois froid et distancié, mais aussi pétri de tendresse pour leurs fragilités. Il décrit aussi avec un amour profond la région de Haute-Provence où il a grandi, dure avec les hommes, mais si belle avec ses paysages séchés par le vent âpre, ses sources rares mais d'une beauté sans égale, sa terre aride qui tient amoureux ceux qui y sont nés... Avec la mort de Pierre Magnan au printemps dernier, la littérature française a perdu un grand écrivain, injustement méconnu du grand public. Peut-être avez-vous vu à la télé "La maison assassinée" avec Patrick Bruel ? Ou encore "Les courriers de la mort" ou "Le secret des Andrônes" avec Victor Lanoux ? Sachez que ces téléfilms sont adaptés des romans de Pierre Magnan, et qu'ils peinent à en retranscrire la beauté et la puissance. Alors n'hésitez plus, lisez ses livres, ils le méritent.
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Citations et extraits (116) Voir plus Ajouter une citation
- Tu crois pas que non ! La Nène est amoureuse du Jean maintenant !
- Qué Jean ?
- Le Jean ! Celui qui est tant sale ! Enfin tu sais bien : celui qui travaille à l’imprimerie !
- Moun Diou ! Laisse-moi m’asseoir que ça me coupe les jambes !
Elle dut, la Miane, se mettre les mains sur la tête :
- Mais tu imagines un peu les enfants que ça va faire ça ?
Et l’Uiaoudo dut branler du chef affirmativement, accablée. Après quoi, courageusement, elle reprit son paquet de « Croix » pour aller porter de seuil en seuil la scandaleuse nouvelle.
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Insomniaque depuis la plus tendre enfance, la lecture me soutenait jusqu'à des trois heures du matin. Si j'étais en train de lire, la plus belle fille du monde pouvait croiser ma route, je ne levais pas mes yeux.
J'étais absent au monde pour cause de lecture. Je lisais d'ailleurs n'importe quoi. L'enchaînement magique des mots, même s'il était imparfait, médiocre ou vulgaire, ce dont parfois j'avais l'intuition, me tenait lieu de tout bonheur.
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Je me persuadai que, tout ordinaire qu’elle fut, cette madame G. détenait en elle seule l’ensemble du secret féminin. Le plus grand secret du monde pour moi, alors, et le plus captivant. Un secret dont je savais que je ne me ferais pas une place dans la société si je ne le pénétrais pas ou, tout au moins, si je ne faisais pas semblant de le connaître et d’en participer. Un secret auquel j’avais l’intuition que, par grossièreté, par crainte atavique, peur du ridicule, fatuité ou suffisance, la quasi-totalité de mes aînés, mon père que je vénérais y compris, n’aurait jamais accès et que l’élite des hommes se recruterait seulement parmi ceux qui le comprendraient. (...)
Qu’y avait-il derrière cette activité de brave femme de ménage occupant ses loisirs à de nouveaux travaux ? Percer son secret, même s’il ne contenait rien, me paraissait essentiel.
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Lorsque la naine quittant la pénombre de la boutique s'engageait sous les érables, c'étaient les gradins d'une arène sauvage qui la guettaient. Mesurer quatre-vingt-huit centimètres de haut, en dépit de l'habitude qu'on en avait, et de surcroît traîner dans son histoire tant de morts par accident, cela n'était indifférent à personne. Ça alarmait. On faisait en sorte de la cacher aux femmes enceintes, aux mariées de fraîche date. On interdisait aux écoliers de croire que parce qu'elle était de leur taille et qu'elle portait un tablier et un nœud dans ses cheveux, elle était semblable à eux. On n'y avait pas grand mal d'ailleurs. Sa grosse tête effrayait les enfants.
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Après avoir vu en fleur ces aspidistras alors que pourtant, sur la place, ils étaient toujours parfaitement verts et stériles, j'étais prêt à croire n'importe quoi.
L'effroi permanent devint mon partage. Mais j'avais quatorze ans et le vol d'une mouche suffisait à m'émerveiller.
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