Architectures fantastiques

Dans une ville froide et stérile, une fillette cherche désespérément une courbe, de la couleur, un grain de folie. Soudain, voilà qu'une rêverie la fait glisser dans de surprenants décors faits de faïences, verreries, métaux tordus, granit sculpté et autres débris patiemment assemblés. Chatoyantes ou ondulantes, bizarroïdes ou excentriques, labyrinthiques ou dépouillées, ces architectures ravissent la rétine et mettent en branle l'imagination…

Il y a quelque chose d'enfantin dans le jardin des Tarots de Niki de Saint Phalle, le parc Güell d'Antoni Gaudi ou les tunnels de Joseph Williamson. C'est idée fabuleuse de faire découvrir aux plus jeunes ces oeuvres, ainsi qu'une quinzaine d'autres !

Mais je trouve dommage que le fil conducteur ne soit pas plus fort : la petite fille chemine d'une architecture à l'autre comme dans une sorte de rêve éveillé dont on ignore les tenants et aboutissants (extraits disponibles via le lien ci-dessous). C'est sans doute moi qui ne suis pas très versée dans les lectures contemplatives (sans doute d'autres se laisseront-ils simplement porter par les merveilles qui peuplent ces pages) mais il me semble qu'un album un peu long comme celui-ci demande un peu de tension narrative ce qui aurait pu être fait par exemple par le biais d'une quête (comme dans Jeu de piste à Volubilis de Max Ducos) ou d'un concours (comme dans le concours de cabanes de Camille Garoche).

Ou alors, il faudrait lire ces pages comme un documentaire mais dans ce cas, le traitement de chaque architecture est un peu léger. Par exemple, une voix mystérieuse demande à la protagoniste, à propos de Niki de Saint Phalle : « Sais-tu, Enfant, pourquoi cette artiste aux mille facettes a créé cet endroit enchanté ? Sais-tu que nos habits de lumière ont chassé ses cauchemars ? Sais-tu qu'elle a vécu ici quelque temps ? » On n'en saura pas plus, le texte se borne souvent à souligner ce que montrent déjà les illustrations.

Il y a, en tout cas, là matière à donner envie d'en savoir plus sur les différents artistes abordés. Et une belle invitation à laisser libre cours à sa propre créativité.
Lien : https://ileauxtresors.blog/2..

L'imaginaire a t-il sa place dans le paysage urbain?

On le comprendra avec l'histoire du monde et des hommes à présent, les monuments étaient des repères dans l'espace et le temps, de grands pics qui devaient donner du sens, une marche à suivre, par exemple l'église indiquait la place du village et de l'activité commerciale d'un bourg, l'Arc du Triomphe de Paris* pour autre exemple, marquait la mémoire universelle et française, le souvenir des soldats courageux qui ont sacrifié leur vie tandis que les tombes nous rappelleront qu'ils sont morts..."
Pour mémo, allo Wiki?
"...Monument parisien connu dans le monde entier, l'Arc de Triomphe, est construit à la demande de l'empereur Napoléon Ier après la bataille d'Austerlitz pour rendre hommage aux soldats de la Grande armée... "
https://www.laflammesouslarcdetriomphe.org/#:~:text=Monument%20parisien%20connu%20dans%20le,soldats%20de%20la%20Grande%20arm%C3%A9e.

Plantés dans le paysage, ces créations pouvaient aussi rappeler au présent et ordonner des comportements sociaux recommandés : se rappeler qui les avait érigé et imprimer un devoir de respect, qui avaient de l'argent et pouvaient aider les autres (sous contrepartie), qui étaient plus honorables et pieux. Certe impressionnants ou jolis, ils pouvaient être des cadeaux au fort message de propagande pour rappeler à une société quel pouvoir permettait de la maintenir hors de l'eau comme un bateau en pleine tempête ( je vous l'offre cette merveille pour que l'histoire se souvienne de moi ).

Et, figurez-vous jeunes gens, que peu à peu, l'Art va cesser d'être détourné et la "beauté" prise en otage pour convaincre, l'Art va pouvoir exister pour lui-même, pour le beau et le talent (plus que le décoratif), il aura aussi un message, mais qui ne demandera aucune adhésion et vantera du savoir-faire et de la créativité à portée de tous. Un biais plus populaire.

"Architectures fantastiques" de Nancy Guilbert et Patricia Bolaños glissera cette pensée vive chez les jeunes lecteurs : L'Art n'appartient pas seul aux musées, la fantaisie aux livres et aux parcs d'attraction.
L'architecture et la sculpture posera donc l'utile de côté pour n'embarquer ici que sur du plaisir, de profiter, de contempler, d'être inspirer.
Dans l'aventure, une petite fille se demandera un peu où peut bien se cacher la petite "folie" dans les règles esthétiques du paysage urbain si rigide et ordonné (à comprendre : cet autre usage existe t-il seulement?) ?
Dans le souci d'harmoniser, peut-on imaginer alors tout construire et construire n'importe où?
(non, nous le savons devant l'exemple des voies " Hausmaniennes" de Paris).
Cela résultera d'une décision municipale, nous les grands, le savons, en France en tous cas, ou bien d'une volonté politique d'éclaircir la vue pour le bien commun et sur des raisons de sécurité aussi ( nous ne voudrions pas que la belle construction nous tombe sur la tête, n'est-ce pas?).

Rentrons dans le livre!
Le documentaire invitera sans doute indirectement les jeunes lecteurs à aller observer sur des photos dans les livres de référence ou le net ses bizarres constructions.
Il ne faudra pas, au contraire hésiter à aller vérifier que ces drôles de monuments atypiques existent bel et bien, pour les repérer dans le monde et nous inspirer d'un "whaou! Je n'aurais pas cru ce genre d'audace possible et autorisée dans le paysage urbain !".
Les 17 cônes d'acier des Watt Towers, le parc presque de bonbons pailletés et de grottes en pierre cyclopéenne de Gaudi, la construction bizarre de métal et de tuyaux de Jean Tinguely "le cyclope de la forêt", le jardin fantaisie de Nicki de Saint phalle, la Porte des enfers de Bomarzo, le dédale de Joseph Williamson ou le nid-cabane de Terunobu Fukimori.
Le style graphique de l'illustratrice Patricia Bolanos rendra l'exploration plus enfantine et forcément surréaliste.
Justement, à nos livres et vérifions !
Un documentaire et un inventaire intéressant pour amener les plus jeunes à ce constat là, que le fantastique n'aura pas pignon sur rue que dans les parcs d'attraction.