Deux jeunes gens sont assis sur le banc des accusés : Thomas Baldini, luthier, et Arjuna Bahabur, étudiant en médecine. Amis depuis l'enfance, chacun s'accuse, dans des versions contradictoires, d'avoir tué le même homme, Haïssam Medhi, étudiant en mathématiques, lui-même meurtrier de sa fiancée, la violoniste Aïcha.
Crime passionnel ? Vengeance ? Ou tout autre chose ? Qui est le véritable meurtrier ? Pourquoi Haïssam Medhi avait-il tué Aïcha ? Qui était-elle, cette mystérieuse Aïcha, femme-enfant et musicienne exceptionnellement douée autour de laquelle le drame s'est noué ? Qui l'a aimée, et qu'est-ce vraiment, pour un homme, que l'amour ? Quant à la vérité, pour dire le monde et le comprendre, est-elle évidente et unique ou au contraire plurielle et ambiguë ?
Au procès, les juges et les jurés s'interrogent, les journalistes se perdent en conjectures. Islam traditionnel contre soufisme, essence divine de la musique ou appel diabolique à la sensualité et la débauche ; les mobiles sont confus, le débat est complexe, la dialectique s'invite au procès, Averroès, Aristote et Thomas d'Aquin sont cités à comparaître, rien n'est clair et tout est paradoxe.
Mais lorsque la justice est enfin rendue, condamnant pour meurtre l'un des accusés, innocentant l'autre, nous n'en sommes qu'à la moitié du roman. Et pour celui qui a été innocenté, “acquitté au bénéfice du doute”, commence une nouvelle histoire, un autre récit qui dévoilera, au fil des pages, une tout autre vérité. Se posera alors une nouvelle question : comment vivre et que faire avec la culpabilité, la peur et l'impossible réparation lorsque la justice a condamné l'innocent, libéré l'assassin, et que sur soi a été lancée une fatwa destinée à substituer le châtiment de Dieu, via le bras armé de ses “fidèles”, à la justice défaillante des hommes...
Avec ce polar atypique, Patrice Heffner, lui-même avocat au barreau de Paris, échafaude une intrigue aux fils savamment entremêlés qui entretient jusqu'au bout le suspense et interroge le lecteur sur les conséquences auxquelles peut conduire “ce vieux conflit, toujours le même, jamais résolu (...) entre la foi et la raison”, sur la place du religieux dans la société laïque, rationnelle et scientifique d'aujourd'hui, sur les outils conceptuels à notre disposition pour questionner ce monde, autant que sur les drames intimes de la passion, de l'erreur - humaine et judiciaire -, de la culpabilité et de la rédemption.
Un polar rondement mené et un roman intelligent, érudit et tout en nuances, avec lequel j'ai passé un bon moment.
Commenter  J’apprécie         412
Le violon, l'amitié, l'amour, l'Inde, une jeune fille de rêve, tous ses ingrédients donnent un livre merveilleux
gros coup de coeur
Commenter  J’apprécie         20
C'est difficile l'amour. C'est formidable, c'est comme la vie. C'est-à-dire terrible, terrible avec sa soeur jumelle la souffrance. On ne comprend rien à l'amour. C'est cela qu'exprime la musique. La musique commence là où les paroles sont impuissantes. C'est pour cela que la musique constitue le lien direct avec le ciel. C'est comme la corde d'un instrument que seul Dieu peut comprendre, comme seule une mère comprend ce que son enfant est incapable d'exprimer.
Elle était la vie, elle était la joie. Elle riait et le violon riait. Voilà ce qu'il avait tué, Medhi. C'était bien un criminel au sens propre du terme. Il avait mis fin à la vie d'un être divin, un enfant chéri de Dieu, sûrement…
Je ne suis pas venu ici défendre mon fils. S'il est coupable des faits dont on l'accuse, j'aurai honte aussi, car nous avons appris chez nous à être responsables de nos actes, même de ceux qui nous échappent, même plus encore , car les actes qui nous échappent nous révèlent à nous-mêmes.
http://www.editions-harmattan.fr/index.asp?navig=catalogue&obj=livre&no=59730
ARJUNA
Roman
Patrice Haffner
« Elle était la vie, elle était la joie. Elle riait et le violon riait. Voilà ce qu'il avait tué, Medhi. C'était bien un criminel au sens propre du terme. Il avait mis fin à la vie d'un être divin, un enfant chéri de Dieu, sûrement? » Au travers d'une histoire prenante ou s'entremêlent les passions, le sentiment religieux mais d'abord l'amour de la musique, l'auteur tente de répondre à la question d'un père « Quel est le problème qui dresse nos fils les uns contre les autres, envoie nos enfants se faire sauter avec des explosifs, et pousse les femmes à s'armer et à tuer ? »
Patrice Haffner est avocat honoraire au barreau de Paris, ancien secrétaire de la Conférence, ancien membre du Comité français près la Cour internationale d'arbitrage, et n'en est pas à son premier roman chez L Harmattan.
Broché - format : 13,5 x 21,5 cm
ISBN : 978-2-343-14794-9 ? 15 mai 2018 ? 242 pages
+ Lire la suite