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EAN : 9782072873133
Gallimard (03/02/2022)
4.17/5   9 notes
Résumé :
« Les Islandais avaient beau habiter depuis mille ans un des endroits les plus neigeux du monde, ils continuaient à espérer que cet épais manteau n’était qu’un phénomène passager et n’avaient jamais conçu des outils efficaces pour lutter contre la neige. C’est un exemple criant de l’infatigable optimisme de notre nation. Elle se contente d’affronter une tempête à la fois et imagine toujours que le temps finira par se lever. »

Eilífur Guðmundsson rentr... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (6) Voir plus Ajouter une critique
De formation artistique et d'abord connu pour ses peintures et ses dessins, Hallgrimur Helgason est devenu une grande voix de la littérature islandaise, à l'ironie caractéristique. Avec ce premier tome d'une trilogie explorant les transformations de l'Islande depuis son émergence d'un quasi Moyen Age au tournant du XXe siècle, il entame une vaste fresque digne des grandes sagas islandaises.


L'Islande ne serait pas devenue la nation d'aujourd'hui sans cette manne providentielle que fut le hareng et ses grands bancs appréciant ses eaux froides. Pourtant, tout entiers tournés vers la pêche au requin, dont, considérant sa chair toxique, ils se contentaient de prélever le foie pour le précieux combustible que son huile fournissait au monde, ses habitants dédaignèrent longtemps ce qu'ils considéraient un « poisson de malheur », lui préférant les sombres et visqueuses soupes de lichens, bien insuffisantes face aux habituelles disettes.


En cette fin de XIXe siècle, la vie en Islande est restée cadenassée à l'âge de pierre. Sans routes et cernée par des eaux tempétueuses prises par l'embâcle une bonne partie de l'année, cette terre inaccessible et enclavée par des reliefs abrupts, torturée par le froid et les intempéries incessantes, plus souvent caressée par l'obscurité que par la lumière du jour, n'est encore qu'un monde « figé depuis mille ans », ne connaissant ni roue, ni argent, ni allumette, où « les tâches saisonnières forment les maillons fixes d'une chaîne immuable », « chaque journée de travail [...] la suite logique de la veille et le prélude au lendemain. »


Lorsque, épuisé, le fermier Eilifur Gudmundsson rentre chez lui avec les trois kilos de farine qui lui a fallu aller quérir à plusieurs jours de marche dans la neige et la tempête pour sauver sa famille de la famine, sa maison de tourbe au toit herbu a disparu, avalée avec ses habitants par l'une de ces avalanches dont la fréquence fait dormir les gens encordés les uns aux autres. Protégée par une poutre, seule la vache a survécu et, avec elle et son lait, le dernier né, Gestur, un petit garçon de deux ans. Ainsi commence le récit d'apprentissage d'un enfant qui connaîtra trois vies au gré des aléas qui continueront à s'enchaîner, et, à travers lui et une myriade de personnages hauts en couleur, aux corps tordus comme des clous et aux trognes avinées, mais héroïquement accrochés aux merveilles d'humanité cachées sous la misère, la crasse et les vieilles croyances, l'épopée picaresque d'un bout de terre oublié, soudain transformé en « Klondyke » lorsque les Norvégiens viennent y pêcher massivement le hareng.


Son ironie caustique fait tout le sel de cette fresque pittoresque et attachante, où les âpres beautés de l'Islande n'ont d'égale que la vaillance de ses habitants, des « crétins » archaïques, impressionnants d'énergie et désarmants de poésie, sautant tardivement du servage moyenâgeux au capitalisme moderne. Captivé tout au long de ses près de six cents pages, l'on referme ce drôle et formidable roman avec une hâte : que la traduction française du deuxième tome déjà paru en islandais soit au plus vite disponible. Coup de coeur.

Lien : https://leslecturesdecanneti..
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Style bien particulier, pour un pays bien particulier.
L'Islande littéralement « pays de glace », territoire hostile se peuple, tout d'abord, au IX-Xème siècle par des colons norvégiens fuyant des conflits nationaux, des chefs de clans créent une assemblée, l'Althing, le plus vieux parlement du monde. Au XIIIème siècle (1262), l'île devient une colonie du Royaume de Norvège.
En 1536, l'Islande passe sous domination du Danemark qui s'empare du commerce local.
le pays glisse peu à peu vers la pauvreté (XVIIIème siècle) suite à de nombreuses catastrophes naturelles et des tentatives de développement économique qui avortent les unes après les autres.
Hallgrimur Helgason, dans son roman « Soixante kilos de soleil », nous emmène dans un fjord de la côté nord : le Segulfjördur (fjord de l'Aimant) et nous narre l'existence de quasi-bête de la population de ce golfe, regroupée en petits villages mais parfois en fermes isolées vue la faible densité.
Lorsque l'on aborde ce roman, il faut faire abstraction des noms islandais patronymes ou lieux géographiques, l'accoutumance vient au fur et à mesure des pages comme le font les corps au froid local.
Notre auteur affirme qu'il faut, pour être apprécié de ses congénères, être un bon conteur et Hallgrimur n'a pas de souci à se faire de se côté. Dans un style bien à lui, mélange de descriptions très imagées et d'humour caustique avec des passages de pure poésie, il nous attache, rapidement, à ce petit peuple de pauvres paysans, qui vivent d'un maigre troupeau et du troc des bonnets, gants, écharpes qu'ils tricotent au magasin (tenu par un danois) contre des denrées. « La plus grande partie de cette classe sociale possède le statut de domestique, les ouvriers avaient l'obligation de s'attacher à une exploitation agricole en une forme de servitude baptisé servage sous contrat. Il était interdit à ces domestiques soumis par leurs maîtres à une discipline de fer de se marier ou d'avoir des enfants ». Ces serfs islandais percevaient, cependant, un salaire ce qui permettait d'économiser pour s'offrir trois agneaux et un toit et en cette fin de XIXème siècle, avec l'assouplissement de la législation, de devenir paysan propriétaire et de fonder famille.
le seul bois disponible était le bois flotté de récupération utilisé pour la construction de frêles embarcations, pour les habitations on utilisait la tourbe, faute d'arbres, qui de plus s'avérait un très bon isolant. Quelques téméraires, s'essayaient à la pêche au requin au péril de leur vie.
Nous suivrons avec un intérêt particulier, Gestur l'enfant aux trois pères que l'on retrouve en fil rouge de cette histoire mais aussi Lasi, son troisième père, paysan-menuisier-poète, les différents pasteurs dont Arni, le dernier en date, féru de musique et de chants traditionnels (on ressent l'importance des us et coutumes pour ce peuple) et sa jolie épouse Vigdis et sa non moins belle dame de compagnie Susanna. Mais on retiendra, également, ce florilège de portraits parfois sombres, parfois attendrissants des habitant de ce fjord.
Quand, en ces premières années du XXème siècle, les norvégiens débarquent de nouveau et décident de construire une usine de salage de harengs dans le Segulfjördur, promesse d'un futur prometteur ou simple invasion ? Toutes les tranquilles habitudes s'en trouvent ébranlées.
En conclusion, le livre d'Hallgrimur Helgason nous aide à mieux comprendre le caractère des islandais fiers de leur nation, de leurs traditions, résilients, résistants. Ce récit du quotidien de la population microcosmique du fjord de Segulfjördur à l'entre-deux siècles nous émeut sous la plume éclairée de l'auteur.
Merci aux Editions Gallimard pour cette belle découverte.
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Islande. Lorsque Eilífur et son petit garçon Gestur rentrent chez eux, c'est un drame qu'ils vont découvrir. Leur maison a été ensevelie sous la glace, et sa femme et sa fille sont décédées. Pour Eilífur va alors commencer un long deuil mais également un long combat pour offrir le meilleur à Gestur.

C'est un tout petit résumé que je vous livre ici à dessein, tant le roman est dense et empli d'événements. Je peux juste vous dire que nous suivront principalement Gestur dans ce roman d'apprentissage. J'ai vraiment beaucoup aimé ce roman dépaysant, permettant au lecteur d'avoir une véritable vue d'ensemble sur l'Islande.

L'auteur va donc ainsi nous parler des traditions mais également du caractère des islandais. J'ai trouvé cela très intéressant, et les passages parlant du pays s'emmêlent parfaitement à ceux parlant des personnages forts et hauts en couleur qu'a su créer l'auteur.

Le petit Gestur va devoir apprendre à se construire, suite à un énorme drame survenant dans sa famille. Il va devoir s'adapter à plusieurs nouvelles situations, et je l'ai trouvé empli de courage.

La plume de l'auteur est très fluide. J'ai beaucoup aimé suivre les aventures des divers personnages, mais également les références à l'Islande, que j'ai trouvées très intéressantes. Ce roman est assez dense, et pourtant, les pages défilent rapidement.

Un roman qui attrape son lecteur dès les premières pages, et qui lui offre une multitude de détails qui le dépayseront. Une réussite.
Lien : https://mavoixauchapitre.hom..
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A la veille de Noël, le paysan Eilifur Gudmundsson revient chez lui, dans un fjord de la côte nord de l'Islande, Segulfjördur, après plusieurs jours de marche sous la neige, le sac lesté de trois kilos de farine. Mais sa maison a disparu et ses habitants ont été engloutis sous une avalanche. Un meuglement l'avertit toutefois qu'il y a une survivante, sa vache. Dessous, son petit Gestur, âgé de 2 ans. Sa femme et sa fille sont mortes.
Nous allons suivre le destin d'Eilifur et de Gestur, et celui de l'Islande d'une certaine manière, au tournant du XX°siècle.
Les paysans islandais vivent alors dans des fermes en tourbe, adossées à la colline, l'ensemble de la maisonnée résidant dans une seule pièce commune, obscure, éclairée par une ouverture tapissée d'un placenta de brebis. On entre dans cette maison par un couloir bas, sorte de tunnel, destiné à isoler la maison des éléments hostiles. Seuls les notables : le marchand, qui a le monopole du commerce, le pasteur et le médecin, vivent dans des maisons en bois ou pierre. Faute d'arbres, le bois est rare et très cher. le seul bois disponible était le bois flotté de récupération.
Les paysans vivent de l'élevage des moutons, de la pêche au requin, dont ils n'utilisent que le foie pour confectionner de l'huile.
Leur monde va changer en raison notamment de l'arrivée de marins norvégiens qui vont les initier à la pêche au hareng, à sa capture et à son salage. Les hommes et les femmes vont brutalement passer dans un monde marchand à l'opposé de leur monde ancien, où l'on pratiquait encore le troc, où l'attachement des domestiques à leurs maîtres (misérables également), des paysans à leurs terres, était proche du servage.
Très belle « saga », tous les personnages sont attachants, très vivants, l'auteur fait preuve aussi d'un humour caustique vis-à-vis des travers de ses compatriotes de l'époque, qu'il épingle, tout en écrivant des passages très poétiques, à l'image des poèmes et chants islandais.
Ce roman, passionnant, est le premier d'une trilogie romanesque retraçant en pointillé l'histoire islandaise.
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Naissance d'une nation, de sa modernité, de la conscience éperdue de ses seuils, de la misère de sa condition paysanne, immuable et comme à l'écart de l'idée du progrès, de la forme nouvelle, romanesque --- ironique et picaresque --- à trouver aux récits et veillés une façon autre de construire une société nouvelle, une autre forme d'exploitation. Hallgrímur Helgason emporte le lecteur dans le basculement du XX siècle, dans l'adieu à une société rurale et recluse par la description du destin, souvent très drôle autant que cruel, de Gestur et de sa découverte d'un monde en plein changement. Outre son aspect historique, Soixante kilos de soleil charme par son humour, ses situations cocasses et tragiques, pour si bien faire entendre le déchirement d'une modernité sans cesse à interroger.
Lien : https://viduite.wordpress.co..
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critiques presse (4)
Culturebox
08 avril 2024
L'écrivain islandais signe une fresque historique bouleversante avec "Soixante kilos de soleil", une oeuvre poétique puissante et généreuse. Épique.
Lire la critique sur le site : Culturebox
LeDevoir
19 février 2024
Avec un souffle qui relève de l’épopée, alors que chaque temps mort de Soixante kilos de soleil semble être comblé par l’écriture, Hallgrímur Helgason, 64 ans, plonge dans le folklore de son pays pour échafauder sous nos yeux une fresque vibrante aux accents rabelaisiens, sertie d’humanité, d’un peu de réalisme magique et d’un irrésistible humour permanent — c’est aussi là que se trouve le soleil.
Lire la critique sur le site : LeDevoir
LeFigaro
16 février 2024
Sur fond de roman de formation, une évocation haute en couleur de l'Islande.
Lire la critique sur le site : LeFigaro
LeMonde
29 janvier 2024
Le romancier islandais rappelle l’ouverture de son île au monde, fin XIXᵉ siècle, grâce à la pêche au hareng, dans une fresque attachante et drôle.
Lire la critique sur le site : LeMonde
Citations et extraits (23) Voir plus Ajouter une citation
Des coups de marteau résonnant dans la quiétude d'un fjord : peu de choses sont aussi belles en ce monde. Ici, quelqu'un fixe sa vie avec des clous ! Quelqu'un a foi en cet endroit ! Le soleil scintille sur la blancheur des planches, l'oiseau se balance sur les eaux tranquilles du Pollur et l'été bêle sur chaque versant. P. 153
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Quand les vents frais arrivés du sud traversaient l'île, ils gagnaient quelques degrés et redescendaient des hautes terres désertes aussi tièdes que s'ils sortaient d'un four. Les gens venus d'ailleurs s'étonnaient toujours du phénomène étant donné que la règle générale voulait que les vents islandais soient froids ; il n'était donc pas rare qu'on aperçoive des visiteurs ahuris qui, debout dans les prés, faisaient sécher à la brise du sud leur âme détrempée.
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En Islande, le monde du travail était figé depuis mille ans. Les tâches saisonnières formaient les maillons fixes d’une chaîne immuable : agnelage, sevrage, transhumance, fenaison, abattage, semaines passées à tricoter, campagne de pêche hivernale, campagne de printemps… Chaque journée de travail était la suite logique de la veille et le prélude au lendemain. Grâce à leur labeur, les gens avançaient d’un cran sur la chaîne, sans toutefois jamais la quitter pour se retrouver ailleurs. Le progrès était inconnu. On ne trimait jamais pour amasser, mais seulement pour avoir le droit de continuer à s’épuiser à la même besogne. L’avenir n’était porteur d’aucun espoir, d’aucun rêve, d’aucune impatience, il n’était que l’exacte réplique du passé, ce qui cadenassait la vie en Islande.
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Au commencement, il y avait la page vierge, le papier vide et blanc, dénué de taches sombres, sans le moindre point ou virgule. Le fjord se résumait à un manteau immaculé à perte de vue depuis la cascade la plus enfoncée à l'intérieur des terres jusqu'à l'océan, et l'on n'avait aucun moyen de distinguer sous cette immensité ce qui était la mer de ce qui était la terre. La neige avait effacé toute trace de l'homme sur ces lieux qui s'offraient au ciel boréal, aussi intouchés que le jour où on les avait colonisés, il y avait 999 ans.
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Cette pratique était l’avortement du temps jadis, les enfants qui n’étaient pas les bienvenus étaient exposés, on les confiait aux soins du Bon Dieu et des éléments, on les précipitait dans une chute d’eau ou dans une crevasse. Comme personne n’avait le courage de les tuer, et comme il n’existait pas de bourreaux d’enfants en activité sur la terre d’Islande, la tâche revenait aux mères dont beaucoup perdaient la raison après avoir jeté leur nouveau-né du haut d’une falaise. C’était pourtant ce qu’on attendait d’elles et les motivations de ces exécutions étaient le plus souvent de nature morale, l’enfant n’avait pas de père, il était né d’un propriétaire terrien et d’une fille de ferme, il était le fruit d’un viol ou d’un moment de folie le temps d’une lumineuse nuit d’été. Mais parfois, le motif était également économique, la pauvreté était telle qu’elle ne tolérait pas l’arrivée d’une bouche supplémentaire.
Oui, c’était incroyable, Rögnvaldur Sumarsól avait été un de ces enfants. À ses dires, on l’avait abandonné dans la nature. D’une manière ou d’une autre (on se demande comment ?!), il avait été sauvé et, depuis, il avait passé sa vie exposé aux éléments, c’était dehors qu’il avait cheminé, dehors qu’il avait arpenté versants et vallées telle une incarnation, un porte-parole de cette cohorte invisible, de cette partie silencieuse de la nation, peut-être seul survivant parmi les milliers de nouveau-nés qui avaient hurlé au fond des crevasses et des précipices d’Islande, ce pays si cruel avec ses habitants qu’il en réclamait un dixième : un enfant sur dix devait lui être sacrifié.
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