Publié dans les années 30,
le Meilleur des Mondes dépeint un monde normalisé où chacun est à sa place, où tout est ordonné pour border une prétendue stabilité sociale. Rien n'est trop bon pour maîtriser les émotions : drogue, lavage de cerveau, conditionnement social... Depuis leur naissance dans des flacons, jusqu'à leur disparition et leur recyclage en phosphore, les êtres humains sont devenus des copies conformes et sont heureux de l'être.
Voilà un monde très étrange que nous décrit
Aldous Huxley dans ce roman. Difficile d'arriver à comprendre ce monde nouveau, conditionné pour mener une vie "parfaite", sans maladie, sans émotions, sans attaches... Difficile de se sentir proche de ce monde effrayant, et pourtant... certains de ses aspects nous rappelle parfois à notre quotidien et nous fait prendre conscience que la fiction n'est pas complétement dénué de réalisme.
Les personnages sont pareils à des robots, répétant bêtement les phrases toutes faîtes répétés en boucle depuis l'enfance. Il n'y a plus aucune individualité, et l'esprit du corps social est formaté de la même manière. Chacun sa caste, chacun un destin tout tracé... Un futur qui parait effrayant, angoissant. L'être humain peut-il se diriger vers un tel extrême ?
Au milieu de cette foule quasi non-pensante, un homme fait figure de "Sauvage" car
il est né d'un homme et d'une femme, et qu'il a connu l'existence dans sa plus pure réalité. Cet homme se gorge de la poésie de
Shakespeare, des émotions de l'écriture, des pensées divines... et se retrouve au milieu d'un monde aseptisé à tout point de vue, dans lequel
il est incapable de trouver sa place. Il fait figure de curiosité, de bête de foire. L'introduction du personnage de John, le "Sauvage", n'est pas sans rappeler le
Candide de
Voltaire. La remise en question de la société "normalisée" devient alors beaucoup plus forte au travers des yeux de cet étranger, et le fossé se dessine un peu plus à chaque page.
Ce roman interroge et semble ouvrir une porte inquiétante sur ce que le futur pourrait réserver à une humanité qui se déshumanise peu à peu. Les progrès de la science, l'industrie... Dans
le Meilleur des Mondes, ces aspects ont fini par vider les humains de toute substance. J'ai apprécié la manière qu'a eu l'auteur d'interroger sur le futur en dépeignant une société épouvantablement désincarnée, et qui pourtant se trouve des justifications parfaites et se satisfait de son état.
Je ne m'attendais pas vraiment à cela en m'attaquant à ce roman. Je le pensais plus "démonstratif", montrant encore plus d'exemples concrets sur ce nouveau monde. le récit possède des longueurs, des passages un peu plus philosophiques notamment sur la fin, sur les questions de Dieu et de conditionnement. Ces passages sont intéressants, bien qu'ils tendent à traîner un peu. Mais après tout, ce roman n'est pas fait pour divertir, mais pour donner matière à réfléchir.
Il est empreint de théories sociales et de questionnement de la société.
En refermant le livre, je me suis posée la question : plus de 80 ans après la publication du
Meilleur des Mondes, que pourrait bien écrire Aldous Huxlex en voyant notre société d'aujourd'hui ?