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EAN : 9782315008117
Max Milo (11/10/2018)
4.5/5   4 notes
Résumé :
La notion de race fait un retour violent dans le langage et les conflits sociaux en France, comme si le sujet avait été refoulé. Les minorités visibles n’hésitent plus à revendiquer leur couleur ou leur identité racisée.
L’historienne africaine-américaine, Nell Irvin Painter, adopte un point de vue révolutionnaire : au lieu d’étudier la négritude, elle interroge la construction de la notion de race blanche, depuis les Scythes de l’Antiquité jusqu’aux catégori... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
Essai de Nell Irvin Painter, chercheuse universitaire américaine sur le sujet.

Le livre commence bien avant les constructions modernes des "races", si ce n'est que pour expliquer en quoi les discriminations différaient d'aujourd'hui. On commence donc avec les Grecs et leurs "barbares", puis on se lance dans les mémoires de Jules César. La façon paradoxale dont les Gaulois sont décrits par César est l'une des premières itérations d'un paradoxe qui dure jusqu'à aujourd'hui, utilisé par les démagogues de toute sorte :

Les Gaulois sont décrits comme à la fois plus forts et plus nombreux que les Romains. C'est nécessaire pour que les Romains ressentent la menace. C'est encore plus nécessaire pour le leader qui veut montrer qu'il est un génie militaire. Il n'y aurait pas de gloire à vaincre un ennemi plus faible.

Mais le gaulois est aussi faible, il a besoin de la force romaine pour se civiliser, pour lui donner une chance de survivre à un monde difficile. Parce qu'il faut bien justifier de lui faire la guerre portée par de bonnes raisons, au final.

Puis l'essai arrive au coeur du sujet : la modernité, le colonialisme et l'esclavage. Ils viennent d'où, tous ces termes utilisés pour parler des Blancs, Caucasiens, Aryens, etc.?

Réponse : Ils ont tous des origines complètement débiles, qui ont été repris comme étant quasi scientifiques par des gens voulant désespérément justifier les pouvoirs européens, et leur droit de faire tant de victimes.

Caucasien, par exemple? Beaucoup de servantes européennes étaient des esclaves arrachées du Caucase. Leurs maitres aimaient les dominer : être violée faisait partie de la description de tâche. Au point où l'idée est venue que ces femmes étaient idéales, soumises, belles, toujours à leur disposition. En d'autres mots : meilleures que les femmes européennes. La Caucasienne est donc devenue une façon de désigner la femme idéale, la femme supérieure et voilà, quelques siècles de glissement sémantique et on se dit : "la race supérieure, c'est nous! Donc nous sommes caucasiens!"

Bref, je ne résume ici que quelques chapitres qui m'ont particulièrement marqué, mais j'en conseille vivement la lecture.

Le seul point négatif, c'est que le livre se concentre sur la perspective anglaise-américaine-allemande. C'est comprenable pour un livre américain écrit par une chercheuse américaine. Mais je cherche depuis sa lecture (2020) un essai qui ferait un travail semblable pour la France. Parce que la conception de la "blanchitude" expliquée ici finit par être : Ce qui est au nord du Rhin. (Qui, donc, n'est pas catholique et n'a jamais été romanisé.) Encore : Très intéressant d'un point de vue allemand ou anglais.

Mais bon, ne faisons pas comme si le racisme "scientifique", la phrénologie, l'eugénisme et tout le reste du coffre à outils des suprématistes blancs n'ont pas été tout aussi populaires en France, Belgique et compagnie. J'aimerais lire cette histoire aussi.

(Si vous connaissez des livres sur le sujet, je suis preneur.)
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Merci à Masse Critique de m'avoir fait découvrir ce livre, une source inépuisable de réflexion sur l'Amérique d'aujourd'hui ! Dense, riche et mettant en perspective beaucoup de faits et de concepts, ce livre est indispensable si on veut avoir une idée juste des Américains.
L'auteur, professeur d'histoire à l'université de Princeton et spécialiste de l'histoire du Sud des Etats-Unis, souligne dans l'introduction qu'elle aurait pu intituler ce livre « Les Blancs d'Amérique : comment, de l'Antiquité à nos jours, s'est construite cette notion ».
L'antiquité où les premières divisions entre « races » furent établies. le caractère dépendait alors du lieu de vie ; un endroit connaissant plusieurs saisons très marquées engendrait des peuples plus sauvages et plus impulsifs.
Plus tard, avec César et les Romains, la politique et la guerre définissent les identités nationales. Les Gaulois, comme les Indiens Pontiac, Sitting Bull et Geronimo plus tard, sont peut-être pleins de vaillance mais sont condamnés à être vaincus.
Les Germains commencent à cette époque à être glorifiés : refusant la civilisation, gardant un caractère barbare, ces hommes conservent leur virilité et leur esprit guerrier, contrairement aux Romains. En effet leur société vivant en paix, les hommes feraient preuve de faiblesse et de décadence. Ils seraient plus efféminés.
Cet esprit de liberté inhérent aux blancs est mis à mal par l'histoire et les périodes, nombreuses, de traite des blancs, par les Vikings, les italiens, les ottomans … jusqu'à la déportation des enfants sans foyer ou des serviteurs sous contrat par les britanniques vers leurs colonies au XXVIIème siècle, puis des criminels vers l'Australie jusqu'au XIXème.
Ces esclaves servirent de premiers modèles à l'idéal de beauté : en effet les odalisques au XIXème siècle étaient créées grâce à des esclaves géorgiennes, caucasiennes ou circassiennes.
Mais cette beauté ne resta pas uniquement esthétique. Elle fut élevée au rang de science avec tout d'abord l'étude de copies de statues grecques, qui allaient devenir le modèle suprême de beauté. En laissant de côté un détail : les copies étaient italiennes, faites en marbre blanc … mais pas les originales grecques, qui étaient de couleur sombre.
A la beauté grecque s'ajouta la supériorité intellectuelle soulignée par Goethe, même s'il n'a jamais mis les pieds en Grèce.
Les scientifiques se mirent à collectionner les crânes et à les mesurer : l'Européen était proche du dieu grec, les Noirs proches des orang-outan.
Quant aux premiers américains, ils sont des descendants des Européens. Uniquement. Les Indiens et les Noirs sont oubliés dans cette première définition de l'Américain et les théoriciens de l'époque (notamment Crèvecoeur ou de Tocqueville) rejettent l'esclavage non pas comme quelque chose de néfaste pour les Noirs mais comme un mal affreux pour les blancs du Sud qui dominent sans peine et donc sont incités à être plus oisifs et irascibles.
L'Américain est donc jusque là un descendant d'Européens du Nord protestants. Idée renforcée par l'arrivée d'Irlandais catholiques au milieu du XIXème siècle : un race inférieure incapable de progresser pour Ralph Waldo Emerson, qui glorifiait l'héritage teutonique des américains et son caractère authentique, libre, sans mélange, viril, fort et grand … (remarque perso : tout ce qu'il n'était pas … mais ce ne fut pas le dernier à parler de critères de grandeur physique et morale qui ne correspondaient pas à la réalité !)
A la fin du XIXème, avec l'arrivée massive d'immigrants d'Europe de l'Est et du Sud et de Juifs de Russie, un élargissement du concept d'Américain fut nécessaire : oui aux Européens du Nord, en intégrant les Irlandais, mais non à ces nouvelles populations « fétides et stagnantes en Europe, ignorantes et manipulables ».
Plusieurs problèmes se posent en cette fin de siècle : tout d'abord ces nouveaux immigrants, possédants des défauts innés et permanents, idée diffusée par un magazine connaissant un très grand succès à l'époque le Saturday Evening Post, mais réfutés par d'autres, notamment Franz Boas, qui soutenait l'adaptabilité et l'évolution possible des immigrants au contact de l'environnement américain. D'où des lois imposant des quotas d'immigrants en fonction de leur pays d'origine.
Ensuite certains blancs, pourtant descendants d'européens du nord, n'entraient pas dans les cases ! Il s'agissait de vagabonds, de chasseurs, de fermiers, vivant dans la pauvreté. Mais les scientifiques trouvèrent une explication : ils étaient des descendants des serviteurs sous contrat (=esclaves blancs) et donc leur hérédité était mauvaise … La pauvreté étant héréditaire, il fallait empêcher cette marée dégénérée de se reproduire. D'où des campagnes d'éducation puis de stérilisation.
Pendant la première guerre mondiale, ce sont les Juifs qui étaient tenus responsables de tout : le communisme, le socialisme, les grêves, le bolchévisme, la guerre, … Les Italiens (tels Sacco et Venzetti) servirent également de boucs émissaires. Mais comment justifier alors la colère des ouvriers qui demandaient des augmentations de salaires, à part par la présence et l'influence malsaine d'étrangers ?
Petit à petit et notamment grâce au mélange de populations engendré par la deuxième guerre mondiale (16 millions de personnes brassées dans l'armée américaine), le concept d'Américains s'élargit encore : aux Européens du Sud et de l'Est, Mexicains mais plus difficilement encore aux Noirs et aux Asiatiques.
Le GI Bill, destiné aux vétérans, joua un grand rôle : il subventionna l'accès à l'éducation, prêta de l'argent à taux faible pour encourager l'achat d'entreprise, de commerce ou de maison, et créa une allocation chômage. Les Noirs dans le Sud en étaient bien sûr exclus.
C'est ainsi que l'on vit le développement des banlieues blanches, uniformes et la disparation du financement fédéral des centres villes (là où les Noirs étaient contraints de vivre).
On aperçoit aujourd'hui une autre manière de voir les choses : la race n'a aucune valeur scientifique, les humains sont identiques à 99.9% et on parle maintenant dans le recensement de la population américaine de groupes ethniques.
Finalement les mariages interraciaux tant redoutés ont eu lieu, de nombreux enfants en sont nés et il n'y a pas eu de décadence et de dégénérescence des Américains !
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Je lis peu d'essais mais suite à une interview télévisée de Nell Irvin Painter, j'ai eu envie de me plonger dans Histoire des Blancs. le racisme et la condition des Noirs forment un sujet qui me passionne autant qu'il me désespère. J'aime beaucoup me cultiver à ce propos. Avec cet essai très documenté, j'ai pu m'immerger dans la notion de race en Amérique – tout en faisant le pont avec l'Europe – de l'Antiquité à nos jours.

Tout d'abord, l'auteure rappelle que les esclaves des quatrième et cinquième siècles avant notre ère étaient blancs et qu'il n'y avait pas de notion de couleur et encore moins de race.

« le récit que l'on fait des Blancs ignore l'antique esclavage de l'Europe et le métissage qui en découle, ce qui conduit les lecteurs d'aujourd'hui à trouver peu vraisemblable l'idée selon laquelle des Blancs ont pu être esclaves. Mais dans ce que nous appelons maintenant l'Europe, la plupart des esclaves étaient blancs : rien là que de très banals. »

Le statut social définissait le tempérament des Hommes, les lieux d'habitation définissaient les statures et les couleurs de peau. Elle s'appuie sur des textes anciens référencés comme cet extrait de Des airs, des eaux et des lieux d'Hippocrate, grand médecin de la Grèce ancienne (qui constituait l'Europe à cette époque) :

« dans un pays âpre, sans abri tour à tour désolé par le froid et brûlé par le soleil, les habitants ont le corps sec, maigre, velu, les articulations bien prononcées ; l'activité, la pénétration, la vigilance sont inhérentes à de tels hommes ; vous les trouverez indomptables dans leurs moeurs et dans leurs appétits, fermes dans leurs résolutions, plus sauvages que civilisés, d'ailleurs plus sagaces pour l'exercice des arts, plus intelligents, plus propres au combat. »

Au temps de César non plus la notion de race n'existait pas, il soulignait « les traits des Germains en rapport avec la guerre ». Encore une fois, ce n'était pas la couleur de peau qui entrait en ligne de compte.

Nell Irvin Painter s'appuie sur de nombreux faits historiques et textes qui démontrent que la notion de race est apparue tardivement et que longtemps, c'était l'environnement, la condition physique et mentale qui catégorisaient les Hommes. L'esclavage était loin d'être réservé aux Noirs – au contraire – même si ce dernier est largement décrit et raconté en littérature alors que celui des Blancs est éclipsé. En effet, c'était « la géographie, pas la race, qui était le facteur déterminant ». de plus, depuis toujours il y eut des déplacements des peuples, des brassages des populations. Les Vikings ont largement contribué à cela et furent des « marchands d'esclaves de premier ordre ». C'est le dix-huitième siècle qui « inventa l'équivalence à laquelle nous sommes maintenant habitués : qui dit « race » dit « noir » et qui dit « noir » dit « esclave ».

Les débuts de l'attrait pour la couleur et l'apparence physique font leur apparition à partir du dix-septième siècle en rapport avec la beauté des esclaves blanches. Les géorgiennes, circassiennes et caucasiennes étaient particulièrement appréciées.

« Dans le contexte américain la notion de pureté raciale s'était clairement trouvée mêlée à celle de beauté physique. »

Au dix-huitième siècle, la blancheur prend un tournant scientifique avec les mesures crâniennes et des comparaisons entre les différents peuples qui se retrouvent classés dans un ordre sans équivoque. En effet, l'illustrateur hollandais Petrus Camper dessina un tableau dans lequel apparaissent des crânes et des visages en cinq formes et aspects différents, il commence par les singes, puis les Nègres, les Kalmouks, les Européens et un Apollon du Belvédère. « L'ordre adopté par Camper fait intervenir une ambiguïté supplémentaire, capitale ». Les anthropologues du dix-huitième siècle eurent une place déterminante dans l'apparition de la notion de race. Une sorte de « grécomanie » se répandit, l'apparence physique prit une place de plus en plus importante.

« La blanchité prend désormais place dans la classification des races réorientant le classement des hommes : on quitte le classement par zones géographiques selon Linné pour mettre l'accent sur la couleur de la peau comme facteur de beauté selon Blumenbach. Une fois qu'il avait établi le caucasien comme variété, le terme a dérivé loin de son origine géographique. »

Le terme « blanchité » est souvent utilisé par l'auteure et est ce que l'on pourrait appeler « la condition blanche ».

Un confrère de Blumenbach, Meiners, était même devenu « le précurseur favori » des nazis :

« Dans des phrases caractéristiques de la teutomanie du XIXe siècle, il écrit que les Allemands ont la peau « la plus blanche, la plus éclatante et la plus délicate », qu'ils sont « les plus grands et les plus beaux des hommes » non seulement en Europe mais dans le monde entier et ont « un sang pur » qui leur donne une supériorité physique, morale et intellectuelle sur tous les autres. »

Je pourrai encore vous écrire pléthore de citations et de faits chronologiques issus de cet essai, mais ce serait vous faire une dissertation de plusieurs pages. Je vous laisserai vous immerger dans ce livre érudit et complet si vous vous intéressez fortement au sujet. En effet, même si c'est mon cas, j'ai eu besoin de faire des pauses, de lire un roman entre deux chapitres pour alléger ma lecture. Il y a parfois un effet de répétition. L'auteure nous renvoie aux mêmes arguments mais à travers différents personnages de l'histoire par exemple. En revanche, les différentes époques se succèdent parfaitement et avec elles, l'évolution des mentalités et aussi leurs contradictions au fil des siècles. L'auteure nous détaille comment l'Homme a peu à peu focalisé sur l'apparence physique puis sur la soi-disant pureté des Blancs et comme il a de plus en plus dénigré et utilisé les Noirs et les « migrants », notamment aux États-Unis. L'aberration des Hommes m'a laissée bouche bée à de nombreuses reprises.

L'auteure ne délaisse pas pour autant les changements de mentalité au tournant du vingt-et-unième siècle :

« En 1997, l'Association américaine d'anthropologie physique a exhorté le gouvernement américain à supprimer l'utilisation de la race comme catégorie de données et à la remplacer par des catégories ethniques. Les généticiens qui ont étudié l'ADN – l'élément constitutif des gènes qui donne les instructions à notre corps en réaction à notre environnement – sont également parvenus à la conclusion que la race, en tant que catégorie biologique, n'a aucun sens. »

Et ajoute que :

« C'est cette science de la génétique moléculaire qui porta le coup le plus fatal à la théorie de la race. Avant même que la cartographie du génome humain ne fût complète, l'Association américaine pour l'avancée de la science (AAAS) avait conclu, en 1995, qu'en termes biologiques, la race n'a aucune valeur scientifique. Elle n'avait désormais d'importance qu'en tant que catégorie sociale servant à abolir des modèles discriminatoires. »

Même si cela est désormais logique pour la plupart d'entre nous, il est bon de rappeler que le terme de race n'a aucun sens, sachant qu'il est incroyable de s'apercevoir que cette « découverte » américaine ne date pas d'hier mais presque… Toutefois, en remarquant ce qu'il se passe dans le monde, force est de constater que l'argumentaire n'est pas encore désuet, malheureusement, et que le sujet mérite amplement d'être abordé encore et toujours. Je terminerai par la citation de ce paragraphe en page 364 du livre :

« En juin 2000, le président Bill Clinton, à la Maison Blanche, déclara que les Instituts nationaux de santé (organisations gouvernementales) et Celera Genomics (une société privée) étaient arrivés à égalité dans la compétition qui les opposait depuis des années. Une partie des résultats suscita la déception, voire la consternation : par exemple, les humains s'avéraient posséder moins de gènes que ce à quoi l'on s'attendait, environ 40 000 gènes pour 100 trillions de cellules, ce qui ne laissa pas de décevoir ceux qui s'attendaient au chiffre plus extravagant de 100 000 gènes, qui convenait davantage à une espèce si intelligente. Mais, et c'est beaucoup plus important, deux éléments ressortaient clairement de ces recherches : selon les propres termes de J. Craig Venter, qui était alors à la tête de Celera Genomics : « La race est un concept social, et non scientifique. Au cours des 100 000 dernières années, nous avons tous évolué à partir de la même tribu, comptant un petit nombre d'individus, qui a émigré d'Afrique et colonisé le monde ». Chaque individu partage 99,99 % du matériel génétique de n'importe quel autre être humain. (…) D'un point de vue génétique – toutes les populations, et tous les Américains – descendent des Africains. »

Merci à Babelio pour cette lecture dans le cadre de la Masse Critique Non Fiction et aux Éditions Max Milo.
Lien : https://ducalmelucette.wordp..
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Cet ouvrage historique très documenté est publié en 2010 aux USA et traduit en français en 2019. L'historienne et professeure des universités africaine-américaine retrace la construction et l'évolution de la notion de "race blanche" depuis l'Antiquité jusqu'à l'Amérique du XXIème siècle. Plus largement son livre donne une idée de l'histoire de la science des races.
Elle démarre avec le rappel qu'il a existé un esclavage des Blanc•hes, qu'il a été oublié; l'esclavage est devenu synonyme de peau noire.
Elle montre que les frontières entre Blanc•hes et non-Blanc•hes sont en fait poreuses, évolutives.
La représentation de "l'Américain•e" sous-entendait une origine anglo-saxonne, mais des assimilations ont eu lieu (immigré•es allemand•es et irlandais•es, puis italien•nes, mexicain•es, juif•ves...) Cependant, seul le mouvement pour les droits civiques a permis aux Africain•es-Américain•es d'être reconnu•es comme Américain•es... Aujourd'hui la pauvreté et la ségrégation sont encore massivement noires aux USA.
L'historienne rappelle que dans les années 50 l'étude de l'ADN a invalidé la race comme concept biologique. Elle ne subsiste plus que comme réalité sociale, générant des discriminations. En gros la science avance mais les vieux stéréotypes ont la dent dure.
Cette somme historique est parfois laborieuse, avec de nombreux portraits et détails. C'est un pavé ! Mais l'autrice passionne par les thèmes abordés : l'historique d'un idéal de beauté blanc, le racialisme au XIXè siècle dans des pseudo-sciences, les débats en anthropologie pour remettre en cause le concept de race... Elle explique qu'on a considéré longtemps qu'il y avait plusieurs races blanches européennes, jusqu'à aboutir à une dichotomie Noir•e/Blanc•he encore perceptible aujourd'hui.
Elle rappelle que la blanchité a dans son histoire l'eugénisme, sous-tendue par l'idée d'une pureté raciale. La ségrégation est allée jusqu'à la stérilisation de peuples non blancs, au début du XXè siècle aux USA.
La succession historique des classifications humaines (dans l'Antiquité c'est le degré de civilisation qui classait les hommes et non le concept de race, par exemple) révèle des objectifs politiques mouvants...et souligne les stéréotypes attachés à chaque période historique. Les projets d'"américanisation" des immigré•es au XXè siècle montrent aussi leurs différents visages dans l'ouvrage.
L'autrice termine son ouvrage par la présentation d'avancées récentes, avec une vision globalement plutôt positive; parce qu'elle regarde tout cela à l'échelle de l'histoire humaine, sans doute.
C'est très dense et très instructif !
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Citations et extraits (1) Ajouter une citation
Il n'y a jamais eu le moindre consensus sur le nombre de races humaines ni même sur le nombre de races blanches. Les critères changent sans arrêt en fonction des goûts individuels et des besoins politiques. (P. 357)
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Videos de Nell Irvin Painter (4) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Nell Irvin Painter
Dans l?Antiquité, les Grecs méprisaient les Perses parce qu?ils étaient pâles.
De la Préhistoire à nos jours, voici l?histoire du "blanc", avec l?historienne américaine Nell Irvin Painter, qui vient de publier "Histoire des Blancs".
Retrouvez l'entretien de Nell Irvin Painter à écouter sur France Culture : https://www.franceculture.fr/personne/nell-irvin-painter
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