«
Ubu Cycliste : Ecrits vélocipédiques » (2007, le Pas d'Oiseau, 116 p.) rassemble des courts textes de
Alfred Jarry, tous axés sur le cyclisme. C'était sa contribution à l'éducation des peuples par Alfred Henri Jarry-Quernest de Contoly d'Orsay, (1873-1907), fils d'Anselme Jarry, né à Laval, ville palindrome, et mort après avoir demandé un cure-dent. « Nous allons prendre conseil de notre conscience. Elle est là, dans cette valise, toute couverte de toiles d'araignée. On voit bien qu'elle ne nous sert pas souvent. »
Dès 1899, il fait partie du Vélocipède Club de Laval et fait de longues ballades dans la Baie du Mont Saint Michel. « « Sauf hostilité bien démontrée de celui qui souffle et du grand cheval qui pleut,…je repelotonnerai demain mardi, sur celui qui roule, le long crin du trottoir cyclable vers votre mercure ». Mais en fait, la bicyclette est plus qu'un simple instrument de promenade ou de transport. « le cycle est un pléonasme : une roue et la superfétation du parallélisme prolongé des manivelles. le cercle, fini, se désuète. La ligne droite infinie dans les deux sens lui succède ». D'ailleurs, en hommage, la Rue
Alfred Jarry à Laval est interdite aux véhicules, sauf aux vélos.
On ne présente plus
Alfred Jarry. Mais sait-on qu'il partageait sa chambre avec « Clément luxe 96 course sur piste », bicyclette qui est restée à jamais impayée de ses 525 francs. Mais c'était pour « faire plus rapidement le tour de la pièce ». D'ailleurs c'était « son squelette extérieur ». Il y rajoutera des jantes en bois, déjà prémonition des courses de côtes l'époque, on ne parlait pas encore d'exosquelettes. Quant aux cycles de famille…. On pourra aussi lire la poursuite fantastique d'une quintuplette avec le train entre Paris et Irkoutsk, c'est tout dire. Cela pourrait donner des idées pour un prochain tour de France. Une octuplette pour chaque équipe, ou deux quadruplettes, en cas de panne. Fini le soupçon du dopage individuel, en dépit de leur plein gré.
On pourra lire des textes sur Ixion attaché à sa roue pour l'éternité.
On lira l'épopée des coureurs ivres-morts dopés au « Perpetual-Motion-Food », ce qui vaut, de loin, le fameux « Pot Belge », et d'après les derniers renseignements obtenus à l'insu de leur plein gré de se shooter au bicarbonate de soude, incontrôlable et surtout indécelable.
Enfin, et surtout, il convient de lire « La Passion considérée comme course de côte », parue dans « le Canard Sauvage », le 11 avril 1903, pratiquement un anniversaire, surtout un vendredi saint, à la veille d'un Paris-Roubaix. Texte que j'ai découvert en Equateur, un jour aussi de veille de Pâques, mais raconté à la radio, à la manière d'un récit de course. le texte a été repris dans « L'Anthologie de l'Humour Noir » de
André Breton (1966,
Jean Jacques Pauvert, 593 p.).
Court texte qui commence par
« Barrabas, engagé, déclara forfait.
Le starter Pilate, tirant son chronomètre à eau ou clepsydre, ce qui lui mouilla les mains, à moins qu'il n'eût simplement craché dedans — donna le départ.
Jésus démarra à toute allure ».
Encore plus mythique que celle de l'Alpe d'Huez, la montée du Golgotha dans laquelle « il y a quatorze virages » qui vit la catastrophe finale, avant l'arrivée. « le déplorable accident que l'on sait se place au douzième virage » mais le leader « quoique ne portant rien », doit abandonner. « Il continua la course en aviateur …. mais ceci sort de notre sujet ».