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EAN : 9782226452313
208 pages
Albin Michel (13/01/2021)
4.03/5   17 notes
Résumé :
Tout perdre du jour au lendemain. Quitter Paris et les privilèges d'un milieu envié mais impitoyable. Fuir son mari poursuivi pour trafic d'influence. Devenir la proie d'un infernal harcèlement sur les réseaux sociaux et dans la presse parce que « femme de ».

Dans ce roman contemporain, Anaïs Jeanneret, observant les milieux du pouvoir et leur cruauté, décrit la traque d'une femme prise dans l'engrenage du cyberbashing. Et qui, en choisissant de sorti... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (10) Voir plus Ajouter une critique
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Quand médias et réseaux sociaux s'acharnent

Le nouveau roman d'Anaïs Jeanneret frappe fort et juste. Il met en scène une romancière, épouse d'un homme politique corrompu et qui la trompe de surcroît. Elle devient alors la proie des médias et des réseaux sociaux, aptes à juger sans savoir.

Quand Louise sort de chez elle, elle a l'humeur aussi maussade que celle des manifestants bardés de leurs gilets jaunes. Et ses yeux rougis par le gaz lacrymogène sont à l'unisson de son état d'esprit. Après plus de vingt ans de mariage elle a découvert que Philippe, son mari secrétaire d'État à Bercy, possédait un compte off-shore et avait une liaison avec Mathilde, son assistante.
Autant dire que le dîner qu'elle honore de sa présence l'indiffère au plus haut point. Elle regarde les convives s'agiter et s'auto-congratuler, satisfaits du vernis dont ils ont recouvert leurs existences bourgeoises.
Elle a fait son choix. Demander le divorce et prendre l'air.
Dans ce coin perdu du Perche où s'est réfugié sa mère, qui l'accueille sans lui pose de questions, elle trouve la quiétude de la zone blanche, d'une nature figée par l'hiver. L'endroit est idéal pour poursuivre la rédaction de son nouveau roman.
Ici, elle se ressource, retrouve des souvenirs et prévient son fils Léo parti en stage en Australie de son choix. Qui ne l'étonne pas outre-mesure, ayant bien senti le fossé se creuser entre ses père et mère. À deux heures de route de Paris, la rumeur de la capitale la rattrape cependant. Elle découvre les insinuations fielleuses des journalistes après le rachat du groupe de presse Pressinvest orchestré par son mari: « Louise Voileret, l'écrivain des beaux quartiers a toujours su merveilleusement bien s'entourer, Dès le lycée, elle a noué des liens avec Pierre Bergot, aujourd'hui nouveau propriétaire de Pressinvest. Étudiante à la Sorbonne, elle fait tout naturellement un stage d'été au Figaro, bon sang ne saurait mentir. le service littéraire accueille la jeune stagiaire quand d'autres passent leur été à travailler dans un fast-food, On ne s'étonnera donc pas de voir son premier roman publié deux ans plus tard. Puis elle épouse Philippe Dumont, bomme politique réputé pour son puissant réseau. N'en jetez plus! Pourtant, il lui en faut davantage. Pressinvest est à vendre. L'opportunité est trop belle. Elle fait le lien entre M. Bergot et son mari. Ce dernier ouvre les bonnes portes, ignorant le conflit d'intérêts. de son bureau de Bercy, rien n'est plus simple, L'homme d'affaires saura remercier Mme Voileret le moment venu, elle peut attendre sereinement le renvoi d'ascenseur.» La voilà punie pour une faute qu'elle n'a pas commise. La voilà prise dans une spirale infernale qui va la happer encore plus puissamment. Des amies prennent leur distance, son éditeur manque leur rendez-vous, les journalistes l'assaillent. Les révélations s'enchaînent, la forçant à réagir. D'autant que la vague devient de plus en plus nauséabonde, l'antisémitisme venant se mêler aux soi-disant moeurs dissolues.
"Au-delà du défoulement, la haine est devenue un moyen d'expression comme un autre. Elle semble sans limites, banalisée, décomplexée, auto-justifiée et nourrie par le conspirationnisme et la misère humaine."
Anaïs Jeanneret réussit parfaitement à dépeindre cette époque qui, par la force et l'instantanéité des réseaux sociaux, peut détruire en un instant une réputation, vider des tombereaux d'insanités et contre lesquels il n'y a pas moyen de lutter. Alors, il faut se blinder, alors il faut essayer de se construire une nouvelle légèreté. "Mais après l'implosion des derniers mois, elle n'est pas certaine de savoir recoller les morceaux. Pas sûre de retrouver cette légèreté." le réquisitoire est aussi implacable que désespérant. Puisse ce roman nous aider à ne pas nous emballer, à ne pas crier avec la meute mais conserver un regard lucide sur une actualité qui s'emballe trop fréquemment, laissant le spectaculaire prendre le pas sur la réalité des faits. En ce sens, ce roman est un avertissement salutaire.


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Louise Voileret, épouse Dumont, la cinquantaine, voit son environnement s'effondrer lorsqu'elle découvre que son mari, secrétaire d'État, a reçu des pots-de-vin.

Ils vivent dans un bel appartement bourgeois de la rue de Varenne. Louise est une auteure reconnue mais discrète. Elle est publiée et ses lecteurs lui sont fidèles.

Leur couple s'est peu à peu oublié et ils n'entretiennent plus que des liens polis et distants, à l'occasion mondains.

Un jour, Louise découvre l'existence d'un versement douteux qu'a reçu son mari ainsi que son infidélité avec sa jeune assistante. Elle quitte Paris pour rejoindre sa mère en Normandie et prendre du recul sur tout ça. L'occasion de souffler...

Ce roman est implacable et efficace. On assiste aux mécanismes impitoyables du harcèlement sur les réseaux sociaux et comment le scandale éclabousse Louise, en tant qu'épouse. Comme si la femme était coupable des agissements de son mari.

Elle voit ses «proches» prendre leurs distances. Heureusement, les vraies amies restent et la soutiennent quand elle est au plus bas, au point de ne plus sortir de chez elle et de ne plus pouvoir écrire.

Elle va se battre, espérant gagner la guerre contre son ex-mari et la foule anonyme qui l'acculent. Contre tous, seulement aidée de ses quelques amies, elle veut faire entendre sa voix, son innocence et son indépendance d'esprit.

Anaïs Jeanneret nous fait entrer sans effort dans la tête de Louise, malgré l'usage de la troisième personne. C'est un super portrait de femme et le récit glaçant de cette machine à broyer les âmes qu'est le cyber-harcèlement.

On tourne les pages, on veut savoir, jusqu'à la fin, abrupte et surprenante, mais pas tant que ça au fond.
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Un roman vite lu, qui à première vue semble conter une histoire romanesque qui se passe dans les beaux quartiers de Paris .
Un couple, une romancière mariée à un secrétaire d'Etat. Une usure du couple, une affaire financière louche pour lui, un divorce.
Mais le plus intéressant est l'irruption par toutes petites touches de l'affaire dans les réseaux sociaux, des photos trafiquées, d'affirmations fausses qui touchent l'épouse. Elle est pourtant étrangère à l'infamie qui touche son époux!
Devant un tel déferlement comment se protéger quand presque tous vos "amis" se détournent de vous? Comment retrouver peut-être une vie normale?
C'est en cela que ce roman bien de notre époque est parfois glaçant.
je ne suis pas restée indifférente à cette lecture et au danger des écrans qui peuvent tuer.
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Pour être honnête, je me suis plongée dans la lecture de ce roman pas forcément pour de bonnes raisons au départ.
Anaïs Jeanneret a été brièvement mannequin puis comedienne, par le passé, avant de se lancer dans l'écriture mais on ne peut pas dire, objectivement, qu'elle ait marqué les annales dans aucune de ses différentes activités.
Elle est, principalement, connue en effet pour avoir été, pendant plusieurs années, la compagne de Vincent Bolloré.
C'est ce statut peu enviable et ingrat de " femme de" qu'elle dénonce dans ce livre d'inspiration largement autobiographique.
D'ailleurs, le personnage principal est romancière ( comme elle) et en couple avec un homme puissant et corrompu (Vincent Bolloré, dont la puissance en tant qu'homme d'affaires et financier n'est plus à démontrer, a également été mêlé à des affaires de corruption). Comme je suis assez intriguée par la personnalité de ce monsieur et que j'étais curieuse d'en connaître davantage sur l'homme privé, je me suis jetée avec gourmandise et une bonne dose de voyeurisme ( je l'avoue) sur ce bouquin que je me suis amusée à lire comme une espèce de roman à clef et je dois dire que je n' ai pas été déçue. Ça a été une lecture fort divertissante et je reconnais volontiers à Anaïs Jeanneret des talents d'écriture.
Cependant, j'ai été assez agacée, je dois dire, par la très grande naïveté du personnage féminin qui semble découvrir certains travers de la nature humaine :
- Oui, les hommes sont infidèles et plus on monte dans l'échelle sociale plus ils le sont (un des meilleurs moyens de juger un homme sur pièce est de voir comment il s'est comporté avec les autres femmes de sa vie, ses ex et surtout, avec la mère de ses enfants. Un homme qui s'est comporté toute sa vie comme un salop et un goujat a peu de chances de se transformer subitement en prince charmant avec sa dernière conquête , quand bien même celle-ci serait une créature sublime et irrésistible. C'est une forme d'arrogance typiquement féminine de penser qu'on peut changer un homme grâce au pouvoir "magique" de l'amour.)
- Non, les "amis" qu'on croise dans des cocktails mondains entre deux coupes de champagne ne sont pas de vrais amis , ils sont toujours prêts à vous lâcher à la moindre difficulté ( comme c'est surprenant) et pour eux, vous cessez subitement d'exister quand vous n'êtes plus " la femme de " ( comme c'est surprenant)...
- Et oui, quand on se prétend écrivain mais qu'on a passé 10 ans sans publier une ligne à vivre au crochet de son mec milliardaire et à parader dans des soirées mondaines, faut pas s'étonner après d'être cataloguée " femme de" ( je ne porte pas de jugement moral entendons nous bien, chacun est libre de ses choix mais faut étre un tout petit peu logique quoi)
Certes , on vit dans un monde fait majoritairement par et pour les hommes mais force est de constater que certaines femmes se complaisent dans un rôle volontairement passif parce qu' elles veulent être traitées comme des princesses. Or ce n'est pas ça la vraie vie. On fait tous des choix pour notre confort personnel jusqu'à ce qu'un beau jour, on se retrouve obligé de regarder l'hideuse réalité en face dans le miroir de nos petites compromissions. On n'y échappe pas. Personne n'y échappe.
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Un récit glaçant, et d'actualité, sur le cyberharcelement.
Femme d'un politique accusé de conflits d'intérêt, Louise est considérée comme complice simplement car elle est sa femme.
Commence pour elle une descente aux enfers rythmée par le cyberbashing dont elle fait l'objet.
Petit  à petit ses amis s'éloignent, ne voulant pas être éclaboussés par le scandale. Elle se retrouve quasiment seule pour se battre contre les accusations qui pleuvent sur elle. 

La presse s'empresse de faire son procès, sans même avoir connaissance des faits.
Comment lutter contre ces calomnieurs qui se cachent derrière leurs écrans ? Comment se battre contre ce battage médiatique ? Comment faire-valoir son innocence quand votre vie privée est étalée dans la presse et sur les réseaux sociaux ?
Qu'il soit à tort ou à raison, ce jugement en place publique, ce grand déballage dont elle fait les frais est d'une violence inouïe. La traque qui est découle aussi.
Ce livre n'est pas sans rappeler certaines polémiques ayant secoué notre pays au cours des dernières années.
L'auteure décrit parfaitement les rouages de cette machine de guerre qu'est la presse lorsqu'elle décide que vous être coupable.
Elle pose aussi une question très intéressante, sur le statut de " femme de". Peut on être complice des actes de son époux simplement car on est mariée avec lui ?
J'ai beaucoup aimé ce roman dévoré en une journée.
A lire !
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critiques presse (1)
LeSoir
01 mars 2021
«Dans l'ombre des hommes» décrit la descente aux enfers d'une femme prise dans l'engrenage du harcèlement des réseaux sociaux. Infernal.
Lire la critique sur le site : LeSoir
Citations et extraits (12) Voir plus Ajouter une citation
INCIPIT
Elle sort de l’immeuble sans remarquer la pluie de janvier qui précipite le crépuscule. Dehors, il n’y a pas une âme. La ville semble désertée. Sur l’asphalte mouillé, ses semelles émettent un bruit de succion qui résonne désagréablement dans le silence. Absorbée par l’implosion de son existence, l’étrangeté de cet après-midi ne lui apparaît pas. Dans sa fuite, elle remonte la rue de Varenne vers les Invalides. Un ronflement de moteur se rapproche, puis s’éloigne. À peine a-t-elle eu le temps d’apercevoir entre les façades d’immeubles en vis-à-vis la voiture de police passant en trombe sur le boulevard. Elle tourne sur la droite, longe le square d’Ajaccio et commence à percevoir la rumeur. En débouchant sur l’esplanade des Invalides, elle tombe sur un mur de cars de CRS qui bloque le quartier. Elle le dépasse. De l’autre côté, vers la rue Fabert, elle devine la foule malgré la fumée par-dessus laquelle volent quelques projectiles. Elle s’approche encore. Elle ne pense plus. Elle n’a plus d’identité. Elle veut juste se fondre dans la mêlée humaine. Un groupe de femmes quitte le cortège et passe devant elle sans croiser son regard. Quelque part, des cris recouvrent les revendications, aussitôt suivis d’affrontements. Des détonations explosent, puis les manifestants se dispersent pour échapper aux gaz lacrymogènes. Ça ne l’arrête pas. Sans réfléchir, sans le vouloir, elle avance. En première ligne, des jeunes cagoulés vêtus de noir courent tête baissée sur les forces de l’ordre. Quelqu’un lui dit de ne pas rester là. Ses yeux brûlent. Elle suffoque. Elle ne bouge pas. À travers ses larmes, elle voit les poings tendus, les banderoles, la confusion. Elle voit des hommes dont elle ne saisit pas s’ils sont policiers ou frondeurs. Prise entre les Gilets jaunes et les CRS qui s’affrontent chaque samedi depuis des semaines, elle voit ceux qui avancent, ceux qui reculent. Dans chaque camp, la tension est d’une même intensité, l’épuisement marque les visages d’une même violence. C’est comme une vague de napalm, personne n’y échappe. Pas même elle. Sa fatigue se nourrit d’autres défaites. Qu’importe. Dans cet entremêlement de tragédies individuelles, tous partagent le désarroi et la rage. Soudain, il y a une bousculade, un corps percute le sien, on la pousse, on l’entraîne en sens inverse. C’est alors qu’elle est prise de nausées. Alors que sa propre lassitude lui coupe les jambes.

Elle roule maintenant dans les rues illuminées. Les décorations rappellent les fêtes de fin d’année à peine terminées. Plus rien n’évoque les troubles de la journée. Elle traverse le pont Royal, s’engage dans la rue de Rivoli. Elle ne s’est jamais lassée de la beauté de Paris. Ce soir pourtant, rien n’est plus pareil. Un gouffre vient de s’ouvrir devant elle.
Place de la Concorde, elle manque faire demi-tour. Mais elle n’a nulle part où aller.
Elle s’observe dans le miroir de l’ascenseur. Avant de venir, elle a pris un bain, enfilé une robe, remis de l’ordre dans ses cheveux, s’est maquillée, puis elle est partie, soulagée de n’avoir pas croisé son mari. Elle espère faire illusion malgré ses traits tirés et ses yeux encore irrités par les gaz. Au fond, elle sait que personne n’y prêtera attention. C’est l’avantage de la cinquantaine. Mais le réflexe de respectabilité demeure. Ne jamais laisser paraître les failles.
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Romancière, elle avait jusque-là compté sur un mélange d’inconscience et d'enthousiasme. Elle s'était employée à oublier que personne n’attendait ses livres et que tant d’autres en avaient écrit de bien meilleurs, de plus brillants, tout en se laissant porter par l’évidence de son désir à s'emparer des mots pour les plier à son seul plaisir. Mais après l’implosion des derniers mois, elle n’est pas certaine de savoir recoller les morceaux. Pas sûre de retrouver cette légèreté. L'écriture est une mécanique fragile. p. 174
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– Vous devez avoir des tas de choses à vous raconter, lance Nathalie dans un éclat de rire aussi absurde que ses propos.
Louise n’a rien à dire à cet homme. En regardant son amie s’éloigner vers d’autres invités, elle peine à se souvenir de la jeune femme qu’elle a connue quinze ans plus tôt. Elle était follement amoureuse d’un artiste peintre et ses rires étaient alors de vrais rires, jusqu’au jour où elle avait annoncé son mariage avec un banquier. Personne n’avait compris. Ou plutôt, tout le monde avait compris.
– Chère madame, votre mari a été parfait la semaine dernière dans cette émission politique. Il a mouché les journalistes avec brio. Vous pouvez être fière de lui !
Louise revoit la tête de Philippe la veille, son visage déformé par la stupeur, mâchoire ouverte et regard de lapin pris dans les phares d’une voiture, puis par la haine. Elle l’entend encore lui jeter à la figure: « Qui es-tu pour me faire la morale, pauvre cruche ! Barre-toi si cette vie te dégoûte, si je ne suis pas à la hauteur de ton éthique, de ta morale à deux balles. On rêve ! »
– Vous regardez beaucoup la télévision, Jean-Jacques ?
Ou s’appelle-t-il Jean-Pierre ? Elle est prise d’un doute. Mais à la persistance de son air satisfait, elle suppose ne s’être pas trompée.
– Rarement. À part les émissions culturelles et les débats politiques, bien sûr.
– Bien sûr !
Elle s’étonne toujours de voir ces hommes en costume agrafé d’une barrette rouge censée faire toute la différence répondre sérieusement à d’aussi stupides questions. La réponse ne la déçoit pas. À cet instant, Paul Perrier et sa jeune épouse, Mathilde, font leur apparition dans le salon. Jean-Jacques continue ses bavardages sans remarquer que Louise ne l’écoute plus.
– Votre mari a raison de vouloir créer des lois pour encadrer Internet. On ne peut pas laisser un tel espace sans réglementation. Il faut structurer et moraliser ce circuit mondialisé.
– Structurer et moraliser…
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La déflagration s’est produite hier matin avec cette lettre arrivée par la poste à l’adresse de M. Dumont. Louise aurait pu ne pas y prêter attention. Mais après le départ de Philippe, elle était tombée sur l’enveloppe expédiée de Trinité-et-Tobago, décachetée et oubliée sur le lavabo de la salle de bains. Elle n’avait pas résisté et avait regardé. Elle l’avait fait presque sans y penser, avec cependant la sensation diffuse d’ouvrir une boîte de Pandore. À l’intérieur, elle était tombée sur un relevé bancaire mentionnant un virement de trois cent mille dollars versés sur le compte de M. Philou. Brutalement, ce nom enfoui dans les limbes de sa mémoire avait resurgi d’un passé lointain. Il l’avait frappée comme un coup de massue. Elle en avait eu les jambes coupées et avait dû s’asseoir sur le rebord de la baignoire. Au début de leur histoire, ils s’amusaient à s’appeler ainsi. Phi pour Philippe, Lou pour Louise. À eux deux, ils étaient les Philou. À cet instant, ce jeu entre amoureux se révélait d’une ironie glaçante. Louise avait eu l’impression que son sang ne remontait plus jusqu’au cœur. Incapable de travailler ni de penser à autre chose, elle était allée dans le bureau de son mari. Elle avait fouillé partout à la recherche d’autres documents compromettants. Elle n’avait rien trouvé. Mais dans sa nervosité, elle avait fait tomber des dossiers empilés sur la table. Les feuilles s’étaient éparpillées au sol parmi lesquelles étaient cachées les photos de Mathilde. Sur la plus vulgaire, l’assistante avait écrit au feutre : « Bon anniversaire, mon chéri. »
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– J’ai beaucoup aimé le dernier, tu sais. Vraiment. Et je ne désespère pas d’arriver un jour à te débaucher. Je suis certain que tu pourrais faire un excellent livre sur le monde politique.
Toute la saveur de la phrase tient dans ce vraiment. C’est une flatterie de camelot. La confirmation du mensonge possible sinon certain. Ce vraiment est un affront dont l’éditeur n’est pas conscient mais qui allume dans le regard de Louise une rage froide.
– Encore faudrait-il que je m’y intéresse, ce qui est loin d’être le cas, répond-elle avec un ton plus sec qu’elle n’aurait souhaité.
– Tu l’écrirais sous une forme romanesque bien sûr, tu ferais ça merveilleusement bien. Il s’agit juste de le situer dans un univers qui n’a aucun secret pour toi. Je te garantis un best-seller.
– Un best-seller ! Tu me tentes.
– Tu en es où ? Trente mille exemplaires ? Là, tu franchirais les cent mille.
Louise voudrait qu’il se taise. Être ailleurs. S’il savait à quel point elle souhaite se tenir à distance de ce pouvoir politique qui aspire ses serviteurs avec la force d’un trou noir. Ça fait des mois que Stéphane Thinet la poursuit avec cette idée. Depuis que Philippe a été nommé à Bercy en fait. Avant, il la saluait à peine.
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Vidéo de Anaïs Jeanneret
Anais Jeanneret lit un extrait de son livre "La solitude d'un soir d'été" (Ed. Albin Michel 2013).
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