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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Edition bilingue de folio, ces trois nouvelles écrites en 1954 m'ont rappelé des récits de Tchekhov comme « La Steppe » où la nature est omniprésente et glorifiée.
Nous sommes dans le Nord de la Russie dans la région d'Arkhangelsk.
Ces récits sont vibrants d'émotion et de lyrisme. Deux jeunes garçons par «une matinée tranquille» partent, leurs coeurs juvéniles gonflés par le rêve d'une belle prise, mais, la tête envahie d'effrayants « racontars » sur leur lieu de pêche.
Ce récit est rempli d'innocence et de jeunesse, il y règne une atmosphère poétique, la nature est sublimée. La tension crée par l'imagination fertile des deux jeunes garçons et la survenue d'un incident conduit le récit à un paroxysme où Kazakov nous fait trembler, mêlant fantasmagorie et brute réalité. Il met en opposition la candeur des jeunes, la quiétude et beauté de la nature et le drame.
Kazakov est un brillant portraitiste et il peint à merveille l'instant présent, il le sublime.
Dans la nouvelle « La petite gare » c'est la séparation des amants sur le quai de la petite gare qu'il met en scène de façon subtile et en toute dernière minute, quand le train démarre, le récit se déchire en quatre mots, laissant une femme déchirée:
« T'entends…Je reviendrai plus T'entends…».
La nature de Kazakov est baignée de lumière diaphane, inondée de rosée, grouillante de vie lors de ces parties de pêche ou de chasse, elle n'est que silence, douceur, calme et senteur. A lire c'est un régal !
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À la Chasse
Nouvelle de Iouri Kazakov

Ne à Smolensk situé en Russie dans le sillage des guerres, comme si c'était prédestiné de le dire, en 1927 en Russie communiste, pas moins significative de l'ajouter, Iouri Kazakov, fils d'ouvrier, doit son salut à la qualité de ses études professionnelles qui le destinent tour à tour vers le génie civil, puis la musique et enfin l'écriture.
Il me fait penser à Jakes Helias qui, élève studieux et brillant, aura la chance d'obtenir une bourse qui lui permettra d'accéder à l'université à l'issue de laquelle le métier d'enseignant lui tendait les bras..
Iouri n'est pas qu'un contemplatif, il scrute les âmes et dans cette Russie bolchevique il va en voir de toutes les couleurs. Il sera, la famille sera d'abord affligée par la déportation du père au goulag pour avoir refusé de dénoncer un crime. Cela impactera sa vie comme si c'est lui qui l'avait fait -surtout quand on n'a rien fait . La famille alors s'était exilée à la rue Arbat de Moscou, quartier des artistes ou Pouchkine demeura un temps. Les Kazakov vont y vivre chichement. Iouri retournera au pays qui l'a vu naître. Il ne reconnaîtra plus rien, plus personne ; le sentiment sera l'amertume et il tournera le dos définitivement à son cher pays. À propos de la musique, musicien et professeur de conservatoire, Iouri n'obtiendra pas le poste qu'il convoitait à cause des antécédents paternels. Il tournera le dos à la musique définitivement. Il lui restera la littérature et là, il va engager de sérieuses études comme il a toujours su le faire, sa sensibilité d'artiste va être mise à l'epreuve. . Il va écrire la nouvelle : « La Petite gare » qui est un joyau de la littérature russe, ainsi que de nombreuses autres nouvelles empreintes d'un réalisme poignant et de poésie . On ne sort pas indemne de telles lectures tant l'humanité qui s'en dégage est attachante.
Iouri a des valeurs, et une culture, il a vu du pays et se projette à travers des personnages pour lesquels nous avons une empathie certaine.
Il s'épuisera dans de telles conjonctures, sa vie ne sera jamais apaisée à l'image du Dniepr finalement qui aura vu tant de soldats le traverser pour des issues incertaines ..
Sur la tard, il va ne plus rien produire et se mettre à boire. Il quittera sa maison de Moscou pour se réfugier à la campagne dans sa datcha où il ne sera plus que l'ombre de lui-même. Il n'y aura pas d'alternance et encore moins de rémission : le dépit pour le dépit. Les épisodes ensoleillés de sa vie brilleront à jamais dans son dos..

Et si comme cela ne suffisait pas à son destin éprouvé, cabossé, de sa mort alors, sa datcha sera dépouillée et des manuscrits emportés que l'histoire ne dit pas s'ils tombèrent un jour entre de bonnes mains..

«  .. il gratta l'herbe, écarta les marguerites aux longues tiges solides, mais il n'y avait rien qu'une terre grise, de vieilles feuilles pourries, de petits bolets gluants ; des fourmis se traînaient, les gouttes de sang d'un fraisier tremblotaient. « Naturellement … C'est le tourbillon de la vie, se disait Piotr Nikolaievitch déçu et chagrin. Tout passe, tout change .. Voyons' ça suffit, avons-nous même été ici autrefois ? » il se leva, regarda autour de lui : c'était la, quelque part sous un sapin, qu' ils avaient leur hutte. Où la chercher ? Elle était si bell, si fraîche le jour, si chaude la nuit, cette hutte ! Comme il l'avait bien construite, avec son père !.. Où était donc ce sapin ? Est-ce que tout ça, il ne l'avait pas rêvé en fin de compte ? »

Ah' ces rêves qui deviennent rêves d'un passé réel heureux qui a prit fin dans de tristes circonstances dont je mesure plus encore avec Kazakov qu'ils déchirent le coeur des hommes comme je ne l'avais imaginé, porté à croire dans ma solitude que ça n'arrive qu'à soi-même. Je ne pense pas que ça aide dans la vie d' apprendre que ça arrive aux autres : un tel écho ne fait qu'aviver des plaies ..comme un bateau qui se fracasse contre un récif pensant rejoindre la terre ferme !..
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На полустанке и другие рассказы... Et je dois commencer par citer ici notre amie Nastasia-B : "À ce niveau d'écriture, on comprend que la littérature est réellement un art. À ce niveau d'écriture, on s'aperçoit que l'outrage d'une traduction ne peut entacher que très faiblement la lumière du propos. Iouri Kazakov parvient à écrire de la prose comme vous rêveriez la poésie : simple, limpide, évidente, belle, puissante, essentielle, magique".

Car j'ai ressenti ce même émerveillement devant certaines oeuvres méconnues d'André DHÔTEL ("La maison du bout du monde", "Ma chère âme"), de Yachar KEMAL ("Terre de fer, ciel de cuivre", "La légende des mille Taureaux"), Tarjei VESAAS ("Palais de glace", "Les oiseaux") : ce monde sensible a cette lumière particulière que seuls quelques-uns parviennent encore à discerner... Iouri Kazakov était du nombre. Une matinée au bord de la rivière, le drame tapi dans une lumière dorée irisant la rosée sur les fougères ... Iouri Kazakov détestait visiblement "la grande ville" (où il était né) : comme on le sent bien, et comme on partage ! Comme on préfèreévidemment les bords de Loire et ceux de l'Evre de Gracq aux particules fines du brouillard jaunâtre parisien... Comme on aime les "écrivains provinciaux", au fond ! (ces Maupassant aux odeurs de vase remuée...). Dans ce monde des premiers éblouissements, dans cette "littérature des Pouvoirs Premiers" (comme l'écrivait Notre "Saint" Ramuz...), le monde sensible respirait à l'état d'enfance : on y souffre, on y pleure, on s'y noie... Les tentacules d'une pieuvre d'eau douce peuvent vous aspirer au fond de la rivière (c'est cet affabuleur de Michka Kaïoulenko qui vous l'affirmait quand vous portiez des culottes courtes, tels Iachka et Volodia...).

(1°) "La petite gare" [1954] nous fait entrer immédiatement dans le coeur et l'âme de la très jeune fille au fichu, tête penchée sur l'épaule de son compagnon haltérophile — celui qui l'abandonne — très lâchement en partance vers la ville (Moscou et ses mirages...) : il n'y a plus qu'à sécher ses larmes dans le foin de la charrette qui l'entraînera vers on ne sait quels autres cieux tristes... Une histoire immortelle, n'est-ce pas ?

(2°) "Une matinée tranquille" [1954] nous fait partager les fanfaronnades (et la connaissance naturaliste) estivales de Iachka — le "cousin des champs" — et son ahuri d'"ami des villes", Volodia (tout juste sorti de son ignorance crasse moscovite) : il a fallu se lever avant l'aurore pour aller pêcher au-dessus du gouffre de la rivière lointaine...

(3°) "Nocturne" [1955] est le récit presque "dhôtélien" d'une longue marche solitaire d'un chasseur dans les senteurs de la plaine et des forêts (cette senteur tenace des pinèdes sèches) jusqu'à un lac lointain... et une rencontre double autour d'un feu de camp...

On repense à ce recueil d'exceptionnelles nouvelles " le Vent du Nord" ("Vindane") de Tarjei VESAAS, pour leur côté âpre et panthéiste... [Comparer la prose de Kazakov à celle de Vesaas n'est pas — pour nous — un mince compliment !]

Ainsi, on a hâte de découvrir très bientôt l'intégrale de ce beau recueil (première traduction : 1962 ; ouvrage reparu dans la collection "L'imaginaire" de Gallimard) et l'autre recueil — conseillé par Nastasia B, que nous remercions ici vivement pour nous avoir amenés discrètement et efficacement aux oeuvres de Iouri K. — "La belle vie" au titre si charmeur...
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