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EAN : 9782916136684
296 pages
Les éditions du Sonneur (23/10/2013)
3.44/5   9 notes
Résumé :
Aarhus, au Danemark. Le narrateur, un Pakistanais athée et pragmatique, vit en colocation avec Ravi, un Indien flamboyant et sceptique, et Karim, Indien lui aussi, qui partage son temps entre son travail de chauffeur de taxi et sa pratique austère de l’islam. Alors que le narrateur tente de se remettre de son récent divorce et que Ravi tombe éperdument amoureux d’une Danoise, les trois hommes se retrouvent brusquement mêlés à une affaire où règnent soupçons, méfianc... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (8) Voir plus Ajouter une critique
Au début du roman (dans un premier chapitre intitulé "Prolégomènes à une intrigue"), le narrateur, un pakistanais d'éducation musulmane et devenu athée, professeur de littérature anglaise à Aarhus au Danemark, se masturbe désespérément au volant de sa Hyundai pour tenter de récupérer un échantillon de son sperme dans un récipient de plastique pour une procréation médicalement assistée. Ça ne fonctionne pas car il est trop pressé (il doit prononcer une conférence une heure plus tard loin de là) et stressé (notamment par l'apparition d'une voiture de police dans la brume matinale).
À la suite de cet échec et de son refus de continuer ces tentatives, son mariage va imploser et il va s'installer en colocation avec Ravi, un indien hindouiste de la grande bourgeoisie, écrivain thésard au charme dévastateur, dans l'appartement de Karim Bhai, un chauffeur de taxi, indien lui aussi, un musulman orthodoxe et rigide, dénué de tout humour.

Mais ce n'est pas tout, pour les prolégomènes. le narrateur, écrivain-professeur malicieux ou tout du moins absolument non fiable, au parcours remarquablement proche de celui de l'auteur, nous enseigne comment raconter une histoire en même temps qu'il le fait : En annonçant d'emblée, et au fil du récit, que des événements dramatiques à forte portée médiatique vont nous être révélés, que cet appartement fut celui mentionné dans tous les tabloïds lorsque "la chose" est arrivée, qu'il aurait du se méfier…, il va nous démontrer, par la construction de la narration elle-même, comment nos préjugés se forgent, et très souvent à tort.

La cohabitation des trois indopakistanais, leurs échanges, leur voisins et collègues, et leurs histoires d'amour – des rencontres via Internet à l'histoire d'amour de Ravi avec une danoise superbe mais toujours sous contrôle -, forment un roman passionnant à multiples intrigues, qui questionne les limites d'une société danoise (et occidentale) qui se dit permissive, la frontière ténue entre foi aveugle et fanatisme violent, et qui instille subtilement une défiance justifiée, vis-à-vis des media et des idées reçues.

Avec son titre provocateur (la première fausse piste d'un écrivain apparemment très joueur), en hommage à Dany Laferrière, «Comment lutter contre le terrorisme islamiste dans la position du missionnaire» est une lecture jubilatoire et profonde. Un bonheur de lecture.

«Ravi se l'expliquait ainsi : "Presque tous les Angliches et les Yankees titulaires dans les facultés d'anglais du Danemark, qui sont ici au fond parce qu'ils sont américains ou angliches, et tous les Danois, qui sont ici parce qu'ils sont Danois - ce qui me semble déjà beaucoup plus logique -, adorent la littérature multiculturelle, bâtard. Tu le sais bien. Nous le savons bien. Cela leur rappelle leurs arrière-grands-parents aux colonies. Evidemment ils aiment Rushdie et Naipaul. Naipaul, Kureishi, Rushdie : enfin, ces types sont tellement indiens qu'ils parlent même avec un accent anglais ! Voilà pourquoi les gens comme nous devraient écrire des romans, "yaar" ; imagine tes collègues se tortillant dans tous les sens, partagés entre leur désir d'être ouverts d'esprit et la crainte souterraine que nous leur chapardions leur langue de pain et de beurre, et ceci avec notre accent délibéré de "roti" et de "ghee".»

Lexique (dans le glossaire à la fin du roman) :
"Yaar" : Mon vieux, mon pote (argot hindi)
"Roti" : Pain plat de farine complète, sans levure
"Ghee" : Beurre clarifié
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Tout commence par un bocal, une branlette dans une voiture pour la bonne cause de la survie de l'espèce humaine, un bocal en plastique surdimensionné et une voiture de police. Alors, où est le terroriste ? Non, ce n'est pas celui auquel vous pensez. Un début sur les chapeaux de roue !

Dans un style narratif, le bien-nommé narrateur Pakistanais d'origine musulmane, mais athée, pragmatique et professeur de littérature anglaise raconte sa cohabitation avec Ravi, un indien fortuné de la caste des brahmanes, thésard à ses heures. Karim, indien également, mais de confession musulmane, vivant son Coran à la lettre, propriétaire de l'appartement est le troisième larron. « Karim était notre aîné de plus d'une décennie. Comme Ravi il était indien ; comme moi, il était musulman. Contrairement à moi, il croyait en Dieu et ses prophètes, surtout le dernier d'entre eux ; contrairement à Ravi, il ne se mettait pas dans tous ses états à propos de ce que l'Occident avait fait subir au reste du monde, ainsi que Ravi aimait à le dire. » Dans cet immeuble habite également, à l'étage au-dessus, le Grand Claus, sa femme Pernille et leurs deux filles. Leur ami le Petit Claus fait également partie du groupe, ils ont leur importance.

Tout ce petit monde se côtoie, s'invite, s'évite, enfin bref, cohabitent tant bien que mal, dans la petite ville d'Aarhus, au Danemark, jusqu'à ce que la machine s'emballe. Chacun a ses idées bien arrêtées, ne cherchant pas trop à s'ouvrir ou ouvrir les yeux sur l'autre malgré l'exigüité des lieux.

Ravi et le narrateur vivent une vie normale pour nous. Ils sortent, vont dans les cafés, cherchent l'âme soeur pour un instant seulement. Karim quant à lui, vit sa vie, fidèle aux préceptes du Coran. Chaque vendredi il organise, dans son salon-chambre, des réunions, sorte d'école coranique.

Le narrateur se pose des questions ; et si Karim était un terroriste ou affilié à une section islamiste agissante ? C'est vrai, quoi, plusieurs fois par mois il disparait plusieurs jours, a toujours besoin d'argent…. Plutôt louche en ces temps discutables et discutés. Est-ce son esprit « verre à moitié plein, à moitié vide » comme son ami le décrit qui fait que cette suspicion est présente. Ravi, son prénom lui va si bien, ne connait pas ces hésitations, il fait partie de la catégorie « verre plein à déborder » et accepte Karim comme il est.

Un jour, suite à la sortie des caricatures de Mahomet dans un journal, le journaliste est agressé par un Somalien. Les choses deviennent sérieuses lorsqu'ils découvrent qu'il s'agit d'Ibrahim, un habitué des vendredis de Karim.

Le narrateur décide d'aller à la police, non pour dénoncer « leur ami », mais raconter leur quotidien chez Karim, puisque, bien sûr, il ne pouvait, selon les journaux, rumeurs… n'être qu'un dangereux islamiste dévoué à Al-Qaïda.

Et bien non, Karim n'est pas celui que l'on pense. Oui, il est très dévot, oui, il suit à la lettre les préceptes du Coran. S'ils s'absentent inopinément, s'il a un réel besoin d'argent, c'est pour s'occuper de quelqu'un qui lui est très cher ; son épouse qui vit maintenant dans son monde à elle et qui l'appelle lorsque la raison lui revient pour quelques heures ou quelques jours.

J'oubliais les Claus petit et grand. Là également, il y a mauvaise interprétation. Ce n'est pas pour une femme que Grand Claus décide de divorcer, mais pour vivre avec Petit Claus, son amour depuis si longtemps. Alors que la famille se liguait contre lui pensant à une autre femme, épouse et filles acceptent avec joie ce coming-out cette révélation. Nos amis ont faux sur toute la ligne.

Le Danemark n'est pas en reste, nos deux acolytes critiquent joyeusement les habitants de ce pays nordique avec leur foi calviniste,

La frontière entre la foi pure et dure et le fanatisme religieux est plus mince qu'une feuille de cigarette. le narrateur n'aurait certainement pas soumis Karim aux questions des policiers s'il y avait eu une ouverture entre eux, une envie de se comprendre ou simplement de se connaître. Ils sont restés dans le superficiel, vivant chacun pour soi alors qu'ils vivaient en communauté. « Ce que j'éprouvais, c'était l'impossibilité de toute conversation, comme s'il m'avait fallu hurler par-dessus un vacarme niagaresque pour me faire entendre de Karim Bhai : ce qui nous serait parvenu aux oreilles n'aurait pas été les mots que je voulais, ni les mots qu'il aurait prononcé, mais une sorte de grossière pantomime. Non que nous refusions de parler, mais toute conversation était rendue impossible par le Niagara de soupçons, de préjugés et d'effronterie qui cascadait autour de nous. ».

Tabish Khair dénonce, non sans humour, l'individualisme, les jugements hâtifs, les préjugés qui ont la vie dure, quel que soit le pays où l'on vit. Les idées reçues, les informations envahissantes, les on-dit, les à-peu-près font souvent du mal et ce livre en est la preuve.

Le style narratif, sans aspérité de ton, est habilement corrigé par les nombreuses saillies des deux amis, le narrateur et Ravi. C'est un livre agréable et très facile à lire, puis à méditer. Les préjugés et jugements hâtifs font partie de l'âme humaine ; « chassez le naturel, il revient au galop » dit un de nos proverbes.

Quant à la position du missionnaire est-ce celle de Karim Bhai avec ses réunions du vendredi ? Est-ce la position du narrateur ? Est-ce la passivité, le dilettantisme de Ravi ?

Lien : http://zazymut.over-blog.com..
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Non je n'ai pas pris le livre pour le titre. Quoique. Il était avant tout en sélection lecture dans ma librairie favorite.

L'histoire mêle les vies de trois hommes, qui se retrouvent en raison des nécessités de l'existence, à vivre au même endroit dans une ville du Danemark. le bailleur est un chauffeur de taxi qui prône un islam pur et dur ai-je envie d'écrire, qui lui interdit de se trouver seul dans la même pièce qu'une autre femme qui n'est pas sa parente, et deux locataires, un hindou dont la famille indienne est fort aisée et qui a pour seule ambition de collectionner les femmes quelconques et un professeur de littérature anglaise d'origine pakistanaise et musulmane mais devenu athée.

C'est bien enlevé, émaillé d'humour sans la moindre causticité, et on a vite pris le pli de consulter le lexique lorsqu'on a un doute sur la signification d'un mot que l'auteur a voulu laisser en danois, en arabe ou en ourdou. le tout donne envie d'aller fouiner du côté des autres livres écrits par cet auteur indien pour voir s'il confirme la qualité de cet ouvrage-ci.
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Aarhus, au Danemark. le narrateur, un Pakistanais athée et pragmatique, vit en colocation avec Ravi, un Indien flamboyant et sceptique, et Karim, Indien lui aussi, qui partage son temps entre son travail de chauffeur de taxi et sa pratique austère de l'islam. Alors que le narrateur tente de se remettre de son récent divorce et que Ravi tombe éperdument amoureux d'une Danoise, les trois hommes se retrouvent brusquement mêlés à une affaire où règnent soupçons, méfiance et peur. Karim est-il le dangereux terroriste que le narrateur voit en lui ? Pourquoi disparaît-il si régulièrement ? Dans ce roman audacieux, Tabish Khair met en lumière, avec humour et vivacité, la mince frontière entre foi et fanatisme, jugement et préjugé, destin individuel et histoire collective.

C'est donc un bon moment de lecture, même si je trouve que ce livre est moins original et fort que les deux précédents romans de l'auteur que j'ai eu l'occasion de lire, Apaiser la poussière et A propos d'un Thug. Il n'y a pas dans celui-ci de trame romanesque complexe, et l'écriture aussi est plus simple, plus quotidienne. Sans doute à cause du thème, qui se place dans l'actualité. Je comprends bien que l'auteur ait eu envie de traiter ce sujet, et il le fait plutôt bien, mais en même temps j'espère qu'il va revenir à des livres plus littéraires et ambitieux. Même si ce type d'ouvrages peut rebuter certains lecteurs, qui auront sans doute plus de facilité pour entrer dans celui-ci.
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Dans une petite ville du Danemark , deux amis issus de classes favorisés et cultivés, le narrateur, un Pakistanais athée musulman qui «mange du porc et boit de l'alcool» et Ravi un Indien Hindou sorte de Casanova Bollywoodiens emménage en colocation chez Karim un Indien musulman fondamentaliste qui outre l'organisation de soirées de lecture du coran possède un comportement étrange.

Avec ce titre à rallonge, je pensais en l'empruntant qu'il s'agissait d'un essai mais c'est bien d'un roman qu'il s'agit, bien que finalement, c'est presque un essai, tant on croit vraiment dans cette belle galerie de personnages.
On retrouve notamment outre les 3 personnages principaux :
Le couple de voisins Danois anciens membre d'ONG en Asie du Sud Est et ravis de le faire savoir à leurs nouveaux voisins.
Une jeune fille Bosniak aux parents athée mais séduit par l'Islam fondamentaliste de Karim. 
Ces personnages sont très bien croqués par l'auteur, qui sait avec ironie souligner avec humour les fractures identitaires des cultures d'orient et d'occident. Tabish Khair parsème l'ouvrage de référence littéraire très érudits des deux cultures.Hélas après deux tiers très intense et riche en questionnements, le tout s'essouffle rien n'avance vraiment, on sent bien que le bouquet final promis n'aura pas lieu, que la fin sera décevante. C'est le cas.
Dommage. 
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Citations et extraits (9) Voir plus Ajouter une citation
Ravi se l'expliquait ainsi : "Presque tous les Angliches et les Yankees titulaires dans les facultés d'anglais du Danemark, qui sont ici au fond parce qu'ils sont américains ou angliches, et tous les Danois, qui sont ici parce qu'ils sont Danois - ce qui me semble déjà beaucoup plus logique -, adorent la littérature multiculturelle, bâtard. Tu le sais bien. Nous le savons bien. Cela leur rappelle leurs arrière-grands-parents aux colonies. Evidemment ils aiment Rushdie et Naipaul. Naipaul, Kureishi, Rushdie : enfin, ces types sont tellement indiens qu'ils parlent même avec un accent anglais ! Voilà pourquoi les gens comme nous devraient écrire des romans, "yaar" ; imagine tes collègues se tortillant dans tous les sens, partagés entre leur désir d'être ouverts d'esprit et la crainte souterraine que nous leur chapardions leur langue de pain et de beurre, et ceci avec notre accent délibéré de "roti" et de "ghee".
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Dès l’instant où tu mets les pieds dans ce pays, ils te racontent qu’ils ont réussi à faire sortir clandestinement tous les juifs du Danemark quand les nazis ont voulu les rassembler. Ils oublient de mentionner que c’est un officier allemand qui a divulgué les projets nazis à la résistance danoise, un mouvement en majorité communiste, interdit par le gouvernement danois. Ils oublient de dire que les seuls, à l’exception de ces pauvres cons d’Allemands, à avoir formé un régiment SS au complet étaient ces bons Danois aux yeux bleus !
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Karim s’est absenté plus longtemps qu’à l’accoutumée. Il n’a pas réapparu avant le surlendemain. A son retour, il avait l’air visiblement épuisé. Son visage était plus pâle et, chose inhabituelle, ses cheveux courts et clairsemés, et sa barbe fournie, grisonnante, étaient ébouriffés. Mais, comme à l’ordinaire, il n’a rien voulu révéler de ce qu’il avait fait ne de l’endroit où il s’était rendu.
Loin de moi l’idée de donner l’impression que ces détails étaient aussi suspects qu’ils en ont l’air au moment où je rédige ceci. Il est important de préciser ce point, même si je suis sûr que ma petite amie titulaire d’une maîtrise de création littéraire aurait sévèrement critiqué pareilles explications.
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Tu sais, espèce de foutu poundé, tu prends le chemin de tous ces foutus négros. A une époque, ils sont arrivés en Europe, ont exhibé les chaînes invisibles de l’esclavage sous les yeux des femmes blanches, ont fait du battage autour du rythme inné et de la nature animale de l’homme, et ils les ont toutes joyeusement embrochées avant que les Blancs aient même le temps de se racler la gorge pour protester.
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Le langage est avant tout une arme. Quand il l'a inventé, l'homme est devenu l'espèce la plus meurtrière de toutes. Si les dinosaures avaient survécu jusqu'ici, l'Homo sapiens verbeux n'en aurait fait qu'une bouchée ! Je serais prêt à renoncer à tous les mots en échange d'un seul geste éloquent : rompre le pain, offrir un verre d'eau à un inconnu, s'asseoir pour partager un repas, laver les pieds de quelqu'un.
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