Rudyard Kipling, entre grâce à son père, à la Civil and Military Gazette de Lahore, à l'âge de 17 ans. Pour cette revue, il va rédiger un certain nombre de nouvelles, un certain nombre d'entre elles, écrites entre 1886 et 1887 vont constituer l'essentiel du recueil
Simples contes des collines, publié en 1888. Ces nouvelles auront du succès, et vont d'emblée lancer la carrière de
Kipling.
Il s'agit de quarante nouvelles, courtes, juste quelques pages. La publication dans la Civil and Military Gazette imposait un format court. Les nouvelles se passent aux Indes, plusieurs à Simla, qui est située en montagne, et réputée d'un climat plus propice pendant les grandes chaleurs. Les personnages sont des Britanniques essentiellement, les Indiens présents le sont plutôt au second plan. Nous avons donc un tableau de la société anglo-indienne de la fin du XIXe siècle, de ses usages, de ses habitudes, de ses façons de penser, de ses travers, de ses ridicules, de ses préjugés. Et du regard condescendant voire méprisant qu'elle porte sur les Indiens. Certains personnages sont récurrents, reviennent dans plusieurs textes : Mrs. Hauksbee, le policier Strickland par exemple.
Très célèbre à son époque (lauréat d'un des premiers prix Nobel de littérature),
Kipling est un peu passé de mode maintenant, connu essentiellement pour
le livre de la jungle, ou plutôt par la célèbre adaptation faite par Disney. Une image un peu désuète, d'un chantre d'une société coloniale obsolète lui colle un peu à la peau. Mes seules lecture de lui étaient jusqu'à présent
le livre de la jungle et
le second livre de la jungle, faites dans l'enfance, et qui très honnêtement ne m'ont pas laissé un grand souvenir. A cause d'une lecture de quatre de ces nouvelles proposée au musée Guimet (lecture faite par Alexandra Steward) j'ai eu envie de m'y plonger.
Je ne peux pas dire que ces textes m'ont enchanté. le format court n'est sans doute pas propice au complexe, au construit. Il s'agit en quelques pages de dessiner un personnage, de trouver une anecdote, une chute qui permet de conclure rapidement l'intrigue.
Kipling y montre une indéniable efficacité, dans une grande économie de moyens. C'est assez cruel, il n'est pas vraiment tendre pour ses personnages, et montre surtout leurs travers et ridicules. Lu à la file, c'est un peu répétitif (même s'il y a une vraie invention dans les intrigues) et surtout cela manque un peu d'humanité, d'empathie avec ses personnages, qui peuvent avoir un côté type, plus qu'être des vraies personnes. Cela dit, on sent une vraie fascination pour l'Inde, pour sa magie, ses mystères, qui par contraste, font peut-être de ces personnages, souvent des petits fonctionnaires à l'univers mental étroit, ces créatures un peu falotes. Ils ne sont pas à la mesure du pays où ils sont amené à vivre en quelque sorte. Ce qui peut annoncer leur départ prochain. Malgré ce pressentiment,
Kipling reste un homme de son milieu, de sa culture, un membre de la bonne société, dont au final il accepte les codes et les impératifs, et il y a là un côté daté. Par exemple la vision de la femme, des relations entre les deux sexes, que véhiculent ces textes, semble vraiment totalement dépassée, caricaturale.
Mais je dois admettre que la lecture à laquelle j'ai assisté était plus convaincante, peut être parce qu'Alexandre Steward aime visiblement ces textes et en donné une lecture très vivante et investie. Peut être aussi que le choix des textes était judicieux, ou qu'à petites doses, cela passe mieux. Cela me donne envie de retenter autre chose de l'auteur, d'autant plus qu'il s'agit d'un texte de jeunesse, d'un premier essai dans la fiction, et qu'un voyage en Inde est tout de même toujours tentant.