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sur 5920 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Je vois une chose que je ne comprendrai jamais. La passion irrésolue. Puis je lis la sainteté de la princesse. Alors je m'appuie, je me défile. Pour comprendre l'enjeu, d'une lettre. Elle vient temporiser mon intellect du livre dans son ensemble. le bijou du monde contemporain, n'est plus cette fois, un lys, mais une jonquille. Il n'y a alors plus de vallée, mais un long corridor, celui de l'infante justesse, d'une noble indomptée qui se faufile entres les jugements des uns, pour épouser la suite de Dieu. Pourquoi est-elle si sereine ? Une certaine impression dont ma lecture me laisse perplexe domine ma pensée sans me laisser parler. Juste avant, j'étais ignorant. Maintenant que j'ai en tête l'histoire de la femme la plus féconde du monde, j'en reviens à mes propres déboires, sans couvert de la modernité de ma tendre époque, le XXIe siècle. La lumière d'un bonheur autochtone rongé sur les étalages d'une braderie, avec de petits éléphants en marbres, des liqueurs bleues marine, jaunes de citronnelle, verte de diamant. Jusqu'alors c'était un défilé de sensations poétiques. Mais pour une histoire qui se complexifie dans le regard public du XVIIe siècle, j'entrevois, car ma vue est toujours aveugle, sur ce que peut projeter les rayons de la lumière haute, une pesanteur, par rapport à l'élément de songe féminin, dans son plus bel appareil, rêve éphémère que m'offre une vue reposante d'une prise de conscience singulière. J'avais maintenu un rythme de lecture assez tumultueux, en outrageant la fin complète où j'ai pu m'arrêter sur les dernières phrases, dans un silence de neige, blanc de pureté joyeuse et non d'individualité. Être une femme dans un monde de femmes. Avoir des espérances masculines ou féminines n'est pour ce que j'ai pu disposer dans mon esprit, sans l'ombre d'un choix dans la lecture du texte, revient à une diligence. Aux chevaux calmes et sereins qui rentrent dans les coulisses de la pénombre. Un service n'est jamais rendu dans le monde des rois et des reines que contre une autre offre, si l'on en prend au pied de la lettre le monde de cour comme une sphère de justesse, sans égal, au reste de la foule d'individus. Aimer. L'être aimé. Soi-même et le désordre de la séduction. Madame de Montmorency en sera assurément une statuette pleine d'effigie, petit dans son sacrement, très grande statue dans l'office sacré. Alors pourquoi le temps d'une vie brève est-il la fin, n'y aura-t-il pas, un après Clèves, une Mélisande, une Sémiramis, une Jane Austen, une Mary Wortley Montagu, toutes mystérieuses par le devenir en fleurs de leur postérité, toujours synonyme de printemps, de lentes évolutions dans les mentalités.
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Un livre qui a fait débat pendant de nombreuses années dans les clubs de littérature à sa sortie, à propos de la fidélité excessive du personnage principal : est-ce seulement par principe morbide et moralisatrice qu'elle agit de cette façon, ou la preuve d'une belle âme ? Je recommande ce livre, magnifiquement bien écrit et qui peut vous faire réfléchir.
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Ce livre m'a beaucoup marqué quand je l'ai lu adolescente.
Je trouvais dingue d'avoir à faire à une personne si rebelle pour l'époque. Quel exemple à suivre ! J'ai adoré !
Pour moi c'est un classique incontournable qu'il faut avoir lu.
En tout cas, il a fait partie des oeuvres qui m'ont construite.
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La Princesse de Clèves est selon moi un roman "psychologique" incisif qui questionne la question de l'amour à travers les émotions et sentiments des personnages. Très intéressant et intelligent ! Un grand classique à lire. Les passions peuvent me conduire mais elles ne sauraient m'aveugler.
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J'ai un amour certain pour le XIXème siècle en littérature, le siècle du roman avec Balzac et Zola notamment, mais aussi Dumas, ou Hugo, un siècle riche en grandes signatures. le XVIIIè reste pour moi celui des philosophes, avec Rousseau, Voltaire et Diderot. Je suis même remonté, plus rarement, au XVIème siècle, avec les histoires fantastiques de Rabelais, où la poésie d'un Ronsard ou d'un Du Bellay.

Et le XVIIème me direz-vous ? J'en connais bien sûr le théâtre (le trio Molère, Racine, Corneille) et les fables De La Fontaine. Mais je n'aurais pas forcément imaginé du roman à cette époque-là. Et comme vous l'aurez sans doute remarqué, je n'ai pour l'instant cité que des hommes. Et là nous voilà face une auteure, Madame de la Fayette. Alors que ce roman est régulièrement cité par des Babeliotes, comme une lecture scolaire, imposée rébarbative, je n'ai jamais eu de mon côté la chance de le croiser sur ma route.

Je dis chance parce que j'ai été absolument bluffé par la modernité du propos, et même du style. Il y a dans ce roman l'essentiel des thèmes qui feront les Scènes de la vie privée De Balzac, mais également une évocation saisissante de la vie de Cour. J'avais craint de retrouver les tournures un peu ampoulées qu'on a l'habitude de rencontrer chez Molière ou Racine, mais c'est sans doute la recherche de poésie, de la rime qui conduit leur style.
En effet malgré un classicisme certain, la phrase de Madame de la Fayette se parcourt aisément, sans rupture, sans retour en arrière pour saisir le sens. Alors qu'un Rabelais fait sentir tout le poids de son ancien français pour la compréhension, on se sent ici en terrain connu, pas dépaysé.

J'ai également trouvé intéressant l'utilisation du récit dans le récit qui permet à l'auteure de faire conter par certains personnages une partie des anecdotes historiques qui retracent le contexte : les histoires des femmes successives d'Henri VIII, les intrigues de Cour en France. Ces passages étaient sans doute destinés à l'époque à informer le lecteur des cachotteries des plus grands, qui ne devaient pas être aussi connues qu'aujourd'hui. C'est d'autant plus brillant que cela met particulièrement en exergue l'histoire principale de cette princesse de Clèves, coincée entre mariage raisonnable et passion interdite. A une époque où les mariages étaient systématiquement arrangés, notamment dans ces familles nobles et où les passions s'exprimaient par des relations adultérines quasiment connues de tous, le choix de l'héroïne de se tenir à ses engagements aura finalement des conséquences plus tragiques que le choix de la duplicité et de l'hypocrisie. le message est complexe, on aurait presque envie de se moquer de l'héroïne dans certains de ses entêtements, et même les contemporains trouvaient son comportement "invraisemblable" comme l'indique Marie Darrieussecq dans une préface, alors que notre époque le trouve juste "idiot". En tout cas, l'histoire fait réfléchir sur les choix d'une vie, sur la manière de les assumer ou de suivre ses envies sans les respecter.

Je disais plus haut que je n'avais pas eu la chance de lire ce roman pendant mes études. Les jeunes lecteurs auraient sans doute du mal à me comprendre, se rappelant leur peine face à l'analyse de formulations estimées "précieuses", à l'image d'un Sarkozy qui avait moqué le roman lors de sa candidature à l'élection présidentielle. Une levée de boucliers pour protéger ce classique de la littérature française avait eu lieu, à juste titre. En effet, quand je parle de modernité, c'est bien évidemment relativement à son époque, il y a 400 ans tout de même. Quand on regarde bien et qu'on observe toute l'influence qu'elle a pu avoir sur les romanciers, notamment ceux du XIXème, on ne peut qu'être admiratifs de cette époque où les romancières prenaient toutes leur place et dépeignaient si bien l'ambiance d'intrigue de la Cour du Roi Henri II.
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La Princesse de Clèves
Madame de la Fayette (1634-1693)
« La magnificence et la galanterie n'ont jamais paru en France avec tant d'éclat que dans les dernières années du règne de Henri le second. »
Ainsi commence l'histoire de la Princesse de Clèves, un des romans les plus célèbres du XVIIe siècle. Paru en 1678 sans nom d'auteur, ce roman précieux, historique et d'analyse se passant à la cour des Valois au XVIe siècle connut immédiatement un succès retentissant et reste de nos jours un des plus beaux romans d'amour de la littérature française. Madame de la Fayette, de son vrai nom Marie-Madeleine Pioche de la Vergne comtesse De La Fayette, fut l'amie De La Rochefoucauld et de Madame de Sévigné.

Petit rappel historique.
Henri II, duc d'Orléans et de Bretagne, second fils de François Ier et de Claude de France naquit en 1519, et régna de 1547 jusqu'à sa mort en 1559, survenue de façon accidentelle lors d'un tournoi (contre Montgomery, capitaine de la garde royale), organisé pour le mariage de sa fille Élisabeth avec Philippe II roi d'Espagne. Epoux de Catherine de Médicis il avait une première favorite en la personne de Diane de Poitiers, duchesse de Valentinois dont la reine, dissimulatrice, ne sembla jamais jalouse. Diane de Poitiers avait été la maitresse de son père François Ier et l'était encore de bien d'autres comme le comte de Brissac. Henri II accéda au trône en 1547 suite à la mort de son frère aîné François le dauphin en 1536. Il était un séducteur et aimait le commerce des femmes. Hélas sous son règne débuteront les terribles guerres de Religion.
L'histoire.
Mais tout d'abord une précision sémantique importante à savoir qu'au XVIIe siècle le mot « amant » signifie seulement « celui qui aime » sans connotation sexuelle comme de nos jours.
Arrive un jour à la cour une vertueuse beauté âgée de quinze ans qui attire les yeux de tout le monde, une beauté parfaite issue de la Maison de Chartres. Orpheline de père, elle est élevée par Mme de Chartres sa mère qui ne se contente pas de lui apprendre à cultiver sa beauté et son esprit mais fait tout pour lui donner en plus vertu et amabilité. Chez un bijoutier italien elle est remarquée par le prince de Clèves, un homme respectable et de haute naissance, ami de François de Lorraine duc de Guise. Il est séduit par sa beauté et ne voit d'autre issue pour la revoir que de se confier à Madame, la soeur du roi, qui a une grande influence à la cour et qui organise la rencontre. Par la suite Mlle de Chartres devient la favorite de la Reine dauphine, Marie Stuart l'épouse du dauphin fils ainé du roi, et fréquente Mesdames filles du Roi et fait l'unanimité à la cour, excepté auprès de Madame de Valentinois, la favorite du Roi. Passionnément amoureux, le Prince de Clèves d'un statut social plus élevé que celui de Mlle de Chartres, désire ardemment l'épouser. Ce que sait hélas aussi le prince, c'est que son ami le chevalier de Guise en est lui aussi amoureux depuis le premier jour qu'il l'a vue. Et puis le père du prince, le duc de Nevers est aussi un obstacle probable de par son étroite relation avec Madame de Valentinois ennemie de la maison de Chartres. Il faut dire qu'à la cour, l'ambition et la galanterie sont source de cabales et de jalousies, de commérages et d'intrigues amoureuses et politiques.
« …On n'y connaissait ni l'ennui, ni l'oisiveté, et on était toujours occupé des plaisirs ou des intrigues…Ainsi il y avait une sorte d'agitation sans désordre dans cette cour, qui la rendait très agréable, mais aussi très dangereuse pour une jeune personne. »
La mort du duc de Nevers son père laisse le champ libre au Prince pour demander en mariage Mlle de Chartres, mais avisé, « il eut préféré le bonheur de lui plaire à la certitude de l'épouser sans en être aimé. » Car il apparaît que la demoiselle n'éprouve aucune inclination particulière pour le Prince, son sentiment étant d'estime tout au plus. Quoi qu'il en soit, le mariage se déroule au Louvres, mariage qui donne au Prince des privilèges mais pas davantage de place dans le coeur de sa femme.
À la cour la beauté de Mme de Clèves ne laisse de susciter de l'admiration et Jacques de Savoie duc de Nemours, grand séducteur, homme brillant de retour de Bruxelles ne peut qu'être surpris par sa beauté et lorsqu'il fut proche d'elle et qu'elle lui fit la révérence, il ne peut s'empêcher de donner des marques de son admiration, et en peu de temps faire une grande impression dans le coeur de Mme de Clèves. « Se voyant l'un et l'autre ce qu'il y avait de plus parfait à la cour, il était difficile qu'ils ne se plussent infiniment. »
Sur son lit de mort Mme de Chartres rappelle ses devoirs à sa fille et ce qu'elle doit à son époux, la met en garde quant à sa réputation si elle se laisse séduire par le duc de Nemours.
Des récits secondaires viennent se greffer sur l'intrigue centrale et illustrent la thèse centrale en attirant l'attention sur les désordres de l'amour. Ainsi la seconde partie de ce récit cite entre autres la conversation que tient M. de Clèves à sa femme au sujet de la relation entre Mme de Tournon et son amant M. de Sancerre, (ami de M. de Clèves), qu'elle trompe avec M. d'Estouville. Leur projet de mariage semble prendre mauvaise tournure car M. de Sancerre n'est pas un parti assez bon pour elle. de retour de voyage M. de Sancerre apprend et la mort subite de Mme de Tournon et son infidélité et se confie à M. de Clèves.
Également est évoquée par la reine Dauphine, Marie Stuart, à l'intention du duc de Nemours, la vie de Anne Boulen (ou Boleyn) qui fut la seconde femme de Henry VIII d'Angleterre, reine consort de 1533 à 1536 et mère de la reine Élizabeth I ère. Née en 1501, son mariage avec Henry VIII est à l'origine de la réforme anglaise, Rome tergiversant pour accorder le divorce à Henry d'avec Catherine d'Aragon. Accusée injustement de trahison, d'adultère et d'inceste avec son frère le vicomte de Rochefort, elle fut décapitée en 1536.
On ne peut que remarquer dans ce roman qui est aussi une peinture des moeurs de l'époque la précision du style dans l'action et la subtilité de l'analyse du caractère des personnages et des passions qui les animent. On peut dire que Madame de Lafayette a su concilier dans cette oeuvre la subtilité romanesque de l'esprit précieux et la vérité sobre et éternelle du classicisme. Les situations sont souvent compliquées et parfois invraisemblables.
Dans la troisième partie, on découvre la lutte de Mme de Clèves avec des rebondissements incessants pour ne point succomber au charme du duc de Nemours, quitte à s'éloigner un temps de la cour après avoir avoué à son époux qu'un prince de la cour, sans en citer le nom, la poursuit de ses assiduités et qu'elle en est touchée de passion. le duc de Nemours dissimulé derrière une porte assiste à la confession de la princesse. La jalousie de M. de Clèves va grandissante malgré la grande marque de sincérité que constitue l'aveu de son épouse. Garder le secret est le plus difficile, et des bruits courent … Mais Mme de Clèves se refuse au duc de Nemours autant par souci de sa tranquillité que par respect de son devoir d'épouse. Et puis elle lui en veut de son manque de discrétion et de son imprudence dont il s'afflige in fine : elle sait qu'elle a eut tort de croire qu'il y eût un homme capable de cacher ce qui flatte sa gloire. La troisième partie se termine sur la mort du roi lors du tournoi organisé lors du mariage de sa fille.
Après la mort du roi, la cour change complètement de face pour passer aux mains des Guise par l'intermédiaire du cardinal de Lorraine Charles de Guise qui devient le maître des finances, avec l'arrivée du duc de Guise aux commandes des armées. le connétable du roi, M. de Montmorency est le premier écarté, puis c'est le tour de Diane de Poitiers. A lieu à Reims le sacre du nouveau roi, François II, fils de Henri II, et époux de Marie Stuart.
La mort de M. de Clèves qui plonge Mme de Clèves dans une douleur et un abattement indicibles, ne laisse pas de donner espoir au duc de Nemours de conquérir définitivement le coeur de la princesse, mais c'est sans compter sur le goût du sacrifice qui habite Mme de Clèves pour honorer la mémoire de son mari. Elle va prendre une décision irrévocable en accord avec son sentiment du devoir bien que son amour pour le duc de Nemours n'ait faibli.
En définitive c'est une vue pessimiste du monde et la négation de la possibilité d'atteindre le bonheur malgré les apparences qui domine dans ce magnifique récit. L'influence du jansénisme sur le caractère de la princesse est évidente, qui met en lumière le fait que l'amour mène à la perdition et à la mort selon un destin inexorable qui nie la notion de liberté humaine.
En conclusion, un chef d'oeuvre éternel.


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La Princesse de Clèves, ou l'allégorie de la vertu.

Rappelant certains écrits de l'ère médiévale, le roman précieux de Madame de la Fayette conte à la fois bonheurs et malheurs de l'amour à la Cour. Si la première partie peut sembler lente et peine à captiver au-delà du divertissement, les trois suivantes font taire les premières craintes : l'émotion est de plus en plus vive, et le texte semble presque teinté de merveilleux. Entre passion et devoir, ce récit d'apprentissage bouleverse et donne d'autant plus de sens à l'emploi du « précieux » qui le qualifie : un chef-d'oeuvre.
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La passion amoureuse de deux êtres, la princesse de Clèves et le prince de Nemours. Il est l'un des hommes les plus en vue à la cour royale, elle est très jeune et très belle, mais aussi mariée. Un sujet intemporel !
Un cour récit dans lequel l'auteure décrit les tourments que vit cette femme car pour elle, l'infidélité est inimaginable.
La plume de Madame de Lafayette est très belle, la langue est soutenue, la description de l'état psychologique des personnages est précise.
Un très beau moment de lecture !
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Lorsque je cite ce livre comme l'un de mes 3 livres préférés, la plupart des gens sont assez surpris.
Oui, ce roman du 17ème est un peu vieillot, je n'ai rien à dire à ce sujet. Ecrit dans un français que nous n'avons plus l'habitude de lire, il est - pour l'avoir conseillé à des amis - difficile à appréhender pour des personnes qui n'ont pas vraiment l'habitude de lire.
Une fois la "barrière" de la langue passée, il y a l'histoire. Et quelle belle histoire, quelle morale magnifique. C'est certainement pour cette raison que j'aime tant ce livre.

C'est donc l'histoire d'une femme qui, comme toutes les femmes de son époque, doit épouser un homme du même rang qu'elle : un homme qui lui est plus ou moins imposé.
Le fait est que cet homme n'est pas détestable, bien au contraire ils ont beaucoup d'affection l'un pour l'autre, et elle n'est ni triste ni déçue d'être sa femme.
Mais elle est amoureuse d'un autre.
Malgré cet amour fort et unique qu'elle ressent, elle sera fidèle à son mari, même après la mort de celui-ci, et elle s'empêchera toute sa vie de vivre son grand amour, simplement parce qu'elle est fidèle au protocole et aux bonnes manières.

Nous avons souvent l'habitude, dans les romans de cette époque, de suivre des héros/héroïnes qui veulent justement s'émanciper des règles imposées par leur condition. La Princesse de Clèves est le parfait exemple de ce qui pouvait être imposé à une femme de bonne famille et on a tendance à être horrifié qu'elle ne se rebelle pas, qu'elle ne fasse pas ce qui lui plait, qu'elle se complaise dans toutes ces obligations.
Mais la réalité, c'est que c'est exactement comme cela qu'une femme devait agir à l'époque pour éviter un scandale.
C'est le sacrifice de sa vie et de son bonheur au dépens de son rang et de ses devoirs.
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Un petit chef-d'oeuvre qui montre combien les rapports humains sont tributaires d'un tyran : le langage. Dans une société où chacun cherche à s'élever, plaire ou nuire - la cour du roi Henri II -, le moindre mot, la moindre intonation, le moindre regard, un visage qui pâlit ou s'empourpre, tout, absolument tout est susceptible d'être interprété à charge ou à décharge (plutôt). Tout est langage et dit quelque chose… jusqu'au silence, lui-même traqué. Dans un tel monde avide d'intrigues et à l'affût du plus petit faux pas, prêt à en imaginer là même où il n'y en a pas, comment, quand on est une femme, ne pas être compromise et voir sa réputation aussitôt ruinée si on développe une passion amoureuse, alors qu'on est mariée à un homme qu'on respecte et estime, mais qu'on n'aime pas ? le simple fait d'aimer illégitimement, même en secret et sans satisfaire sa passion, met déjà en danger, car le sentiment peut à tout moment trahir celle qui aime et si elle parvient à dominer ce sentiment, menace encore le danger que la passion réciproque de l'autre ne la précipite, par une éventuelle impatience, maladresse ou imprudence de sa part à lui, dans la catastrophe. C'est la situation périlleuse dans laquelle vont se retrouver la toute jeune princesse de Clèves et le duc de Nemours, deux êtres d'exception qui conjuguent beauté physique sans pareille et beauté morale sans égale.

Dans ce roman, c'est incontestablement le langage qui tient le premier rôle: non seulement en raison de la prose si savoureusement précieuse de l'autrice, son art de la langue, mais aussi parce que le langage est le ressort de l'action et l'action même, les événements qui décident du destin des protagonistes étant essentiellement des événements de langage: le doute, l'étonnement, l'allusion, l'insinuation, l'affirmation, la contestation, la protestation, la question, le mensonge, etc. et bien sûr les figures de style. La passion amoureuse entre la princesse de Clèves et Nemours enclenche ce qui va ainsi constituer le contenu du livre: les discours de chacun des deux avec lui-même et avec les autres pour contrôler, autant que possible, le discours des autres entre eux et avec eux-mêmes. Il fallait tout le génie et le talent de Madame de Lafayette pour livrer une analyse de cette complexe mécanique intime et sociale qui, du début à la fin du livre, tient en haleine malgré le caractère élémentaire de l'histoire.

N. B.: Selon Geneviève Mouligneau, docteur en philologie romane de l'Université Libre de Bruxelles, la plupart des ouvrages de Madame de la Fayette publiés au XVIIe siècle seraient dus à Jean Regnault de Segrais (1624-1701), un littérateur de profession, qui fut secrétaire de la Grande Mademoiselle, et auquel on attribue désormais couramment les Nouvelles françaises ou Divertissemens de la princesse Aurélie, parmi d'autres ouvrages. Geneviève Mouligneau ajoutait même que des lettres de la correspondance de Lafayette, que l'on tenait pour authentiques, n'étaient que des faux du XIXe siècle.
Voir: https://contagions.hypotheses.org/881
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Quand elle commença d'avoir la force de l'envisager, et qu'elle vit quel mari elle avait perdu, (...)______ qu'elle eut pour elle−même et pour monsieur de Nemours ne se peut représenter.

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