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3,45

sur 5899 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
93 critiques! Merci Sarko! oui, vous avez bien lu: notre inculte à talonnettes a plus fait pour la promotion de ce merveilleux livre que des générations de professeurs dévoués et que la beauté radieuse de Marina Vlady dans le film de Cocteau!

Depuis, on voit fleurir sur les boutonnières des badges "J'aime la Princesse de Clèves" , presque aussi populaires que la langue tirée des Stones, ou le "save water, bath with a friend" qui a eu ses heures de gloire dans un temps que les moins de ...tuit ans ne peuvent pas connaître!

Bref, gloire aux incultes qui ont assuré sans le vouloir la promotion de ce petit livre aigu, fouillé, premier roman classique -et non de chevalerie- , écrit par une femme qui plus est, encore empreint des foisonnements de la préciosité baroque -ah, les interminables panégyriques sur les plus belles, les plus nobles, les plus fameuses princesses qui fussent jamais venues en cette cour...-, mais qui a su néanmoins dessiner avec une fermeté toute classique les lignes de force de tous les futurs romans d'amour français.

J'entends par là: il est beau, mais volage, elle est belle mais prude, mais mariée, ils s'aiment, ça ne peut pas coller, ça ne collera jamais, ils se séparent.

L'amour passion, celui qui fait souffrir, au point qu'on se demande si on n'aime pas mieux la souffrance, qui vous rend si vivant, tout à coup, que cet amour lui-même....Voir Denis de Rougemont pour le reste...

Les scènes fortes ne manquent pas: le vol du portrait, sorte de mise en abyme, genre étiquette de Banania...On fait le portrait de la Princesse, immobile, elle voit le duc de Nemours voler ce petit portrait, et ne peut intervenir car la scène se passe dans un salon, il voit qu'elle l'a vu, et elle voit qu'il l'a vue le voir...Vertige!

Pas mal non plus, la scène de la canne qui a fait fantasmer plus d'un psychanalyste: le duc est venu épier la princesse en son château de campagne où elle a fui pour l'éviter: de nuit, il l'aperçoit qui enrubanne lascivement une canne, la sienne, oubliée lors d'une visite, qu'elle la caresse, la tourne et la retourne entre ses doigts fins, le regard brouillé, dans le simple appareil d'une beauté qu'on vient d'arracher au sommeil...je m'égare!

Je me souviens d'une explication de cette scène, faite à la fac par un jeune étudiant boutonneux, complexé mais néanmoins plein d'audace, qui se livra à un décodage sexuel, jungien ou barthésien, d'une grande limpidité, tout en balançant fiévreusement son pied droit couvert d'une chaussette rouge, tandis que le gauche, couvert d'une chaussette bleue, restait fixé au sol, impavide (je jure sur la tête de madame De La Fayette que je n'invente rien!).

Notre aimable professeur, toujours courtois, poli, civil, d'habitude, devenait de plus en plus rouge de fureur rentrée, et quand le jeune homme eut fini ses incongruités, il éclata en anathèmes virulents contre la nouvelle critique...et ses adeptes!

Voilà un livre puissant , songeais-je sur mon banc, en réprimant à grand'peine un fou-rire (nous avions en ce temps que les moins de ...tuit ans etc.. le respect de nos professeurs et de leur autorité), un livre, dis-je, qui est capable de susciter des polémiques et des interprétations ultra-modernes trois siècles après avoir été écrit!

Je le pense toujours aujourd'hui: "Save classicism, bath with the duke of Nemours!"


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J'ai un amour certain pour le XIXème siècle en littérature, le siècle du roman avec Balzac et Zola notamment, mais aussi Dumas, ou Hugo, un siècle riche en grandes signatures. le XVIIIè reste pour moi celui des philosophes, avec Rousseau, Voltaire et Diderot. Je suis même remonté, plus rarement, au XVIème siècle, avec les histoires fantastiques de Rabelais, où la poésie d'un Ronsard ou d'un Du Bellay.

Et le XVIIème me direz-vous ? J'en connais bien sûr le théâtre (le trio Molère, Racine, Corneille) et les fables De La Fontaine. Mais je n'aurais pas forcément imaginé du roman à cette époque-là. Et comme vous l'aurez sans doute remarqué, je n'ai pour l'instant cité que des hommes. Et là nous voilà face une auteure, Madame de la Fayette. Alors que ce roman est régulièrement cité par des Babeliotes, comme une lecture scolaire, imposée rébarbative, je n'ai jamais eu de mon côté la chance de le croiser sur ma route.

Je dis chance parce que j'ai été absolument bluffé par la modernité du propos, et même du style. Il y a dans ce roman l'essentiel des thèmes qui feront les Scènes de la vie privée De Balzac, mais également une évocation saisissante de la vie de Cour. J'avais craint de retrouver les tournures un peu ampoulées qu'on a l'habitude de rencontrer chez Molière ou Racine, mais c'est sans doute la recherche de poésie, de la rime qui conduit leur style.
En effet malgré un classicisme certain, la phrase de Madame de la Fayette se parcourt aisément, sans rupture, sans retour en arrière pour saisir le sens. Alors qu'un Rabelais fait sentir tout le poids de son ancien français pour la compréhension, on se sent ici en terrain connu, pas dépaysé.

J'ai également trouvé intéressant l'utilisation du récit dans le récit qui permet à l'auteure de faire conter par certains personnages une partie des anecdotes historiques qui retracent le contexte : les histoires des femmes successives d'Henri VIII, les intrigues de Cour en France. Ces passages étaient sans doute destinés à l'époque à informer le lecteur des cachotteries des plus grands, qui ne devaient pas être aussi connues qu'aujourd'hui. C'est d'autant plus brillant que cela met particulièrement en exergue l'histoire principale de cette princesse de Clèves, coincée entre mariage raisonnable et passion interdite. A une époque où les mariages étaient systématiquement arrangés, notamment dans ces familles nobles et où les passions s'exprimaient par des relations adultérines quasiment connues de tous, le choix de l'héroïne de se tenir à ses engagements aura finalement des conséquences plus tragiques que le choix de la duplicité et de l'hypocrisie. le message est complexe, on aurait presque envie de se moquer de l'héroïne dans certains de ses entêtements, et même les contemporains trouvaient son comportement "invraisemblable" comme l'indique Marie Darrieussecq dans une préface, alors que notre époque le trouve juste "idiot". En tout cas, l'histoire fait réfléchir sur les choix d'une vie, sur la manière de les assumer ou de suivre ses envies sans les respecter.

Je disais plus haut que je n'avais pas eu la chance de lire ce roman pendant mes études. Les jeunes lecteurs auraient sans doute du mal à me comprendre, se rappelant leur peine face à l'analyse de formulations estimées "précieuses", à l'image d'un Sarkozy qui avait moqué le roman lors de sa candidature à l'élection présidentielle. Une levée de boucliers pour protéger ce classique de la littérature française avait eu lieu, à juste titre. En effet, quand je parle de modernité, c'est bien évidemment relativement à son époque, il y a 400 ans tout de même. Quand on regarde bien et qu'on observe toute l'influence qu'elle a pu avoir sur les romanciers, notamment ceux du XIXème, on ne peut qu'être admiratifs de cette époque où les romancières prenaient toutes leur place et dépeignaient si bien l'ambiance d'intrigue de la Cour du Roi Henri II.
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Autant la lecture de "Roméo et Juliette" du grand Shakespeare m'avait laissée de marbre, autant j'ai vibré de tout mon cœur pour "La Princesse de Clèves" de Mme de La Fayette, cet autre grand drame amoureux et passionnel.

Quelle séduction irrésistible exerce notre belle langue sur le lecteur !
La relation sentimentale qui unit Mme de Clèves et M. de Nemours, et qui s'inscrit dans le contexte brillant quoique fort complexe de la Cour de France, trouve peu d'égales dans la littérature française, de par sa dimension dramatique et sa profondeur psychologique. La narration est si enlevée que j'ai souvent eu le sentiment de lire Dumas. Le combat que livre Mme de Clèves contre ses sentiments, par devoir et par vertu, a de quoi inspirer tous les poètes ; la persévérance et la fidélité du malheureux M. de Nemours - un homme pourtant si bien fait pour attirer la gloire et pour plaire à toutes les femmes - livrent quant à elles une figure d'amant peu commune qui préfigure presque le romantisme, pourtant bien plus tardif.

Le seul avertissement qui me vient à l'esprit à l'heure de recommander la lecture de "La Princesse de Clèves" est qu'il vaut mieux avoir quelques connaissances historiques sur le règne d'Henri II, au risque de se sentir un peu perdu dans l'amorce du roman.

Je conseille également vivement de découvrir la majestueuse adaptation cinématographique réalisée en 1961 par Jean Delannoy (cf. lien ci-dessous).


Challenge PETITS PLAISIRS 2014 - 2015
Lien : https://www.youtube.com/watc..
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Au XVIe siècle, à la cour du roi Henri II, la Princesse de Clèves, récemment mariée, fait la connaissance du duc de Nemours et il se produit entre eux ce que l'on appelle aujourd'hui un « coup de foudre ». D'un côté, Monsieur de Nemours est un séducteur à la beauté irrésistible et de l'autre Mme de Clèves est très attachée au respect de ses devoirs matrimoniaux. Ce roman à l'histoire simple mais ô combien puissante est le premier roman d'analyse psychologique de l'Histoire de la littérature.

La profusion de verbes conjugués fait qu'au fil des pages chaque phrase palpite de vie, frémit d'inquiétude, brûle de désir ou est mortifiante de désespoir. Les moindres soubresauts de l'âme de Mme de Clèves sont passés au crible avec une acuité et un raffinement dans l'analyse tels qu'on pourrait croire cette histoire authentique tant elle vibre d'une sincérité que l'on ressent viscéralement.

Il n'est pas facile de bien entrer dans ce livre qui requiert de grands efforts de concentration. le plaisir est cependant à la mesure de l'effort.

Mme de la Fayette y peint admirablement les rudesses de la vie à la cour où il est difficile pour Mme de Clèves de concilier la dissimulation de ses sentiments avec les transports de joie que font naître la vue et la compagnie de l'être désiré ; un être désiré malgré soi avec une inclination irrépressible qui brouille le jugement.

Cependant Mme de Clèves parvient à réfréner sa passion, contrairement au duc de Nemours qui saisit toutes les occasions de se trouver en sa présence, croiser son regard et converser avec elle. Il éprouve ainsi sa résistance et la jette dans des affres vertigineuses. Ne pouvant la fléchir, il dépérit, vit avec un vague à l'âme et finit par ne plus s'intéresser à aucune autre femme.

Le livre est ponctué de moments de grande intensité où l'on tremble pour ces êtres soumis à la rigidité et à la cruauté du fonctionnement de la cour qui, machine implacable, peut broyer en un éclair un gentilhomme ou une dame que la force de sa passion a poussé(e) à découvrir le point le plus vulnérable de son être au risque de se compromettre définitivement.

Mme de la Fayette évite les écueils de la monotonie en entrecoupant son histoire de péripéties savoureuses comme le quiproquo avec le Vidame de Chartres et relate la joute qui fut fatale au roi.

La princesse de Clèves exprime aussi l'obéissance scrupuleuse aux devoirs de la morale religieuse qui font de Mme de Clèves une sainte de la littérature, ce qui confirme qu'il s'agit bien d'un roman.

Cette histoire, vue avec les yeux des lecteurs de ce début de XXIe siècle, peut donner envie de sourire. Il faut pourtant tenir compte de l'époque à laquelle elle appartient. Elle nous permet d'en voir les moeurs tout en faisant vibrer chez le lecteur d'aujourd'hui les fibres immuables de ce qui fait de nous des êtres humains.
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A contre-courant de notre temps (mais aussi du temps de l'auteur, ce début de règne baroque, tourné vers la fête et les plaisirs), le roman de la Princesse de Clèves indique la voie de la rigueur, du refus de la facilité, la voie de la contrainte que l'on s'impose à soi-même par souci de soi, de sa dignité, de sa "gloire", comme on disait alors. Il s'agit moins, pour l'héroïne, de la crainte de l'enfer ou des conséquences du mal, que de se refuser à tout avilissement, à toute dégradation de soi : or suivre sa pente, dans ce roman, c'est perdre sa valeur et sa fierté. C'est par orgueil (et crainte de souffrir) qu'elle ne pèche pas. L'héroïne aspire à autre chose, à plus grand et plus beau que le bonheur, qui est devenu pour nous, aujourd'hui, la valeur suprême : agir dignement est le souci de cette jeune aristocrate. Il n'est donc pas surprenant que ce roman ait encouru les foudres de tous aujourd'hui, du Président Sarkozy lui-même au moindre lycéen inculte, sans oublier la cohorte des enseignants gauchistes qui firent mine de redécouvrir le livre. Il nous prend tous à rebrousse-poil en nous disant qu'il y a mieux, plus haut, plus beau et plus noble que le bonheur.

Voilà pour la morale. Il reste deux obstacles à franchir pour entrer dans ce court roman et en tirer tout le profit possible : d'abord, l'erreur d'y voir un "roman historique" à la façon de Walter Scott ou ... Christian Jacq : Mme de La Fayette vit en un temps où la particularité historique, le pittoresque des âges anciens, ne sont pas conçus. Il suffit de voir les grands tableaux d'histoire et l'indifférence avec laquelle on traitait la vraisemblance historique des costumes et des décors. La cour du roi Henri II, c'est Saint-Germain ou Versailles. Il faut attendre un siècle et demi et le Romantisme pour voir apparaître ce goût du pittoresque, à la naissance du roman historique.

L'autre obstacle est celui de la langue. Pour nous, qui sommes habitués au français littéraire contemporain appauvri, et déshabitués du français recherché, la langue de ce roman nous semblera difficile, inutilement compliquée. Les ignares diront "ampoulee". Un petit effort de relativisme et de tolérance nous est demandé, et le français du XVII°s, avec l'habitude, devient clair. Et s'il reste des passages compliqués, surtout ceux qui sont consacrés à l'analyse des sentiments ou aux argumentations, c'est que les personnages eux-mêmes ne vivent pas dans des situations simples, mais sont pris dans un lacis de valeurs et de situations contradictoires. Kundera disait que le roman est l'apprentissage de la complexité : il vaut mieux faire cet apprentissage avec ce beau roman, que de ne jamais soupçonner qu'il existe des complexités en ne lisant que des prix Goncourt.

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Tous les hommes sont des salopards, ils ne pensent qu'à une chose et on ne peut qu'être malheureuse à leur contact, l'a prévenue sa Mère. Donc, seule chose à faire pour la princesse de Clèves : se prémunir, surtout ne pas aimer, ne pas s'éclater, ne pas désirer, c'est mal, et se marier mine de rien sans rien faire, voilà la solution. N'avoir confiance en rien concernant les sentiments, et surtout pas en ses propres sentiments, et encore moins en soi même.
Quand le prince de Clèves l'aperçoit (seule, sans sa mère, tiens) il tombe éperdument amoureux d'elle… parce qu'elle belle, blanche et blonde, raisons qui nous paraissent futiles, mais, passons. Et puis , il note au passage qu'elle est riche, là encore, passons.
Et elle, la Mère, ne consent au mariage qu'après la mort du père de Clèves, un ennemi de moins, et surtout, surtout, parce que sa fille n'en est pas amoureuse.

Tu peux choisir d'être heureuse, à condition de ne l'être jamais, lui dit elle.
D' ailleurs, c'est moi ta meilleure amie, et tu dois me dire tous tes secrets.
La gamine a 16 ans, Madame de Lafayette insiste sur ce point : Comment pourrait elle livrer à sa mère des secrets d'alcôve, mieux vaut n'avoir rien à raconter, non ?

Comment peut elle se libérer de la manipulation maternelle ?

En fait, jamais.

Car la Mère préfère encore mourir ( et elle le fait) que de la savoir amoureuse en vrai. Alors le mari, transparent et absent, amoureux transi reprend la manipulation en héritage, en demandant à sa femme « soyons amis, dites moi tout » et la conclusion, identique : mieux vaut crever que de savoir que la petite bécasse sera heureuse.

Je dis bécasse, parce qu'elle aurait mieux fait d'écouter Goldman plutôt que sa mère : « Ne lui dis pas, ça sert à quoi, on n'avoue rien si on est innocent » et elle qui a tout fait pour obéir aux injonctions de sa mère, avoue au mari qu'elle essaie de ne pas penser à Nemours.
Aurait elle pu après ces deux deuils, mère et mari, deuils dont elle se sent coupable, revenir à un état d'esprit antérieur à la perte ?

Madame de Lafayette n'a pas lu Freud, mais elle analyse la confrontation à la réalité lors de la perte de la personne aimée. Cette épreuve de réalité exige le retrait de toute la libido, et affirme l'attachement aux interdits anciens même si ils ne sont plus que le fruit de l'imagination.
Abandonnée par sa mère, la princesse de Clèves ne veut pas s'abandonner à l'amour passion qu'elle partage avec le duc de Nemours, par peur d'être abandonnée.
Bingo, la mère a gagné.


Ceci est ma lecture , personnelle, de ce roman à la fois historique, témoignage des moeurs galantes du XVII siècle, et, à mon avis, extrêmement moderne, racontant l'emprise d'une mère sur sa fille .
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Il faut être surpris pour aimer.'Je serais incapable de devenir amoureux d'une personne avec qui je serais accoutumé et, si je ne puis être surpris d'abord, je ne puis être touché. Je crois que les inclinations naturelles se font sentir dans les premiers moments et que les passions qui viennent que par le temps, ne se peuvent appeler de véritables passions', nous confie Mme de la Fayette dans Zaïde.
La curiosité s'agite, le coeur se tait.
Que pourra faire Cordelia? Aimer et se taire.
Le repos, c'est une mort volontaire. Les passions qui nous divertissent font aussi notre malheur.
Le besoin de remuement pascalien, à défaut de pouvoir rester tranquille, en repos dans une chambre.
Nous aimons ces tourments, car 'le repos entier est la mort'.
La Princesse de Clèves choisit cette mort volontaire... la fuite, le retrait, la retraite, la sauvegarde.
La sublimation existe, dit Michaux. Non est un meurtre sublimé.
La vertu ne serait-ce alors qu'une stratégie de défense, de légitime défense, inspirée par la seule crainte des passions? Un réflexe de protection déclenché par des peurs anticipatives mais improbables...
La querelle des anciens et des modernes. Georges Sand versus Mme de La Fayette.
Les désordres de l'amour et le choix de la Princesse de Clèves/Mme de la Fayette, alias Marie-Madeleine Pioche de la Vergne.
De ce choix, de ce sentiment de résistance naît le vertige, l'immense désir de tomber. A mesure que l'on a plus d'esprit, les passions augmentent, nous rappelle Pascal dans son Discours sur les Passions de l'amour.
Mme de la Fayette, donc la passionnée.
Son repos? ses deux graves soucis: la littérature et l'amour.
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Je tiens à remercier Monsieur Nicolas Sarkozy qui, lorsqu'il assurait la fonction de président de la République, donna une seconde vie à "La Princesse de Clèves" et, par la même occasion, me poussa à lire cette oeuvre majeure de la littérature française. Je lui suis donc très reconnaissant d'avoir, comme les dévots du XVIIIe ont pu le faire avec les oeuvres voltairiennes par exemple, permis à une oeuvre de s'adjuger de nouveaux lecteurs par le seul fait qu'elle soit blâmée publiquement. A quand le prochain opprobre littéraire depuis qu'un autre grand lecteur a succédé au petit Nicolas ?
Mais tout cela ne nous dit rien de cette oeuvre emblématique. Si la longue description introductive de la cours du roi de France sous le règne d'Henri II n'est pas une partie de plaisir, le récit commence vraiment à devenir intéressant lorsque ses deux principaux protagonistes entrent en lice : la fameuse princesse de Clèves et le non moins célèbre duc de Nemours. Il faut avouer que Madame de Lafayette a un léger penchant pour l'hyperbole. On ne peut pas imaginer amants aussi parfaits, tout n'est que luxe, beauté, intelligence et raffinement. La perfection est si proche que le récit basculerait presque dans le conte merveilleux. Mais tout est si remarquablement bien raconté que l'on se laisse porter malgré cet effacement de la rationalité. Balzac est encore loin, laissons Madame de Lafayette donner au roman ses lettres de noblesse.
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Nouvelle (re) lecture pour l'aide aux devoirs...
Je ne livrerai pas de commentaire, pour dire, à mon tour, tout l'intérêt de la lecture de ce roman qui parle d'honneur, de plaisir, de devoir , de sentiments, de rêves d'amour qui embellissent la vie, chassent l'ennui, mais qui demandent , quand il faudrait les concrétiser, volonté, courage, franchise, loyauté et cela tue...
Je me bornerai à citer Camus dans « L'homme révolté – Révolte et Art »
« Qu'est-ce que le roman […] , sinon cet univers où l'action trouve sa forme, où les mots de la fin sont prononcés, les êtres livrés aux êtres, où toute la vie prend le visage du destin. le monde romanesque n'est que la correction de ce monde -ci, suivant le désir profond de l'homme. Car il s'agit bien du même monde. La souffrance est la même, le mensonge et l'amour. Les héros ont notre langage, nos faiblesses, nos forces. Leur univers n'est ni plus beau ni plus édifiant que le nôtre. Mais eux du moins, courent jusqu'au bout de leur destin et il n'est même jamais de si bouleversants héros que ceux qui vont jusqu'à l'extrémité de leur passion, Kirilov, et Stravroguine, Mme Graslin, Julien Sorel ou le prince de Clèves. C'est ici que nous perdons leur mesure, car ils finissent alors ce que nous n'achevons jamais.
Mme de la Fayette a tiré la Princesse de Clèves de la plus frémissante des expériences. Elle est sans doute Mme de Clèves, et pourtant elle ne l'est point. Où est la différence ? La différence est que Mme de la Fayette n'est pas entrée au couvent et que personne autour d'elle ne s'est éteint de désespoir. Nul doute qu'elle ait connu au moins les instants déchirants de cet amour sans égal. Mais il n'a pas eu de point final, elle lui a survécu, elle l'a prolongé en cessant de le vivre, et enfin personne , ni elle-même, n'en aurait connu le dessin si elle ne lui avait donné la courbe nue d'un langage sans défaut. »
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« Ressuscité » dans l'opinion publique « grâce » aux déclarations « inspirées » d'un chef d'Etat plutôt amateur de résultats sportifs que de belles lettres, La Princesse de Clèves n'a pourtant, depuis sa publication au XVIIe siècle, jamais cessé d'attirer des lecteurs, lesquels remercient tout de même « chaleureusement » ledit chef d'Etat pour sa publicité spontanée !
Balzac ne s'y était pas trompé, qui affectionnait particulièrement cette princesse, au point de créer un personnage féminin très semblable, résistant lui aussi à une passion envahissante : la comtesse Henriette de Mortsauf, dans le Lys dans la vallée, autre histoire d'un combat entre l'amour et le devoir.
Car nous avons ici affaire à un récit non seulement romantique avant l'heure – je parle du courant littéraire, pas des mièvreries insipides à la sauce Saint-Valentin ! –, mais en plus d'une élégance à vous faire pâlir d'envie.
Racontant un amour impossible parmi les cours du roi Henri II et du très éphémère François II, Madame de la Fayette en profite aussi, par un anachronisme volontaire plein de finesse, pour décrire celle de Louis XIV, avec ses secrets d'alcôve et ses intrigues.
Roman d'une déconcertante facilité à lire, car, pour autant que le style peut paraître désuet – diront certains que l'absence de vulgarité dans un texte effraie au moins autant que moi, les piqûres ! – il est d'une extrême fluidité.
Ecrit par une femme « bien née », il ne pouvait être en fait que cela : un modèle de vertu, d'intelligence et de style !
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La Princesse de Clèves (IV Partie)

Quand elle commença d'avoir la force de l'envisager, et qu'elle vit quel mari elle avait perdu, (...)______ qu'elle eut pour elle−même et pour monsieur de Nemours ne se peut représenter.

l´haine
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l'horreur
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