Pièce de
Marc-Michel (qu'on oublie toujours, le pauvre) et de
Labiche datant de 1852, Edgard et sa bonne me semble un bon exemple de ce qu'allait et aimait voir le public des boulevards.
C'est un vaudeville construit sur un prétexte on ne peut plus conventionnel : Edgard Beaudeloche a une liaison avec la femme de chambre, Florestine, alors que sa mère lui a d'ores et déjà arrangé un mariage avec la jeune Henriette Veauvardin. La pièce se déroule d'ailleurs le jour-même où le contrat de mariage doit être signé. Edgard cherche à se défaire de Florestine tout en lui mentant impudemment sur son mariage imminent. S'ensuivent les péripéties habituelles. On pense à La puce à l'oreille de Feydeau, qui est d'une autre envergure...
Tout l'intérêt de ce vaudeville tient dans la rapidité des échanges et des déplacements des personnages, car c'est véritablement mené au pas de charge. À la lecture, évidemment, pas simple de suivre ce rythme effréné. Autre problème toujours inhérent à la lecture : de nombreuses chansons sont intercalées entre les dialogues. Il paraît donc évident que ce n'est pas du tout un texte à lire. Cela dit, je ne suis pas certaine que j'aurais aimé la musique si j'avais assisté à une représentation... Ce serait sans doute plus drôle qu'à lire, certes, mais qu'est-ce que l'intrigue est convenue ! Ce qui sauve le tout, c'est la fantaisie quelque peu débridée qui apparaît par le biais du futur beau-père d'Edgard, avec son projet de remplacer des cochons chasseurs de truffes (mais qui mangent ces mêmes truffes) par une somnambule extra-lucide (qui trouvera mais ne mangera pas les truffes, comme c'est bien pensé !) On sent, malgré ça, que
Labiche et
Marc-Michel ne se sont pas trop fatigués, ont fait ce qu'il savaient faire, et donné au public de l'époque exactement ce qu'ils voulaient, sans plus d'ambition que ça.
Avec toutes les pièces écrites par
Labiche (172, je crois, publiées en oeuvres complètes avec son accord, mais bien plus au total), on se doute bien qu'une bonne partie ne relève pas du meilleur. Comment choisir ? Au moins, comme lorsqu'on lit Scribe ou Meilhac, on a avec Edgard et sa bonne une idée de ce qui plaisait en 1852 : ça ne rapportera guère de profit qu'aux gens intéressés par l'histoire du
théâtre, et plus particulièrement à l'histoire du
théâtre français du XIXème, et plus spécifiquement à l'histoire du
théâtre de boulevard du XIXème. Ce qui ne fait pas forcément grand-monde, hein.