Ce superbe premier roman de
Malek Lakhal nous emporte dans la danse des non-dits, des soupçons et des oublis: cette "
Valse des silences" qui pèse sur nos épaules et détermine notre parcours.
On a tous nos petits ou grands secrets, mais dans l'histoire d'Ahmed il s'agit d'autre chose. le silence est structurel.
Il y a d'abord le poids des mots "ce pays", "les gens", "la pauvrette" au sujet de la tante Fédia, qui paye cher sa liberté et sa parole. "Maktoub", comme une sentence qui tombe.
Et puis il y a le poids de tous les autres mots, ceux qu'on ne prononcent pas. Sous la contrainte de la colère, de la peur ou de la honte, et qui conduisent inexorablement à la frustration ou la compromission.
Les silences de la société se retrouve dans les familles et entre les individus. Ils touchent finalement tout le monde, ce que la construction parfaite de l'ouvrage nous permet d'entrevoir: toutes les générations, et mêmes celles et ceux qui ont choisi de mettre de la distance - mentale ou géographique. Tunis ou Paris même combat.
Mais dans les derniers instants, ces silences subis ou provoqués deviennent encore plus encombrants.
Dans ce récit à plusieurs voix, et bien que le personnage principal soit un homme, on lit aussi les femmes, celles qui endossent sans rien dire, celles qui osent dire et puis se taisent (mais n'en pensent pas moins), celles encore qui fuient pour pouvoir être elles-mêmes.
J'ai été conquise dès les premières pages par un style doux et des mots durs. Ceux qui l'ont prononcent et ceux que l'on ne prononcent pas.
Chez Lattès, évidemment ❤
《La phrase à retenir》
"Maktoub. le mot flotte dans l'atmosphère,prêt à traverser les lèvres. C'était écrit haut dans le ciel, inéluctable. Toujours la même farce à rejouer. Encore et encore, s'assommer de destin."