Un second tome tout aussi puissant et poignant que le 1er.
Le mystère qui planait tout au long du 1er tome cède ici la place à une plongée dans le passé du village. Les failles et cicatrices sont ouvertes et exposées, les non-dits sont explicités. Mais
Larcenet réussit le miracle de demeurer très pudique, malgré l'indicible qui est ici raconté, il n'y a pas de déballage malsain, pas de voyeurisme.
Il nous montre les Hommes dans ce qu'ils ont de plus laid, cédant à la lâcheté et même parfois à la barbarie et pourtant
Larcenet ne prétend pas les juger de façon péremptoire. Après tout, ils sont nos semblables, ils sont nous. Derrière les horreurs qu'ont commis ces Hommes il y a souvent la peur. Décidément, la peur me semble être un noeud central de cette histoire. Même si la peur n'est pas le seul thème de cette oeuvre très riche, elle est au coeur du récit. Elle est la cause de bien des maux. C'est par peur que les villageois laissent l'armée d'occupation entrer dans la ville, c'est par peur qu'ils se taisent lorsque l'un des leurs est exécuté sommairement, c'est par peur qu'ils se rendent complices de l'épuration.... Et n'est-ce pas, malheureusement, terriblement humain que de renoncer à son humanité par peur... J'ai eu l'impression que
Larcenet, sans excuser les villageois, cherchait à comprendre et à rappeler que cette origine du mal qu'est la peur est en chacun de nous. D'ailleurs les seuls personnages dont l'auteur ne cherche pas à expliquer le comportement sont les soldats nazis et ils sont représentés sous la forme de monstres, les excluant ainsi de fait de l'Humanité, eux qui ne sont pas mus par la peur mais juste par le désir de dominer et détruire.
Larcenet a signé là une oeuvre magnifique, une de celles qui marque un lecteur pour toujours. J'ai été plus qu'émue, saisie par certaines planches qui m'ont fait pleurer sur l'Humanité, sa laideur et sa faiblesse mais aussi sa beauté et sa tendresse. Ces éclats de lumière sont certes rares et brefs mais ils irradient d'une telle puissance qu'ils redonnent de l'espoir et donnent un sens à la vie. Ces lueurs ressemblent à des scènes toutes simples, par exemple à un homme qui étreint son enfant. C'est simple mais tellement beau, ça n'a l'air de rien et pourtant c'est immense. Comme cette oeuvre magnifique.