«
Mausolée» est un roman original que l'on devine imprégné d'une part autobiographique importante: c'est le récit, à travers le prisme de trois générations de femmes, de la vie quotidienne d'une famille dans la Bulgarie communiste, de 1944 aux années 90.
La principale narratrice est Milena, la plus jeune des trois femmes, qui dépeint donc comment chacune d'elle, a, à sa manière, tenté de résister au système.
On lit ce livre d'une traite même si il n'y a pas d'intrigue à proprement parlé: c'est l'histoire magnifique d'individualités luttant au quotidien contre un régime qui cherche à les «dissoudre» par la peur, la honte, la monotonie et la répétition.
Le roman débute par l'arrestation de Peter, jazzman, le grand-père de Milena, qui sera fusillé du fait de son activité subversive. Vingt ans plus tard, c'est au tour de Sacho le Violon, son ami de disparaitre. Autour de ces deux événements, la vie continue mais chacun doit composer car depuis l'école jusque dans la vie professionnelle et quotidienne, chacun dépend du bon vouloir du Parti.
Le récit narratif est singulier:
Rouja Lazarova alterne le roman à la première personne et à la troisième comme si il y avait deux Milena, celle d'avant et d'après la liberté. le roman est surtout écrit au présent, «temps plat, sans relief, sans nuances, un présent qui n'en finit pas, qui écrase le passé et l'avenir dans un magma pesant comme un jour sans espoir.»
Ce qui est interpelle également, c'est la description de la chute du communisme et le fait que la vie ne devient pas rose pour autant «après»: les personnages du «monde souterrain» c'est à dire la mafia font leur apparition et la corruption est toujours aussi présente. On découvre aussi que parmi les très proches pouvait se cacher un traître.
Enfin, que faire de cette liberté à laquelle on a aspiré toute une vie? Elle, «dont ils avaient une vision romantique s'est révélée à eux sauvage et cruelle».
Ce livre témoignage nous imprègne parfaitement de la manière dont de nombreuses populations ont vécu à l'est sous l'ère communiste et nous démontre comment malgré tout, la résistance individuelle est toujours possible.