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EAN : 9782841110513
203 pages
Editions Nil (23/05/1996)
3.5/5   29 notes
Résumé :

« Depuis trois semaines, la couleur de la lumière change presque tous les jours, les haies et les bosquets de saules commencent à s'éclaircir. Je guette par la fenêtre la cavalcade des nuages, au large, leurs ombres qui se font la course sur le champ labouré en contrebas. Un trait de lumière passe sur la mer comme une vague, s'enfle à toute vitesse, submerge le rivage, les arbres du Cosquer, et disparaît. Des taches d'encre noire envahissent le ciel, puis s... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (7) Voir plus Ajouter une critique
"Le vent siffle dans les joncs, une odeur lourde monte autour de moi. Un cri doux, guttural, me fait sursauter : l'appel, insistant, des bernaches cravants dans un champ d'algues vertes. Un pas encore, et elles s'envolent, pesantes, dans un fracas qui longuement résonne. Des dizaines, des centaines de bernaches, d'un noir de suie, des harles huppés, des canards colverts, des tadornes, des pluviers, des huîtriers-pies, des hérons cendrés, des aigrettes, dans un seul et interminable froissement d'ailes.
Je reste là, longtemps. Oui, ce peut être cela aussi, le monde, avec ce ciel immense et bleu au-dessus de soi..."
Le premier chapitre du livre se termine par cette phrase, et l'énumération qu'elle comporte. C'est une manière d'écrire chère à Michel le Bris, ici elle lui permet de donner vie à un paysage, et bientôt il l'utilisera pour faire mieux remonter de sa mémoire, et de l'Histoire, tels des fantômes, tous les marins de légende de son coin de Bretagne.
Car si le premier chapitre, encore calme, décrit "la beauté du monde", le deuxième, d'un coup, plonge dans les souvenirs d'enfance de l'auteur.
Le lecteur n'a plus qu'à suivre avec les siens, de souvenirs, (il a certainement lu L'ancre de Miséricorde, l'île au Trésor, les romans de Stevenson), et voilà l'enchantement réussi : il écoute les histoires du père le Floch, "réfugié dans un coin de la pièce" avec l'auteur, il "boit ces paroles, bouche bée", pendant que, dehors, "le vent aboie comme une meute de chiens galeux".
- "Tu connais l'histoire du père Noan, revenu du Chili à la rame ?"
Même enfant, Michel le Bris est un peu sceptique, mais il préfère n'en rien dire : parce qu'il "craint trop la réponse". "Et puis, à quoi bon ? Les histoires sont toujours vraies, mais d'une autre manière. Surtout lorsqu'elles restent vivantes plus de quarante années."
Alors, comme dans une Chanson de Geste, il fait revivre les hauts faits de la région de Morlaix : "Un nid de corsaires ! " soutenait le père le Floch ! Il ne croyait pas si bien dire."... "De hardis marchands, aussi - autrement dit des pirates, en ce XVe siècle où Arabes, Espagnols, Bretons et Anglais se détroussaient à qui mieux mieux, hors des regards indiscrets, tout en continuant à commercer fort civilement."
L'auteur s'est documenté, je vous laisse découvrir l'histoire "vraie" au milieu de la saga légendaire.
Et voilà Michel le Bris énumérant les "noms emportés par l'histoire", et le lecteur le suit, émerveillé : "Hervé de Porzmoguer, Yvon le Cheny, Roland le Faucheux, François du Quelennec, et tant d'autres encore... ils guettaient tous, embusqués derrière l'île de Batz, les navires anglais, flamands, hambourgeois, qui revenaient chargés de cargaisons précieuses des Antilles, fondaient sur eux comme des oiseaux de proie, avant de disparaître dans l'île de Sieck."
Il va sans dire que le lecteur doit oublier, pour un temps, ses principes...
Et voilà bientôt l'arrivée des corsaires du XVIIIe, "soixante quatorze armements corsaires à Morlaix !" ... "Ils furent des dizaines, Hervé de Kersauzon, Jacques Hallegouat, Lézard du Buisson, Jean Labbé, Pierre Maudret, Guillotou de Kerdu"..." tant d'autres encore, oubliés de l'Histoire, à se lancer à l'aventure depuis Roscoff ou Morlaix sur des bateaux jaugeant pour la plupart moins de dix tonneaux, avec des équipages de fortune..."

Je vous laisse poursuivre seuls, j'ai voulu vous donner un avant-goût de ce livre qui ravira tous les amoureux du genre. C'est avec plaisir que j'ai retrouvé ici le style de Michel le Bris, que j'avais apprécié dans plusieurs des préfaces qu'il a écrites pour les Editions Phoebus. Et que j'ai tenté de vous faire entrevoir, si vous ne le connaissez pas encore.

NB Je n'ai pas pu mettre un H majuscule à histoire lorsque j'aurais du le faire, parce que le site ramenait alors obligatoirement à un livre intitulé l'histoire (avec un grand H), qui n'a rien à voir avec le sujet.


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Ce livre, emprunté à mon père, nous emmène en Bretagne dans la Baie de Morlaix.
L'auteur nous fait visiter le littoral de son enfance au travers de ses souvenirs et d'anecdotes sur le passé de la Baie, les corsaires et autres marins...
Etant originaire de la région, j'ai été touché par la retranscription des lieux, des couleurs, des odeurs, de l'atmosphère qui règnent sur ce bord de mer.
J'ai vécu un beau moment de nostalgie, celle que l'on éprouve envers une époque révolue qui, autrefois, était attachée à cet endroit qui nous est cher...
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L'auteur, breton né à Plougasnou, passe l'hiver sur les bords de la baie de Morlaix. Il se promène le long des grèves, dans le vent et la tempête, se souvient de ses sorties en mer, de ses parties de pêche à pied et de ses rêves d'enfant qui construisait une cabane en s'imaginant être dans les grands espaces de l'Ouest sauvage. Il évoque également le souvenir des marins et des paysans bretons d'autrefois : le dur labeur des goémoniers, les aventures du roi des mers, Nicolas Coëtanlem, grand corsaire et même pirate qui faisait régner la terreur sur l'Océan. Dans de petites tavernes enfumées, il en profite pour nous raconter l'histoire d'un Robinson breton, William le Squin qui survécut à un naufrage aux îles Crozet et celle d'un certain Troïlus du Mesgouez, mauvais seigneur qui tenta de soumettre la ville « libre » de Morlaix en usant de ses appuis à la cour.
Ce livre présenté comme « roman », n'en est pas vraiment un car il ne comporte aucune fiction mais une séries de réalités bretonnes qui la dépassent totalement. Nombreuses descriptions du climat, des paysages et de l'ambiance dans un style fleuri allant parfois jusqu'à l'alambiqué. Cet impressionnisme très personnel est heureusement agrémenté de nombreuses anecdotes aussi bien sur la vie d'autrefois (qui peuvent venir en complément au « Cheval d'orgueil » ou aux « Mémoires d'un paysan bas-breton ») que sur la petite histoire avec ses personnages de bretons hauts en couleur, fiers, courageux et souvent admirables. le lecteur apprendra beaucoup de choses sur la sociologie de la Bretagne et pourra rectifier certaines idées reçues et faire un sort à certains clichés. Intéressant de ce point de vue.
Lien : http://www.etpourquoidonc.fr/
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Un livre acheté par hasard lors de rencontres littéraires à Rennes. Un auteur que je ne connaissais pas. Ce n'est pas un roman, c'est assez souvent brouillon et pourtant je l'ai lu d'une traite.On y rencontre pirates et corsaires, goemoniers, aventuriers de la mer et commerçants redoutables . On y parle aussi de la vie quotidienne en Bretagne à différentes époques.
Tout cela se passe aux alentours de la Baie de Morlaix dans le Finistère
Les anecdotes sont souvent savoureuses et on passe un bon moment
Tout cela donne envie de découvrir d'autres oeuvres plus connus de cet écrivain qui sait raconter la Bretagne loin des schémas traditionnels
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Sorti de ma bibliothèque pendant le confinement, ce livre, "un hiver en Bretagne", m'a fait découvrir un auteur que je ne connaissais pas, pas plus que je n'ai fréquenté le Salon du livre qu'il a créé "Etonnants Voyageurs". J'avoue que je craignais de trouver un "auteur- chantre" de la "bretonnitude" tendance de l'époque actuelle...
J'ai eu l'heureuse surprise de lire le texte d'un amoureux de la langue française. Cette langue, Michel le Bris la manie avec brio, beaucoup de poésie, avec un vocabulaire extrêmement riche (de quoi faire des centaines de dictées à pièges pour les fans de l'exercice !).
J'y ai découvert une "micro-région" , celle de la baie de Morlaix, son histoire, et aussi ses paysages. J'aimerais la parcourir avec en tête les descriptions magnifiques de ce coin de "beauté du monde". Je retiens enfin et surtout les phrases où l'auteur fait référence au lieu du vécu de notre enfance, aux "personnalités"observées , tout ce qui laisse en nous une empreinte pour la vie entière. (cf citations choisies)
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Citations et extraits (8) Voir plus Ajouter une citation
Tout se brouille, bientôt, sous les trombes fumantes. Un bouillonnement d'eaux grasses déborde des caniveaux, les maisons disparaissent dans un brouillard jaunâtre comme si toute la saleté de la ville montait devant moi dans le ciel, à peine voit-on à cinq pas. Je dévale la rue, vent debout, à demi étourdi par la violence des averses, vers la venelle au Beurre où je sais que m'attend le havre des âmes en peine, des traîne-savates et rêveurs de la baie, derrière les carreaux épais du Ti Coz. Une bourrasque noire hurle déjà dans mon dos, en secouant la porte, tandis que je m'engouffre hors d'haleine dans la salle enfumée, des écharpes de pluie encore accrochées aux plis de mon suroît. Les bûches, dans la cheminée, s'embrasent en gerbes d'étincelles, les flammes découpent des ombres brèves, brutales, sur les murs bas, les visages qui se lèvent à mon entrée, sculptés par la lumière rare, n'ont que peu à envier à ceux des forts mangeurs, buveurs et braillards que retrouvait le sieur Le Gac chez cette luronne de Barbe Le Breton. Ils sont tous là, mes compagnons, Antoine Pouliquen, bouquiniste, loup de mer et grand coeur, Gérard Delahaye, Melaine Favennec, d'autres musiciens que je distingue mal dans la pénombre enfumée, et la voix forte de Patrick Ewen, retour du grand Nord, qui nous emporte (...) Non, rien n'a changé au Ti Coz depuis quatre siècles, ce devait être déjà une belle taverne, aux murs épais, aux poutres trapues, (...) où se pressaient convoyeurs et corsaires, calfats et charpentiers, matelots barbus et rugissants, soudés par le même allégresse. (...) Un coup de vent brutal couche les flammes dans l'âtre et chacun dresse l'oreille, comme si venait d'entrer dans la pièce la longue cohorte des canailles de la Row.(..) Patrick prend le temps de tirer sur sa pipe, sûr de ses effets. L'odeur des épices et du vin chaud chasse les derniers lambeaux de nuit entrés dans la salle avec moi, et il me semble en cet instant que l'univers entier se trouve là blotti, autour du feu qui brûle, tandis que la grande nuit du monde, au-dehors, danse la sarabande.
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D'où vient que la neige continue ainsi de nous fasciner - que dans toutes les écoles, quand tombe la neige, les enfants deviennent intenables, presque fous ? Peut-être de ce qu'elle est fuyante, insaisissable, comme venue d'outre-monde, prise dans une rêveuse dérive entre les éléments, sans jamais se réduire à l'un d'eux. Elle est de l'eau, certes, qui coule déjà entre mes doigts, et se fera torrent, rivière, au moment de la fonte, mais une eau qui danse, entre ciel et terre, dans une parenthèse du temps où l'on dirait la gravité abolie par miracle. Elle est terre, qu'elle irrigue, enrichit, et travaille. Feu aussi, qui me brûle les mains, de trop la pétrir, et feu de la cheminée que j'allumerai tout à l'heure au retour, chaleur douce de l'intimité. Et puis air, surtout, morceau de ciel et de nuage, parcelle d'air devenue visible, le temps d'un souffle. Peut-être la neige est-elle simplement ce qui circule entre les éléments et qui les lie, pour en faire une demeure - soit la définition même de l'imaginaire, dont elle serait comme la substance ? Conjonction de la lumière et du silence, et l'une des rares images de l'éternité inscrites en notre psychisme, elle renverrait en somme à notre propre lumière, et au silence qui en nous demeure - autre manière de dire que ses paroles sont celles-là mêmes de nos enchantements...
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Une très vieille légende prétend que lorsque les Gaëls envahirent l'Irlande, le peuple féérique des Tuatha de Danaan déplaça simplement son royaume : du visible, il glissa dans l'invisible. Voilà bien des semaines que je repense à cette légende, tandis que j'essaie de comprendre ce qui me ramène à ce coin de rivage, de ressaisir un peu de l'esprit, de l'âme de cette baie, de ce qui pour moi, en fait vraiment un lieu. Car c'est ce royaume qui revient sous ma plume, quoi que je fasse, c'est cet ailleurs qu'à chaque fois je découvre ou pressens, disant ce qui m'attache à cet ici, à croire décidément qu'un ici n'est un lieu que s'il est une porte ...
" Du vent ", diront les esprits forts qui, comme chacun sait, ne manquent pas. Du vent, oui, précisément.
(...)
Du vent. Autant dire rien : invisible, il n'a ni forme, ni dimension, ni odeur, ni goût qui puissent lui être attribués en propre. (...) Et pourtant, sans lui, il n'y aurait sur terre aucune vie, l'humidité stagnerait sur les océans, les terres vers les Tropiques seraient des déserts de feu, et partout ailleurs gèleraient, il n'y aurait pas d'érosion, et donc pas de terre, pas de culture. S'interromprait-il qu'il n'y aurait pas de pollinisation, les arbres puis la terre deviendraient stériles : il est la vie, la semence, la force à l'oeuvre de la création (...).
Presque rien, et pourtant essentiel (...) Spiritus en latin désignait la respiration des dieux, liant dans un même mot le souffle de l'esprit et celui des vents ; ruah en hébreu comme ruh en arabe confondent en un même mot le vent et l'esprit ; le grec pneuma, le latin animus, expriment tout à la fois le souffle de l'air et la chair de l'âme. Et vents peuvent être dits nos musiques, nos paroles, les histoires colportées de village en village qui tissaient notre mémoire et notre imaginaire ...
Un lieu, en somme, ne serait que du vent. Autrement dit une âme ...
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Le silence, ce n'est pas l'absence de bruit, le blanc d'un "rien", non, le silence est peuplé de mille sons, il vit, et nous éveille, le silence, simplement, est la disparition du brouhaha, du bruit de fond, de ce qui rend chacun les êtres et les choses informes, indifférenciées...
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J'ai laissé mon petit Nostromo s'échouer dans une crique, derrière l'île Stérec. Karo, l'île Blanche, le château du Taureau sont comme à portée de main, et, derrière la tourelle de la Chambre, entre île de Sable et île aux Dames, la prairie de sargasses où j'ai fait cet été quelques unes de mes plus belles pêches de bouquets. L'eau se retire doucenement, en chuintant contre la coque. Les dernières grappes de fucus, les laminaires, les zoostères vert sombre émergent des profondeurs en frissonnant. Une odeur lourde, presque séminale, d'iode et de goémon brassé, m'enveloppe peu à peu, malgré le froid – sous cette profusion végétale déployée devant moi en forêts, en prairies, en taillis hérissés, grouille, invisible, une vie formidable. Ce coin de la baie de Morlaix est d'abord un ventre, pour des milliers d'espèces, le coin des naissances et des métamorphoses. Cette eau, si claire tout à l'heure sur le sable, voilà qu'elle prend dans l'effervescence végétale des airs de soupe nourricière. Et rien, rien autour de moi, que l'espace grand ouvert, la mer, au ras du ciel immense ...
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