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3,51

sur 338 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
« Il y avait une petite fois, pendant la canicule, un type qui était assis devant une fenêtre ouverte. »

C'est ainsi que commence "Le procès-verbal". Comme l'auteur l'a bien souligné dans la préface, le sujet du livre est singulièrement (et volontairement) abstrait : « l'histoire d'un homme qui ne savait trop s'il sortait de l'armée ou de l'asile psychiatrique. »

En effet, dans ce premier roman, le réalisme a trouvé fort peu de crédit auprès de l'auteur. Cet homme assis devant une fenêtre s'appelle Adam Pollo. Marginal et solitaire absolu, Adam Pollo a fui la ville, cet univers mécanique et imperméable à toute signification... Il s'est retiré dans la périphérie de l'absurde bouillonnement citadin, dans une villa désertée, sur la colline. Adam tente d'échapper à la face technique et culturelle du monde. Il veut tenter une expérience extrême...

Isolé, reclus, Adam a enfin adopté l'existence dont il avait toujours rêvé : il vit de manière quasi primitive, dans une sorte de rapport fusionnel avec la nature, entretenant avec elle un rapport très animal et matériel. Il évolue au sein de l'intensité solaire, dans la splendeur diurne de l'été, dans un univers brutal et jaune, qu'il a en quelque sorte réinvesti physiquement.

Adam Pollo se perd dans l'ivresse des sensations premières, il devient littéralement tout ce qu'il observe et ce qu'il accomplit. Obnubilé par l'idée de « citation », de « trace », d' « inscription », Adam Pollo remplit des cahiers entiers, dans lesquels il ressasse ses obsessions philosophiques et métaphysiques. C'est cette prose jubilatoire et anti-conformiste contenue dans les cahiers d'Adam, qui constitue la matière essentielle du récit.

Par son esprit subversif, Adam endosse le rôle de prophète. Il écrit lui-même le rapport, le « procès-verbal » qui relate son aventure, son itinéraire, au terme duquel les Hommes vont être amenés à l'arrêter et le « juger ». Après avoir erré pendant tout l'été, et transgressé les interdits fondamentaux, ce « Robinson Crusoé urbain », considéré comme aliéné, est interné dans un asile psychiatrique. Ainsi, il passe du voluptueux espace d'égarement méditerranéen au confinement froid et aseptisé de l'espace médical. Adam a suivi un parcours qui l'a mené d'un domaine aveuglant et illimité, à la fraîcheur raide et géométrique de l'asile.

Une incroyable histoire d'errance et de soleil à découvrir d'urgence !
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Après qu'il eût obtenu le Nobel de littérature en 2008 je ne pouvais rester dans l'ignorance et donc devais me lancer dans la lecture de l'oeuvre de J.M.G. le Clézio. Ayant l'esprit plutôt ordonné, j'ai choisi son premier roman, celui qui le consacra dans le monde littéraire, celui qui reçut le prix Renaudot en 1963, "Le procès-verbal" . Pas étonnant qu'il ait attiré l'attention des "professionnels" de l'époque tant ce roman fait preuve d'originalité dans sa prose et dans sa construction. Mais tout aussi émouvant est le récit d'Adam Pollo, grand solitaire vagabond, personnage étrange évoquant quelque peu Antoine, le personnage d'un autre premier roman, celui de Jean-Paul Sartre, "La Nausée". Aucune indication précise sur le temps et l'espace, tout juste savons nous que l'action se déroule à la fin de l'été dans une ville bordant la Méditerranée (Nice ?). A la manière d'Antonin Artaud, Adam Pollo se donne le temps d'observer le monde afin d'y vivre en toute conscience, comme seuls peuvent le faire les gens dit dérangés ou asociaux, eux qui, par leur clairvoyance, ne peuvent se satisfaire du raisonnable.
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"On me reprochera certainement des quantités de choses.
D'avoir dormi là, par terre, pendant des jours ; d'avoir sali la maison, dessiné des calmars sur les murs, d'avoir joué au billard. On m'accusera d'avoir coupé des roses dans le jardin, d'avoir bu de la bière en cassant le goulot des bouteilles contre l'appui de la fenêtre : il ne reste presque plus de peinture jaune sur le rebord en bois. J'imagine qu'il va falloir passer sous peu devant un tribunal d'hommes ; je leur laisse ces ordures en guise de testament ; sans orgueil, j'espère qu'on me condamnera à quelque chose, afin que je paye de tout mon corps la faute de vivre..."

Adam Pollo a pris la décision de vivre retiré de la société. Pour des raisons qui nous demeurent obscures, il habite dans une maison abandonnée qui donne sur la mer. Il passe la journée à bronzer au soleil, à fumer des cigarettes et lire des vieux journaux. Il ne semble pas trop concerné par l'insalubrité de son habitat ou par l'ennui mortel qui hante son quotidien.

Parfois, il sort. Il se balade en ville. Il erre dans les rues, sans trajectoire précise. Il se rend aussi à la plage, se laisse dériver le long des rochers. Mais s'il a une occupation bien essentielle et qui lui prend tout son temps et sa concentration, c'est bien de ne rien faire.

Le procès-verbal est le premier roman de J.M.G. le Clézio. D'abord envoyé à Gallimard dans l'espoir de gagner un concours avec un voyage comme premier prix, il se verra publié, récompensé du prix Renaudot et manquer de justesse le Goncourt. Pas mal pour un auteur de 23 ans.

Je dois avouer qu'au début, je ne comprenais pas trop ce que je lisais. le style est certes excellent, mais je ne comprenais pas l'intérêt et la direction de l'histoire. C'est seulement vers le milieu du livre que j'ai été happé par le livre, d'un coup, je ne pouvais plus le poser. La lecture du Procès-verbal est difficile à décrire, mais je pense qu'on peut l'apparenter à celle de l'Étranger de Camus pour l'impression d'absurde qu'il nous livre, ou à l'univers d'Henry Miller pour son côté cru et chaotique.

À travers son personnage, et du haut de ses seulement 23 ans, Le Clézio nous livre une autre manière de voir le monde et de le décrire, en employant un vocabulaire riche qui m'a souvent poussé à consulter mon dictionnaire et à réfléchir longuement sur certaines descriptions. Au début je n'aimais pas ma lecture, et quand j'ai fermé mon volume, j'étais bien convaincu d'avoir terminé un chef d'oeuvre. Vraie leçon de littérature, voilà un livre qui repousse encore un peu les limites de l'art.
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Ce livre m'a fait l'effet d'une pause ensoleillée et complètement hallucinante. On y trouve toute sorte de roman en un seul, un petit conte, un meurtre, l'amour, un article de journal, une relation épistolaire ou des poèmes. Nous suivons Adam dans ses folies, on perd le contrôle, se laisse emmener dans les rues d'une ville de côte d'Azur sans bien comprendre ce que l'on fait. J'ai adoré ce roman, dingue et violent mais qui justement s'en détache complétement. A lire et à relire indéfiniment, pour à chaque fois vivre cette aventure d'une nouvelle manière.
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