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Claudine Gothot-Mersch (Éditeur scientifique)
EAN : 9782070328130
408 pages
Gallimard (03/05/1994)
3.56/5   24 notes
Résumé :
Leconte de Lisle (1818-1894), chef de file des parnassiens, a écrit le recueil Poèmes Antiques en 1852. Il se situe entre le mouvement romantique et symbolique.
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Bof.

Ok…je développe un peu. Leconte de Lisle fut une gloire incontestée du Parnasse, courant artistique qui fustige le nombrilisme des romantiques, poètes indécents d'un siècle décadent se complaisant dans leurs paysages embués et larmoyants…

Cette boustifaille impudique, très peu pour Charles Marie René Leconte de Lisle qui juge qu'il “y a dans l'aveu public des angoisses du coeur et de ses voluptés non moins amères, une vanité et une profanation gratuites.”

Pour les parnassiens, à l'instar de Stéphane Mallarmé, Sully Prudhomme ou José-Maria de Heredia, il faut en revenir à l'art pour l'art.
Le poète doit honorer les mythes fondateurs, sans les parasiter par la médiocrité de son existence facultative ou de ses prêchi-prêcha moraux voire, honnis soient, politiques… Eh bien, quoi de mieux que de revenir à la pureté chimique des mythes antiques, et de dérouler des kilo-mètres d'Alexandrins aux Diane chasseresse et autres nymphettes de bassin harcelées par des Olympiens insatiables (hashtag balance ton Zeus).

Vous l'aurez compris, c'est bien cette devise de Théophile Gautier, “l'art pour l'art”, qui guide la plume de l'auteur. Mais finalement est-ce que l'on n'en revient pas au point dénoncé ? A savoir se regarder le nombril autour de quelques sujets autorisés pour savoir qui a la plus longue…métrique ?

Pas naïf, l'auteur prévoit déjà l'accueil que recevra son recueil : “ces poëmes seront peut-être accusés d'archaïsme et d'allures érudites peu propres à exprimer la spontanéité des impressions et des sentiments” (pas commode d'en disconvenir).

Pourtant, il concède que l'art peut avoir un caractère de généralité, même si l'on part de l'expérience particulière et c'est à coup sûr, à mon sens, la subjectivité qui ouvre le chemin de l'empathie. Cette Antiquité fantasmée à partir des rigoureux textes des poètes gréco-latins est aussi glaciale que le marbre, certes étincelant, de leurs colonnes corinthiennes.

De fait, les contemporains des parnassiens se sont immédiatement montré sceptiques, à l'image de Remy de Gourmont qui déplorait ces « poètes français inférieurs » qui depuis cinq siècles « chantent, avec les mêmes phrases nulles, le printemps virgilien. »

Même si, lus à voix haute, la mélodie des vers est agréable, et ça et là, à petite dose, les poèmes le sont aussi nous sommes très loin d'une poésie qui bouleverse… et je rejoins finalement le constat prémonitoire de Leconte de Lisle dans sa préface : “ces poëmes, il faut s'y résigner, seront peu goûtés et peu appréciés.”

Qu'en pensez-vous ?
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Le recueil compte 31 poèmes, répartis comme suit. Sept poèmes hindous ouvrent le recueil (exotisme, légendes, lyrisme, poèmes épiques et philosophie). La majeure partie des Poèmes antiques est néanmoins consacrée à la Grèce (mythes héroïques, idylles antiques). le recueil s'achève sur une douzaine de poésies diverses consacrées à la nature ou exprimant la nostalgie. Personnellement, j'ai trouvé que c'était une poésie froide, érudite, presque didactique. La forme est également rigoureuse (l'alexandrin classique). Ce n'est pas dépourvu d'esthétisme, mais assurément de sentiments.
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Leconte de Lisle nous offre avec ses Poèmes Antiques un autre petit bijou de la poésie française. Ici l'érudition se veut au service du style, afin d'évoquer les puissances tutélaires et les mirages de la nature. Comme le disait lui-même Leconte de Lisle, auquel Victor Hugo portait d'ailleurs une admiration sincère, "la poésie est trois fois générée : par l'intelligence, par la passion, par la rêverie". Trois états d'esprit utilisés pour ressusciter les légendes indiennes et l'époque hellénistique. L'auteur y réussit fort bien, maniant aussi bien les méandres religieux des hymnes védiques que le conte des épopées antiques.

Le poème Çunacépa offre par exemple quelques moments suspendus absolument sublimes :

"Et de ses beaux bras nus elle fit doucement
Un tiède collier d'ambre au cou de son amant,
Inquiète, cherchant à deviner sa peine,
Et posant au hasard sa bouche sur la sienne.
Lui, devant tant de grâce et d'amour hésitant,
Se taisait, le frond sombre et le coeur palpitant."

La Grèce antique n'est elle aussi pas en reste quant à la puissance d'invocation qui caractérise l'écriture de Leconte de Lisle, notamment dans Niobé :

"Dans sa robe de pourpre, immobile et songeur,
Il suit auprès des Dieux son esprit voyageur ;
Il règne, il chante, il rêve. Il est heureux et sage."

Pour reprendre notre propos liminaire, on voit bien que (...)
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Citations et extraits (35) Voir plus Ajouter une citation
Médailles antiques - I ; II ; III

Celui-ci vivra, vainqueur de l'oubli,
Par les Dieux heureux !
Sa main sûre et fine
A fait onduler sur l'onyx poli
L'écume marine.

Avec le soleil, douce, aux yeux surpris,
Telle qu'une jeune et joyeuse reine,
On voit émerger mollement Kypris
De la mer sereine.

La Déesse est nue et pousse en nageant
De ses roses seins l'onde devant elle ;
Et l'onde a brodé de franges d'argent
Sa gorge immortelle.

Ses cheveux dorés aux flots embellis
Roulent sans guirlande et sans bandelettes ;
Tout son corps charmant brille comme un lys
Dans les violettes.

Elle joue et rit ; et les gais dauphins,
Agitant autour nageoires et queues,
Pour mieux réjouir ses regards divins
Troublent les eaux bleues.

--------------------------------------------------------------------------------------

Les belles filles aux pressoirs
Portent sur leur tête qui ploie,
À pleins paniers, les raisins noirs ;
Les jeunes hommes sont en joie.
Ils font jaillir avec vigueur
Le vin nouveau des grappes mûres ;
Et les rires et les murmures
Et les chansons montent en choeur.

Ivres de subtiles fumées,
Les vendangeurs aux cheveux blancs
Dansent avec des pieds tremblants
Autour des cuves parfumées ;
Et non loin, cherchant un lit frais,
Éros, qui fait nos destinées,
À l'ombre des arbres épais
Devance les lents Hyménées.

----------------------------------------------------------------------------------------

Ni sanglants autels, ni rites barbares.
Les cheveux noués d'un lien de fleurs,
Une Ionienne aux belles couleurs
Danse sur la mousse, au son des kithares.
Ni sanglants autels, ni rites barbares :
Des hymnes joyeux, des rires, des fleurs !

Satyres ni Pans ne troublent les danses.
Un jeune homme ceint d'un myrte embaumé
Conduit de la voix le choeur animé ;
Éros et Kypris règlent les cadences.
Satyres ni Pans ne troublent les danses :
Des pieds délicats, un sol embaumé !

Ni foudres ni vents dont l'âme s'effraie.
Dans le bleu du ciel volent les chansons ;
Et de beaux enfants servent d'échansons
Aux vieillards assis sous la verte haie.
Ni foudres ni vents dont l'âme s'effraie
Un ciel diaphane et plein de chansons !
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"ni les soupirs secrets, ni l'attente incertaine et ses pleurs indiscrets, ni les baisers promis, ni les voix de syrène, n'ont troublé de mon coeur la profondeur sereine."
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Juin.

Les prés ont une odeur d'herbe verte et mouillée,
Un frais soleil pénètre en l'épaisseur des bois,
Toute chose étincelle, et la jeune feuillée
Et les nids palpitants s'éveillent à la fois.

Les cours d'eau diligents aux pentes des collines
Ruissellent, clairs et gais, sur la mousse et le thym ;
Ils chantent au milieu des buissons d'aubépines
Avec le vent rieur et l'oiseau du matin.

Les gazons sont tout pleins de voix harmonieuses,
L'aube fait un tapis de perles aux sentiers,
Et l'abeille, quittant les prochaines yeuses,
Suspend son aile d'or aux pâles églantiers.

Sous les saules ployants la vache lente et belle
Paît dans l'herbe abondante au bord des tièdes eaux ;
La joug n'a point encor courbé son cou rebelle,
Une rose vapeur emplit ses blonds naseaux.

Et par delà le fleuve aux deux rives fleuries
Qui vers l'horizon bleu coule à travers les prés,
Le taureau mugissant, roi fougueux des prairies,
Hume l'air qui l'enivre, et bat ses flancs pourprés.

La Terre rit, confuse, à la vierge pareille
Qui d'un premier baiser frémit languissamment,
Et son oeil est humide et sa joue est vermeille,
Et son âme a senti les lèvres de l'amant.

O rougeur, volupté de la Terre ravie !
Frissonnements des bois, souffles mystérieux !
Parfumez bien le coeur qui va goûter la vie,
Trempez-le dans la paix et la fraîcheur des cieux !

Assez tôt, tout baignés de larmes printanières,
Par essaims éperdus ses songes envolés
Iront brûler leur aile aux ardentes lumières
Des étés sans ombrage et des désirs troublés.

Alors inclinez-lui vos coupes de rosée,
O fleurs de son Printemps, Aube de ses beaux jours !
Et verse un flot de pourpre en son âme épuisée,
Soleil, divin Soleil de ses jeunes amours !
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Midi.

Midi, Roi des étés, épandu sur la plaine,
Tombe en nappes d'argent des hauteurs du ciel bleu.
Tout se tait. L'air flamboie et brûle sans haleine ;
La Terre est assoupie en sa robe de feu.

L'étendue est immense, et les champs n'ont point d'ombre,
Et la source est tarie où buvaient les troupeaux ;
La lointaine forêt, dont la lisière est sombre,
Dort là-bas, immobile, en un pesant repos.

Seuls, les grands blés mûris, tels qu'une mer dorée,
Se déroulent au loin, dédaigneux du sommeil ;
Pacifiques enfants de la Terre sacrée,
Ils épuisent sans peur la coupe du Soleil.

Parfois, comme un soupir de leur âme brûlante,
Du sein des épis lourds qui murmurent entre eux,
Une ondulation majestueuse et lente
S'éveille, et va mourir à l'horizon poudreux.

Non loin, quelques boeufs blancs, couchés parmi les herbes,
Bavent avec lenteur sur leurs fanons épais,
Et suivent de leurs yeux languissants et superbes
Le songe intérieur qu'ils n'achèvent jamais.

Homme, si, le coeur plein de joie ou d'amertume,
Tu passais vers midi dans les champs radieux,
Fuis ! la Nature est vide et le Soleil consume :
Rien n'est vivant ici, rien n'est triste ou joyeux.

Mais si, désabusé des larmes et du rire,
Altéré de l'oubli de ce monde agité,
Tu veux, ne sachant plus pardonner ou maudire,
Goûter une suprême et morne volupté,

Viens ! Le Soleil te parle en paroles sublimes ;
Dans sa flamme implacable absorbe-toi sans fin ;
Et retourne à pas lents vers les cités infimes,
Le coeur trempé sept fois dans le Néant divin.
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La robe du centaure

Antique Justicier, ô divin Sagittaire,
Tu foulais de l'Oita la cime solitaire,
Et dompteur en repos, dans ta force couché,
Sur ta solide main ton front s'était penché.
Les pins de Thessalie, avec de fiers murmures,
T'abritaient gravement de leurs larges ramures ;
Détachés de l'épaule et du bras indompté,
Ta massue et ton arc dormaient à ton côté.
Tel, glorieux lutteur, tu contemplais, paisible,
Le sol sacré d'Hellas où tu fus invincible.
Ni trêve, ni repos ! Il faut encor souffrir :
Il te faut expier ta grandeur, et mourir.

O robe aux lourds tissus, à l'étreinte suprême !
Le Néméen s'endort dans l'oubli de soi-même :
De l'immense clameur d'une angoisse sans frein
Qu'il frappe, ô Destinée, à ta voûte d'airain !
Que les chênes noueux, rois aux vieilles années,
S'embrasent en éclats sous ses mains acharnées ;
Et, saluant d'en bas l'Olympe radieux,
Que l'Oita flamboyant l'exhale dans les cieux !

Désirs que rien ne dompte, ô robe expiatoire,
Tunique dévorante et manteau de victoire !
C'est peu d'avoir planté d'une immortelle main
Douze combats sacrés aux haltes du chemin ;
C'est peu, multipliant sa souffrance infinie,
D'avoir longtemps versé la sueur du génie.
O source de sanglots, ô foyer de splendeurs,
Un invisible souffle irrite vos ardeurs ;
Vos suprêmes soupirs, avant-coureurs sublimes,
Guident aux cieux ouverts les âmes magnanimes ;
Et sur la hauteur sainte, où brûle votre feu,
Vous consumez un homme et vous faites un Dieu !
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Vidéo de Charles-Marie Leconte de Lisle
Leconte de LISLE – Pourquoi devint-il parnassien ? (Chaîne Nationale, 1953) Une conférence de Géraud Venzac, intitulée « Leconte de Lisle, témoin de l'échec religieux et politique du romantisme », prononcée le 6 juin 1952 à l’Institut Catholique de Paris, diffusée sur la Chaîne Nationale le mois suivant.
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