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EAN : 9782251453682
200 pages
Les Belles Lettres (03/11/2023)
4.06/5   8 notes
Résumé :
Loin d’être une nouvelle histoire du livre, cet essai s’intéresse à la matérialité de sa forme moderne pliée, le codex, et à la manière dont elle nous invite à le manipuler. Il porte donc avant tout sur le livre comme un corps physique avec lequel le lecteur est invité à interagir par toute une série de gestes : l’ouvrir et le fermer, le feuilleter, le corner, y placer ses doigts comme marque-page, y laisser des souvenirs et des empreintes, s’y enfermer. L’articulat... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Il y eut le formidable "L'infini dans un roseau" d'Irène Vallejo, voici le non moins flamboyant "La magie du Codex" de Sylvie Lefèvre....
Leur point commun parler de notre point commun à chaque Babeliaute que nous sommes :
Le livre, ce simple mot de 5 lettres, dont l'étymologie nous renvoie irrémédiablement au latin liber, qui n'est autre que la partie vivante de l'écorce sur laquelle on écrivait autrefois.
Matière vivante, que d'autres ont précédée : argile, papyrus, la soie, l'os....
Matières vivantes visant à faire vivre les idées, magnifique mise en abyme...
En résumé, une matière vivante, au service d'une autre matière vivante, qui prendra vie sous la plume d'un écrivain, sous le calame d'un calligraphe, sous le roseau du scribe...

Mais finalement cet "objet" qui, à force d'être devenu familier, parfois obsolète au profit de versions dématérialisées, n'aurait-il pas vu sa magie oubliée, ou à défaut se ternir...
Prenons-nous encore le temps de ressentir le toucher du papier ?
Écoutons-nous encore le bruissement des pages en les tournant ?
Prêtons-nous encore attention à la typographie utilisée ?
Sentons-nous encore l'odeur du livre neuf, fraîchement imprimé ?
Avons-nous encore les sens en éveil devant cet objet né du vivant, pour nourrir le vivant, pour donner un sens à la vie, pour nous redonner vie, pour nous ouvrir à la vie, pour enrichir notre vie, etc...

Pourtant, comment passer à côté des couvertures jaunes de ce carton finement ondulé des Éditions Grasset, ce toucher si typique des couvertures des Éditions Les Belles Lettres, la couleur si mémorable des Éditions Gallimard, ces livres en édition limitée qui fleurissent lors de fêtes de fin d'année, le toucher cuir de la couverture et le papier bible des livres de la collection La Pléiade, les couvertures, que tout Babeliaute mentionne avant même son billet, des livres de la collection McDowell aux Éditions Toussaint Louverture, et qui rappelle les reliures Hetzel...
Autant de différences si infimes, autant de dissemblances devenues imperceptibles, pour un objet qui, intrinsèquement ressemble à son voisin de bibliothèque, mais qui s'en différencie physiquement....

Cet ouvrage, bien plus qu'un livre sur l'histoire du livre se construit, sur une trame de relation entre l'objet et celui qui de le détient pour un temps....car le livre passe de nos mains, à notre vie au travers de gestes anodins...
Le temps d'une lecture, on ouvre le livre ou est-ce lui qui s'ouvre à nous ? Il nous dévoile son coeur, cette reliure qui n'a pas toujours été la même tantôt livre-accordéon, tantôt livre-papillon...
"Espace du dehors, celui du lecteur, de la diffusion et de la réception d'un livre, et espace du dedans, celui du texte et de son auteur, s'interpénètrent ou se superposent. L'oeuvre se porte au-delà d'elle-même, hors d'elle-même, mais elle accueille aussi son public en son sein. Jouant de cette porosité entre deux mondes que permet l'ouverture d'un volume"
Car de volumen, le livre deviendra codex, dans cette forme que nous lui connaissons, peu ou prou, aujourd'hui, ce codex que l'on ouvre et fermé à l'envi
"Le jeu sur les ouvertures, sur l'opposition entre espaces du dedans et du dehors est rendu possible par la forme du livre est la nôtre depuis le 1er siècle avant J.-C. : le codex. On l'ouvre et on le ferme. le rouleau de l'Antiquité gréco-latine, lui,se déroulait (volvere, evolvere, pervolvere, pervolutare), se déployait (explicare) pour être lu : volvendi sunt libri dit Cicéron dans son Brutus, « il faut lire les livres ». Pour ranger ce volumen,il fallait le réenrouler (revolvere). Quant aux ordinateurs et aux liseuses, utiliser les mots ouvrir et fermer comme noms de commande relève bien du glissement de sens, du propre au figuré, et par commodité pour un public qui était habitué à l'outil livresque"

Ouverture / fermeture qui font irrémédiablement penser à un parallèle avec l'architecture : portes, fenêtres, portails,... Autant d'éléments qui ouvrent sur un monde
" Depuis Horace, au moins, la métaphore du texte comme bâtiment est restée vivante : Exegi monumentum aereperennius / Regaliquesitu pyramidum altius (Odes, III, 30 « J'ai achevé un monument plus durable que le bronze / plus haut que les pyramides des rois »). Certaines oeuvres iront jusqu'à modeler leur espace textuel sur une construction architecturale : Cité des dames de Christine de Pizan (1404-1405), Temple de Boccace de Georges Chastelain (1463-1464), La Sale d'Antoine de la Sale (1451), pour ne citer que des textes médiévaux. Pour ce dernier livre, destination pédagogique et instructive, l'auteur tire ses matériaux de compilations historiques, de florilèges de grands auteurs et de sa propre vie."

Et que dire des frontispices, empruntés au latin pour désigner le fronton d'un édifice, et qui s'est adapté au monde du livre pour désigner soit une première page où le titre figure dans un appareil décoratif qui couvre toute la surface (le titre gravé pour la bibliographie moderne), soit une gravure placée en tête de l'ouvrage et en regard de la page de titre (le frontispice de la bibliographie moderne).
Car finalement, n'est-ce pas ce que nous faisons en ouvrant un livre, n'entre t-on pas dans un univers à nul autre pareil, dans un lieu qui nous est inconnu, dans une cathédrale de mots, un dédale de phrases, un labyrinthe d'histoires, et en le refermant ne garderons-nous pas une réminiscence de ce lieu, une rémanence de sentiments, qu'ils soient positifs ou négatifs, des citations que nous notons pour nous-mêmes ou que nous partageons, des bribes d'imagination, une persistence rétinienne de mots. Et le partageant, en le transmettant n'est ce pas une part de nous que nous partageons et que nous transmettons.

Et puis il y a ces réponses à des questions que nous ne sommes même jamais posées, pourquoi toujours la première page à droite : "Les mots recto et verso désignaient, on l'a vu, le sens vertical ou transversal selon lequel étaient disposées les lamelles du papyrus dans la construction de la feuille. Ces termes se sont trouvés réinvestis dans le codex aux feuillets pliés : ils s'y réfèrent au geste du lecteur qui en tournant (vertere) la page passe de l'endroit (recto) à l'envers (verso) ou, comme l'on disait autrefois, au revers.
Par une évolution dont je ne peux retracer l'histoire en détail, le recto ou page de droite s'est trouvé survalorisé au détriment du verso ou page de gauche. Cela peut sembler naturel lorsque l'on sait qu'autrefois la position à droite était connotée plus positivement que celle de gauche(...)"
Les objets qui permettent de poser les livres et de libérer les mains, l'autrice usant pour cela de l'image magnifique de l'Annunciata d'Antonello da Messina, le livre ouvert que l'on retrouve si souvent dans les" Annonciations"...
Les livres dans lesquels ont y cache des secrets, les livres troués volontairement, les livres dans lesquels des petits dispositifs ingénieux se déroulaient, les livres pop-hop... En résumé un lieu où l'imagination était et est multiple

Parmi les gestes qui font partie de nos lectures, sauf à lire un ouvrage d'une seule traite, il a celui de marquer sa page.
Alors, il y a les marque-page qui disent également tant sur le lecteur lui-même. du simple bout de papier insignifiant à ceux plus personnels, chargés d'une histoire, chargés de souvenirs, chargés d'émotions...
Paolo Rumiz écrit dans son livre "Canto per Europa" (que j'ai lu récemment) : "Quando finì il disegno, spense il lume, inserì un segnalibro con il motto Nulla die sine linea, poi ripose il registro con cura e si lasciò, sfinito, catturare dalla notte." (Une fois le dessin terminé, il éteignit la lampe, inséra un marque-page avec la devise Nulla die sine linea, puis rangea soigneusement le registre et se laissa, épuisé, capturer par la nuit.).

Nulla sine die sine linea / pas de jour sans une seule ligne.
Que ce soit de notre livre en cours ? Ou de nos livres en cours ? de notre livre fétiche ? de notre livre compagnon ? de notre livre refuge ? de notre livre préféré ?
Combien sommes-nous a ne pouvoir laisser une journée sans lire une ligne ?
Et au final cet objet auquel on ne prête presque plus attention se trouve peut-être résumé dans la sublime couverture.
Le coeur du livre n'est-il pas le reflet de celui de son lecteur ? le livre suscitant émotions, passions... En un mot, le livre c'est la vie...
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La Magie du codex est un joli livre. Il se présente comme s'intéressant « à la matérialité » de la « forme moderne pliée (…) et à la manière dont elle nous invite à le manipuler ». « Il porte avant tout sur le livre comme un corps physique (…) ».
Et c'est cette approche qui m'a séduit, et conduit à l'acquérir.
Mais en cela il m'a déçu. Essentiellement centré sur les livres du moyen-âge et peu après, dont l'auteur est une spécialiste, il relègue à assez peu de choses les époques suivantes. Ce qui conduit l'ouvrage à beaucoup s'étendre sur le livre religieux, majoritaire alors, mais dans ses limites justement.
Il fait aussi à peu près l'impasse sur les étapes de sa fabrication matérielle, leur histoire, sur la riche histoire de ses matières, de ses formats ; à peu près aussi sur la relation tactile avec le lecteur. Je ne crois pas y avoir croisé les odeurs non plus.
L'auteur sort souvent du propos annoncé, s'attachant alors non plus à la « matérialité », mais au contenu, comme en témoignent les développements de certains chapitres presque entiers, et les nombreuses reproductions de pages anciennes, et le très grand nombre d'extraits de textes recopiés dans leur version de l'époque, puis délivrés dans leur adaptation en français moderne ; le tout comme en remplissage ici de pages.
Ce livre, à la lecture et la relecture, m'apparaît plutôt comme un butinage de sujets, au gré des travaux historiques de l'autrice. Ceux-ci présentent de l'intérêt évidemment, mais cela fait, à mon sens, que l'ouvrage laisse grandement sur sa faim.
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La magie du codex nous invite à redécouvrir le livre dans toute sa beauté et son mécanisme. Loin d'être un simple objet pratique, le codex, c'est-à-dire le livre relié en cahiers, est l'aboutissement d'une histoire riche et passionnante. Il est issu d'une multitude de réflexions qui ont permis de déterminer quels systèmes étaient les plus appropriés pour en faire un support beau et fonctionnel.

Sylvie Lefèvre, spécialiste de la littérature française du Moyen Âge, nous promène ainsi, de chapitre en chapitre, de l'extérieur du livre, la couverture, jusqu'en son centre, le pli. Cette histoire est illustrée par un grand panel de livres : des manuscrits aux imprimés, des livres pour enfants ou pour adultes, du plus simple au plus complexe, d'aujourd'hui et d'hier. Ainsi, à travers cette ribambelle d'exemples, nous découvrons l'univers et la magie du livre.

Faire l'histoire du codex aujourd'hui est significatif puisque nous sommes dans l'ère de la dématérialisation, de l'écran d'ordinateur, où la pratique de la lecture peut facilement perdre son caractère sensoriel et même sensuel. de ce fait, revenir aux origines et à ce qui fait la grandeur du livre est émouvant et presque subversif.

Un livre à offrir à tous les amoureux des livres et même à ceux qui ne le sont pas encore !
Lien : https://www.instagram.com/p/..
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Citations et extraits (3) Ajouter une citation
Tourner la page. Ce geste semble condamné par l’écran de l’ordinateur ou de la tablette de lecture. Pourtant des logiciels de page turner ont très vite été développés, qui permettent d’un clic de souris d’imiter l’ancien mouvement – accompagné ou pas du bruit de la page qui se tourne – et, sur les tablettes, la technologie tactile a même autorisé la page tournée du bout du doigt. Et si cela disparaissait un jour, lorsque chacun se sera totalement adapté à la lecture d’un objet sans profondeur et d’une page presque toujours sans verso, il resterait sans doute encore l’emploi figuré que nous faisons régulièrement de la locution tourner la page pour signifier « changer de sujet, d’occupation ; oublier le passé, se tourner vers l’avenir ».
Cette formule eut une forme plus ancienne avec le mot feuille ou feuillet. Ainsi, au xiie siècle, première grande période de la littérature française, dans l’Eneas qui adapte l’Énéide de Virgile en français, l’auteur invente toute l’histoire amoureuse entre Énée et Lavine. Cette dernière a reçu une leçon sur l’amour de sa mère, mais qu’elle se refuse à suivre faute de la comprendre. Le dieu lui-même se charge de la blesser pour lui faire aimer Énée. Alors qu’elle souffre, elle apostrophe cette divinité qu’on lui a présentée comme un chasseur mais aussi comme un médecin (v. 8130-8131) :

Amors, car retorne ton foil,
De l’autre part me fai garder !

Amour, tourne donc ta page
et permets-moi de regarder l’autre côté

(INCIPIT)
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Livres d'heures, livres de prières, livres de messe se sont souvent mués du Moyen Âge à aujourd'hui en des ouvrages qui contiennent mémoire (dates des naissances et baptêmes, des décès) et souvenirs (prières et images pieuses insérées) d'un individu, puis d'une famille lorsque l'exemplaire est passé de génération en génération. Mais certains auteurs, eux, ont rêvé d'emporter dans leur tombeau toute leur œuvre. Alors qu'il a déjà beaucoup écrit mais rien publié, Gustave Flaubert écrit ceci dans une Lettre bien connue à Louise Colet (3 avril 1852) :

La pensée de rester toute ma vie complètement inconnu n'a rien qui m'attriste. Pourvu que mes manuscrits durent autant que moi, c'est tout ce que je veux. C'est dommage qu'il me faudrait un trop grand tombeau ; je les ferais enterrer avec moi, comme un sauvage fait de son cheval. — Ce sont ces pauvres pages-là, en effet, qui m'ont aidé à traverser la longue plaine. — Elles m'ont donné des soubresauts, des fatigues aux coudes et à la tête. Avec elles j'ai passé dans des orages, criant tout seul dans le vent et traversant, sans m'y mouiller seulement les pieds, des marécages où les piétons ordinaires restent embourbés jusqu'à la bouche.
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Depuis Horace, au moins, la métaphore du texte comme bâtiment est restée vivante : Exegi monumentum aere perennius/ Regalique situ pyramidum altius (Odes, III, 30 « J'ai achevé un monument plus durable que le bronze / plus haut que les pyramides des rois »).
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Video de Sylvie Lefèvre (1) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Sylvie Lefèvre
À force d'être devenu familier, parfois obsolète ou bousculé par les usages numériques, le livre a vu sa magie oubliée. Sylvie Lefèvre, spécialiste de littérature française du Moyen Âge, nous invite à une promenade dans les manuscrits et imprimés, qu'ils soient précieux ou modestes, pour adultes comme pour enfants, et à redécouvrir le livre comme corps physique avec lequel le lecteur interagit par toute une série de gestes : l'ouvrir et le fermer, le feuilleter, le corner, y placer ses doigts comme marque page, y laisser des souvenirs et des empreintes, s'y enfermer… Car tel est aussi l'un des plus grands des plaisirs : manipuler le livre, de la couverture jusqu'en son coeur, pour qu'à nouveau, la magie fasse effet.
Disponible en librairie. Pour en savoir plus sur cet ouvrage, écouter un extrait audio ou feuilleter des bonnes pages : https://bit.ly/46p4ohc
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