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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Stanislas Lem n'est pas seulement l'auteur de Solaris, il a aussi écrit des récits satiriques particulièrement réussis : c'est le cas du "Congrès de futurologie", écrit au début des années 70.
Le roman est très court, les péripéties s'enchaînent à un rythme rapide, l'imagination de Lem semble sans limite.
Le narrateur, Ijon Tichy, personnage récurrent de Lem, participe donc à un congrès consacré à l'avenir de la planète, et plus particulièrement aux conséquences désastreuses de l'explosion démographique.
Ce congrès a lieu dans un pays imaginaire d'Amérique latine, le Costaricana, dont le régime autoritaire utilise des moyens originaux pour désamorcer l'opposition : il verse dans l'eau des canalisations des "bénignateurs", des drogues qui vous rendent bienveillant même envers vos ennemis !
Les participants de ce congrès proposent des solutions radicales pour enrayer l'explosion démographique : désérotisation de la société, célibat obligatoire, onanisation (valorisation de l'autosexualité) et, pour les incurables, castration. Certains même vont plus loin : ils proposent un nouveau code pénal dans lequel la procréation serait considérée comme un délit grave, hautement nuisible pour la société.
Evidemment, des contestataires virulents manifestent leur opposition, les combats de rue se multiplient, si bien que les autorités sont obligées de bombarder les manifestants avec des "bembes", des Bombes de Mutuelle Bienveillance (B.M.B.) ; mais comme la concentration des aérosols a été mal évaluée, les masques des policiers sont insuffisants et ceux-ci font de gros câlins aux manifestants !
Le congrès est interrompu, Ijon Tichy avec quelques participants tente de s'enfuir mais, rattrapé, il est intoxiqué par une dose fatale d'hallucinogènes : son cas étant désespéré, il est congelé et se réveille dans la Terre de l'avenir, une société où les êtres humains consomment de multiples drogues en quantité considérable.
La plus grande partie du roman est donc consacrée à la description et à la dénonciation de cette dystopie d'un nouveau genre, une pharmacocratie.
Mais un incroyable coup de théâtre intervient dans le dernier quart du roman, un coup de théâtre digne des meilleurs romans de Philip K. Dick : c'est un avenir terrifiant qui attend l'humanité ...
Un livre important qui fait rire très jaune et qui donne beaucoup à réfléchir.
Note : 4,5 / 5
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En octobre dernier, les éditions Actes Sud ont eu la bonne idée de rééditer Stanislas Lem, grand auteur de science-fiction et l'un des très rares écrivains (avec les frères Boris et Arcadi Strougatski) du genre à l'Est du rideau de fer à connaitre un succès mondial. Ils auraient, en revanche, pu éviter une quatrième de couverture qui dévoile et divulgâche complétement l'intrigue de ce roman.


Publié originellement en 1971, le congrès de futurologie est un roman dont l'action initiale se situe en 1999 où nos futurologues planchent sur des solutions à la surpopulation galopante sur Terre. En dépit de l'accueil du Hilton et du charme du Costaricana, l'ambiance n'est pas au beau fixe : de violentes manifestations secouent le pays et sont durement réprimées par le régime autoritaire en place. Nos futurologues n'avaient pas prévu de se retrouver au milieu d'une guerre civile... Une seconde partie du roman se déroule 40 ans plus tard dans une société prospère qui semble s'être apaisée et apporte à ses citoyens tout le confort et l'abondance dont ils rêvent. Cette utopie idyllique cacherait elle néanmoins quelque secret ?


Le livre paru en 1971, deux ans après Ubik de Philip K. Dick et trois ans avant Soleil Vert d'Harry Harrison, deux romans avec lesquels il partage bien des points communs. On est frappé, avec ce livre maintenant quinquagénaire par les différences, les décalages mais aussi les thèmes communs avec notre époque. Si on ne parle pas à l'époque de la crise écologique aujourd'hui omniprésente dans nos esprits, les craintes d'une explosion démographique, soutenues par les publications alarmistes de démographes comme Paul Ehrlich (The Population Bomb, 1968) irriguent le livre. Concernant un autre aspect, le livre n'aborde pas l'essor de l'informatique, des bulles informationnelles et des mondes « virtuels » et des « fake news », pour autant, le roman anticipe un développement de la chimie « psychique » et aboutit in fine aux mêmes effets et aux mêmes problématiques que celles dont nous parlons aujourd'hui.


Concernant mon ressenti de lecteur, je me retrouve un peu partagé : comme s'il existait deux Stanislas Lem : il y a l'auteur "sérieux" de science-fiction que j'apprécie pour son intelligence ses trouvailles et son originalité, celui qui a écrit Solaris ou Retour des étoiles et puis il y a l'auteur "blagueur" et satyrique de la Cybériade dont les traits d'humour me laissent souvent indifférent quand ils ne me font pas complétement sortir du récit. Dans ce roman, on alterne des passages plutôt sérieux à d'autres très légers et quasi-absurdes et j'ai été un peu gêné par ce mélange sucré-salé qui est restera pour moi le principal point noir du livre (je ne doute cependant pas que d'autres apprécieront).


En résumé, c'est un livre intéressant pour son contenu mais aussi par l'époque qu'il raconte même s'il m'a laissé sur un sentiment assez mitigé. Je continuerai ma découverte des livres de cet auteur majeur en espérant un engouement plus franc pour ma prochaine lecture.
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Les futurologues que ce soit dans les livres de science-fiction ou dans la réalité ne sont guère des gens très optimistes. Stanislas Lem s'est donc amusé ici à prévoir un monde anéanti par ses dérives et qui serait gouverné par la toute puissante chimie des cervelles. Nous n'en sommes pas loin tant la consommation des tranquillisants, somnifères et autres produits régulateurs de stress s'est dangereusement accrue.
Le roman est rondement mené et drôle. l'imagination de l'auteur en matière de pharmacopée psychique, sans limite. Mais le livre pose aussi la question de la teneur de ce que nous nommons réalité. Car tout ce que nous percevons n'est bien sûr que filtré par notre chimie interne et cérébrale. Sur une thématique assez voisine, on connait les excellents "Simulacron 3" de Daniel F.Galouye, Time out of joint de Philip K. Dick, Matrix ou encore Truman Show.

Page 26 du roman chez "J'ai lu", je note mon étonnement à lire un projet d'immeuble où chaque famille devrait déménager tous les jours de son appartement pour emménager dans un autre. Ces déplacements suivraient le mouvement du cheval sur un échiquier !
C'est le concept organisateur de "La vie mode d'emploi" de Georges Perec et de son immeuble.
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En 157 pages bien tassées, Stanislas Lem propose sa version du Meilleur des Mondes... Un monde de psychimie, où les populations droguées n'ont plus la moindre notion de la réalité. Seuls quelques uns ont encore accès à ce que le monde est réellement, c-à-d un cloaque immonde où la misère et la surpopulation sont omniprésentes.

Comme toujours chez Lem, c'est court mais très dense. L'écriture de Lem est souvent difficile (ce n'est que mon avis). Elle contient un humour à froid assez décapant. Et on y trouve toujours de nombreuses trouvailles, Lem étant un scientifique visionnaire très au fait des avancées technologiques.

On a -évidemment- une charge contre le pouvoir en place, contre celles et ceux qui dirigent. On pourra bien sûr y voir une critique de la centralisation étatique, de la planification. Mais à mon avis, le propos de Lem est plus vaste. de nombreux rouages mis à mal dans ce roman sont clairement liés à l'économie de marché et la critique de Lem est celle de l'homme et de l'abus de pouvoir inhérent à sa nature.

Lem, une nouvelle fois, cultive l'absurde pour mieux nous montrer le vrai. Il va loin dans la réflexion sur l'opium du peuple et la manière de museler une population. Sur la psychologie et la manipulation du réel aussi.

Vers la fin du roman, on a droit à 3 scénarios catastrophe pour mettre fin à cette situation où les populations droguées n'ont plus aucun contact avec la réalité. C'est cynique, mais guère éloigné du plan mis en place par le staff de Reagan au début du HIV, et qui consistait à ne pas soigner les malades du SIDA afin qu'ils meurent plus vite et contaminent moins de monde. Et Lem écrit ce roman en 1971.

J'ai moins aimé les quelques dernières lignes, où Lem s'en tire par une pirouette et nous joue le coup de "je rêvais"... Sans doute est-ce obligatoire étant donné le régime totalitaire dans lequel il vivait.

Enfin, mention toute particulière aux traducteurs qui ont dû prendre à bras le corps les néologismes et les noms de médicaments inventés par Lem, comme le réfutal ou le ouidac, la stratégine ou le tactidon...
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Ijon Tichy a été enrôlé comme futurologue dans un congrès au Costaricana, le but étant de trouver une solution au problème de surpopulation. Il y a bien quelques menaces d'attentats, et des enlèvements de responsables américains, mais ces événements somme toute banals n'entravent pas la bonne tenue des conférences, et sont gérés avec professionnalisme par le pays hôte. Jusqu'à ce qu'un des groupes décide d'introduire de puissants psychotropes provoquant bienveillance et optimisme béat dans l'eau courante, déclenchant une cascade de conséquences surprenantes.

Ce livre est une petite surprise. Il commence assez innocemment, et a l'air d'une bonne farce, avec une conférence improbable, des intellectuels à l'ouest et des situations loufoques (comme une police anti-émeute armée jusqu'aux dents d'amour pour son prochain).

Ensuite, viennent les noeuds au cerveau. Les psychotropes provoquent des illusions, mais il existe des anti-psychotropes qui vous ramènent au réel. Mais certains psychotropes vous donnent l'illusion d'avoir pris des anti-psychotropes alors qu'il n'en est rien, et vous vivez dans une illusion en ayant le sentiment d'être le seul à en en être sorti (imaginer des situations encore plus complexes est laissé à titre d'exercice aux lecteurs de cette critique).

Enfin, arrivent les questions plus sérieuses. J'ai été surpris, au cours de ma lecture, de découvrir que le roman avait été écrit dans les années 70. C'est en effet en filigrane une sévère critique du technosolutionnisme, qui pourrait s'appliquer aux changements climatiques actuels (sauf qu'on parle ici de surpopulation et, années 70 obligent, d'une future période glaciaire). Nos braves scientifiques, un brin déconnectés de la réalité, imaginent des solutions très créatives qui ne règlent pas grand-chose mais créent de nouveaux problèmes encore plus graves, qu'il faut régler par des solutions encore plus drastiques, qui ne règlent rien non plus mais créent de nouveaux problèmes encore plus dangereux, etc. le tout dans une fuite en avant toujours plus rapide.

Le roman commence donc par un rire bon enfant, puis on se gratte la tête, et on en sort avec les sourcils froncés en se demandant dans quelle panade l'humanité est en train de se mettre toute seule. L'âge du roman se remarque seulement par certains détails : des ordinateurs un peu vieillots, la crainte d'un âge de glace au lieu d'un réchauffement, ... – les conférences scientifiques n'ont par contre pas pris une ride (tirez-en les conclusions que vous voulez). Une belle surprise plutôt inattendue !
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Difficile au premier abord de comprendre où veut nous mener l'auteur. le ton peut paraître assez étrange, très sérieux et posé pour décrire des événements plutôt loufoques. Il présente un monde où les drogues et autres hallucinogènes permettent de contrôler la population, et où chaque individu se retrouve au centre du monde – de son monde. Cela reste complètement d'actualité, si on pense notamment au monde virtuel numérique.
La fin est de celle qui vous fait lire une seule page par jour, pour garder l'excitation de la découverte, pour en profiter avec parcimonie, regrettant l'approche du dénouement.

Un seul bémol, le milieu du roman, où l'auteur laisse parler son imagination, ça en devient une simple liste d'idée qui casse un peu le rythme, mais il faut passer outre ce moment et rejoindre vite la fin.
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Voici un livre pour le moins original. L'ouvrage est une critique, sous le prétexte d'un voyage dans le futur (notre futur, puisque le héros atterrit en 2039), d'une société ne vivant que sous l'emprise de psychotropes. Ce monde futur est assez bien dépeint : on vit avec le principal protagoniste ses désappointements progressifs au fur et à mesure qu'il découvre l'univers dans lequel il a échoué. Cependant, à mon goût, l'histoire met trop de temps à démarrer, et la chute se laisse en partie deviner. Enfin, la quasi-absence d'un découpage en chapitres rend la lecture un peu malaisée.
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(lu en traduction)

Un Meilleur des mondes sous stimulants. Un début drôle à l'extrême, un milieu désarçonnant, flou, inquiétant, presqu'ennuyeux tellement il s'éparpille, et un dernier tiers effrayant. le mieux, irrésistible ennemi du bien, est encore de plonger dans cette lecture sans rien en savoir, sans rien en attendre, sinon d'être surpris.
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Punchy, kaléidoscopique, mais mesuré, jamais de trop, et... très pertinent, sur le fond notamment ! Ca change de la "sf" planplan qu'on peut facilement trouver a droite a gauche. Un livre vraiment stimulant.
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L'hôtel Hilton de Costaricana abrite plusieurs colloques dont le 8ème congrès mondial de futurologie consacré à la surpopulation. Les participants apprennent dès le premier jour que le consul américain a été enlevé par un groupe terroriste qui réclame la libération de prisonniers politiques. Après avoir bu de l'eau du robinet, le Pr Ijon Tichy se rend compte qu'elle contient une drogue du bonheur qui impose une bienveillance infinie aux contaminés. Dans les rues la guerre civile éclate, la drogue est vaporisée, la situation devient incontrôlable mais le Pr Tichy trouve un masque à oxygène pour se protéger.
Ce texte de témoignage, qui s'approche du journalisme tel que Hunter S. Thompson le pratiquait, est une avalanche de délires narcotiques, une nausée perceptive surréaliste comme un trip onirique agité jusqu'à saturation. le style est saccadé, l'expérience part dans tous les sens au milieu d'une fête foraine kaléidoscopique où l'identité et l'altérité sont brouillées. Ensuite cette fantasmagorie se transpose dans le futur, dans une prospective sociologique et technologique. Et c'est dans ce post-modernisme linguistique que Stanislas Lem est très fort, conséquence d'une extrapolation civilisationnelle malicieuse pour décrire une société de contrôle psychimique qui compose les sentiments individuels. S'ouvre alors une succession d'inventions à venir dans la grande tradition des catalogues de trouvailles farfelues. Dans cette véritable contre-utopie le message socio-politique questionne la liberté illusoire, l'éradication de la révolte et l'oubli par la camisole chimique où tout imprévu est lissé. La dilution de la réalité, l'inquiétante étrangeté se retrouve dans Invasion Los Angeles de John Carpenter, le doute absolu dans Existenz de David Cronenberg. C'est une vraie illustration du despote éclairé, du bonheur factice, de l'aveuglement commode et de l'oubli lénifiant.
Lien : https://lesbouquinsdyvescalv..
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