Ce n'est pas en restant couché que tu vas trouver des choses à faire pour te lever
Le rythme de la scène et le rythme du récit ne peuvent coïncider. L'intelligibilité du temps y est différente.
Ahmed Madani présente adroitement son récit, les dialogues du petit-fils et du grand-père, les apartés-monologues. Il forme un paysage, dont la profondeur plonge dans le passé. Jusque dans cet ignoble contingent français dans la guerre d'Algérie.
Gus et son rythme d'adolescent, ses nourritures, ses instruments électroniques, ses rejets des parents, ses haines…
« je hais la campagne
je hais les arbres
je hais les fleurs
je hais l'herbe
je hais les oiseaux
tout me fait chier ici »
Pierre et les poids des ans, de la vie régulière de la campagne, les soupes et les poissons, l'habitude de la solitude…
« La solitude tout seul c'est très dur
mais à deux »
Les dire et les silences, les inventions et les mensonges.
Les rapprochements et les acceptations. Les pas de l'un vers l'autre. Se lever tôt, débroussailler à la faux, les autres mots.
Le noir d'un creux, d'un vide, d'un non-dit, la terreur d'hier, « tu ne sais pas ce que c'est que d'avoir un membre fantôme entre les jambes »
La vieillesse, les absences, les peurs nouvelles, la mémoire de l'amour…
Et le resurgissement du passé ignoble.
« mais tu fermes ta gueule
tout le monde ferme sa gueule
l'armée on l'appelle la grande muette »
Les reproches au père du plus jeune :
« tu m'as abandonné
tu ne me vois plus tu ne m'entends plus
tu ne veux pas savoir qui je suis
tu ne veux pas savoir ce que je vis
tu ne veux pas savoir ce que je pense
tu bosses tu bosses tu bosses »
La révolte adolescente. Incommunicabilité. Les échanges de deux êtres construits comme hommes. Et pourtant l'espoir comme accomplissement de la mémoire. Lakhar.
Poser un drapeau sur sa tombe. Reconnaître et apprendre.
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