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sur 624 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
1986. Sept ans après la révolution iranienne, Maryam, 6 ans, et ses parents fuient l'Iran pour se réfugier en France. C'est le temps de l'arrachement à une terre et ses souvenirs, à sa langue et sa culture, qui va hanter la mémoire de Maryam, l'amener d'abord à renoncer radicalement à ses origines pour se fondre pleinement dans la langue et la culture françaises. Mais au fil de sa maturation, la terre de ses origines, son sel, lui manquent pour pouvoir grandir pleinement, se sentir entière. Alors elle se questionne sur la langue qui fonde son identité et va chercher à déterrer « ses racines dans [un] terreau qui ne sent plus le passé mais l'avenir ».

« Marx et la poupée » est un magnifique roman écrit par Maryam Madjidi en 2017 et qui a été récompensé cette même année par les prestigieux prix Goncourt du premier roman et Ouest-France Etonnants Voyageurs. Entre fiction et autobiographie, c'est un roman polymorphe, déroutant parfois au niveau de la narration, empli d'une sensibilité jusqu'au bout des mots.
Par allers retours successifs, Maryam conte son histoire, celui d'un exil forcé depuis l'Iran jusqu'en France. Elle narre la violence du déracinement, la perte des repères, le regard des autres qui la force à une normalisation bien illusoire. Au coeur de l'exil et de l'intégration à une autre terre, la langue, les langues constituent le point nodal de sa construction. En trois actes, « Marx et la poupée » déroule cette épiphanie des langues, depuis l'oubli volontaire par Maryam de sa langue maternelle afin d'assimiler le français et de se fondre entièrement dans la population, jusqu'au désir de retrouver le terreau des origines, la langue maternelle qui l'a construite et modelée. Trois actes de naissance ponctuent donc le temps de cette complexe épiphanie qui vient dire la difficile construction de soi dans l'exil, hors-sol.
Le trait d'union que Maryam inscrit entre ses deux langues qui la nourrissent, c'est celui que la poésie apporte, dans sa créativité, la richesse de ses messages et sonorités. Et elle vient, en miroir, nourrir le lecteur de ses créations littéraires variées : tantôt quelques contes, tantôt des poèmes qu'elle suspend sur le fil de son existence dont elle déroule ici le récit.
Ce trait d'union qu'elle inscrit, quelle que soit la langue, et qui rejoint chacun en son humanité, c'est celui du souffle, de la vie qui se poursuit quoi qu'il en soit des douleurs qui en jalonnent le chemin.
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La Feuille Volante n° 1222
Marx et la poupée- Maryam Madjidi – Éditions le Nouvel Attila.Goncourt du premier roman 2017

La petite Maryam vit les premières heures de la révolution iranienne depuis le ventre de sa mère qui doit, enceinte, sauter du 2° étage pour ne pas être capturée. Puis, six ans plus tard elle rejoint ses parents à Paris et raconte ses souvenirs. Cela commence plutôt bien, l'expression "il était une fois" souvent répétée, évoque une belle histoire voire carrément un conte de fées. Pourtant la petite fille qui parle n'est pas vraiment ravie de ce qui lui arrive puisqu'elle doit quitter son pays. Pour cela elle doit donner ses jouets aux enfants du quartier de Téhéran où elle habite parce que ses parents communistes l'ont décidé ainsi et que pour eux la propriété est bannie de leur vie. de toute manière elle n'aurait pas pu les empoter dans ses valises. C'était pourtant des cadeaux de sa grand-mère qu'elle aime tant. C'était pourtant aussi des livres pour enfants.
On peut lire ce livre comme une fable ou comme un journal écrit cependant en français, langue qu'elle rejette au début parce qu'elle symbolise l'exil, l'abandon de son pays et de sa famille mais qu'elle s'approprie au point de l'utiliser pour écrire ce témoignage. le français est à la fois le symbole de la liberté absente de l'Iran mais aussi de l'accueil des étrangers. Nous sommes donc avec cet ouvrage, en plein symbole. Pourtant il y a une réalité et une question. Comment devenir une autre personne tout en restant soi-même, sans rien oublier de ses origines? Pour l'auteure, l'apprentissage du français a été cette réponse en ce sens qu'elle a adopté cette langue, d'abord par nécessité, pour se faire comprendre, pour vivre en France et aider ses parents dans leurs démarches administratives, puis ensuite par goût puisqu'elle a choisi d'exprimer son témoignage dans cette langue et de le faire sous le forme de l'écriture. Cela ne signifie par pour autant qu'elle a choisi de tirer un trait sur son passé et sur sa culture originelle qui sont une sorte de refuge parce que la mémoire est partie prenant de la vie, surtout pour un écrivain qui ainsi confie aux mots et à la page blanche tout ce qu'il a été avant. C'est un peu comme une nouvelle naissance, sans rien oublier, sans renier sa langue maternelle au profit de la langue de l'exil …Il y a pourtant un paradoxe qu'elle incarne et dont elle joue en tant qu'étrangère. Elle en rajoute même un peu dans la poésie persane qu'elle cite à l'envi. Elle devient conteuse, incarne l'exotisme, la magie de l'orient, folklore de senteurs et de voiles, une sorte de fantasme collectif entretenu à travers la littérature et la peinture françaises pour un auditoire déjà conquis. Qu'on le veuille ou non, elle est porteuse, en tant qu'exilée, d'une charge émotionnelle et culturelle qu'un Français souhaite connaître, ce qui entraîne une foule de questions. Elle aime se présenter comme quelqu'un de différent, une femme qui vient d'ailleurs et qui se cache en permanence derrière un masque qu'elle donne à voir et qui la dissimule. Elle prétend vouloir qu'on lui pose des questions inattendues et qui révéleraient un message plus politique, plus quotidien qu'est par exemple la condition des femmes qui, dans ce pays, vivent sous la dépendance des hommes et de la loi islamique, ce qui fait d'elles une cible de choix, uniquement destinées à mettre des enfants au monde et à rester cantonnées dans un rôle domestique. En Iran, le combat contre le régime des Ayatollahs est un combat pour la liberté, ce qui est d'autant plus vrai pour les femmes. C'est aussi un thème de réflexion qui ici est offert à propos de la politique, de la liberté, de la démocratie et l'usage qu'en font les gouvernants qui, une fois élus, se dépêchent de faire le contraire de ce qu'ils avaient promis. Cette forme de confiscation touche tous les régimes de tous les pays, et en cela ce livre a un côté universel.
Il y a tout dans cet ouvrage, de l'autobiographie, de la fiction, des témoignages, de la poésie, et on peut se demander en quoi ce livre est un roman. Nous savons depuis longtemps que la littérature n'a aucun compte à rendre à la réalité, qu'elle ne s'inscrit ni dans un essai politique ou sociologique ni dans un récit authentiquement historique et fait la part belle à la fiction et même au délire. Dans sa démarche créatrice, l'auteur puise l'essence de son oeuvre autant dans son vécu, dans sa souffrance, dans ses souvenirs personnels et parfois ses rancoeurs et ses remords que dans ses fantasmes ou dans son imaginaire. La littérature est un monde à part dans lequel le lecteur entre ou n'entre pas, le décor qui est tissé tient entre les pages d'un livre et permet l'évasion, ou pas, suivant le degré de disponibilité de celui qui le tient entre ses mains.

© Hervé GAUTIER – Février 2018. [http://hervegautier.e-monsite.com
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Voilà une auteure nouvelle qui, outre les premiers avis plutôt bienveillants de la blogosphère, a titillé toute ma curiosité lors de son passage télé.

Et dès réception de ce livre, je me suis senti happé par toute l'histoire, cette première autobiographie d'une iranienne, filles de parents opposants communistes au régime iranien dont la prime enfance a été entièrement marquée par les combats politiques, le culte de la non propriété, les errances de la doctrine marxiste et enfin l'exil en France où il lui a fallu tout ré apprendre dans une langue et au sein d'une culture à l'opposé de la sienne. 

Parcours dur, récits vifs, choc de cultures, passerelle entre l'Iran, ses traditions, les errances des parents de la narratrice dans la société française, face au quotidien, à l'école et récit heureux d'une réussite et d'une véritable intégration.

C'est enjoué, le style est fluide et après "Désorientale", un nouveau témoignage sur cette Iran qui s'ouvre à nouveau à nos compatriotes et au tourisme.
Lien : http://passiondelecteur.over..
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Un premier roman réussi, une écriture poétique, sensible, parsemée de poèmes persans. L'histoire d'une petite fille qui doit couper ses racines et survivre à l'exil. Elle quitte l'Iran, sa grand-mère, sa maison, son univers, les saveurs orientales des plats savamment mitonnés, les odeurs, l'ambiance qui l'a bercée depuis sa naissance, elle n'a que 6 ans.
Pourtant, rien n'était simple avec ses parents, militants convaincus, opposés au régime en place ; déjà dans le ventre de sa mère, elle se souvient d'avoir été malmenée lorsque sa mère participait à des manifestations, le déchirement d'avoir à offrir aux autres enfants ses jouets, ordre de ses parents communistes convaincus que le partage est nécessaire dès l'enfance.
Un beau récit émouvant où la douleur de l'exil est omniprésente. L'apprentissage de la langue française, la vie étriquée au 6ème étage d'un immeuble parisien, la mère absente, les yeux vers l'horizon, les premiers croissants du matin qu'elle n'arrive pas à goûter, le père qui fait des petits boulots pour subvenir aux besoins de la famille.
Et malgré tout l'impossibilité de retourner vivre en Iran en femme libre et éduquée.
Et puis la réconciliation avec elle-même, l'acceptation, la lucidité et le soulagement d'un retour en France.
Un très beau texte à ne pas manquer.
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"Marx et la poupée" de Maryam Madjidi, plusieurs fois récompensés est un TRES beau livre TRES vivant que l'on dévore TRES vite. Maryam quitte ses jouets, ses livres, son école, sa grand-mère car ses parents ont décidé de quitter l'Iran la peur au ventre. Au fil des petites choses de la vie -une nouvelle école, une nouvelle institutrice, un nouveau toit, une nouvelle alimentation qui constituent autant de chapitres Maryam raconte avec un coeur et des réflexions d'enfants ce changement de vie brutal jusqu'à l'âge adulte et c'est très beau. Un livre que je suis heureuse d'avoir pu lire.
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Ce serait l'histoire d'une gosse sans âge - entre le tien et le mien si tu cherches à savoir -. Et elle aurait un grand bocal qu'elle remplirait de billes de tailles différentes. Une pour chaque sentiment, pour chaque anecdote, chaque membre de la famille.

Quand elle est petite elle vit à Téhéran, avec sa mère mais pas tellement son père puisqu'il part en France. Alors elle raconte l'histoire de sa famille, de son quartier. Même que des fois on dirait que Marjane Satrapi devait pas traîner trop loin. Sauf que pendant que Marjane fait des dessins, Maryam écrit beaucoup, et réfléchit autant.

Les billes de souvenirs s'accumulent une à une, même que pour tenir le bocal, y'a le fantôme de Romain Gary période La vie devant soi qui tient la main de l'auteure. En tout cas moi j'ai trouvé.

L'arrivée en France, le problème d'identité, d'intégration, de double-culture, et de tous ces concepts qu'on a du mal à percevoir tant qu'on les lit pas bicause on fait partie des privilégiés. Je fais pas la jérémiade, parce que c'est bien d'ouvrir les yeux aussi de temps en temps.

Des fois y'a des billes noires, celles qui font péter l'empathie au point d'avoir les tripes qui remuent. La condition des femmes en Iran, les prisonniers politiques, le cul chez les ados iraniens et comment tu fais pour draguer quand t'as même pas le droit d'avoir des mèches qui dépassent de ta tête hein ?

Faut avoir le coeur sacrément accroché, mais quand même parfois, tu pourras sourire. T'inquiètes tu pourras aussi rigoler parce que y'a des moments rigolos et je pense pas que Maryam se vexera si on s'amuse avec elle.

Si t'es cap, t'as pas trop à attendre longtemps bicause le livre sortira le 12 janvier, c'est dans pas si longtemps alors si t'as des étrennes qui sont des billets tu peux les dépenser pour cette jolie histoire.

C'était bien !

(maintenant je vais aller lire un Mickey par contre sinon je vais faire des rêves un peu durdur)

Sioux !
Lien : https://www.instagram.com/lo..
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Un très bon premier roman !

Maryam Madjidi fait partie de ces trentenaires qui dépoussièrent la littérature comme Marion Messina ou David Lopez. Dans Marx et la poupée, l'auteure raconte l'exil, la révolution iranienne, la jeunesse de Teheran et la famille. Son regard sur le monde est poétique et sensible. Une belle découverte.

Lien : https://lilietlavie.com/2019..
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Elle a eu trois naissances: une sur un fond de révolution, une autre en France et la dernière sur la terre de ses origines.
Maryam est née en Iran à l'heure de la révolution qui embrase le pays. Ses parents sont des activistes chevronnés mais leur combat communiste est de plus en plus difficile à mener. Sa mère et elle doivent rejoindre le père déjà parti en France.
Commence alors une vie d'exilée, tiraillée entre ses parents et la volonté de devenir française, de ne plus être montrée du doigt, de devenir transparente.
Tout au long de ce récit, Maryam nous propose des séquences de sa vie un peu « plic-ploc », on la suit dans ses rêveries, dans sa vie d'adulte pour revenir à son enfance… Elle nous explique alors sa relation avec sa langue maternelle et sa langue d'adoption, comment garder ses racines quand on pousse autre part.
Maryam raconte avec beaucoup de talents les atrocités subies par les Iraniens restés au pays, elle raconte aussi la douleur d'être en France, de quitter son pays, la perte de ses repères et de la difficulté d'adaptation.
Cette histoire joue sur plusieurs tableaux, du très concret comme l'exil, l'apprentissage du français, à des parties plus poétiques qui débutent par « Il était une fois » où Maryam se met en scène. C'est un récit très beau que ce court roman grâce aux qualités d'écriture de l'auteure.

J'y ai vu des ressemblances avec "L'art de perdre" (où on sent que l'écriture est plus aboutie) et je ne doute pas que les prochains romans de l'auteure gagneront en intensité.


Lien : https://pagesversicolores.wo..
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Un récit largement biographique et poétique sur l'exil qu'a vécu l'auteur; Très beau et poignant. A découvrir
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Un ouvrage construit de façon originale entre récit autobiographique, anecdotes, histoires et contes pour exprimer le malaise de Maryam, enfant exilée, enfant intégrée. J'ai beaucoup apprécié l'aspect véridique de ce livre qui nous montre des évènements et de la terreur qui existaient en Iran. J'ai pris conscience aussi de la difficulté pour les enfants exilés de s'intégrer et de se construire, cependant je peine à comprendre le message de l'auteure dans les cas cités : que propose-t-elle ? que faudrait-il ? J'admire aussi la complexité de cet enfant perdu qui a trouvé des parades pour lutter et finalement pour se construire malgré sa situation. Et l'amour des langues,et de la poésie.
Un ouvrage complet qui fait rire , qui fait pleurer, qui fait réfléchir
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