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sur 624 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Parfois je ne comprends pas pourquoi tel livre a eu un prix. Là je ne me suis pas posé la question une seconde. L'écriture est légère et vive, poétique, fluide. On passe de l'Iran à la France, et retour, en passant par la Chine, on navigue dans le temps, entre les vivants et les absents, entre oubli et recherche. C'est fin et très beau.
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Je le dis où pas j'ai adoré pour un 1er roman Maryam Madjidi laisse éclater ses talents de conteuse : C'est un récit très original, enchanteur, linéaire, poétique, sensible, autobiographique, qui laisse rêveur où j'ai tout aimé.
Un bref résumé du livre : Une petite fille de six ans vient s'installer en France avec son père et sa mère communiste, après la révolution d'Iran….il faudra prendre le temps de le lire… pour en connaitre toutes les beautés.
Il est plus qu'un coup de coeur, il est sublime et c'était pour moi le bon moment de le lire…. J'ai même envie d'approfondir sur l'histoire iranienne et il donne aussi envie de découvrir les poèmes d'Omar-Khayyam cité par l'auteure.
Une belle surprise de lecture, un livre qu'on m'a prêté qui mélange souvenirs personnels, nostalgie, l'exil d'un pays pour un autre,la double culture, l'intégration, et les questions identitaires, la tristesse du déracinement mais aussi la reconstruction et la réconciliation avec soi-même.
Beaucoup de sujets qui sont des sujets d'actualité.
Pour finir de vous convaincre j'ai du mal à le lâcher même terminé il est toujours auprès de moi et j'ai envie de relire certains chapitres pris au hasard un peu comme de court poème.


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Si vous cherchez un jour une définition du mot «littérature», alors sortez votre exemplaire de Marx et la poupée, car ce livre doit figurer dans la bibliothèque de tout honnête homme. Pour le résumer, il suffit d'une phrase: c'est l'histoire d'une famille iranienne contrainte à l'exil et qui doit s'inventer une nouvelle vie en France. Mais ce qui fait sa force, c'est qu'en le refermant, il vous restera des images fortes, des épisodes inoubliables, des émotions intenses. Bref, ce qui constitue l'épine dorsale de la bonne littérature.
L'un de ces épisodes marquants arrive dès les premières pages. Nous sommes en 1980 à Téhéran et la narratrice n'est pas encore née. Ella même failli ne pas naître car sa mère, enceinte, se retrouver au coeur de la répression qui a suivi l'arrivée des ayatollahs, pourchassée par les gardiens de la révolution. « Ma mère porte ma vie mais la Mort danse autour d'elle en ricanant, le dos courbé ; ses longs bras squelettiques veulent lui arracher son enfant ; sa bouche édentée s'approche de la jeune femme enceinte pour l'engloutir. »
Elle finira par s'en sortir et accoucher, mais ni elle, ni sa famille ne voudront renoncer à leur liberté. La maison familiale, dans le quartier de Tehranpars sert aux réunions politiques clandestines. On y discute de Marx et d'une autre révolution, on parle de liberté. Vu par les yeux de la petite fille qui grandit dans cette ambiance, ce monde d'adultes est absurde. On y cache les tracts dans des couches-culottes, on enterre les livres signés Marx, Lénine, Che Guevarra dans le jardin ou on met en prison des gens dont les cheveux volent au vent. L'oncle Saman, qui a pris l'habitude de lui offrir une Golé Maryam, la belle fleur qui embellit son jour d'anniversaire, ne viendra pas. Il a été arrêté porteur de tracts et jeté en prison à Evin.
C'est là qu'un détenu passe son temps devant la télévision, regardant un stupide dessin animé. On se dit que l'intellectuel est en train de perdre la raison avant qu'il n'explique qu'il écoute la voix de son épouse, chargée de doubler l'un des personnages.
La répression est de plus en plus forte. Les participants à des fêtes privées sont impitoyablement poursuivis. Il est temps de songer à fuir. Les jouets sont répartis entre les enfants pauvres du quartier, achevant de briser le moral de la petite fille : «Je me sentais si seule au monde. J'étais convaincue que je vivais avec deux monstres qui me déposséderaient de tout.»
La vocation littéraire de l'auteur – double de la narratrice – date sans doute de ce moment où elle a dû monter dans un avion partant vers la France en laissant derrière elle sa grand-mère chérie et son pays natal : « Je voudrais semer des histoires dans les oreilles de tous les êtres. Je veux que ça fleurisse, qu'il en sorte des fleurs embaumantes à la place de toutes les fleurs manquantes, absentes, de toutes les Golé Maryam qui auraient dû être offertes et qui n'ont pas pu l'être. »
Si dans les chapitres suivants il n'est pas question de violence ou de répression, la tension ne faiblit pas pour autant. Car Maryam Madjidi dit la souffrance née de l'exil. Elle raconte, par exemple, comment son père doit subvenir aux besoins des famille en acceptant tous les petits boulots qui se présentent. Pour cela, elle nous raconte comment les mains de son pères changent. Grâce à un Iranien d'origine turque, il est d'abord tôlier-peintre dans un garage, avant que ce dernier ne ferme. Au chômage, ses mains devaient trouver quelque chose d'autre rapidement. Elles vont alors devoir travailler le bois, le béton, les briques, le ciment, le gravier, la peinture, les tuiles, la moquette, les enduits, le carrelage. « Puis un jour ses mains ont commencé à moins travailler, elles étaient fatiguées, ridées et craquelées par endroits. Il y avait aussi la marque d'innombrables blessures laissées par la matière et l'outil. La peau était devenue aussi dure que du cuir. »
Il passera alors à la calligraphie, dessinant de belles lettres persanes et cherchera dans l'opium de quoi soulager son vague à l'âme.
Sa fille ne va guère mieux. Elle ne retrouve pas les saveurs de son enfance, la musique de la langue de son pays. Elle va refuser de manger, refuser de parler. Fort heureusement pour elle, l'arrivée d'un couple de réfugiés iraniens et leur fille Shirin va lui permettre de retrouver le moral. Avec cette compagne de jeux joyeuse et pleine de vie, elle trouvera la complice qui lui permettra de trouver une place dans cette société parisienne. Comme un bouchon de champagne qui explose, elle accepte de lâcher les mots qu'elle a patiemment appris, sans toutefois vouloir les dire. « Les mots se pressaient pour sortir, impatients qu'ils étaient, ça fusait dans le petit studio, ils volaient, ils dansaient, ils butaient contre les meubles, ils s'élançaient de ma bouche comme des flèches et touchaient le plafond et les murs, ils virevoltaient eux-mêmes, soulagés d'être enfin libérés de ma bulle intérieure, enchantés de pouvoir enfin communiquer avec les autres. Tout l'espace était rempli de mes mots français. »
N'allez toutefois pas croire que ce premier roman si sensible devient alors une ode à l'intégration. Tout au contraire, il est question de rentrer au pays, de retrouver les parfums qui manquent tant à la famille, les amis et les proches qui souffrent en silence. Une image de plus suffit à faire voler en éclats ce rêve. En voyant sa petite fille faire du vélo en short et débardeur, son père comprend que ce retour est impossible : « On ne peut pas partir. Je ne peux pas lui enlever cette liberté si innocente. »
Il faudra attendre 2003 pour que la jeune femme retourne à Téhéran. Mais ne pourra pas y rester car son passeport ne suffit pas à faire d'elle… une iranienne.
Voilà sans doute le plus authentique des témoignages sur la condition des migrants. Ici foin de considérations politiques ou économiques. C'est le coeur, la chair, les sens qui parlent. C'est poignant, ironique, vrai. C'est de la grande littérature.

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L'exil est un sujet troublant et douloureux pour qui l'a vécu et il n'est pas toujours aisé d'en parler avec détachement, peu s'en faut! Maryam Madjidi a vécu ce déracinement alors qu'elle n'était qu'une toute petite fille. Quittant l'Iran de ses ancêtres, elle trace ici un parcours original, fait d'allers et retours du passé au présent, de Paris à Téhéran. Je n'ai pas trouvé cela décousu. Au contraire, ce mélange de styles donne au récit une vivacité, un souffle de vie, une espérance... Un joli premier roman, un Goncourt mérité.
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Un remarquable petit livre, écrit avec sobriété et une certaine élégance.

Dans la première partie sur les premières années d'une petite fille de parents communistes dans l'Iran des premières années de la Révolution islamique, Madjidi joue avec ses souvenirs, réels, mais un peu magnifiés par le temps, et l'envie de se donner un rôle, ce qu'elle admet.

La deuxième partie enchaîne sur l'arrivée en France, la disparition des repères, l'apprentissage de la la langue, le rôle ambigu de l'école républicaine, la reconstruction en une jeune femme, plus totalement iranienne, mais pas complètement française. L'exil rend schizophrénique. Où sont les origines, où est la richesse culturelle ?
Un entre-deux indicible : « Tu sais ce que ça fait d'être nulle part chez soi ? En France, on me dit que je suis iranienne. En Iran, on me dit que je suis française. Tu la veux ma double culture ? Je te la donne, va vivre avec et tu viendras me dire si c'est une "belle richesse" ou pas ? ».

L'auteure parvient malgré tout à concilier tout cela dans un troisième temps, alliant la richesse de la poésie de Omar Khayyâm, à sa redécouverte de son Iran natal et des contraintes imposées aux femmes dans ce pays.

La forme de l'ouvrage est magnifique. Pas d'excès. Une belle économie de mots pour dresser un portrait sensible de son père, qui se referme dans le bricolage durant l'exil, de sa mère, amère de quitter son pays, et surtout de la grand-mère, guide des pensées inconscientes.
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Je viens de terminer ce roman pour lequel j'ai eu un grand coup de ♥.
Roman ou biographie ? Peu importe. On est happé par l'histoire de cette petite fille/femme.
Le récit est poétique, onirique. C'est un questionnement sur l'exil, les origines.
Un excellent moment de lecture.
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Premiers mots de la 4 ème de couverture : "Depuis le ventre de sa mère, Maryam vit de front les premières heures de la révolution iranienne. Six ans plus tard, elle rejoint avec sa mère son père en exil à Paris."
Connaître l'exil de la bouche de ceux qui l'on vécu... Un exil et un roman couronné du Goncourt du premier roman ! Double tentation quand on s'intéresse à notre monde!... Non?
"Exilés", "Réfugiés"...Ces mots qu'on retrouve régulièrement dans la bouche de nombreux décideurs, et aussi dans celle de l'homme de la rue, soit parce que ce sont des mots de rejet de ces étrangers, porteurs de tous les maux de la création, soit parce que d'autres, bien moins nombreux - en tout cas bien moins vindicatifs, et qu'on entend moins dans les médias et les discours - accompagnent ces exilés afin qu'ils s'insèrent du mieux possible dans notre société.
Maryam a de vagues souvenirs de cette révolution iranienne, qui vit arriver à la tête de l'Iran les ayatollah, leur rigorisme religieux, leurs barbes, leur robes noires et surtout leurs tueurs pourchassant les opposants.
Ses parents, communistes étaient de ceux pourchassés par ces "révolutionnaires". Les moins chanceux des opposants étaient arrêtés, jetés en prison, torturés, pendus à des grues ou fusillés puis enterrés dans des fosses communes...les femmes étaient arrêtées, parce qu'une mèche de cheveux sortait du voile...
Aujourd'hui sur ces fosses, des immeubles modernes ont été construits.
Les parents de Maryam se réunissaient dans la clandestinité et transportaient dans les langes de leur fille, bébé, les comptes rendus des réunions de cellule...Maryam était trop petite pour s'en souvenir, on lui l'a raconté.
Alors son père quitta l'Iran pour la France, son épouse et sa fille le rejoindront quelques années plus tard.
La gamine, appendra le français, fera des études à la Sorbonne et son métier l'amènera à travailler à l'étranger, en Chine, en Turquie, notamment, pour le compte de la France.
Intégration réussie de Maryam, devenue auteure, pour nous conter ces années de vie en Iran, cette répression, ces crimes, la banalisation de la répression, le départ du père, l'attente angoissante du départ dans l'aéroport, dernières minutes de tous les dangers sur le sol iranien, l'arrivée et la vie à Paris dans des chambres de bonnes sans confort, l'ennui de sa mère et sa nostalgie de l'Iran, les repas français vs les repas iraniens, la lente ascension du père pour donner des conditions de vie décente à sa famille, la scolarité...bref la vie de ceux que nombreux ne veulent pas voir, parce qu'ils coûtent cher, parce qu'ils viennent manger notre pain...
Cette gamine dont les parents n'avaient que Marx pour dieu, abandonna là-bas ses poupées. Elle partage avec nous le souvenir de ses angoisses, de ses peines, de ses peurs passées, de ses succès, de ses joies.
Tout n'est pas dit, chronologiquement. Non, par des aller-retours littéraires entre l'Iran et la France, elle pioche aléatoirement de ci de là, quelques événements souvenirs, quelques conversations, quelques morceaux de vie, afin de nous parler d'elle, de ses parents, de l'Iran et de la France, vue par la gamine et l'adulte qu'elle est devenue.
Et de nous aussi...!
Ah que j'aimerais que tous ceux qui ont le mot "Exil" à la bouche, puissent prendre connaissance de ce texte. L'écriture est merveilleuse, certains passages notamment le poème "Il était une fois" devraient être lus par le plus grand nombre.
Tout y est dit en quelques vers.
Alors je vais acheter ce petit livre, que j'avais trouvé sur la table de présentation d'une médiathèque, l'acheter pour le partager, pour le prêter ou pour l'offrir, et pour le relire.
A méditer : "Tu sais ce que ça fait d'être nulle part chez soi ? En France, on me dit que je suis iranienne. En Iran, on me dit que je suis française. Tu la veux ma double culture ? Je te la donne, va vivre avec et tu viendras me dire si c'est une « belle richesse » ou pas."
Gros, gros coup de coeur pour ce titre et cette auteure amoureuse du français.....qu'elle enseigne ! Clin d'oeil !
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Beaucoup ont dit et raconté l'exil ; il y en a qui sont passés sans laisser de traces, à mon point de vue en tout cas, et il y a ceux dont on se souviendra. Marx et la poupée est de ceux- là. Sans pathos, ni optimisme béat, Maryam Madgidi nous parle de l'exil, de son exil, de son rapport à la langue qu'elle réinvente et ″avale‶ faute de pouvoir parler la sienne.

« La langue prend forme dans le secret de ma bulle, de mon monde intérieur, mon placenta à moi. »

Maryam est petite fille lorsque qu'elle quitte l'Iran avec sa mère pour rejoindre le père déjà à Paris. La famille fuit un régime qui emprisonne un certain nombre de ses membres.
Ce récit de l'exil commence bien avant la naissance de l'auteur. Il narre trois naissances : l'originelle, celle de l'exilée arrivant, et celle qui fait la synthèse des deux retrouve sa langue.
Le conte persan n'est jamais bien loin, intimement mêlé au vécu de l'auteur et de sa famille.
C'est le côté protéiforme, son absence de chronologie et de linéarité qui font l'originalité et la force de ce roman.
Maryam Madjidi convoque les poètes persans de son enfance pour alimenter, et illustrer son propos.
On y perçoit l'extrême sensibilité de l'auteur, mais également son humour, sa maturité, mais aussi sa fragilité dans ses deuils de petite fille. Quand l'humain se retrouve séparé de sa terre et des siens, sait puiser au fond de lui les ressources pour se réinventer. C'est cela que Maryam Madjidi a voulu nous montrer au fil de ce très beau livre.

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Chahdortt Djavann, Negar Djavadi, Marjane Satrapi, Mana Neyestani et d'autres encore ont écrit, dessiné à propos de leur pays, l'Iran, qu'ils ont dû quitter, fuir au péril de leur vie, parfois, mais Marx et la poupée, premier roman de Maryam Madjidi (photo ci-dessous) livre encore un autre éclairage sur l'exil et ce retour qui devient vite impossible.

Tout commence dans le ventre de sa mère, en 1980, à l'université de Téhéran : « Ma mère porte ma vie mais la Mort danse autour d'elle en ricanant, le dos courbé… » Obligée de sauter du deuxième étage pour échapper au viol, au massacre, elle ne perd pas son enfant, heureusement ! Cette enfant écrit aujourd'hui et égrène ses souvenirs. Elle parle entre autres de la voix de sa grand-mère et de ses jouets que ses parents lui demandaient de donner aux enfants du quartier. Elle a 5 ans et ne comprend rien au communisme car on veut lui apprendre le détachement matériel et l'abolition de la propriété.
Avant de se retrouver à Paris, en 2005, elle évoque Saman, son oncle âgé de 19 ans, qu'elle va voir en prison. Il parle maintenant des huit années passées dans une des pires prisons du monde. Elle dont les parents transportaient des documents du Parti communiste dans ses couches, livre ses souvenirs de « ce pays qui massacre ses meilleurs enfants. »
Son père déjà en France, elle est restée avec sa mère qui veut poursuivre ses études de médecine en Iran. Il avait été viré de la banque parce qu'il distribuait des tracts anti-Khomeini puis sa mère éjectée de l'université après avoir manifesté.
Le récit est précis bien que non chronologique mais les retours en arrière sont indispensables et attendus afin de comprendre cet exil et toutes ces souffrances endurées par tant de gens privés de liberté d'expression et menacés dans leur existence.
Le titre de la seconde partie : Deuxième naissance, est éloquent. Maryam Madjidi n'hésite pas à parler du concret, de la nourriture quotidienne, de nos habitudes, de tout ce qu'elle doit reprendre à zéro pour pouvoir vivre le plus normalement possible en France. Lorsqu'elle part travailler en Chine, à 32 ans, elle regrette nos croissants !
Elle parle aussi de cette nouvelle langue qu'elle apprend, refusant d'abord de parler puis rejetant ensuite le persan que son père essaie de conserver à la maison. Sa Troisième naissance la réconcilie avec sa langue maternelle et des poètes comme Omar Khayyâm et Sadegh Hedayat. Pourtant, son retour à Téhéran, en juillet 2003, est un échec malgré cet amant fugace qui lui fait découvrir « les ruelles mal famées et pauvres du sud de Téhéran… le tchador noir des femmes, femmes-corbeaux au visage caché… »

Sa grand-mère a raison lorsqu'elle lui dit : « Tu es trop libre pour ce pays. » Alors elle travaille quatre ans en Chine, un an à Istanbul puis revient à Paris où elle repense à ce chauffeur de taxi qui, à Téhéran, lui récita un poème de Hâfez (XIVe siècle) et ajouta : « la seule chose que nous avons su préserver, c'est notre poésie et c'est la seule chose à sauver de l'Iran. »
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Comment décrire ce roman découvert grâce à une opération commerciale sur les livres de poche (2 achetés = 1 troisième offert).

Maryam Madjidi a une écriture singulière, atypique, étonnante et captivante. Dans ce premier court roman elle nous raconte ses souvenirs d'enfance, l'Iran de la révolution, le don forcé de ses jouets au profit des enfants du voisinage au nom du communisme, l'exil en France, l'apprentissage de la double culture, le manque de l'amour de la grand-mère restée en Iran, la dure expérience de l'immigration pour une enfant de 6 ans, l'abandon de la langue maternelle, l'intégration, le refus du passé et d'une part de son identité pour mieux la retrouver.

Tout commence alors qu'elle est encore dans le ventre de sa mère, laquelle est prise dans un mouvement de révolte au sein de l'université, saute par une fenêtre pour échapper à la police et que miraculeusement le bébé de 7 mois qu'elle porte n'est pas blessé. Puis viennent le combat politique et la clandestinité, la peur de la police politique, les arrestations dans l'entourage, l'exil vers la France comme seule fuite possible.

Les chapitres sont très courts. Dans la première partie, première naissance, je les ai perçus comme des clins d'oeil, un regard furtif sur le monde, un éclairage court mais précis sur un moment, un sentiment, une situation.

Il y a trois personnages principaux : l'enfant et ses parents. Leur histoire est majoritairement contée par le regard d'une enfant, puis de la jeune femme et de l'adulte qu'elle est devenue. Dans les moments qui semblent les plus douloureux l'auteure semble prendre de la distance en les désignant par leur fonction dans la famille ("la mère", "le père", "la fille"), avant de revenir à la personnalisation ("Je", "nous"), amenant l'empathie du lecteur.

Le roman oscille entre plusieurs styles. Il se fait fable, récit autobiographique, poème, dialogue, journal. L'écriture est fine, drôle, sensible, poétique, notamment dans l'évocation des fantômes du passé, ombres d'apparence inquiétante mais toujours bienveillantes.

Un Goncourt du premier roman qui appelle d'autres récits et un coup de coeur pour une auteure que j'ai envie de suivre.
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