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EAN : 978B08KQH1W8P
Payot et Rivages (04/11/2020)
3.9/5   5 notes
Résumé :
L'une des tâches de la philosophie a toujours été de faire apparaître des pans du réel restés cachés. Le corps a été un l'un d'eux. La sexualité a été l'un d'eux. Mais cela n'était jamais encore arrivé à une partie du corps. Cette partie, qui n'en est pas vraiment une, parce qu'elle est une tout à elle seule, c'est le clitoris. Organe dit du plaisir de la femme. Organe longtemps ignoré, souvent mutilé. L'organe du plaisir effacé.
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
L'essai de Catherine Malabou est un ouvrage dans lequel la professeure de philosophie met en lumière le clitoris comme objet de plaisir, de pensée, de torture, et de discussion, simplement. Mais une seule et même question y gravite : comment et pourquoi le clitoris a été le grand oublié de l'Histoire ? Sans mettre un terme sur l'organe, ni les arts, ni les sciences ne le définissent exactement au cours des siècles tandis qu'il est à l'honneur aujourd'hui. Un voyage passionnant vers l'autonomie du plaisir féminin.
J'ai beaucoup apprécié cet essai pour la pertinence et l'organisation des propos autour du clitoris. Longtemps non défini, cet organe érectile à posé un problème sémantique. Pour en comprendre l'enjeu et son lien avec le féminisme, Malabou n'hésite pas à dépeindre ses pensées en s'appuyant sur de nombreux noms comme Simone de Beauvoir, Carla Lonzi, Halimata Fofana, Paul B.Preciado ou encore Sigmund Freud (ce dernier perdant peu à peu sa crédibilité au sujet du plaisir féminin, finalement). Tant d'auteurs et de chercheurs dont les propos sont propices à illustrer parfaitement cette frise chronologique du clitoris. Ils permettent à l'essai une fluidité surprenante sur un sujet pour le moins complexe. C'est bien cette dernière et la valeur des propos portés qui nous pousse à dévorer cet ouvrage.

La pluralité des sujets est remarquable, alternant philosophie et psychologie. le plaisir effacé nous parle un temps d'excision, un autre de transsexualité, de patriarcat, mais surtout d'extase et de liberté. Tant de voix toujours élevées plus haut pour libérer l'image jusqu'alors définitivement vaginale de la femme, entité vouée à l'adoration du pénis dans l'imaginaire collectif. Il déchaine aujourd'hui les passions, les recherches, la curiosité. le clitoris est un tout, mélange indissociable de féminisme et féminité que Catherine Malabou illustre parfaitement ici.
Lien : https://troublebibliomane.fr..
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Dans cette étude, Catherine Malabou explore les causes de l'absence, jusqu'à une époque récente, de la (re)connaissance du clitoris, organe oublié des traités d'anatomie, comme des diverses expressions artistiques, a fortiori comme lieu du plaisir féminin.
Cet ouvrage, fort bien documenté, porte un éclairage philosophique sur un thème qui n'a émergé que tardivement comme sujet d'étude, malgré quelques devancières (S de Beauvoir) et avant la « révolution sexuelle » des années 60 et l'émergence du féminisme. Les questions liées aux mutilations sexuelles, celles du genre et des transformations recherchées pour retrouver l'identité entre la conscience et l'apparence physique traitent de la représentation et de la place de la femme dans la société.
On pourrait regretter que cette étude ne présente qu'insuffisamment le clitoris comme lieu du plaisir féminin. Certes la thèse de l'ouvrage porte justement sur le « plaisir effacé », mais il n'aurait pas été vain d'évoquer son opposé permettant de valoriser cet organe secret s'il en est.
Enfin, il n'est sûrement pas inutile également de penser qu'à partir d'un même organe, il existe une grande variété (sinon une infinité) de vécus, de ressentis et de plaisirs. Il n'y a pas UNE femme mais DES femmes aux comportements et ressentis multiples et évolutifs. La réflexion de Françoise Dolto rapportée dans l'ouvrage est à cet égard fort éclairante : « ... j'ignore tout à fait qui je suis et c'est pour ça que je ne peux pas te répondre parce que je ne sais pas où est ma féminité à moi ».
Catherine Malabou nous livre une étude qui questionne et nous invite à réfléchir sur ce sujet essentiel dans la caractérisation du féminin, de la féminité, du féminisme.
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Un livre essentiel à fair élire aux hommes, évidemment, or je suis prête à parier que ce sont les femmes qui le lisent et c'est déjà très bien et fondamental.
Un bel essai, une contribution dont on avait besoin sur une partie du corps féminin cachée, non dite, et donc effacée et donc une partie où s'exerce la politique. Celle de la domination. On nie pour contrôler.
Ça pose bien les jalons d'une société qui domine, qui invente le corps des femmes comme ça l'arrange parce que ce sont les hommes qui en parlent, qui se pensent détenteurs du corps de la femme... les propos de Sartre font frémir : la femme est un trou à combler, oupf ! je m'étouffe.
Merci pour ce livre. Je signale au passage que l'autrice est dans une émission de France Culture, une série sur le corps féminin en quatre parties : le clitoris, l'utérus, les seins et les cheveux, passionnant.
Libérons-nous et récupérons notre corps,
salutaire
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Il s'agit d'une évocation poétique, mais non sans engagement, de la sexualité féminine, qui prend la philosophie et la psychanalyse pour inspiration et l'amusement de l'existence d'un organe spécifiquement dédié au plaisir pour point de départ. Est-il pour autant inutile - et s'il ne l'est pas, que pourrait-on bien en faire ? Un livre, celui-ci, par exemple.
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Citations et extraits (56) Voir plus Ajouter une citation
« Corps, seins, pubis, clitoris, lèvres, vulve, vagin, col utérin, matrice… et ce rien qui déjà les fait jouir dans/de leur écart », écrit-elle. La pluralité des zones ne peut se rassembler, demeure espacée, ce pour quoi elle emporte le plaisir au-delà du couple ouverture-fermeture, passivité-activité.
Mais que n’a-t-on reproché aussi à cet écart ! Valerie Traub considère qu’il est encore pris, enfermé, dans le cadre d’une adéquation stricte entre parties du corps et désir. La psychomorphologie du corps féminin d’Irigaray serait encore dépendante d’une « logique de l’équivalence ». Équivalence entre lèvres et désir féminin. Or la logique de l’équivalence est selon Traub « assurée par le phallus ». C’est le phallus en effet qui, pour Lacan, détient le « pouvoir de nommer » et d’assigner une valeur signifiante à une partie du corps, lui permettant ainsi de devenir l’emblème d’une identité érotique.
Tenter de penser et d’écrire le plaisir féminin, au risque supposé d’une rigidification identitaire, n’était-il pas cependant une étape nécessaire ? Ne le reste-t-il pas ? Il n’est pas sûr non plus qu’Irigaray soit tombée dans le piège d’une symbolisation encore phallique du clitoris, qui lui conférerait une valeur de principe du corps des femmes. Le clitoris, écrit-elle, « résiste à fonder sa fermeté ».
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Dans le féminisme, la femme trouve la conscience féminine collective qui élabore les thèmes de sa libération. La catégorie de répression dans la psychanalyse équivaut au maître-esclave dans le marxisme [et l’hégélianisme] : les deux forment une utopie patriarcale où la femme est vue comme le dernier être humain réprimé et asservi pour soutenir l’effort grandiose du monde masculin qui brise les chaînes de la répression et de l’esclavage18. » Enjeu majeur de l’autoconscience féministe, le clitoris marque désormais l’écart irréductible entre soumission et responsabilité.
Comment éviter toutefois, entre femmes, la reconstitution de la puissance phallique ? La réduction de l’écart ?
Dans son Journal, Lonzi évoque douloureusement les difficultés qu’elle rencontre avec Ester, sa compagne, qui se sent dominée par elle. « Avec Ester, je ne peux que me taire. Elle est en colère contre elle-même et ne le supporte pas. Maintenant, elle ose dire ce qu’elle n’avait jamais encore exprimé, ce qui était encore impensable : que, dans notre relation, je suis l’homme et elle est la femme. C’est ainsi que la dichotomie de la vaginale et de la clitoridienne fait retour, et même le féminisme ne pourra y mettre fin. »
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Comment faire l’amour à une image ? Les nymphes « sont femmes, écrit Boccace, elles leur ressemblent à première vue ». Elles leur ressemblent mais il leur manque quelque chose… Boccace a recours à une nouvelle image. « Il est vrai que toutes sont femmes, mais les nymphes, quant à elles, ne pissent pas . » La Muse-nymphe, étant privée d’âme et de corps réel, est aussi privée de… mais de quoi ? L’anatomie défaillante de l’époque ne permettant pas de distinguer véritablement entre clitoris, lèvres, vagin et urètre, Boccace réduit la vulve à la miction. Les nymphes sont des femmes « qui ne pissent pas  ». Agamben considère que Boccace, en s’exprimant ainsi, fait preuve d’un « réalisme brut ». Réalisme vraiment ? S’il est vrai que les nymphes ne reprennent vie qu’à s’unir sexuellement à un homme, la copulation les animera donc en les faisant uriner ? Réalisme, cette confusion entre pisser et jouir ? C’est bien cela en effet que signifie « les nymphes ne pissent pas » : les nymphes ne jouissent pas. Elles n’ont pas de sexe avant que l’homme ne les approche. Et ce sexe, dans l’imaginaire masculin, est doté d’une anatomie fantaisiste.
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Toutes les femelles mammifères ont un clitoris. Chez les quadrupèdes, il est situé près du vagin et se trouve donc stimulé par la pénétration. L’accouplement déclenche l’orgasme et l’ovulation en même temps. « La répartition des mécanismes ovulatoires au sein des mammifères actuels donne […] à penser que l’ovulation induite par la copulation représente le modèle d’origine », déclare un biologiste. Au cours de l’évolution, « du fait du redressement vertical du bassin, le clitoris est devenu un organe antérieur, visible, accessible par devant ». Chez la femme, le clitoris n’est donc pas (ou plus) situé à l’entrée du vagin.
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L’autoconscience éveille ce dont elle est la conscience, à savoir la véritable source du désir. C’est ainsi qu’elle permet d’abord d’en finir avec la culpabilité entretenue par la supposée frigidité vaginale. La « femme vaginale » n’est en effet qu’une projection du schéma sexuel masculin, une fabrication de la « culture patriarcale [qui] a réussi à garder le clitoris caché et inutilisé ». « Comment se fait-il que la femme vaginale hésite à prendre conscience d’un si vaste problème sexuel ? », poursuit Lonzi. Parce que la culture patriarcale est précisément une culture de la clitoridectomie.
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Videos de Catherine Malabou (4) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Catherine Malabou
Capitalisme, écologie, féminisme... La pensée anarchiste moderne est bien-là, prenant des formes diverses, répondant à des questions actuelles. Elle est partout et progresse dans notre société, sur Internet notamment.
Élève de Derrida et spécialiste de la philosophie hégélienne, Catherine Malabou s'intéresse dans son dernier ouvrage “Au voleur ! Anarchisme et philosophie” (PUF, 2022) à l'anarchisme dans l'histoire de la pensée philosophique. Elle pointe la manière dont des philosophes contemporains, comme Foucault ou Levinas, ont développé une pensée libertaire qui ne dit pas son nom, que ce soit par déni ou par inconscience.
Pourquoi l'anarchisme a-t-il été mis si longtemps au placard de la pensée philosophique ? Qui sont les anarchistes d'aujourd'hui ?
La philosophe et professeure de philosophie Catherine Malabou était l'invitée des Matins de France Culture le 5 janvier 2022 pour en parler. _____________
Découvrez tous les invités des Matins de Guillaume Erner ici : https://www.youtube.com/playlist?list=PLKpTasoeXDroMCMte_GTmH-UaRvUg6aXj ou sur le site : https://www.franceculture.fr/emissions/linvite-des-matins
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