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Marily Le Nir (Traducteur)
EAN : 9782021021950
368 pages
Seuil (17/03/2011)
4/5   2 notes
Résumé :
Augustin Gora, un intellectuel roumain d’un certain âge, a quitté la Roumanie communiste pour s’établir à New York où il vit seul, entouré de ses livres. La tanière, c’est ce refuge primordial, ce lieu protégé de l’extérieur, du réel, des autres. Car Gora vit dans l’obsession de son épouse, Lu (qui a refusé de le suivre dans son exil), et de son passé roumain, au milieu de ses livres et des morts (l’écriture de nécrologies est son dada). Un jour réapparaît sa femme ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Augustin Gora est un réfugié politique de la Roumanie communiste qui vit à présent à New York. Intellectuel reconnu, il passe son temps à rédiger les nécrologies de ses contemporains, bien entendu que tout vivant est un mort en sursis. En s'exilant, il a laissé derrière lui ses amis, les conversations d'intellectuels chuchotées au clair de lune, et la belle Ludmilla, sa femme, son amour, qui a refusé de partir avec lui, mais qui viendra pourtant à New York en compagnie de Peter Gaspar, son cousin et amant. Peter Gaspar lui aussi est un intellectuel, il donne des cours à l'université. Il appelle souvent Gora, entretient avec lui des conversations surréalistes grâce auxquelles il se parle à lui-même : "Il interrogeait, tout en s'interrogeant. Il n'attendait pas de réponse, mais l'interrogé faisait partie de l'interrogation. Culpabilisation indirecte". Parfois même, Gora lui répond. Un jour, Gaspar reçoit une carte postale, en lien avec Dima, grande figure mondialement connue, adulé par la Roumanie. Sans doute une menace. Gora, bien avant Gaspar, craint pour sa vie. Car Gaspar et Gora connaissent le passé controversé mais caché de cet homme, Dima, et ses sympathies avec l'extrême droite. Est-ce ce secret que l'on veut faire taire en même temps que Gaspar ?

Il n'est pas évident de faire un synoptique de cette Tanière de Norman Manea.
La tanière, cet endroit à partir duquel Gora écrit ses notices nécrologiques sur les futurs morts, est une oeuvre étrange et labyrinthique. Certaines scènes se répètent plusieurs fois, pour s'inclure dans des contextes différents (notamment la première scène dans laquelle Gaspar monte dans un taxi… j'ai même cru à une erreur d'impression), on ne sait de qui sont les pensées qu'on lit, ni qui parle dans les dialogues, ni à quelle époque ça se passe, encore moins dans quels lieux… Certaines phrases sont belles et poétiques. D'autres passages sont une association de mots, séparés par des points. L'auteur joue avec le son et le sens des mots (avec talent, il faut le reconnaitre). Bref, je suis restée un certain temps assez sceptique devant cette lecture qui me paraissait nombriliste, élitiste et égocentrique.
Mais au bout d'un moment, d'un certain nombre de pages, de passages, de paysages, de personnages, je me suis laissé prendre au jeu. Norman Manea trempe une plume, de celles qui écorchent le papier sur lequel elles écrivent, dans l'acide, pour nous dépeindre deux hommes qui se veulent si différents (sans compter Pallade et Dima) même s'ils aiment la même femme, pour dépeindre deux sociétés si opposées. Si la Roumanie n'est pas un ersatz du paradis, la vie n'est pas forcément plus verte de l'autre côté de l'Atlantique, au pays des capitalistes et des cartes d'assuré social. Des réflexions sur l'amour, l'exil, la société, le socialisme et le capitalisme, surgissent des conversations, des pensées, des conversations. Où qu'ils aillent, ces deux hommes portent leur passé avec eux, que ce soit Gora, qui s'enferme dans sa tanière au pays de la liberté, ou Gaspar, "sorti du ventre ensemencé d'Auschwitz", gros et gras comme un éléphant, qui souhaite être irresponsable.
Même si beaucoup de choses m'ont échappées, probablement par manque de connaissance de l'histoire et des grandes figures de la Roumanie, j'ai beaucoup aimé l'immersion proposée par ce livre qui fait penser au mouvement surréaliste, aux représentations de Dali en particulier (d'ailleurs l'auteur évoque à plusieurs reprises les cauchemars de Gaspar qui se prend pour l'un des éléphants du tableau éponyme de Dali). Mais j'ai fini par me perdre au lendemain du 11 septembre, dans la dernière partie du livre. A ce moment-là, Gora sort de ses lamentations sur la vieillesse, la maladie et l'exil, et l'attentat marque son retour à la vie. Enfin, si j'ai bien compris, et ça, ce n'est pas sur !!
Je garderai en tout cas de cette lecture exigeante un bon souvenir, un livre dans lequel on s'immerge avec plaisir, sans pour autant être jamais sur du moment et de l'endroit où l'on pourra reprendre sa respiration !
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Transcrire la nuit agitée dont il vient juste de s'évader

Des dialogues, des introspections, quelques personnages. le nouveau monde sous le poids des passés qui s'enchevêtrent et forment des filets où certains se raccrochent et d'autres cherchent à s'évader. « L'errant ne cessait de s'éloigner, mais il n'y a pas d'éloignement suffisamment lointain, les fléaux vous trouvent n'importe où. Sorti du ventre ensemencé à Auschwitz, Peter avait plongé dans l'enclos socialiste, puis dans la folie du monde libre. Et maintenant, maintenant, où achève-t-il le cycle ? ».
La civilisation et ses terribles déclinaisons d'Auschwitz, du stalinisme et plus récemment du Word Trade Center. le poids du temps, des souvenirs, de l'amour aussi. Une gigantesque peinture, réalité et imaginaire entremêlés, ombres et lumières, et encore et toujours l'exil.
Gora, Peter, Lu et sous le poids des mots, la littérature, les livres du monde, d'un monde qui s'étend très largement au delà du chemin qui mène de la Roumanie à New-York, un monde si vaste et si petit.
Un ouvrage exigeant, peuplé de fantômes de soi, un labyrinthe, des flux de paroles, un cadre désenchanté de vies, de nos vies peut-être...
« Aucun de nous ne soupçonnait, alors, que nous nous reverrions en exil, à quelques décennies et méridiens de distance »
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Citations et extraits (17) Voir plus Ajouter une citation
- Il n'y a pas besoin d'amour, Gusti, répétait l'ami Koch. Il n'y a pas besoin d'amour, écoute-moi. Dans notre stupidité, c'est ça que nous attendons toujours. L'Amour. Etre aimé, elle est bien bonne ! Après des siècles de haine et d'errance, qu'on nous aime d'un coup. Aime ton prochain plus que toi-même ? Le prochain ! Hum ! oui, je comprends… mais même le prochain ne peut être aimé autant qu'on aime sa propre petite peau. Un mensonge. Jamais plus que soi ! Ce n'est pas possible. Et si c'est possible, c'est trop. Pourquoi nous aimer ? Sommes-nous meilleurs, plus beaux ? Parfaits ? Nous ne le sommes pas. Donc : qu'on nous laisse tranquilles. C'est tout, c'est tout ! Tu m'entends ? C'est tout ! Qu'on cesse de nous demander d'être meilleurs, plus beaux, parfaits. C'est tout ! Il n'y a pas besoin d'amour, Gusti.
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- Oui, vraiment. Pour être élu sénateur, il faut des millions de dollars. On mendie des millions à ceux auxquels on va, ensuite, accorder des faveurs ? Un seul salut : l'économie. La manipulation des défauts humains ! Ca maintient la pourriture. Travail, business, argent. Exploitation jusqu'au sang. On vous met à la porte en deux minutes, si le boss l'a décidé. On perd son assurance maladie, puis sa maison, sa voiture, tout. Donc, on fait attention de pas les perdre. On travaille comme un esclave et on s'attache à cet esclavage. Chez nous, quand on parlait de l'Etat à quelqu'un, il vous disait : "Merde à l'Etat !". Ici, il dit : "God bless America" ! La manie du travail. On travaille comme une bête jusqu'à la dernière demi-heure et hop ! on vous enterre !
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- Le communisme était une cause juste. Elle l'était pour mon père. Et pas seulement pour lui.
- Clore le bec aux gens, confisquer les biens acquis par leur travail, c'est une cause juste ?
- Non, pas nécessairement ça. S'opposer au fascisme, par exemple. Entretenir l'illusion d'un avenir plus juste. L'avenir lumineux de l'humanité, c'est ce que promettaient les slogans.
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La vérité est aussi vérité de l'imagination et des possibilités, la réalité n'est pas uniquement celle des faits, mais aussi celle des hypothèses et de l'énigme, des chances manquées, expirées avec la personne qui a expiré.
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Pour ses camarades et pour l'Alchimiste, la tradition, tout comme la barbarie païenne, seraient les sources d'énergie et de pouvoir. La civilisation est oubli. Absence de but et de centre. Décadence de l'individu.
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