Avec son passé d'ancien militant de l'IRA , de braqueur de banque et d'ancien taulard, on se doutait bien que SAM MILLAR ne serait pas du genre à faire de la broderie avec ses romans , ni à donner dans la dentelle avec ses personnages.
Vous ne serez donc pas étonné si je vous dit que «
Les chiens de Belfast » en est la parfaite illustration. Et pour le coup il vaut mieux avoir l'estomac bien accroché et savoir où vous mettez les yeux en tournant la première page de ce roman, qui constitue le premier opus d'une trilogie.
Car dès le premier chapitre l'auteur vous donne un aperçu de ce que son imagination peut avoir parfois de brutal et dur ! Il vous happe dans une scène particulièrement violente et insupportable qui vous mettra mal à l'aise et tournera un moment dans votre tête.
Nous sommes en 1978. de cette scène il n'en restera que des restes humains éparpillés par les animaux sauvages. Pourtant, vingt ans plus tard cette affaire rentre en résonance avec une série de meurtres dont le summum sera atteint avec la découverte de deux mains gauches dans les entrailles d'un sanglier.
Détective désargenté, joueur de poker , amateur et grand consommateur de cognac, cabossé par la vie et torturé par son corps, Karl Kane, voit dans l'affaire que lui propose un certain Munday, l'occasion de se refaire un peu. de quoi en tout cas payer une partie du salaire qu'il doit à sa secrétaire et quelques autres arriérés enkystés dans son horizon financier.
D'autant que tout ce qu'on lui demande c'est de parvenir à identifier un cadavre qui se trouve à la morgue après avoir été découvert dans un jardin de la ville.
tParce que son ex beau frère avec qui il est en froid est flic , et qu'il connait bien les membres de son équipe, Kane ne tarde pas à découvrir grâce à eux l'identité de l'inconnu. Mais ce qu'il apprend également c'est que Wesley Milligan, c'est son nom, n'est pas décédé de cause naturelle. Et si certains pouvaient en douter, les trois balles logées dans sa tête font taire les plus sceptiques.
Un travail vite mené, et bien payé. Sauf que lorsque son client lui même est assassiné Kane n'a plus d'autre choix que de s'intéresser de très près à cette histoire et mener l'enquête. Car d'autres morts violentes surviennent dont l'une serait totalement passée inaperçue si des chasseurs n'avaient pas tué ce sanglier et décidé de le dépecer.
Une enquête qui va le conduire à faire le lien entre les différentes victimes et se retrouver sur les traces d'une femme aussi séductrice que venimeuse, bien décidée à faire souffrir de manière inouïe les hommes qu'elle décide de prendre pour proie.
Mais ces meurtres, visiblement soigneusement préparés, cette cruauté bestiale délivrée aux victimes n'indiquent pas qu'il s'agit d'une simple histoire de tueuse en série. La motivation de l'assassin semble avoir des racines bien plus profondes que la simple satisfaction d'une pulsion meurtrière.
Avec «
Les chiens de Belfast », Sam Millar réunis tous les ingrédients classiques d'un polar efficace. Un privé usé par la vie et l'alcool, traumatisé par une blessure personnelle ( dont on devine déjà qu'elle refera surface au cours des prochains opus de cette trilogie ) , une secrétaire à la fois amante et maternelle, et une histoire pleines de rebondissements et d'actions.
Sans doute cela aurait-il pu frôler la caricature du genre, mais la patte de Sam Millar qui fait au final toute la différence, c'est sa capacité à allier à la fois l'humour ( notre détective est aux prises avec une terrible crise hémorroïdaire, qui donnera une scène chez le proctologue qui, sans jeu de mots, restera dans les annales ! ) et la violence dans tout ce qu'elle a de plus cru et de plus scabreux.
«
Les chiens de Belfast » n'atteint pas le niveau de l'excellent «
Rédemption Factory », mais c'est tout de même un bon roman qui donnera certainement à son lecteur l'envie de découvrir la suite des aventures de Karl Kane dans les deux autres romans à venir.