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3,7

sur 1477 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Pour beaucoup, ce que je vais raconter ici paraitra dérisoire : "Rue des boutiques obscures" est le premier livre que j'ai eu entre mes mains qui ne soit ni une surprise, un livre de poche, un livre d'occasion. Ma première volonté de lectrice, d'économiser pour m'acheter un livre des Editions Gallimard, le prix Goncourt, dont j'avais aperçu l'auteur par hasard, dans un soir d'internat où je végétais, trainais une adolescence interminable, dans la lucarne télévisuelle, une émission "Apostrophes", seule ouverture sur un monde de liberté possible. Cet auteur, nommé Patrick Modiano, un inconnu, m'avait décoché une flèche en plein coeur. J'ai acheté ce livre, cher pour moi à l'époque, et ramené chez moi. J'ai attendu quelques temps pour le lire, intimidée par cette couverture d'un livre qui me paraissait le summum du luxe et symbole intellectuel dans une famille où le livre était objet superflu. On se moqua de moi. Et puis, j'ai osé ouvrir la première page, m'aventurer dans le récit. Ce fut le début d'une histoire d'amour qui perdure encore aujourd'hui, avec l'univers de Modiano, pas évidente au premier abord, avec les méandres d'une mémoire sans cesse réinventée, un style épuré, l"histoire de destins fracturés, le début aussi de l'obsession de la lecture de l'intégralité de l'oeuvre des écrivains qui auraient l'heur de me sourire... l'affranchissement de s'autoriser l'accès à la culture qui semble réservée à d'autres que soi, de son milieu social, éducatif.
Attention, lire est un acte subversif !
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Il y a parfois du bon à rouvrir de vieux cartons...cartons de livres ayant été lus pas d'autres que vous avant vous et qui vous en font don...histoire de refaire vivre le passé à nouveau et pourquoi pas, de découvrir de précieuses richesses ? Aussi, quoi de plus extraordinaire comme entrée en matière d'avoir trouvé cet ouvrage dans un vieux carton relégué dans un grenier pour découvrir l'histoire de cet homme qui, lui aussi, tente de refaire vivre son passé ?

Le roman débute sur ces quelques mots "Je ne suis rien". En effet, Guy Roland est un homme qui a strictement tout oublié de son passé et de ses origines, oubliant même son propre nom. Guy Roland lui a été suggéré par son ami et collègue de travail Hutte, enfin disons plutôt employeur. Hutte est en effet un détective privé qui a pris Guy sous son aile et tous deux ont travaillé ensemble durant une dizaine d'années avant qu'il ne décide de prendre sa retraite et de se retirer sur la côte méditerranéenne. Fini les affaires pourrait-on dire mais pour "Guy", celles-ci ne font que commencer car, tout au long de son roman, il va s'acharner à reconstituer son passé afin de pouvoir enfin savoir qui il est. Mais d'ailleurs, le sait-on vraiment un jour ?
Ce ne sera pas une quête facile car il s'aventurera sur des fausses pistes, s'imaginant tantôt issu de la haute noblesse ou simple immigré.

Bref, un superbe roman sur la quête d'identité, roman qui se déroule durant la Seconde Guerre mondiale où justement l'identité était au coeur des débats. Un roman poignant, extrêmement bien écrit et laissant le lecteur à ses propres réflexions et interrogations. Peut-on être sûr que l'on se connaît vraiment soi-même ?
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Pour qui se cherche, les identités peuvent être multiples. Guy Roland, homme amnésique, parcourt les rues de Paris à la poursuite de sensations, de signes, d'images qui le rendront à lui-même. Il rencontre des êtres qui lui délivrent chacun une histoire, des photographies où il pense se reconnaître, à tort peut-être. Mais le plus important n'est pas là, puisque il n'est pas en quête d'une vérité mais d'une identité, quelle qu'elle soit, qui mettra fin à une errance … ou pas.

Pour Patrick Modiano, né d'un père juif italien et d'une mère belge flamande arrivés à Paris pendant l'Occupation, obligés de vivre leur relation dans une semi-clandestinité et absents de son enfance, on imagine que cette quête identitaire ne lui est pas étrangère. Il en tire un texte magnifique à l'atmosphère envoûtante, un temps hors du temps, entre présent et passé.
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Un très beau roman sur la quête d'identité. le roman commence en 1965 (on ne découvre cette date que tardivement dans le livre) quand le patron de Guy Roland part à la retraite dans le Sud. Depuis dix ans il a donné une identité fictive à Guy Roland, amnésique, qui a tout oublié de son passé. Il lui a donné aussi un emploi dans son agence de détective privé. Guy, qui a une très vague piste, décide alors d'enquêter sur son passé, en utilisant son expérience de détective. Sa piste s'avère une fausse piste, mais en entraîne une autre, des indices, et de fil en aiguille, il semble se rapprocher du but. La narration est, presque toujours, à la première personne, et, tout en racontant ses recherches, Guy s'invente parfois des souvenirs qui s'avèrent faux, jusqu'au moment où des bribes de souvenir, ou plutôt des sensations, lui reviennent, suggérant qu'il est sur la bonne voie. Guy ne trouvera pas de façon certaine son identité, mais il aura quand même avancé, au fil de ses déambulations dans les rues de Paris, depuis la première phrase « Je ne suis rien. » La construction du roman est très efficace avec sa narration à la première personne et son côté enquête policière. Quand à l'écriture elle est toute en sobriété, permettant au lecteur de ressentir les émotions en même temps que Guy. A la fin, il s'est identifié à un homme dont il n'est pas sûr de l'identité, et dont il ne sait rien après 1940. Mais peu importe, il n'est plus « rien » ; quand au lecteur, il aura découvert en plus une histoire, un morceau de vie pendant l'occupation. Vraiment un très beau roman, à lire absolument.
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J'ai trop longtemps repoussé cette lecture.... Il faut dire que lire Modiano c'est s'attaquer a un monument de la littérature : Grand prix du roman de l'Académie française, le prix Goncourt puis enfin prix Nobel de littérature, toutes ses récompenses me faisait peur. Et puis cette semaine, j'ai pris mon courage a deux mains et j'ai attaqué Rue des Boutiques Obscures que j'ai adoré.

On y fait la rencontre de Guy Roland, un employé dans une agence de police privée, comme vous est moi, a la différence qu'il est amnésique. Il va donc partir a la recherche de lui-même, pour découvrir qui il était. "J'ai arpenté pendant plusieurs jours le XVIe arrondissement, car la rue silencieuse bordée d'arbres que je revoyais dans mon souvenir correspondait aux rues de ce quartier. J'étais comme le sourcier qui guette la moindre oscillation de son pendule. Je me postais au début de chaque rue, espérant que les arbres, les immeubles, me causeraient un coup au coeur."

Le roman est construit de manière très habile : a la façon roman policier et donne beaucoup d'intérêt a cette quête d'identité. le narrateur nous parle a la première personne et renforce ce lien avec le lecteur. Je ne sais pas pourquoi mais ce roman m'a beaucoup fait penser a L'étranger de Camus, dans sa narration, son rythme, lent mais en même temps l'auteur sait comment capter son lecteur.

C'est une très belle découverte qui va me marquer j'en suis sur et qui me donne envie de découvrir d'autres romans de l'auteur.
Lien : http://missmolko1.blogspot.i..
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Chaque titre de livre choisi par Patrick Modiano est un mystère et le titre de ce livre une préface à lui seul. Parcourez la liste des titres de ses ouvrages, tous suggèrent, vous touchent, aucun n'est insipide.
Rue des boutiques obscures, dresse une ambiance, donne le la, un itinéraire improbable, où les individus portent des noms d'emprunt, un espace louche ou les affaires se font ou se dénouent sans laisser de traces.

Jean-Louis Trintignant a prêté sa voix à Guy Roland, à une ombre, "je ne suis rien, strictement rien, j'ai tout oublié de mon passé", avoue Guy Roland  ; je travaille pour Hutte, un détective privé, et il est peut-être temps de savoir d'où je viens.

C'est une voix brisée que j'entends quand Trintignant parle, comme si une autre histoire collait à celle de Guy Rolland, une femme qui aurait compté comme un père pour sa fille, comme un amant pour la femme de sa vie.

Lire Rue des Boutiques Obscures par cette voix, c'est oublier le présent, se laisser guider, par une fissure, un vide qui a tout effacé, sauf la douleur, le manque, un abandon toujours à vif.

Ce voyage dans le temps, est peut-être la voie d'une rédemption tant attendue, la sérénité enfin permise ou possible, un deuil d'espoirs brisés.

Vous êtes bien Pédro MacEvoy ? Je vous reconnais, "oui bien sûr, c'est moi". Il regarde cette photo et surtout son sourire, Il ne lui reste que cela, son sourire comme des bribes éparses d'un passé qui se dérobent. Qui suis-je, alors que la dame lui donne des bouts du puzzle dans cet atelier de confection, et de haute couture. Mais de qui parle t-elle. Ce sourire et cette femme Gay Horlow, si mystérieuse.


Mansour le photographe a lui aussi des clichés. Il a peur, une empreinte laissée par le passé, "cette drôle d'époque", Paris pendant la guerre. Mais rien ne vient aucune ombre n'impose sa présence, la magie de la photo n'opère plus. La neige s'était mise à tomber oppressante, tout devenait flou, et "de cela, il ne restait rien, pas même la traînée lumineuse que fait le passage d'une luciole".


La voix de Guy repasse en boucle ces paysages de neige, l'atmosphère ouatée, son front qui se penche sur le mur blanc de la montagne et qui ne distingue plus rien. Wilmer affirmait que Besson le moniteur de ski, se maquillait pour faire croire à des cicatrices, un affabulateur à qui on ne peux pas faire confiance. Alors pourquoi avoir agit si vite ?

Ce russe, comme "la plupart d'entre eux, même de leur vivant n'avaient pas plus de consistance qu'une vapeur qui ne se condensera jamais".

Jean-Paul Sartre, faisant écho au mythe de Sisyphe de Camus, affirme que la vie est un plongeon dans le vide. Modiano, le dit page 238, "après tout, c'est peut-être ça, une vie ; « des lambeaux, des bribes de quelque chose, qui me revenaient brusquement au fil de mes recherches"...
Modiano ajoute, " nos vies ne sont-elles pas aussi rapides à se dissiper dans le soir que ce chagrin d'enfant"?

A la fin du livre, capté par la voix de Trintignant, une émotion indicible, m'a envahit, le timbre de Jean-louis Trintigant flottait sur des mots d'une fausse douceur, Modiano a creusé le poids de sa souffrance il ne s'est pas délivré de sa conscience, qui suis-je ? Qu'ai-je fais ?
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Une écriture douce et tendre, un réel plaisir de lecture ! La perte de mémoire comme moteur d'une véritable enquête policière, voilà la vision originale que nous propose Patrick Modiano pour ce roman de quête. La quête d'identité poursuivie comme le Graal, banale chez la plupart d'entre nous mais qui dans le cas de Guy Roland prend un intérêt particulier. A cause de son amnésie, il est amené à rechercher effectivement son identité et son enquête le ramène doucement à lui. A travers Paris, patiemment, il arpente les rues et recueille les témoignages. J'ai marché avec lui le long des avenues et je l'ai suivi sans peine dans la recherche de ses souvenirs, sensations perdues inscrites au plus profond de sa chair et finalement retrouvées. le roman se termine sur l'inconnu, on ne sait pas si "Guy" va retrouver tous les éléments de sa vie passée, mais ce n'est pas ce qui compte car l'essentiel est fait, il a réussi à cerner les éléments principaux de ce qui faisait sa personnalité. Plus largement il me semble que ce roman est une image de notre quête à tous, celle de notre identité profonde. Au-delà de notre état civil, ce sont peut-être les émotions, les ressentis, les sentiments partagés ou non, et plus largement toute cette forêt d'impalpables que nous traversons au long de notre vie, qui font de nous ce que nous sommes vraiment.
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Il y a quelque chose de trés touchant dans ce roman de Modiano .
Cette quéte de la mémoire perdue que l'on frole et qui s'échappe , cette quéte à ce petit quelque chose qui font de certaines histoires des chefs d'oeuvre .
Et il faut reconnaitre que Modiano ici est un orfévre .
Son style convoque le passé pour reconstruire le présent , cela avec un talent extraordinaire .
Sa capacité à batir une oeuvre majeure en étant aussi humble , voir effacé , c'est ce qui fait la magie de cet opus que j'ai lu il y a 5 ans et que j'ai encore en mémoire tellement il est beau .
Un trés grand moment de lecture .
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Quête d'identité.

Guy Roland ignore sa réelle identité. Voilà dix ans qu'il vit dans l'obscurité. Lorsque l'agence de police privée qui l'emploie ferme, il part à la recherche de cette vie disparue.

C'est mon premier Modiano et ce ne sera pas le dernier. Il prend le prétexte du roman policier pour élaborer une réflexion sur l'identité. Qu'est-ce que l'identité ? Restera t-elle dans la mémoire d'autrui ? Ou bien l'obscurité emportera t-elle celle-ci ?

L'enquête de Guy Roland se fait de tâtonnement en tâtonnement. Toutes les personnes qu'il croise sont dans l'approximation. Roland s'accroche à une piste, aussi ténue soit-elle, dans l'espoir de recoudre les fils de sa vie perdue. Une simple photographie d'un homme qui lui ressemble, l'emmène dans une époque disparue.

Divers noms, diverses vies s'entremêlent dans la quête du narrateur. Des patronymes compliqués, de sombres histoires diplomatiques oubliés de tous émaillent son enquête. Les rares qui s'en souviennent n'expriment que des regrets. L'enquête n'est qu'accessoire dans ces vies effleurées. Peu importe qui est réellement Guy Roland au final.

J'ai trouvé que la réflexion sur la mémoire de Patrick Modiano s'approchait de celle d'Annie Ernaux dans "Les Années". La mémoire est éphémère, qui que nous soyons nous serons progressivement oubliés après notre mort. L'identité n'est qu'un mirage qui dure une vie. L'oubli est une seconde mort. Pourquoi tant vouloir retrouver la mémoire, alors que pour autrui vous n'êtes plus ?

Bref, ce roman est brillant par sa construction, qui au travers d'une enquête montre une réflexion sur la mémoire.
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Relecture d'un roman qui m'a fait découvrir Patrick Modiano dans les années 1980, probablement parce qu'il avait reçu le prix Goncourt en 1978.
Je suis tout de suite retombée sous le charme de la prose de celui qui, depuis, a reçu le prix Nobel de littérature en 2014.
Le titre de ce sixième roman "Rue des boutiques obscures" n'est pas surprenant puisqu'il s'agit d'un lieu et cela a une importance capitale pour celui qui cherche d'où il vient. Chez Modiano, il y a toujours des repères topographiques qui comblent la géographe et promeneuse que je suis. Car revenir sur les lieux aide à retrouver les traces du passé.
Il faut dire que Guy, le narrateur, est amnésique. Il travaille depuis dix ans chez Hutte qui a créé une agence de police privée après la guerre. Ce dernier l'a aidé et continu à le faire même lorsqu'il part prendre sa retraite à Nice.
Guy va donc mener l'enquête pour retrouver la mémoire et sa véritable identité, en utilisant les techniques d'investigation policière.
Il se souvient par bribes et les noms résonnent dans sa tête comme dans celle du lecteur.
En filigrane, on retrouve la période de l'occupation allemande durant laquelle il a dû se cacher et tenter de quitter la France pour la Suisse.
Patrick Modiano est vraiment très fort pour instaurer un climat trouble avec un mélange de réalité et de fiction.


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