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un jour de septembre (vendredi)
Je descends du taxi, comme dans un rêve, devant l'entrée de ce petit ryokan, perdu et si petit devant ces cryptomérias qui l'entourent, une forêt parée de vert et d'or en cette saison. Je me repose sous le regard complice de la lune. Un clair de lune qui illumine le kimono de cette femme, juste prêt à s'ouvrir pour prendre un bain d'étoiles et de poésie. Les rayons de la nuit recouvre d'un voile sa nudité si blanche, si belle, aussi blanche et parfumée qu'une fleur de jasmin. Je déambule dans les jardins aux alentours, attendant l'appétit ou l'envie de vivre. La pénombre commence à m'envelopper au fur et à mesure que je marche vers la profondeur de la forêt, je ne sais pas si je retrouverai mon chemin, de pierre, de terre, de fraîcheur végétale, je continue d'avancer jusqu'à tomber aux détours d'un bosquet, devant une auberge. Je m'y engouffre, soirée mousse. Au menu, de la mousse. Rien d'autres. Des mousses délicates et délicieuses, elles poussent derrière cet arbre, celles-ci légèrement plus âcres se ramassent à l'ombre des grosses pierres. Même le jus est vert. Qui oserait boire un verre de jus vert dans une nuit dédiée à la mousse. Rassasié je suis, et retrouve la voie de mon futon, guidé par les voix de ces jeunes filles, apprenties geishas.

un jour de mai (mardi)
Je découvre que c'est la journée internationale de la Chouffe. Je chouffe, alors. Chouffes-tu avec moi. Chouffons donc ensemble. Pourquoi pas. Comme ça, une idée saugrenue. Farfelue. Je sais je ne sais pas mettre de la folie dans une vie. Ma folie, c'est ma Chouffe. La Chouffe, c'est ma vie. Je décrète ainsi, le mardi journée mondiale de la Chouffe, même si mon monde s'est restreint à quelques centimètres de poussière.

un jour de février (mardi)
Devant moi, les petites boites. Dis comme ça, ça ressemble au titre d'un roman de Yoko Ogawa. Les Petites Boites. Celles où l'on referme tous ses souvenirs, ses galets, ses peines. Dans mes boites, j'y mets ma vie, un brin de silence, là il me faut la plus grande boite parce que mon silence prend de la place. Dans la suivante, une capsule de Paulaner, une fragrance de jasmin. Une boite allongée, j'y glisse une clarinette. J'y rajoute un air de Coltrane. Plus carrée, j'ajoute un verre de Crozes-Hermitage et un disque de Chet Baker. J'adore associer les vins et les musiques. Pour le Köln Concert de Keith Jarrett par exemple, un Vinsobres. Mais revenons à mes boites, dans la plus petite, j'y glisse un sourire, comme ça je peux l'emporter partout et ainsi l'ouvrir dès que je veux réchauffer mon âme.

un jour d'octobre (dimanche)
Je vois une affiche dans la rue, la grande kermesse de l'école primaire. Je pétille de joie, sautille comme une grenouille, papillonne comme une pucelle. J'adore ces grands rassemblements, je m'y incruste toujours. C'est tout un art, déjà de pénétrer les lieux, ces écoles de plus en plus fermées, surveillées. Maintenant elles mettent même des vigiles à l'entrée, lunettes de soleil, l'air aussi patibulaire qu'un yakuza retraité. Pourtant, je ne me démonte jamais, addict à l'oeuf dans la cuillère, au tir à la corde, à la course dans un sac à patate... le plus compliqué reste le moment du pique-nique où je dois faire semblant que mon fils ou ma fille a préféré manger dans l'autre groupe, dans l'autre partie de la cour. A part ça, je m'éclate. L'art de l'incrust. Il y en a qui s'invite à des séances de dédicace, d'autres à des vernissages d'une galerie, moi ce sont les fêtes d'écoles. Mais, malgré tout, je sais où est ma place, si je sens que je dérange, je m'éclipse discrètement.

Tout aussi discrètement et silencieusement, j'ai fureté au vernissage d'un photographe amateur. Loin de mois l'idée de me gaver de petits fours, une coupe de Vouvray à la main, j'erre entre les dédales des cadres et des invités Les photographies, couleur ou noir et blanc, suivant l'humeur, suivant la luminosité, des tasses de cafés qui fument sur tous les plans, chaque photo porte un numéro, ma préférée : "Bon courage n°1305".

le lendemain (lundi)
Il pleut comme un bison qui pisse. A l'ombre d'un regard.

un jour de décembre (jeudi)
Je me promène dans la rue, sans but, sans envie, sans vie. J'attends juste que le temps passe, s'égraine, les lunes passent, l'eau s'écoule, quand j'entends des cris. Ou des pleurs ? Un brouhaha indescriptible, comme au marché de poisson de Tsujuki à 4h30 du mat. Trente minutes plus tard, il est cinq heures, Tokyo s'éveille. Mes pensées circulent dans ce capharnaüm, aussi vite que le shinkansen mais moins ponctuelles. Toujours est-il que je rentre dans l'enceinte de ce temple. A l'entrée, encore beaucoup plus de monde, c'est le tournoi de sumo des bébés pleureurs. En couche, comme des sumos, le bébé est présenté au prêtre de cérémonie. Il doit pleurer le plus fort possible. Un spectacle "bruyant", la fierté des parents.

un jour d'avril (samedi)
A m'asseoir sur un banc cinq minutes avec toi. Tu es là à mes côtés, un frisson. Une pensée, un fantôme. Je te vois, tu ne me vois pas. Je te parle, tu gardes le silence. Ou l'inverse. Un esprit, yokaï de la passion. Je sors un livre, je suis seul sur mon banc. La Dame de Musashino, un classique. Un cygne vient me voir. Blanc, comme le sommet du Mont Fuji que je regarde par temps clair, par temps de spleen.

un jour d'avril (dimanche)
Le soir, je chopine. j'adore chopiner. Pas toi ? Chopin au masculin, Chopin au féminin. J'aime partager l'intimité de son piano. Je m'enveloppe d'un silence, beau silence pour moi, lourd pour d'autres... Et Bach ?
Je me demande quelle musique s'harmoniserait le mieux avec le Pavillon d'or de Yukio Mishima. Il faut toujours une musique pour accompagner un livre, comme un silence pour accompagner un grand amour.

un jour d'avril (samedi)
Décor : des corps. Encore en corps. Et si je me baladais du côté d'Harajuku.

un jour de mai (mardi)
L'heure du grand pique-nique a sonné ! J'entends les cloches du temple d'à-côté sonner. Elles résonnent dans la bise printanière de cette journée. Il reste encore quelques fleurs de cerisiers que le vent n'a pas encore su égrainer. Je m'allonge au milieu des coquelicots, Elle débouche une bouteille de Beaujolais. Elle me sert un verre, je lui sers un verre. Une fleur de cerisier tombe dans nos verres. Bouquet parfumé que ce vin, senteur inoubliable, la fragrance du jasmin et de l'amour.
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Ce livre ressemble à un journal de bord, il a la forme d'un journal de bord mais ce n'est pas un journal de bord. C'est Manuscrit Zéro. En le refermant, je ne sais toujours pas ce que l'auteure veut signifier : soit le manque d'inspiration, soit l'absence volontaire d'une "histoire".

Il est beaucoup question de nourriture : des plats à base de mousses, des crevettes, un mille-feuilles au tiramisu, des beignets de tempura, des pâtes aux pousses de fougère.
Voici la recette de ce plat japonais :
- un hôtel à flanc de montagne,
- un écrivain célèbre grignotant des graines de tournesol,
- un achat de chaussures,
- une tourneuse de pages de partitions,
- un festival de bonsaïs,
- un bain d'herbes médicinales,
- des poules bantams à perruque,
- un pilleur de cocktail,
- un concours de pleurs de bébés,
- un club de récitation
- etc.

Vous secouez cet inventaire à la Prévert, vous le jetez tel un jeu de Mikado et vous avez le livre de Yoko Ogawa. Chaque enchaînement reprend subtilement un élément du précédent. Déroutants tous ces petits riens qui s'acheminent vers le mot FIN sans qu'il existe.

Prendre le Manuscrit Zéro au premier degré est envisageable mais trop simple. le lire sous la loupe de la psychologie des profondeurs serait plus adéquat.

Première lecture de Yoko Ogawa. A suivre sans bruit sur le tatami.


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ce n'est pas mon livre préféré de Ogawa et de loin. Les nouvelles se suivent dans une cohérence et quelques thèmes répétés intéressants: pour autant, si certaines d'entre elles sont simplement magiques ( l'avant dernière avec sa mère, les bébés sumos) , le niveau est variable ( à mes yeux ) et l'attention peut baisser.
Il reste quand même une bien belle écriture!
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Cela faisait longtemps que je souhaitais lire Yôko Ogawa et je ne suis pas déçue. Il existe une certaine similitude avec l'atmosphère que l'on rencontre dans les livres de Haruki Murakami : étrangeté, une certaine lenteur, la rencontre avec des personnages improbables....

Ce récit à la première personne est celui d'une jeune romancière, qui nous raconte son quotidien, ses rencontres, les événements marquants de sa vie à travers diverse chapitres.Il est construit comme une succession de saynètes mais avec une certaine cohérence et continuité : certains chapitres sont éclairés sous un autre aspect par les suivants, certains personnages évoluent. Un des chapitres est dévolu à sa grand-mère, attachée à deux étranges personnages, une autre à une fête de sport dans une école maternelle où elle s'immisce, une autre à son métier d'auteur de grandes lignes, une autre à une étrange visite guidée sur l'art moderne.....Certaines sont carrément fantastiques, d'autres touchantes ou plus intimistes. J'ai trouvé magnifique celle sur sa capacité de créer les grandes lignes d'un livre et sur sa lecture de ses oeuvres sous cet forme à un vieux romancier. La toute première sur le magasin de chaussures est poignante : on ne peut que ressentir toute la détresse et la souffrance de l'auteur, devant l'inéluctabilité de la séparation et l'impossibilité désormais de partager ces moments. L'écriture est vraiment magnifique malgré sa simplicité : c'est poétique, les phrases sont ciselées, beaucoup d'émotions et de tendresse transparaissent dans ces passages.

Ce qui est marquant c'est l'apparition progressive du portrait d'une femme excessivement seule. Un peu décalée, elle fuit (ou ne peut construire de réelles) les relations humaines, car elle éprouve des difficultés à exprimer ses émotions. Elle semble donc évoluer à la marge, sans réelles attaches. A chaque fois qu'elle se rapproche d'une personne, celle ci s'éloigne plus ou moins volontairement (mort, maladie, disparition, relations amoureuse ...). Ses loisirs, ses joies sont surprenants, mais prennent sens au regard de sa profonde solitude.
Ce roman s'imprime dans votre conscience car beaucoup de tristesse et de solitude se dégagent de ce roman. Pourtant, son caractère poétique et un peu étrange lui confère une certaine légèreté et douceur.
Lien : http://toshoedwige.blogspot...
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Au degré zéro de la création se trouvent les questionnements, les errances, les angoisses, les phantasmes de tout écrivain.
Yôko Ogawa nous permet avec ce « Manuscrit Zéro » de pénétrer au plus profond de son être abyssal où nous retrouvons ce qui constitue son cheminement créatif et ses interrogations.
Non seulement la mise en question de sa nature d'écrivain (toutes les évocations des « grandes lignes ») mais aussi celle de ce qui la constitue en tant que femme reliée au monde qui l'entoure.
L'appel de la petite fille qu'elle ne retrouvera jamais et qu'elle recherche en « pillant » le monde de l'enfance (le stade oral est très présent) comme la recherche difficile de l'autre en tant que complément (l'assistant social R) et tout s'écoule entre les doigts...
Une volonté puissante de vivre est présente notamment évoquée dans le « musée contemporain » de plein air où d'autres disparaissent sans se défendre.
Un petit frère enfoui dans un puits par une petite fille de huit ans que l'adulte a perdu à tout jamais : jalousie, perversion de l'enfance, mal être qu'une analyse psychanalytique pourrait éclairer. L'inconscient, à chaque phrase, monte à la surface et offre images et êtres déformés, proches et loin d'une réalité où nous aimons nous accrocher.
Tel est ce livre, se laisser aller, prendre, laisser les doutes effleurer, laisser la plume courir sur le papier, rire aussi : prouver que le zéro est loin d'être un néant, qu'il se passe tant de choses comme ces vies au fond des mers, vies que l'on ignore, comme ces autres que l'on porte en soi (l'interview en début de livre nous le démontre).
« Tout se déroule sans tarder » dit l'auteur et le sommeil salvateur viendra peut-être, libérateur et créateur.
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Au début, j'aimais beaucoup les romans de Yoko Ogawa. Il se dégageait un charme indéfinissable de ses romans et de ses nouvelles. Souvent, ses récits continuaient de m'accompagner longtemps après avoir refermé le livre. Je pense que la meilleure manière de définir son style serait d'en faire une chroniquese de l'entre-deux. Elle se situe sue la frontière ténue entre le rien et le basculement. Ses histoires se déroulent dans ce territoire trouble qui précède le déséquilibre. S'il y a une forme de lenteur contemplative, il semble toujours qu'un événement est sur le point de se produire. On le pressent, mais de manière très inconsciente.
Réussir de telles histoires demandent une alchimie particulière. Yoko Ogawa la possède indéniablement. Mais, à l'instar d'Amélie Nothomb, ce qui faisait son originalité est devenu une technique. Soit le lecteur adhère sans réserve à ce procédé, soit il finit par se lasser. C'est ce qui m'est arrivé avec Amélie Nothomb. Je suis incapable ne fut-ce que d'ouvrir un de ses roimans depuis des années, tant elle me semble être devenue une caricature tirant indéfiniment à la ligne. de la même manière, j'essaye de temps en temps de relire un roman de Yoko Ogawa et depuis quelques temps, je me eurte à cette impression de redite. Pourtant, je reconnais la qualité de l'écriture et cette capacité à faire surgir quelque chose à partir de ce qui semble n'être que du vent.
Dans Manuscrit Zéro, elle se livre à un exercice dangereux: celui de l'auto-fiction. Elle tient une sorte de journal qui relate sa difficulté à s'atteler à son prochain livre. Elle relate un dîner dans un restaurant spécialisé dans les mousses, une visite d'une exposition de bonzaï, sa mère mourante... Mais il est évident que la fiction l'emporte vite. Les récits glissent dans une ambiance étrange, à la limite du fantastique et non dénue d'humour. Je pense par exemple à son périple dans un festival d'art contemporain qui n'est pas sans évoquer Dino Buzzatti. Dans une atmosphère d'irréalité, nous suivons un double fictionnel de l'autrice qui s'incruste dans des fêtes d'écoles, assiste à une compétition de sumo d'un genre particulier, se rend dans un bain public... Encore une fois, je retrouve son style, je reconnais son talent, mais je trouve cet ensemble de micro-fictions terriblement vain et par moment franchement ennuyeux. Décidément, j'ai de plus en plus de mal avec Yoko Ogawa.
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Il ne s'agit pas d'un journal intime, d'un document sur l'auteur, mais bien d'une lecture fictionnelle d'un quotidien d'écrivain. On n'apprendra pas comment elle est venue à l'écriture, les études qu'elle a suivies, ses amours ou ses morts – quoique ses morts, un peu quand même. Ce quotidien pourrait être le sien, celui d'une femme célibataire à la mère malade, timide et gauche… Bien plutôt, l'auteur ici mise en scène rejoint son personnage fétiche, la femme ni jeune ni vieille, ni belle ni laide, vaguement déconnectée, timide jusqu'à l'aphasie mais toujours de bonne composition. On ne saura pas grand-chose, d'ailleurs, de l'écrivain ni de ses écrits, sinon qu'elle en vit. Pas très bien. Toute entière soumise aux phénomènes, elle ne quitte le récit de ses déambulations que pour plonger dans l'un ou l'autre souvenirs signifiants. Comment elle a persuadé son petit frère qu'il avait en fait été jeté dans le puits à la naissance et qu'il était donc son propre fantôme, comment ce visage de bébé hurlant la poursuit depuis. Comment les plis des coudes de sa grand-mère laissaient apparaître des visages.
Au rang des motifs, on retrouve donc des thèmes récurrents chez l'auteur – les hôpitaux, le classement, l'eau, la mémoire – organisés en un grand archi-thème où chaque motif se répond et trouve dans l'autre sa suite logique. Je suis loin d'avoir lu toutes ses oeuvres, mais je n'ai pas retrouvé en revanche la froideur clinique d'Hôtel Iris ou La Grossesse, pas plus que le désespoir insondable de Cristallisation secrète. C'est dommage, c'est un peu ce que je préfère chez elle. Dans les trois quarts des textes, il ne se passe rien. Mais rien. Tellement rien qu'un se sent bête parce que forcément, on a loupé l'essentiel. le récit du festival de bonzaïs ou de la fête sportive de l'école élémentaire m'ont laissée de marbre – que voilà des thèmes particulièrement peu évocateurs. À côté de cela, il y a de vraies merveilles : le récit du chemin de mousse, la déambulation dans le festival d'art contemporain ou encore un très court texte à propos d'une paire de chaussures – bref et très émouvant parce que totalement inattendu. Ces trois textes donnent un bon exemple de cette littérature du glissement qui semble faire le coeur de Manuscrit zéro. Comment glisser du banal à l'étrange, l'improbable, le merveilleux (l'avant-dernier texte est effectivement écrit comme un conte de fées – sans fée – avec des épreuves, des créatures formidables, un chemin à parcourir, le tout dans le cadre d'une visite guidée. Excellent, excellent texte. Encore une fois : excellent texte).
Manuscrit zéro souffle des pistes d'écriture. L'écrivain comme un voleur, un usurpateur, quelqu'un qui se faufile là où il n'a pas lieu d'être (à l'instar des resquilleurs de cocktails, de fête d'enfants). L'écrivain comme un microscope humain qui observe d'un regard permanent et sans faille jusqu'aux éléments les plus infimes, jusqu'à ce qu'ils s'étalent et s'épanchent avant de devenir totalement autres et littéralement monstrueux. L'écrivain à mi-chemin entre maintenant et avant, plutôt plus doué pour avant que pour maintenant. Demain n'entre pas vraiment en ligne de compte / conte. Créature ultra exigeante et presque rigoriste (voir à ce sujet le texte sur les « grandes lignes » et son rapport à son correcteur, impressionnant), l'écrivain est un peu ridicule aussi. Fait nouveau, que j'ai peu trouvé dans les romans d'Ogawa, cet humour un peu gêné. Elle se peint souvent comme gauche, souris discrète et déplacée, sans répartie. Elle n'a pas le beau rôle, elle pleure devant des images de bébés et envisage d'en voler un, elle tient la chandelle, elle est toute seule, tout le temps. On la sent bien embêtée, parfois, devant la bizarrerie des autres. Clairement, ce n'est pas une héroïne, pas une « force qui va ». Un oeil grand ouvert, plutôt.
L'un dans l'autre, je ne sais pas si ce Manuscrit zéro est une très bonne porte d'entrée pour l'oeuvre d'Ogawa. Je pense qu'il rebuterait un lecteur non acquis à la cause. En raison de cette lenteur, de ces petits riens pas très passionnants si on n'y regarde pas de près. Ce n'est pas vraiment une oeuvre exigeante, cela dit – j'évite en général de commenter le style d'une traduction, mais le phrasé est simple, élégant, mesuré, sans pour autant être impersonnel. Il demande d'être attentif. Ce qui n'est pas toujours facile. Mais il se dégage de ces textes une sorte de force tranquille totalement captivante, un tempo particulier, tout en transitions douces, en instants suspendus, en accords friables entre dedans et dehors, soi, le monde, avant, après. Pas de quoi changer votre vie, mais une somme de minuscules secondes intenses, élevées au rang d'univers. Et qui donnent à penser, toujours essentiel...

Lien : http://luluoffthebridge.blog..
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Petites anecdotes entre réalité et fantasme reliées entre elle par un fil d'Ariane sur toile de fond l'enfance.
Rencontre avec la tourneuse de pages de partitions, le pilleur de cocktail, le journaliste trompettiste, l'étudiant obèse, le festival de bébés pleureurs, le festival de bonsaïs, les cours des grandes lignes, etc.
Oyôko Ogawa fascine, une fois de plus, avec son don d'observation et de description des petites choses de la vie et de l'enfance.
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Dans le monde de Yôko Ogawa on déguste des mousses forestières, on plagie des écrivains qui n'existent pas , on apprend à s'infiltrer indûment dans des fêtes d'école , on assiste à des tournois de pleurs de bébé , on peint sur des ongles les métamorphoses d'une libellule … Laissez-vous entraîner dans cette loufoquerie tendre derrière laquelle résonne l'écho un peu triste des coeurs solitaires .
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Un vrai-faux journal dont la frontière entre le réel et l'imaginaire est floue – et c'est ça qui en fait toute la force. Yôko Ogawa nous mène par le bout du nez dans l'endroit où, semble-t-il, elle trouve l'inspiration pour ses écrits. Et c'est grandiose.
Lien : https://comaujapon.wordpress..
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