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Rose-Marie Makino-Fayolle (Traducteur)
EAN : 9782742711475
69 pages
Actes Sud (04/06/1999)
3.64/5   53 notes
Résumé :
Depuis le début de la grossesse de sa sœur, la narratrice consigne dans un journal les moindres transformations physiques de la future mère. Et quand celle-ci, passé la période des nausées, retrouve un appétit vorace, elle s'empresse de lui préparer des marmelades de pamplemousses, dont elle la régale et la gave à plaisir. Peu à peu la peau — peut-être toxique — et la chair des fruits viennent se mêler, dans son esprit, à l'effervescence mystérieuse de la "matière" ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (15) Voir plus Ajouter une critique
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« ... j'ai oublié de la féliciter.
Mais au fait, doit-on se féliciter de la naissance d'un enfant entre ma soeur et mon beau-frère ? J'ai cherché le mot « félicitations » dans le dictionnaire... J'y ai trouvé la définition suivante : « compliment pour fêter un événement heureux ».
« Cela n'a aucune signification en soi », ai-je murmuré en suivant avec le doigt la ligne de caractères qui ne présageait absolument rien d'heureux. »

Rien ne lui échappe de la grossesse de sa soeur. Vivant sous le même toit qu'elle et son beau-frère, elle a tout le loisir de les observer comme elle le ferait de rats de laboratoire. Ainsi, sans affect pour sa soeur et avec un réel agacement vers son beau-frère, la narratrice décrit les nausées, l'intolérance aux odeurs, la prise de poids — toutes choses naturelles, vécues comme un supplice par la parturiente et son mari.

C'est un vrai bonheur de retrouver, dans ce court roman couronné par le prestigieux prix Akutagawa, le ton distancié de Yôko Ogawa pour rendre compte d'évènements de la vie quotidienne. Un ton particulier et une ambiance feutrée où des choses sont dites sans fioritures, et avouons-le avec une perversité certaine. Remarquable.

Challenge MULTI-DÉFIS 2018
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Yôko Ogawa nous offre une vision sordide de la grossesse en jouant les filles ronchonnes et frustrées de voir leur soeur attendre un enfant et se complait à tourner tout à l'écoeurant, voire au gore, de façon absolument gratuite.
Pas au jour le jour, mais à intervalles assez rapprochés afin de suivre l'évolution, l'auteur égraine les déconvenues de la grossesse (souvent de façon assez "cliché", la totale : les nausées, l'excès de prise de poids ensuite, etc.) et les images négatives. Vision vraiment ignoble et très caricaturale de la grossesse, où je ne peux même pas me dire que c'est bien observé (un jeune ado mâle serait capable de plus de finesse et de nuances dans ses observations si on lui promettait une belle récompense) ni bien raconté (des clefs d'écriture très visibles du début à la fin, aucun plaisir, aucune sensation transmise de façon intéressante ou subtile).
Une lecture aisée cependant, mais une nouvelle que je ne conseillerais absolument pas. Excusez-moi pour cette vision univoque qui ne me ressemble guère, mais quand il faut, il faut, et d'ailleurs, ce n'est que mon avis, c'est-à-dire, pas grand-chose.
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A l'instar du Goncourt chez nous, le prix Akutagawa au Japon n'est pas décerné qu'à des chefs-d'oeuvre, loin s'en faut. Mais là, force est de constater que le prix 1990 fut un sacré bon cru, consacrant Ogawa Yôkô comme une auteure de talent, talent qui n'a fait que se confirmer et s'amplifier par la suite.

La narratrice tient un journal consacré quasi-exclusivement à la période de grossesse de sa soeur. Elle vit de boulots d'intérim et habite chez sa soeur et son beau-frère. Au début, les deux femmes ont l'air assez détachées et peu émues par cette situation nouvelle, l'enfant apparaît encore comme un être futur assez théorique. Et puis les premières semaines marquent la période des nausées…La soeur enceinte est écoeurée par la moindre odeur, réelle ou peut-être imaginaire, au point que la narratrice s'installe les soirs de mars dans le jardin pour faire la cuisine, cuire le riz ou manger du poisson, pendant que le couple reste à l'étage. Elle n'en est pas dérangée, goûtant ainsi à une certaine solitude dont elle se délecte. Elle s'amuse aussi de la psychothérapie foireuse que suit sa soeur, depuis bien dix ans, avec un thérapeute pour qui elle se pomponne à en rendre jaloux son mari, et qui la raccompagne à la maison, l'air bien effaré pour un thérapeute censé l'aider à combattre le stress du quotidien…Bientôt vient la phase inverse de la boulimie, durant laquelle la soeur se goinfre, ce qui lui coûtera de prendre treize kilos sur la balance, excédant largement les six kilos supplémentaires maxi recommandés.

Toujours, la narratrice nous croque le comportement de sa soeur avec un souci du détail, un hyper-réalisme chargé d'humour, non dénué d'un sentiment plus ambigu de femme qui n'a pas d'empathie, pas de joie pour sa soeur, peut-être même jalouse, voir malveillante en puissance ?
La narratrice fait par deux fois diversion, et nous fait sourire, lorsqu'en employée de supérette elle fait goûter des échantillons de crème dessert aux clients, puis lorsqu'elle nous relate sa première rencontre avec son beau-frère, en tant que patiente alors qu'il est prothésiste dentaire, un homme sans consistance, dont elle se demande bien s'il a une quelconque responsabilité dans la grossesse de sa soeur !

Et puis un jour, au supermarché lui vient une envie d'achat de pamplemousses, de bons gros pamplemousses américains, dont on dit que le produit chimique de traitement serait hyper-toxique pour les chromosomes humains…Dès lors, elle va passer son temps à en faire des confitures, dont sa soeur se régale, encore fumantes à même la bassine…Alors la narratrice continue…

Cette longue nouvelle est vraiment un bijou d'humour sur ce qu'est la période de grossesse, avec toutes ces incongruités, ces lubies et ces phénomènes de transformation bien réelles. Avec son ton détaché et sa précision clinique, ce regard acéré et impitoyable, la narratrice ne ressent aucune joie pour sa soeur, qui elle-même ne déborde pas d'enthousiasme. le foetus est comme une chenille extra-terrestre implantée dans le ventre en passager clandestin, on ne peut pas dire qu'il fasse envie.

Ogawa scanne le monde qui nous entoure avec la précision d'un microscope, d'un scalpel ou d'un robot comme on en voit un peu partout au Japon désormais. Elle mêle l'incongru à un humour qui confère à l'ironie voire au cynisme. Sa narratrice aime la solitude, n'aime pas les enfants, ni sa soeur, n'éprouve pas d'empathie pour les autres, on se demande si elle est dotée d'une personnalité propre, quand elle se contente de répéter avec discipline aux clients le message de son employeur lorsqu'elle fait goûter les échantillons…Peut-être pour illustrer le comportement des Japonais ? Il y a aussi de la cruauté pour sa soeur, et peut-être finalement une réflexion froide destinée à lui nuire.

Cette nouvelle est un coup de maître très emblématique de l'oeuvre d'Ogawa, toute en nuances, en subtilités, en mise en valeur des sens, exacerbés ou au contraire annihilés. La noirceur, voire le crime s'invitent dans nos têtes, mais n'est-ce pas juste le fruit de l'imagination du lecteur, bien travaillée en approche par Ogawa ? L'écriture est simple, mais les impressions d'une complexité et d'une richesse formidables, on ne sait pas sur quel pied danser, la fin est ouverte.

A l'époque, une récompense et une notoriété naissante méritées !


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Le ver est dans le pamplemousse
Un excellent Yôko Ogawa.
La jeune narratrice, étudiante, cohabite avec sa soeur aînée et son beau-frère, depuis la mort des parents. La soeur est enceinte. La narratrice va consigner les moindres transformations physiques du corps de sa soeur avec une froide précision d'entomologiste. En apparence, elle prend grand soin de sa soeur, fragile psychologiquement...
J'ai bien aimé cette nouvelle . D'abord elle va à contre-courant des stéréotypes sur la grossesse radieuse et l'attente de l'enfant roi, avec de bonnes pincées d'humour noir. Ensuite je la trouve réaliste. La jeune narratrice est forcée de cohabiter avec une soeur aînée qui fait ses caprices de femme enceinte et un beau-frère, tout mou qui lui cède tout ; on peut voir la suite comme un fantasme puéril de petite fille jalouse. D'ailleurs les lieux ne sont pas nommés, cette clinique M est étrangement déserte et démodée mais toujours bien propre et bien rangée. Les personnages sont anonymes, à l'exception du psychiatre inexpressif qui est censé soigner la soeur. Enfin j'adore l' écriture de la nouvelle en particulier les descriptions, formidables. Elle mêle l' hyper-réalisme froid, inodore, clinique, scientifique, qui objectivise tout, - la mère et l'enfant, réduits à des corps et à des chromosomes - et l'hyper- sensorialité, odorante, gourmande qui grossit un gel, un croissant, un raisin sec, une confiture de pamplemousse...
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Une femme tombe enceinte, elle l'a voulu, on le sait car depuis deux ans, elle prend sa température tous les jours pour déterminer sa date d'ovulation. Elle vit avec son mari et sa soeur qui est la narratrice, je ne sais pas trop si elle est plus jeune ou plus âgée. La narratrice, la soeur tient un journal intime dont nous aurons connaissance à partir des premières semaines de grossesse de sa soeur, les semaines de grossesses et les jours sont annotés très précisément, jusqu'à l'issue de la grossesse.

Elle décrira les changements physiques de sa soeur qui va perdre beaucoup de poids pendant les premiers mois à cause des nausées, elle mangera très peu, elle ne supporte même plus l'odeur de la nourriture, s'alimentera peu. Elle parle de sa grossesse comme d'un événement indépendant d'elle-même, sans joie. Brusquement ses nausées disparaissent, elle se remet à manger, elle prend beaucoup de poids. Elle mangera surtout les confitures de pamplemousse que lui prépare sa soeur qui s'assure que les pamplemousses proviennent bien des États-Unis, ceux-là sont capables de détruire les chromosomes humains…

Je ne raconte pas la fin de ce récit très étrange. J'ai été encore une fois subjuguée par le talent de Yôko dans la concision, la tension monte jusqu'à la dernière ligne. Son personnage principal si pervers, tout ce que le lecteur présage des non-dits, des petits mots, de certaines petites phrases, et ces descriptions qui laissent présager le pire. Une réussite encore !

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Citations et extraits (9) Voir plus Ajouter une citation
- Tu n'as aucune raison d'avoir peur. Un bébé c'est un bébé. C'est moelleux et fondant, ça serre toujours ses petits poings et ça pleure d'une voix insupportable ...
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Mais au fait, dois-je me féliciter de la naissance d’un enfant entre ma sœur et mon beau-frère? J’ai cherché le mot «félicitations» dans le dictionnaire… J’y ai trouvé la définition suivante: "Compliments pour fêter un événement heureux.»«Cela n’a aucune signification en soi,» ai-je murmuré en suivant avec le doigt la ligne de caractères qui ne présageait absolument rien d’heureux.
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De toute façon, j'ai du mal à comprendre ce qu'est un couple. Cela m'apparaît un peu comme une étrange entité gazeuse. Un corps éphémère, sans contour ni forme, qu'on a du mal à distinguer dans la transparence de son flacon triangulaire, au laboratoire
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Puisque ces temps-ci je ne faisais pratiquement plus à manger, tout était propre et bien rangé. Les ustensiles étaient à leur place, le plan de travail en acier inoxydable avait eu le temps de sécher, et le lave-vaisselle était vide? Comme une cuisine d'un hall d'exposition, l'ensemble était froid et sans personnalité.
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29 décembre (lundi)
Ma sœur aînée est partie à la clinique M.
Comme elle ne s’est pratiquement jamais fait suivre, excepté par le professeur Nikaido (un psy), elle était assez angoissée avant d’y aller. «Je ne sais pas du tout comment m’habiller» ou «Je me demande si j’arriverai à parler correctement devant un médecin que je vois pour la première fois» disait-elle, et elle a tellement traîné que le dernier jour de consultation de l’année a fini par arriver. Ce matin encore, elle a levé distraitement les yeux vers moi en disant :
- Je me demande, pour la courbe des températures, combien de mois je dois leur montrer, et elle n’en finissait pas de quitter la table du petit-déjeuner. (p.1)
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