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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Imaginez un photographe de guerre prend un cliché, celui d'un jeune soldat croate en déroute pendant le conflit en Bosnie. Imaginez aussi que, quelque temps plus tard, ce jeune soldat soit capturé, reconnu à cause de la photo qui a paru dans des magazines, puis qu'il soit torturé. Et que sa famille soit retrouvée et exécutée. Ouf ! Ce jeune soldat, Ivo Markovic, fera tout pour retrouver le photographe qui, plusieurs années plus tard, s'est converti à la peinture, son premier amour. Ce photographe/peintre, Faulques, a acquis une tour dans le sud de l'Espagne et a entrepris de composer une grande circulaire fresque représentant le paysage intemporel d'une bataille. Toutes les horreurs commises tout au long de l'humanité y figurent… à donner des frissons.

C'est là que Markovic le retrouve pour se venger. Mais attention, ce roman n'est pas un thriller ni un polar. C'est un roman d'introspection. Ainsi, avant d'exercer sa vengeance, Markovic veut comprendre. Et il veut que Faulques comprenne. Il s'ensuit des échanges qui s'étirent sur plusieurs jours où il est question de guerre, de drames humains, de responsabilité, de foi et de Dieu, d'art, etc. D'amour, aussi. Ces échanges, je les ai trouvé réellement intéressants. On y aborde des thèmes universels comme la nature humaine et d'autres, plus sombres, sur lesquels on n'a pas l'habitude de se pencher (heureusement !).

Arturo Pérez-Reverte est un auteur que j'adore. Comme toujours, il s'est très bien documenté. le monde de la photographie de guerre m'est assez inconnu et il a su le rendre crédible à mes yeux. (Peut-être qu'on professionnel y trouverait à redire mais, moi, il m'a suffit.) J'y ai cru. Aussi, toutes ces références aux conflits de l'ère moderne, de l'Éthiopie à l'Afghanistan, en passant par la Bosnie, toutes ces références à l'art et à la peinture, ces flashbacks dans lesquels il se promène au palais Pitti ou dans d'autres galeries reconnues où il s'extasiait devant des toiles que j'ai vues, je les ai saisies. Ainsi, ce roman, le peintre de batailles, m'a plu et il a su m'intriguer. Peut-être pas autant que je l'aurais souhaité mais suffisamment.

Toutefois, il ne m'a pas complètement convaincu. Sa prémisse de départ et la façon dont Markovic s'immisce dans la vie de Faulques, toute cette situation, elle m'a paru un peu artificielle. Comme si le point de départ avait été ces échanges sur la vie, la mort, la violence, la bêtise humaine et la culpabilité (ou l'absence de culpabilité) et que l'auteur n'avait trouvé que tardivement cette histoire de photographe de guerre pour y arriver. Les fils ne sont pas blancs mais on les a un peu trop étirés pour les raccorder. Bref, ça manquait de naturel, ça semblait forcé. le dénouement, aussi, plus on y approchait, devenait prévisible. Mais pour tout le reste, je suis preneur. le peintre de batailles est un roman troublant, de ceux qu'il est bon de lire de temps à autre. Pérez-Reverte ne donne pas de leçon, il expose, livre des pistes de réflexion. Ce sera au lecteur de se faire une tête.
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De tous les livres que j'ai lus de Perez-Reverte, celui-ci est de très loin le plus complexe, le plus intellectuellement exigeant et peut-être le plus tourmenté.

Il m'a fallu un peu de temps pour y accrocher, d'autant plus que le caractère de Faulques est assez étranger au mien - un esprit très mathématique, qui cherche à mettre les choses en système, à en saisir la logique cachée, la nature profonde, quand pour moi les choses sont absolument évidentes et absolument mystérieuses, et doivent le rester. le chaos, le mystère, l'incompréhensible me séduisent, quand la recherche d'ordre (plus que l'ordre lui-même, mais l'ordre, en un sens, n'existe-t-il pas que par sa recherche ?) me dérange.
Bref, nous ne sommes pas faits pour nous entendre, Faulques et moi, ce qui me rend au moins certains aspects de sa démarche assez impénétrables.

Certains aspects seulement, car les thèmes abordés sont passionnants - le rapport de l'homme à la cruauté et à la violence, la part de responsabilité de chacun, témoins, bourreaux et victimes, le rôle de l'art, de l'image artistique, dans l'appréhension du monde... - passionnants, et traités avec une agréable subtilité, loin des raccourcis faciles, des mises en accusation bien pensantes. C'est très noir et très cru - la noirceur et la crudité de l'âme humaine mise à nu, écorchée pour se comprendre elle-même au-delà des reflets trop séduisants.
Ce n'est pas à lire quand on cherche à se remettre d'une dépression, ou qu'on préfère voir l'humanité sous son jour le moins noir, mais c'est un texte extrêmement stimulant pour l'esprit, qui donne envie d'en rediscuter des heures durant avec d'autres lecteurs.

Et puis au passage, on se demande à quel point Reverte - lui-même correspondant de guerre, qui a tant écrit à son sujet pour des journaux ou dans ses romans - ne fait pas sa propre fresque dans ce livre-là, l'équivalent littéraire de ce que Faulques peint sur les murs de sa tour. Même s'il diffère assez, en apparence, de ses autres romans - globalement beaucoup plus romanesques - il peut aussi apparaître comme une clef de lecture à une bonne partie de son oeuvre, où toujours se retrouve en filigrane comme la quête fascinée du Mal, cet instinct de destruction, cette logique du chaos qui entraîne les hommes, à des années lumière des plats manichéismes. Un jour de colère et Cadix, la diagonale du fou, écrits à la suite du Peintre de batailles, sont dans une logique parfaite à cet égard.

Il est d'ailleurs assez intéressant de remarquer que les personnages féminins sont très souvent les agents de cette destruction - mais des agents bien moins méchants que froidement lucides, d'une intelligence beaucoup plus acérée que celle des hommes dont elles causent la perte. En conclure que l'intelligence est pour Reverte le grand drame de l'humanité ne me semble pas en désaccord avec ce qui est dit dans ce livre-là. Et ça, pour le coup, ça me convient très bien.

Pour en revenir à nos moutons, je rêverais pour ce bouquin d'une édition augmentée - illustrée par tous les tableaux dont parle l'auteur. Ils sont nombreux, et si j'ai eu la chance de passer un bon moment devant la Bataille de San Romano de la National Gallery, en juillet, beaucoup me sont inconnus ou presque, et il est vite frustrant de devoir les chercher.
Un carambar (et plus si affinités) à qui me fait une galerie d'images !
Lien : http://ys-melmoth.livejourna..
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Quand un ancien combattant croate s'impose en visiteur à celui qui l'a immortalisé par un cliché célèbre, gagnant ainsi un prix prestigieux, l'heure des comptes est venue. Car rien n'est sans conséquence. Et pour les dommages dramatiques subis par le jeune soldat et sa famille à cause de cette photo, le photographe devenu peintre doit payer, ou à défaut s'expliquer.

Aborder le travail littéraire d'Arturo Perez-Reverte par ce livre est sans doute une fausse bonne idée car cette lecture est à la fois passionnante et exigeante. Je n'avais jamais lu l'auteur et j'ai été happée sans respiration par une écriture étouffante, enveloppante.

La confrontation des deux hommes est comme un combat silencieux pour comprendre, réfléchir, faire face à ses responsabilités, interroger le rapport de l'homme à la cruauté, creuser la culpabilité et se situer dans les exigences d'un conflit couvert par l'actualité.
Faut-il tout montrer sous couvert d'information? A quel point l'objectif se rend complice des exactions en période de conflit?

Roman à la fois érudit et philosophique sur le sens de la vie et la nature humaine, qui parle d'Art et de Technique et qui ose les scènes les plus rudes dans les descriptions des combats et des exactions. Une thématique intemporelle sur la manipulation des images et la violence banalisée.

#objectif disparition PAL
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Arturo Pérez-Reverte nous avait habitués à des sujets plus légers (comme le tableau du Maître flamand, le Club Dumas ou le pas trop triste Capitaine Alatriste), mais ici, attention, on change radicalement de registre.
Faulques, le peintre de batailles, est un ancien photographe de guerre qui a pratiquement couvert tous les conflits armés de ces trente dernières années sur tous les continents. Récompensé par plusieurs prix internationaux qui lui ont valu sa célébrité, il aspire maintenant à une retraire solitaire et paisible et décide de revenir à son premier métier, la peinture, afin de réaliser son oeuvre ultime : peindre la guerre, intemporelle et absolue, telle que la photographie, trop proche du monde réel, n'a jamais pu l'exprimer. Il réalise son ambitieux projet dans une ancienne tour où il a élu domicile. Il peint une grande fresque circulaire représentant la somme de toutes les batailles, juxtaposant les atrocités commises en temps de guerre à travers les siècles. Or un jour, il reçoit la visite d'un homme, qu'il ne reconnaît pas tout de suite, et qui se présente comme le soldat croate anonyme d'une de ses photos prise pendant la guerre des Balkans. Devenu du jour au lendemain célèbre à cause de cette photographie, qui a été largement publiée, le Croate annonce qu'il est venu pour le tuer.
Que l'on ne s'y trompe pas, il n'y a dans ce livre que peu de scènes d'action : nous avons droit à une longue joute verbale entre les deux hommes, qui vont défendre leurs points de vue, essayer de se comprendre et tenter d'expliquer leurs projets respectifs avant tout passage à l'acte.
La violence, souvent insoutenable, n'est pourtant pas exclue, à travers les flash-back et la remémoration des scènes du passé du photographe peintre, puisant dans le sordide et l'indicible de ses sujets (pour lesquels Faulques ne semble avoir ni culpabilité, ni parti pris, ni envie de dénonciation, mais simplement un réel souci d'esthétisme et de pertinence technique permettant de réaliser le meilleur cliché).
Ce roman nous fait réfléchir à trois niveaux : la guerre en général, le cas particulier de Faulques, et même (plus surprenant) les lois qui régissent l'Univers. Quel doit être le rôle des journalistes en temps de guerre ? Faut-il tout raconter, tout photographier par devoir d'informer ? le photographe a-t-il une part de responsabilité dans les exactions commises en temps de guerre (il semble que oui) ? le photographe doit-il flatter l'égo des assassins – qui en rajoutent presque, se sachant photographiés – en immortalisant leurs exactions et en confortant leur popularité ? Se rend-il alors complice des crimes de guerre ? Doit-il faire abstraction de la violence et de la propagande ?
Faulques, lui-même, est-il responsable de la mort de son amie dix ans plus tôt (je ne dévoilerai pas ici les circonstances si particulières de cette mort) ? Se sent-il coupable et cherche-t-il à se punir ? Est-il de même responsable du sort du Croate et de sa famille ?
Plus curieusement, dans sa recherche de réponses, le roman fait appel aux lois fondamentales du fonctionnement de l'Univers, en évitant soigneusement la religion, qui n'apporte aucune réponse (« - Et Dieu, Monsieur Faulques ?... Êtes-vous croyant ? - Et puis quoi encore ? »). Les lois de l'Univers permettent une tentative d'explication par la symétrie et la géométrie, le déterminisme et l'incertitude quantique, la théorie du chaos et l'effet papillon, tentative de déresponsabilisation par les lois physiques et statistiques, et par la perfection esthétique de l'Univers.
Faulques se réfugie dans l'art et la géométrie pour trouver des réponses, pour donner du sens à sa vie, et même à sa mort. Mais son heure a-t-elle vraiment sonné ?
Ce livre impressionnant questionne le lecteur et dérange, et c'est à chacun d'apporter ses propres réponses aux questions posées.
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D'après la quatrième de couverture, "Arturo Pérez-Reverte nous livre ici son roman le plus intense et le plus dérangeant, et sans doute la clé de toute son oeuvre". Je n'ai pas encore lu suffisamment cet auteur pour me prononcer sur ce dernier point, mais assurément, ce livre est à recommander.

L'histoire: Faulques peint une fresque de bataille sur le mur intérieur d'une tour circulaire, à la façon d'un panorama (voyez ma note ci-dessous). Il s'inspire de scènes qu'il a vécues du temps où il était grand reporter, photographe de guerre. Débarque alors le Croate Ivo Markovic. Faulques l'a photographié en Bosnie. La photo a fait le tour du monde, attirant de graves ennuis au Croate, qui se présente au photographe, après l'avoir traqué des années. Pour se venger.

Mais d'abord, il veut lui parler, pour mieux le connaître. Ambiance lourde et lente. La tension s'installe. le Croate est poli, mais il ne cache pas ses intentions et sa menace est pesante. Faulques semble rester calme, mais sur ses gardes. Ni l'un ne l'autre ne bouge vraiment. Terrible huis-clos. C'est lent, mais je m'en suis délecté.

Les hommes se parlent, longuement. Et les sujets de conversation sont profonds. Ça aussi, c'est délectable: le sens de l'activité d'un photographe de guerre, son attitude envers ses sujets, sa responsabilité, l'efficacité de la photographie pour représenter la guerre, par rapport à celle de la peinture, etc. Il y a aussi la compagne que Faulques a perdue lors d'un reportage. Et la violence dont un être humain peut faire preuve. Intense...

J'avais eu la curiosité de lire ce livre juste après avoir tiré beaucoup de plaisir de "La patience du franc-tireur", un livre plus récent, qui se passe dans le milieu des graffeurs. Fascinant de constater qu'Arturo Perez-Reverte est capable d'écrire deux livres si différents en mettant dans les deux cas la forme en harmonie avec le fond: autant le rythme de "La patience du franc-tireur" est vif et rapide comme le sont ceux qui peignent sur des murs dans la clandestinité, autant le rythme du "Peintre des batailles" est lent et lourd pour faire sentir tout le poids de la lassitude d'un homme qui a vu trop de violence. Je vous recommande cette double lecture pour apprécier toute la maîtrise de l'auteur.

Note marginale: les panoramas. La fresque circulaire de Faulques me donne envie d'attirer votre attention sur une pépite trop peu connue: les panoramas. Avant l'apparition des images animées du cinéma, on pouvait se divertir en allant voir les images fixes des "panoramas". Un panorama est une rotonde plus grande que la tour de Faulques, dont une toile pendue à un rail circulaire couvre totalement le mur intérieur. Il en existait dans plusieurs villes d'Europe. Leurs dimensions étaient standardisées, de sorte que les toiles pouvaient circuler d'un panorama à l'autre. Il en resterait maintenant une quinzaine. Les Belges connaissent celui de la bataille, à Waterloo. Je me suis émerveillé comme un enfant dans le paysage côtier du panorama Mesdag à La Haye. Essayez donc ! Plus d'info: "panorama (peinture)" sur Wikipedia, par exemple.
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Je découvre Arturo Perez-Reverte avec ce merveilleux livre le peintre de batailles. Je n'ai pas commencé par le livre le plus facile de l'auteur. Cependant j'ai été conquise. Il s'agit d'un huis clos entre entre Faulques, un photographe de guerre et Markovic, un soldat croate. Celui-ci a été photographié par Faulques pendant le guerre en ex-Yougoslavie et a fait la une d'un magazine. Faulques s'est retiré dans un phare pour peindre une immense fresque résumant son expérience de photographe de guerre. Faulques est poursuivi par un drame intime: sa compagne Olvido est morte en Ex-Yougoslavie en sautant sur une mine. Après de nombreuses recherches, Markovic retrouve Faulques dans son phare, devenu sa tour d'ivoire. Un long dialogue s'installe entre les deux hommes. le peintre de bataille est un livre très émouvant, bien écrit et induit une réflexion sur le sens de la guerre, le rapport de la vérité instantanée par la photographie. La lecture est parfois un peu lourde ce qui rend le huis clos encore plus poignant et la réflexion du lecteur plus profonde.
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Ô quel regard ! Quels regards !

Après trente ans de baroud sur les étals de boucherie de multiples conflits armés, un photographe de guerre laisse tomber ses appareils et prend des pinceaux pour construire une fresque monumentale et circulaire dans une tour où il s'est isolé. Il se remémore non seulement les regards de blessés, de mourants et de cadavres qu'il a croisés à Vukovar, Beyrouth ou Daraya mais aussi de nombreuses toiles de grands maîtres exposées dans des musées répartis dans le monde entier et décrivant des scènes de batailles. Il revit le temps partagé la belle Olvido qu'il a aimée et réalise que son amour pour elle "n'était pas qu'intensément physique, ni intellectuel" mais "que c'était aussi un sentiment esthétique, une fascination pour les lignes douces, les angles et les champs de vision offerts par son corps et le mouvement serein de sa nature".

Avait-il oublié ce soldat croate dont la photographie lui avait valu la notoriété ? Comment va-t-il réagir quand, dix ans après la célèbre photo, le Croate va venir lui annoncer avec calme et détermination qu'il l'a recherché pour pouvoir le tuer ?

Ce roman nous fait réfléchir à la mort et à la guerre, au basculement entre la peinture et la photographie, au constat qu'il y a des limites que la photographie ne pourra jamais atteindre alors qu'une toile peut s'en approcher, au rôle du reporter de guerre : n'est-il pas acteur à part entière et non pas seulement témoin ? Sans le dire explicitement, Pérez-Perelte laisse supposer qu'un certain déterminisme nous conduit au travers de tout un entrelacs de lignes tantôt fuyantes, tantôt convergentes, vers un destin inéluctable.

Ce livre est riche de questions fondamentales et demande de la part du lecteur un effort certain pour regarder la mort -donc la vie- bien en face.
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une très belle écriture, poétique ,des réflexions philosophiques sur la vie , la mort ,la guerre, la responsabilité de l'homme sur le cours des évènement, l'effet papillon ,le destin les hasards.
Mais aussi des descriptions détaillées, trop parfois , sur les techniques de travail du photographe et du peintre, une approche des grands tableaux sur les batailles ( Ucello, de la Francesca, Goya, etc...) et des passages trop nombreux et trop rudes sur des scènes de guerres contemporaines , ex-Yougoslavie, Moyen-Orient ,Afrique, Vietnam .
Livre assez rude et intello!!
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Peut-être le roman le plus intime qu'ai pu nous proposer Antonio Pérez-Reverte. Se servant à rebours de son expérience de reporter de guerre pour dépeindre un anti-héros torturé, qui se réfugie dans la peinture après avoir délaissé la photographie. Mais pas n'importe quelle peinture...


Son travail d'exorcisme de ses démons intérieurs sera interrompu (ou connaitra une progression ?) suite à l'arrivée d'un individu assez louche qui le confrontera bien vite à ses interrogations sur son ancien métier, sa capacité à faire le mal par lui même et à toucher du doigt (ou de l'orteil), l'Horreur, si propre à Kurtz.


Bien que plus court que les autres, ce roman-là n'est pas le plus accessible de l'auteur. Ce qui n'est pas un mal, au vu du rendement final.
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Qui est le peintre des batailles ? Il s'agit de Faulques. Un nom comme un pseudo, un nom d'artiste, ancien reporter de guerre et d'ailleurs, pourvu que la mort y rôde, son ombre et ses traces.
Un jour, sa vie s'arrête, je veux dire sa vie d'avant. Il abandonne tout pour s'isoler et entreprendre de peindre en une fresque circulaire à même le mur d'une tour, la somme de toutes les images, photographies ou peintures qu'il a patiemment sélectionnées et qui représentent toutes des guerres, désordres, chaos naturels ou humains. Pourquoi cette sombre retraite ? C'est que Faulques vit désormais avec un souvenir, celui de la femme aimée qu'il a laissé mourir, Olvido.

"Obscure est maintenant la maison où tu demeures..." et ce souvenir le précipite vers une autre demeure, celle de la vérité. Un jour, un spectre débarque (si je puis dire). Ivo Markovic, un homme qu'il ne reconnait pas mais qu'il connait pour l'avoir rendu célèbre en le photographiant malgré lui. Un croate qui vient chercher vengeance. Car à la suite de sa photo distribuée, des gens, de simples gens, sont venus tuer sa femme et son fils dans d'atroces scènes. Il a tout perdu et veut retrouver l'homme qui fut l'instrument de son malheur pour le tuer. le face à face renvoie deux hommes perdus comme deux fantômes d'un même côté : le côté de la désolation.

Au fil du récit, ponctué de souvenirs de guerre et d'amours, Faulques peint le mal, le véritable instinct naturel de l'homme, car le mal vient de nous. La nature ne sait rien de tout cela. Les éruptions, les catastrophes, cette logique du chaos échappe à l'homme mais pas le MAL, l'intrinsèque sauvagerie, l'épuration, la carnage, le viol d'humanités. Les enfants même ne sont pas épargnés : ils sont eux aussi dans le tableau, à la fois meurtris et futurs bourreaux. le peintre des batailles achève sa fresque du bout des doigts, quant à Ivo, il finira par partir, laissant à la Mort, celle qui est de toutes les batailles, le soin de faire pour lui son oeuvre.

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Avant tout, dire que APR est l'un de MES auteurs. Ce livre là est presqu'un achèvement : un testament. Car APR a été grand reporter et correspondant de guerre pendant 21 ans et livre dans ce roman son expérience et son sentiment sur ce qu'il faut montrer des horreurs de la guerre au "grand public". Ce livre est celui qui explique que le hasard est géométrique et jamais fortuit : aucune rayure, zébrure, fêlure, aucun tremblement de terre ou d'aile n'arrive par hasard, tout est le fruit d'un sombre calcul, sombre car inconnu, mais qui devient évident dès lors qu'on le distingue : dès que la conscience se pose, la droite avance, se courbe, se brise, détail infime de notre trajectoire infirme. Un livre aux passages parfois insoutenables toutefois, je devais le signaler.
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