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3,72

sur 357 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
J'avais vu la critique de ce livre dans l'émission culturelle que je regarde le dimanche matin. Puis ce fut au tour de Lili Galipette d'en faire l'éloge dans son blog. J'avais déjà une montagne de livres à lire mais je me suis laissée tenter, faible que je suis ! D'autant plus que cela n'était pas gagné ! Vous connaissez mon aversion pour Victor Hugo, - l'homme et non l'écrivain à qui je reconnais toutes les qualités qu'on lui prête -, depuis que j'ai lu les essais d'Henri Gourdin.

Mais Judith Perrignon m'a embarquée dès la première page par son style flamboyant et surtout par le rythme soutenu qu'elle donne à son texte. Elle ne laisse pas le lecteur respirer une seconde. On a vraiment l'impression de se retrouver dans ce Paris en attente du décès d'Hugo, une ville désemparée, totalement perdue, comme si la disparition de l'écrivain allait la laisser orpheline à tout jamais.

J'ai vraiment apprécié ce livre qui non seulement rend un bel hommage à l'auteur que nous connaissons tous mais qui, également, est honnête et ne cache rien de ce dernier. On sent que Judith Perrignon s'est imprégnée totalement de sa vie et de l'ambiance de l'époque. Je lui tire mon chapeau !
Lien : http://www.lydiabonnaventure..
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Mai 1885, à 83 ans, Victor Hugo est victime d'un refroidissement qui tourne mal.
Alité, il est entouré des ses deux petits-enfants Jeanne et George, de jeunes adolescents qu'il aime beaucoup.
Ses enfants sont morts prématurément sauf Adèle qui vit en institut psychiatrique.
Quelques jours plus tard, après une agonie pénible, le grand poète meurt.
Toutes les couches de la société parisienne veulent se manifester aux funérailles du grand Homme.
Les hommes d'église tenteront de le ramener au derniers rites du catholicisme. En vain, Hugo est croyant mais refuse tout dogme, toute religion.
A l'Assemblée Nationale, les différents partis essaient de politiser l'évènement à leur avantage.
Les anarchistes et les libres-penseurs se manifestent également, encore sous les remous de la Commune de 1871.
Le peuple vit cette perte de façon très douloureuse : le grand Hugo les a fait vivre sous sa si belle plume.
C'est un livre remarquable écrit par Judith Perrignon qui aura fait un travail colossal pour rassembler et recouper les faits de ces quelques jours d'agonie et de cette dizaine de jours avant l'inhumation dans l'église Sainte-Geneviève dont on a enlevé les signes appartenant à la religion puis, au panthéon par la suite.
L'auteur y mêle les faits humains et la politique de façon à ne pas lasser le lecteur.
Etant Belge, j'ai dû souvent me remémorer ou apprendre des faits via mon dictionnaire ou Internet et j'ai été comblée car j'aime découvrir ou approfondir de nouveaux domaines comme "le mur des fédérés", la personnalité de Louise Michel, des précisions au sujet de la Commune...et j'en passe.
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« Victor Hugo vient de mourir », mais il n'est pas encore mort au moment où s'ouvre le roman. La foule et les journalistes s'assemblent dans les rues en attendant « l'annonce », en priant, parfois, pour le grand homme ; la famille, les médecins et les proches sont réunis autour du lit bientôt mortuaire… Tous retiennent leur souffle car Victor Hugo l'immortel, victime d'un banal refroidissement à 83 ans, Victor Hugo se meurt… Et pendant que Victor Hugo agonise, Paris, en effervescence, dans les rues et dans les échoppes, dans les cafés et à l'Assemblée, Paris et son peuple, dans l'attente, se tiennent de loin à son chevet : « Paris est un corps fiévreux tandis que le poète lutte contre l'attraction de la terre. On dirait qu'en mourant, qu'en glissant vers l'abîme, il creuse un grand trou et y aspire son temps, sa ville. »

Parce qu'il fut tour à tour royaliste, bonapartiste sous le Ier Empire, républicain sous le Second mais opposé à la Commune, tour à tour comblé d'honneurs ou déchu, banni et exilé, parce que sa parole puissante a rythmé le pouls du pays pendant des décennies, parce qu'il a su donner, avec « Les Misérables », une voix à ceux qui n'en ont pas, sa mort est un séisme qui secoue la France, rallume les vieilles haines et fait craindre au pouvoir le retour d'une possible révolution. Conservateurs, nostalgiques d'ancien régime et tenants de l'ordre moral, anarchistes, socialistes, républicains ou révolutionnaires, tous s'affrontent et se déchirent autour des restes du poète, tous revivent, à l'occasion de ce décès, les grandes luttes des dernières décennies. Les esprits s'échauffent, un début d'émeute ensanglante les pavés, la police et ses mouchards sont en embuscade, l'ordre public est compromis. Victor Hugo vient de mourir, et sa mort est un danger que seuls l'hommage national et l'entrée au Panthéon pourront écarter : « on va rassembler tout le monde derrière Hugo, tresser tant de couronnes, de discours, de lauriers, qu'il étouffera sous l'hommage. On va enterrer le songe avec le songeur. »

Judith Perrignon, romancière et journaliste politique, co-auteur, avec Marceline Loridan-Ivens, de « Et tu n'es pas revenu », signe avec « Victor Hugo vient de mourir » un roman éblouissant de finesse et d'intelligence qui s'inscrit dans l'espace des quelques jours qui séparent le décès de Victor Hugo (22 mai 1885) de ses funérailles nationales et de son inhumation au Panthéon (1er juin) – un Panthéon soustrait à l'Eglise pour devenir depuis lors lieu de culte laïc. Porté par une écriture somptueuse, le roman apporte un éclairage passionnant sur le paysage politique contrasté d'une troisième République encore jeune mais déjà embourgeoisée, qui « combat Dieu et les tyrans, mais vénère l'argent » et que la mort d'Hugo renvoie à ses contradictions, à ses plaies mal cicatrisées, à ses rêves inaboutis. Car « il les laisse seuls, seuls face à l'impossible vérité de l'Histoire, face à eux-mêmes, poignée d'hommes marqués, embrouillés et emportés par les violences et les rêves du siècle écoulé. Seuls avec ce vieux dilemme du monde à changer, cette lancinante question de la radicalité et de la modération, ce besoin de troubles et de paix. Il était l'homme irrésolu qui fournissait les mots de la révolte, mais écrivait comme on recoud les hommes. Comment feront-ils ? »

« Victor Hugo vient de mourir », par-delà l'hommage intelligent et érudit rendu à l'un des monuments des lettres françaises, est un très beau moment de littérature autant qu'une leçon d'histoire. A lire et à faire lire, sans modération.
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Confuse, je retrouve dans mon "bazar" un début de chronique , datant de novembre 2015, sur un ouvrage , qui m'a pourtant enchantée....

Je connais fort peu cette auteure en dehors de sa collaboration au texte autobiographique de l'artiste; Gérard Garouste, " L'Intranquille", qui reste une grande émotion...

J'aime la flamboyance, la fluidité du style de Judith Perrignon, qui
nous refait visiter une époque, ainsi que le parcours, et l'aura unique de l'un de nos plus grands poètes , Victor Hugo...
Elle part d'un évènement historique et national : les funérailles du poète....
pour nous offrir simultanément une radioscopie très précise et détaillée d'une société en plein bouleversement et le parcours unique d'un écrivain engagé, aux multiples facettes et talents: poésie, théâtre, romans... écrits polémiques, etc.

Je choisis de retranscrire trois extraits qui expriment avec lyrisme et empathie la personnalité originale de Hugo...ses liens avec ses lecteurs, mais aussi avec le peuple qu'il a défendu, avec lequel il faisait corps....

"Il savait qu'il ne devait sa grandeur qu'à la colère du proscrit, ces longues années de Guernesey où il s'était senti seul et avec tous, qu'à Jean Valjean le voleur de pain, qu'à Fantine la fille publique, qu'à ces bas-fonds qu'il observait et écoutait, qu'à leur argot copinant dans ses livres avec sa plume superbe, il leur devait bien plus qu'à ces puissants qui plastronneraient derrière sa dépouille et tiendraient discours en tribune. Ce sont les faibles qui l'ont fait important, ce sont eux qui font les grands hommes, il faut avoir troublé les consciences, tissé les fils secrets de l'humanité,
pour rassembler tant de monde, creuser le temps, les siècles, jusqu'au futur. "(p. 190)


"Il regarde (Lisbonne) la foule depuis la fosse jusqu'au dernier balcon, certains sont jeunes encore mais ne le savent pas, ils ont le corps, le visage et les mains comme s'ils avaient vécu le double, ils s'épuisent à l'usine la journée, exultent ici le soir, qu'ils dansent ou fomentent la révolte. le nom du poète les met en joie, mais qu'a donc fait cet homme pour ainsi pénétrer leurs esprits ? Il les a vus, racontés, c'est vrai et ce n'est pas courant chez les gens de son rang, mais ce n'était que des mots, les ont-ils seulement lus , Il y eut toujours tant d'illettrés aux barricades comme au bagne, tant d'enfances sans tendresse ni école. Lui les a lus, tous et depuis
longtemps. Il les a aimés, les aime encore, certains même il les a appris par coeur." (p.89)


"La mort est vaincue. C'est la fête. (...)

C'est sans tenue, sans retenue. Fini les rangs serrés de l'après-midi, l'instant
est exceptionnel, il crée des groupes, des grappes, ce n'est pas tous les jours qu'ils côtoient le grandiose, ils ne sont pas des exégètes, des politiques, des artistes, ils sont les personnages du poète, ses entrailles, ceux qui savent que la vie durant tu rames comme sur une grande galère, qui savent reconnaître un beau ciel, un grand homme, alors ils boivent à sa santé, à la leur, et aux femmes " (p. 204)
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Il s'agit ici du récit de la mort d'un ogre. On pourrait s'en réjouir, sauf que cet ogre est généreux. Immense, entier, engagé dans les causes les plus justes, celles de la liberté, de l'égalité et de la fraternité, défenseur des plus humbles, farouche opposant à la peine de mort, figure contrastée, façonnée d'ombres et de lumières, comme certaines des plus belles pages qu'il a écrites. Son oeuvre est monumentale. Lui aussi est un monument, physiquement aussi. On ne sait plus qui dépasse l'autre, si c'est l'homme ou bien son oeuvre. On ne sait plus cela en ce jour du 22 mai 1885. L'homme a 83 ans, il s'appelle Victor Hugo. Lorsqu'il meurt à son domicile, à peine son dernier souffle est-il prononcé que déjà l'homme est ailleurs, quitte la sphère intime, quitte les siens, pour regagner la rue, là où il est déjà présent depuis toujours, rejoindre la foule, les gueux, les réprouvés, les gens de peu. D'autres hommes sont là aussi pour accueillir sa mort, drapeau ou fardeau déjà encombrant : les hommes politiques, ceux de la République, ses alliés, ses adversaires, la police, l'Église, l'ordre public. L'homme est immense, j'imagine ce corps immense qui s'éteint peu à peu, car c'est ainsi que débute le très beau roman de Judih Perrignon ; il nous invite dans cette chambre où meurt l'artiste, tandis que Paris, le peuple et l'élite, attendent, retiennent leur souffle. Mais l'homme, Victor, pousse son dernier soupir auprès des siens. Ces derniers savent déjà que ce petit espace intime, l'espace d'une chambre, replié là où ils prient autour de celui qui vient de mourir, est fragile. Ils entendent déjà au loin le bruit de la rue et de la foule, des femmes et des hommes qui tendent des bras transis pour venir caresser le visage d'un homme qu'ils idolâtrent par-dessus tout. Ce que j'aime dans ce livre magnifique et très fouillé sur le plan historique, c'est cette conjonction merveilleuse et douloureuse entre la sphère intime et la sphère publique.
L'homme est à peine mort, déjà il faut se poser la question de funérailles nationales, organiser le parcours du cortège funèbre, dire où il devra passer et surtout où il ne devra pas passer. Quel jour ? Un dimanche bien sûr ! Non pas un dimanche justement, un lundi. Un lundi ? Vous n'y pensez-pas ! Les ouvriers ne pourront être présents pour suivre le cortège ! Justement la mort de cet homme fait peur à la République et à la police. Une foule s'apprête à bouger, immense. Immense autant que l'homme, autant que son oeuvre. D'où vient-elle ? Et c'est cela qui est merveilleux. L'homme dérange encore, malgré son retour d'exil depuis quinze ans déjà. On craint l'émotion et les débordements que ses obsèques risqueront de susciter. Et d'ailleurs faut-il lui offrir des funérailles nationales ? Ou plutôt, faut-il offrir à la rue les funérailles nationales de ce génie encombrant plus que jamais ? Cette foule qui peut faire peur à cette République encore jeune et fragile. Sa mort ne lui appartient déjà plus. Ni à sa famille non plus.
Forcément, comme l'homme est immense, il laisse un vide, d'où ce désarroi auprès de la foule qui est là, qui est attend, lui qui fut l'apôtre, l'avocat des misérables, des sans riens. Car par définition les ogres prennent de la place autour d'eux et dévorent tout sur leur passage, les anonymes comme les êtres qui leur sont les plus proches. C'est la foule qui s'empare de sa mort, mais aussi les hommes qui font cette République et veulent récupérer l'événement à leur dessein. Sur un rythme haletant, nous suivons cela comme si nous étions nous-mêmes parmi les journalistes, guettant, courant d'un lieu à un autre, suivant les tractations, les enjeux, les compromis, ce qui se joue en coulisses.
Ce roman est merveilleux car il colle au plus près de l'homme, comme un reportage, tout en laissant une part intime en filigrane, car Victor Hugo, tout ogre qu'il était, avait autour de lui, le jour de sa mort, les siens, celles et ceux qui l'aimaient plus que tout. Je pense notamment à ses petits-enfants, Georges et Jeanne, ces deux petits êtres qui lui étaient chers et pour lesquels il avait écrit quelques temps auparavant L'Art d'Être Grand-père. Car c'est un grand-père aussi qui meurt ce jour-là et le roman nous le rappelle aussi.
Dans ce récit qui se veut aussi conte, nous sentons les blessures intimes d'une famille, la mort ne les a pas épargnés dans sa longue histoire. Nous pensons à Léopoldine, la fille chérie du poète, morte noyée avec son mari, pour laquelle l'artiste écrira un de ses plus beaux poèmes, Demain dès l'aube… Léopoldine est présente dans ce roman. Nous sentons venir de très loin aussi la plainte lancinante d'une autre enfant perdue là-bas, broyée par la vie, Adèle sa fille, déjà folle. Il faut toute la sensibilité de ce récit pour dire cela aussi, entrebâiller le récit comme une porte légèrement ouverte… Et lorsque le récit s'achève, il ne nous reste plus qu'à refermer cette porte doucement, sans faire de bruit, nous éloigner à pas de loup de la chambre de celui qui vient de mourir, pour rejoindre la foule qui pleure là-bas.
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Victor Hugo se meurt et Paris s'émeut. Comment ? le poète n'était pas immortel ? le 22 mai 1885, Victor Hugo n'est plus et Paris pleure. Les autorités craignent un soulèvement du peuple qui a pris le deuil de son héros. La Commune n'est pas si loin et les esprits sont prompts à s'échauffer. « Tout signe de tristesse est normal et suspect. La peine peut tourner à l'émeute. Surveiller la couleur du drapeau, qu'il ne vire pas au rouge. » (p. 38) En haut lieu, on ne met pas longtemps à décider que le poète mérite de grandes funérailles, mais là aussi, on s'écharpe : Sainte-Geneviève ou Panthéon ? Une loi est votée à la hâte pour imposer des funérailles nationales. « Les républicains, les socialistes, les catholiques, les anarchistes, ils noircissent du papier, clament des vérités comme on tire des coups de feu, ils veulent prendre ce ventre, tirer le cadavre de leur côté. Mort cet homme parlera encore. » (p. 31) Pendant quelques jours, la France et Paris ne respirent plus : il faut agir vite, honorer le grand homme tout en évitant les émeutes. Une fois encore, le poète concentre l'attention : on ne pense qu'à lui, on ne parle que de lui. Lui qui aimait tant les honneurs, celui qui lui est rendu post-mortem n'est pas le moins grandiose. « On dirait qu'en mourant, qu'en glissant vers l'abîme, il creuse un grand trou et y aspire son temps et sa ville. » (p. 26)

Et la famille alors ? La seule enfant vivante, Adèle, est folle et loin de Paris depuis des années. Georges et Jeanne, les petits-enfants, comprennent vaguement qu'ils doivent partager leur cher Papapa dans la mort comme ils l'ont partagé dans la vie. Leur peine même n'est pas vraiment à eux. Édouard Lockroy, le mari de la belle-fille de Victor Hugo, défend l'homme derrière le poète et tente de faire respecter ses volontés. Non, pas de prêtre. Non, pas de messe. Hugo appartient à la République, pas à l'Église, et celle-ci s'étrangle de fureur qu'on lui refuse la dépouille du grand homme. « Député, sénateur orateur, il n'appartient qu'à un seul parti. le poète appartient à la France inclinée devant son lit de mort. » (p. 245) Voilà ce qu'écrit Le Figaro, lucide. Et les journaux, d'ailleurs, ont tous des éditions spéciales à faire paraître.

De partout des lettres affluent. Les ouvriers demandent que les funérailles aient lieu le dimanche ou que le lundi soit férié pour qu'ils puissent y assister. On souhaite modifier l'itinéraire du cortège, être autorisé à marcher derrière la famille, les artistes, les officiels. le peuple aussi veut rendre hommage au poète. Des couronnes sont offertes par des délégations étrangères. Voilà le jour des obsèques. Paris est bondée noyée sous la foule émue et recueillie. Mais la police a l'oeil ouvert : ses mouchards lui ont rapporté que d'anciens communards voudraient faire du grabuge. Gare à celui qui brandira un drapeau rouge ! Quel pouvoir il avait, cet écrivain, pour galvaniser les petites gens et leur donner le goût de la révolte ! « Ce n'est pas avec des rimes, disiez-vous qu'on détruit le vieil ordre existant, mais sans la poésie, en aurait-on l'idée ? » (p. 114)

Judith Perrignon rend un magnifique hommage à un grand auteur. Son style est riche, ample et fluide. Avec elle, on retient son souffle pendant les quelques jours suspendus qui séparent la mort et les funérailles. Mais l'histoire de Victor Hugo ne s'arrête pas à la fin du cortège funèbre ou entre les murs du Panthéon. Un siècle plus tard, il résonne encore quelque chose de la voix puissante de l'auteur de Notre Dame de Paris.

De Judith Perrignon, je vous recommande chaudement L'intranquille, autoportrait d'un fils,d'un peintre, d'un fou. Et je vous conseille Tolstoï est mort de Vladimir Pozner, un autre excellent roman qui retrace les dernières heures et la mort d'un grand auteur.
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Victor Hugo vient de mourir,nous sommes le 22 mai 1885 et tout le pays est en émoi.
La France vient de perdre l'un de ses enfants les plus illustres et respectés,un monument,un symbole.
Victor Hugo c'est un Grand Homme, un des écrivains majeurs du siècle ,le souverain des mots mais également un grand républicain une icône absolue d'un siècle tumultueux, l'ami du peuple, l'ami du pays et le pays est triste et pleure.
Les funérailles nationales sont la seule forme d'hommage que la France unanime peut rendre au Grand Père de la République,la patrie reconnaissante..
Tout Paris est mobilisé pour un Adieu à la hauteur de la stature de l'homme.
Judith Perrignon dans ce petit roman inspiré de la grande Histoire a imaginé brillamment les quelques jours de temps suspendu qui se sont écoulés de la mort du poète à son inhumation au Panthéon .
Des jours de recueillement,de peine mais également nous raconte t elle d'agitation des corps ,des coeurs et des esprits dans une jeune France républicaine unie autour du corps et du souvenir du grand homme mais qui se dispute aussi le droit de l'honorer une dernière fois,de l'accompagner à sa façon vers l'immortalité.
Judith Perrignon a imaginé avec fidélité la façon dont les parisiens illustres ou non,proches du défunt ou citoyens ordinaires avaient pu appréhender et se préparer aux funérailles de Victor Hugo et toutes les émotions et les enjeux que cette disparition majeure avait engendrée et impliquée..
Debats d'assemblées, réunions corporatistes, discussions de rue, requêtes multiples,luttes d'influences, la disparition de Victor Hugo et son enterrement auront déchaînés les passions et les débats.
Panthéon ou père Lachaise, honneurs de la République ou de lEglise , parcours du convoi mortuaire, détails de l'inhumation, symbolique de ces funérailles extraordinaires, récupérations, compromis,actions,tout le peuple parisien a cherché à mettre son nez dans ces adieux gigantesques au Maître, à jouer un rôle dans ce grand spectacle funèbre.
C'est une incroyable et haletante chronique sociale et historique, cohérente et passionnante qui est dépeinte dans ces pages autour du cercueil de l'illustre poète à mi chemin entre réalité historique et fiction romancée.
Des funérailles d'exception finalement et sans surprise récupérés par le pouvoir républicain bourgeois qui les utilisera à son profit et en sortira grandi au détriment du peuple.Des proscrits, des Misérables, ceux que Victor Hugo a toujours observé,défendu à qui il devait bien plus qu'à tous ces puissants mais qui pour beaucoup seront tenus à l'écart des obsèques officiels suivis par près de deux millions de personnes.
La République ce jour-là avait étouffé l'homme révolté , même mort Hugo faisait encore peur au pouvoir par sa capacité à fédérer le peuple et ses révoltes, mais point de révolte il y eut, simplement une fête populaire en l'honneur du prestigieux défunt.
Le grand homme a du s'en retourner dans sa tombe, ça Judith Perrignon ne nous le dit pas, elle n'est pas allé jusqu'à l'imaginer dans ce remarquable bouquin très bien documenté dont on ne sait plus au final s'il releve du réel ou de la fiction tant il s'avère juste et convaincant.
Judith Perrignon nous livre ici un tableau réaliste et juste de la France de l'époque et d'un événement historique presque sans équivalent voilà un livre petit par la taille mais grand par sa richesse et son contenu, superbe hommage au poète, à ses mots, à sa vie en même temps qu'une réflexion sur son héritage
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Au 50, de l'avenue qui porte déjà son nom, Victor Hugo va mourir… L'émotion, la crainte, l'appréhension sont à son comble car le grand poète s'est enrhumé dans la cour de l'Académie, le jour de la réception de son ami, Ferdinand de Lesseps. Victor Hugo à 83 ans : « …on dirait qu'un astre va s'éteindre dans le ciel. »
Peu de temps après avoir lu le Paris de Victor Hugo, de Nicole Savy puis le banquet des affamés de Didier Daeninckx, ce petit bijou signé Judith Perrignon venait à point. Au fil des pages, elle nous fait vivre les dernières heures du grand homme, toutes les tensions, les luttes d'influence, la surveillance policière et nous permet de partager les sentiments des proches. L'auteure s'exprime avec une écriture simple, agréable, touchante, précise.
Le clergé attend que Victor Hugo réclame un confesseur mais il ne cèdera pas. Sa famille proche est réduite : «… tous ces morts chez cet ogre qui a enterré femme et enfants… » Ses vieux amis, Auguste Vacquerie et Paul Meurice sont là : « Ils ont tout connu, tout partagé… un mélange d'amitié et d'allégeance. » Georges et Jeanne, ses petits-enfants, l'appellent « Papapa ». Ce sont les enfants de Charles et Alice, leur mère, devenue Mme Lockroy, depuis huit ans. Nous suivrons Édouard, son mari, député à l'Assemblée Nationale.
La police surveille tout le monde, journalistes, anarchistes, ouvriers, avec ses infiltrés car la mort du poète représente un danger. Il ne faudrait pas que Les Misérables, le peuple de Paris se réveille. Cinq cents personnes restent en permanence devant sa maison mais, après une dernière rémission, à 1 h 20 de l'après-midi, Victor Hugo, meurt le 22 mai 1885 !
Dès que la nouvelle se répand, la foule devient de plus en plus considérable. Les officiels viennent saluer sa dépouille. « Hugo, ne le pleurons pas ! » affirme Maxime Lisbonne, l'ancien colonel de la Commune, condamné aux travaux forcés, homme de théâtre aussi, que Didier Daeninckx a su sortir de l'oubli. « Il écrivait si bien mais pas une ligne sur la semaine sanglante et ses 40 000 cadavres. Il nous a abandonnés. » Maxime Lisbonne « saigne encore, le bagne, ses fers, ses fouets, ses tortures lui font mal. »
Depuis, « la République s'est installée, elle est bourgeoise, elle combat Dieu et les tyrans, mais elle vénère l'argent. » Malgré les pressions, les décrets sont tombés : « le Panthéon est rendu à sa destination première et légale. le corps de Victor Hugo y sera déposé. » L'extrême-gauche réclame de pouvoir défiler avec le drapeau de son choix mais ce sera impossible, la police sera intraitable.
Son corps est embaumé. Les obsèques ont lieu le lundi 1er juin et non le dimanche comme les ouvriers auraient aimé pour pouvoir être présents car ce lundi ne sera pas férié : « La République avait fait fermer écoles, théâtres et magasins mais avait préféré les travailleurs à l'usine plutôt que sur les trottoirs. »
Sur le parcours, on loue fenêtres, balcons, escabeaux, gradins… L'Arc de Triomphe est voilé, le cercueil de plomb y est déposé pour un dernier hommage populaire mais c'est un modeste corbillard qui le transporte. « La République, ce jour-là, étouffait l'homme révolté. » Mais reste « la phrase », les mots du poète qu'il ne faut pas réduire et laisser vivre.


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Un roman époustouflant où le lecteur vit ces longues heures d'attente et puis de cérémonie avec l'immense foule qui s'empare des rues de Paris à la mort de Victor Hugo en 1885.
A qui appartient un mort célèbre, comment lui rendre hommage, comment préserver sa mémoire et son héritage de la manière la plus honnête et fidèle possible ?
Quelques critiques intéressantes de mes amis lecteurs Babelio et de Télérama, à consulter. Ce roman a reçu le Prix Tour Montparnasse 2016. Je crois que je vais suivre ce Prix avec intérêt. Je vais aussi me procurer le roman Quatrevingt-treize.
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J'ai lu « Victor Hugo vient de mourir » Judith Perrignon sur les conseils du Masque et la plume, pour la rentrée littéraire de septembre 2015.
C'est exactement le genre de roman que j'adore et la découverte de cette autrice m'enchante. La lecture est vraiment agréable et le livre des éditions L'Iconoclaste aussi (format, papier, police de caractères).
Après la série « Un été avec Victor Hugo » présentée par Guillaume Gallienne sur France inter, j'ai été emballée par cette période qui a fait vibrer la France : une dizaine de jours vécus par le Paris littéraire, politique et ouvrier à la mort de Victor Hugo le 22 juin 1885.

Sans être inquisitrice, Judith Perrignon sait raconter l'agonie du poète en entrant dans l'intimité familiale de « papapa » comme le nomme ses deux petits-enfants. Mais elle relate surtout l'atmosphère particulière des préparatifs des funérailles nationales qui auront lieu le 1er juin 1885, jour où la dépouille de Victor Hugo rendra au Panthéon la destinée de temple des Grands hommes.

Les funérailles vont s'organiser, somptueuses, encadrées par la police comme rarement depuis la Révolution. L'hommage est impressionnant et les gens vont se mobiliser en grand nombre. Tous vont répondre présent car, même si les plus pauvres s'interrogent parce que Victor Hugo vivait en bourgeois, ils constatent qu'il a toujours été soucieux des déshérités et que s'il n'a pas été une voie de l'insurrection de la commune, il gronda pour sauver Louise Michel de la mort et pour qu'on sorte tous les communards du bagne.

C'est bien mieux qu'une biographie car l'événement permet d'aborder une époque et ses protagonistes de façon originale : les anciens communards qui lui doivent en grande partie d'avoir été graciés, les ouvriers et petites mains, les gavroches de Paris, les autorités qui redoutent les débordements et la réapparition du drapeau rouge de la commune, les anarchistes, les journalistes, les élus aux bancs de l'assemblée… tous vont être acteurs de ce moment historique.


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