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Annie Epelboin (Traducteur)Joseph Brodsky (Préfacier, etc.)
EAN : 9782226039514
180 pages
Albin Michel (28/02/1990)
4/5   5 notes
Résumé :
La Mer de Jouvence date de 1935. Jusqu'en 1976 ce fut un inédit total, même en russe. Andréi Platonov a en effet subi, après les attaques de la critique officielle, une offensive haineuse déchaînée sur l'initiative de Staline contre sa Chronique d'un pauvre hère (1931), ce qui lui interdit dès lors de publier.
Mort en 1951 après vingt ans de silence forcé, il est aujourd'hui universellement reconnu comme l'un des plus grands romanciers de l'U.R.S.S.
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Dans les plaines d'Asie centrale, gelées en hiver et brûlées en été, Vermo, un ingénieur, rejoint le sovkhoze des Fermes Natales. Il doit aider Nadia Bostaloïeva, la directrice du sovkhoze, à augmenter la production de viande et ainsi satisfaire, et même dépasser, le plan économique de l'Union des Républiques socialistes soviétiques.

La quatrième de couverture porte à confusion. On imagine volontiers un voyage vers les entrailles de la terre, un Jules Verne chez les Soviets. Il n'en est rien. La mer de Jouvence, qui donne son titre au roman, c'est la réserve d'eau supposée qui serait cachée dans les profondeurs de la terre et que Vermo voudrait faire rejaillir à la surface pour abreuver les hommes et les bêtes du sovkhoze. Car, dans ce désert où rien ne se passe, les contraintes naturelles, à commencer par l'absence d'eau, sont un terrible défi à la volonté bolchevique.

Porté par la volonté collective et les forces individuelles - Nadia Bostaloïeva d'abord, la vieille Federatovna ensuite, mais aussi Kemal le forgeron ou encore Vyssokovski le zootechnicien -, Vermo imagine toutes sortes de moyens pour élever les Fermes Natales vers l'horizon radieux promis par l'idéal soviétique. Mais, dans la steppe, tout n'est qu'illusion ou, tout du moins, paradoxe : on rêve d'avenir dans les Fermes Natales, on veut élever le projet socialiste en creusant la terre, on travaille pour la fraternité humaine en oubliant jusqu'à son humanité (on croit assister à la naissance d'un amour entre Vermo et Nadia ; il ne reste chez Vermo comme chez Nadia que l'obsession de construire, par le travail, sinon une société idéale, du moins un sovkhoze qui répond aux exigences du Parti).

Sous les slogans, sous les termes techniques et la prose qui reprend volontairement et excessivement la sémantique soviétique, Platonov cache son ironie. Une ironie empreinte, probablement, de tristesse ou d'amertume. Car le roman n'est pas un simple réquisitoire contre la politique du Parti Soviétique. C'est aussi le miroir d'un homme qui a cru à la Révolution, aux idéaux socialistes, qui a tenté de mettre en oeuvre la grande fraternisation des hommes, qui a voulu briser les barrières sociales et géopolitiques d'un pays qui, véritablement, naissait. Mais cette naissance s'est faite dans le sang et la violence, et Platonov l'a compris. Parce que son écriture est difficilement saisissable - la frontière entre l'ironie et la véritable foi en un programme idéologique tel que le socialisme est ténue -, Platonov a été placardisé par les autorités intellectuelles soviétiques, Maxime Gorki en tête.

De cette utopie socialiste comme de ce roman, il reste l'impression flou d'un rêve qui s'est transformé en cauchemar. Car, dans le roman, les personnages sont moins des êtres humains que les instruments dociles de la réalisation d'une idéologique politique et d'un système économique qui, dès son origine, manque de viabilité (ainsi la quête de Nadia dans la capitale de la République pour trouver des matériaux démontre l'absence de moyens réels de mettre en place ce que l'idéologie politique prône). Les personnages semblent caricaturaux et, pourtant, ils ne sont que l'expression la plus humble - hormis Vermo et Vyssokovski, aucun n'est supposé instruit - de l'homo sovieticus. La mer de Jouvence est une utopie poursuivie avec acharnement par ceux qui habitent le roman. Dans un ultime paradoxe, c'est une source de vie qui est, finalement, source de mort.
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Vidéo de Andreï Platonov
Michel Eltchaninoff, Françoise Lesourd et Anne Coldefy-Faucard présentent la pensée du philosophe Nikolaï Fiodorov.
Totalement inconnue en France, la pensée utopiste de Fiodorov a influencé la culture du XXe siècle russe et demeure à ce jour une référence importante en Russie. de nombreux écrivains y trouveront des échos de leurs préoccupations, de Tolstoï à Dostoïevski ou à Vladimir Soloviov. Parmi ses héritiers, le futuriste Velimir Khlebnikov et les écrivains Andreï Platonov ou Maxime Gorki, mais également des savants comme Tsiolkovski, le père de l'aéronautique soviétique. Ses idées trouveront indirectement leur expression dans des textes de la science-fiction soviétique ou dans le cinéma d'Andreï Tarkovski et son adaptation de Solaris (1972). La pensée de Fiodorov se situe au croisement des nouvelles disciplines émergentes de son temps, telles que la linguistique et l'anthropologie, mais également la sociologie, l'agriculture, l'économie. Il est attentif aux phénomènes sociaux engendrés par l'urbanisation, l'appauvrissement de la campagne, et pressent, comme d'autres penseurs de son époque, l'avènement d'une crise mondiale majeure. Exhortant l'humanité à s'unir pour vaincre la mort, Fiodorov lui assigne aussi le devoir moral de ramener à la vie toutes les générations disparues, ces victimes du « progrès » : c'est « l'oeuvre commune ». Sur le climat, objet d'attention privilégié, ou encore, sur les transformations biologiques que connaîtra l'humanité, sa réflexion se rapproche de la question du transhumanisme, qui connaît actuellement un véritable engouement dans la Silicon Valley et ses grandes entreprises. Utopique, la pensée de Fiodorov ? Sans doute. Il n'en demeure pas moins que les idées, les interrogations du philosophe sont toujours aussi stimulantes, particulièrement lorsqu'elles sont exposées avec la spontanéité de la Correspondance: les rapports avec la nature, les questions de météorologie, l'urbanisation excessive, la maladie, la mort, la faim, la conquête de l'univers…
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