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3,75

sur 176 notes
Sans vouloir parodier mon ami BazaR, je peux dire sans hésitation que j'ai bien apprécié aussi ce petit Rossignol. L'auteur Audrey Pleynet s'essaie à la science-fiction poétique comme Amal El-Mohtar dans les oiseaux du temps ou comme Sigbjørn Skåden avec son roman "Oiseau". La collection « Une Heure-Lumière » des éditions le Bélial sert de magnifique écrin à cette belle plume qui vous prend par la main en vous emportant loin, très loin…

Nous sommes dans une station spatiale perdue dans l'immensité du Cosmos. Après plusieurs guerres, les différentes races de l'univers ont décidés de s'unir pour mieux se connaître et vivre enfin en paix. Et pour cela rien de mieux que cette station qui sait réunir tout ce beau monde. La technologie qui avait servi dans un premier temps à créer des armes et par manipulations génétiques, des super guerriers ; permet aujourd'hui à toutes les espèces extra-terrestres de se croiser et de vivre ensemble. C'est cette explosion de races et de formes plus exubérantes les unes que les autres que l'auteur s'efforce de décrire avec un vocabulaire riche en diversité et précis dans les détails. Pierre Christin et Jean-Claude Mézières avec leur BD Valerian dans l'ambassadeur des ombres font bien pâle figure devant le récit d'Audrey Pleynet.

Dans cette nouvelle où les mélanges génétiques sont la norme, les êtres qui la parcourent sont souvent le produit d'une mixité interraciale faisant face aux espèces pures qui tentent souvent de s'opposer à celles métissées. Les Spéciens qui prônent un retour à la pureté, luttent contre l'universalité voulue par les Fusionnistes. C'est au travers d'une narratrice mi-humaine mi-alienne que cette bataille se révèle dans toute sa complexité. Et pour être complexe, Rossignol l'est par son univers étrange et exotique. La construction du récit qui s'appuie sur des Flash-back temporels comme dimensionnels désorientent fortement le lecteur en lui demandant un petit effort de concentration. Mais après les premières pages absorbées, le plaisir de les parcourir revient rapidement.

Audrey Pleynet est une autrice exigeante qui sait poser le problème de la diversité raciale avec des mots forts, biens choisis et d'une intensité exceptionnelle. La multitude des sentiments qu'elle arrive à transmettre dans le schéma aussi court de la novella, montre son professionnalisme. Sa réflexion se fait toujours de façon juste et sensible pour un sujet d'actualité qui reste toujours difficile à aborder. Les questions de race et de métissage sont exprimées sans tabous, avec conviction et sincérité. Elle se fait l'avocate d'un discours universaliste sur une échelle galactique. Elle va même plus loin en créant dans sa station spatiale une sorte de Melting-pot cosmique où se retrouve pêle-mêle toutes les essences du vivant, des êtres de chair humanoïde aux entités vaporeuses, des éthérées aux monstres tentaculaires en ignorant les contraintes biologiques ou physiques de la nature.

Le Rossignol d'Audrey Pleynet ne pourra pas vous laisser indifférent, il fait partie de ces livres que l'on aime ou que l'on déteste. Pour ma part, j'ai aimé son message plein de poésie et sans concession vis-à-vis de la xénophobie. C'est un vrai hymne à la diversité universel. C'est aussi le premier prix du meilleur roman de SF aux Utopiales 2023 pour une autrice qu'il faudra suivre désormais de plus près.

♫ Chante, rossignol, chante, toi qui as le coeur gai. Tu as le coeur à rire, moi je l'ai à pleurer… ♪
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Énigmatique et envoûtante, l'entrée en matière de ce livre est splendide.
Mais l'hirondelle ne fait pas le printemps, et le rossignol, pour chanter, n'ouvre qu'un petit bec.
"Rossignol" est un court roman de science-fiction d'Audrey Pleynet, paru dans la collection "Une heure lumière" des éditions "Le Bélial".
"Rossignol" vient tout juste de remporter, à Nantes, le prix littéraire Utopiales 2023, tout bruissant encore des délibérations de son jury.
Toutes mes félicitations vont donc à Audrey Pleynet, l'autrice de ce bel exercice d'écriture, de cet élégant livre de genre que pourtant je n'ai pas aimé.
Le style y est riche d'une architecture de sensations teintée de surréalisme.
Le roman s'ouvre sur les langueurs d'une adolescente si finement mais peut-être trop longuement décrites.
Le vocabulaire y est un peu hermétique, inventé pour l'occasion.
Mais ça fonctionne.
Ce n'est pas si souvent que la science-fiction sait se faire poésie.
Une jeune femme est perdue dans un monde qui n'est que peu décrit, au milieu de personnages n'ayant pas pris le temps d'être convenablement présentés.
Un Marith blanc surgit !
Il faut partir ... Partir maintenant ...
Sont a sa poursuite les spéciens, les nombreux fusionnistes encore ignorant les motifs de sa fuite, les autorités, les dirigeants de communautés et les stationniens apeurés.
La course s'amorce sans réelles explications.
Le contexte ? Les détails ? L'époque ?
Nous ne pouvons pas tout savoir.
Doit-on pour autant ne presque rien savoir ?
Le récit peine à prendre de la force, reste flou.
peut-être est ce là le prix à payer pour une écriture trop stylisée, pour une ambiance trop marquée.
A la fin du quatrième chapitre, à la 47 ème page de ce court roman qui en compte 130, le corps du récit ne semble pas encore ni devoir s'amorcer vraiment, ni prendre force et direction.
L'ennui finit par s'installer.
Le bel exercice d'écriture s'abîme dans la lassitude.
Devenue spécieuse à force de se vouloir élégante et raffinée, la plume d'Audrey Pleynet semble s'écouter écrire.
C'est donc une rencontre manquée pour moi que la lecture de ce livre que j'aurai pourtant aimée suivre avec plaisir et gourmandise, puisque le jury du prix Utopiales, qui n'a pu à ce point se tromper, vient de le récompenser quelques jours avant l'ouverture à Nantes de ce si précieux et intelligent festival ...

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J'allais écrire que ce livre est objectivement magnifique, mais je regarde la distribution des notes sur Babelio, et je découvre que c'est un sentiment très subjectif.

Perso, j'ai été emporté. Audrey Pleynet estime son lectorat. Elle ne le prend pas pour un benêt incapable de s'accrocher aux rochers glissants d'événements enchevêtrés. Elle décide donc de le plonger dans une histoire si difficile à suivre au premier abord. Il faut du temps pour établir des balises, distinguer le décor, jauger les personnages. On se débat dans ce brouillard, mais il ne faut pas paniquer. Il faut patienter. Apprécier la prose, le style si poétique.

Et les images – de fait un peu brouillées par l'ampleur du style qui semble parfois jouer contre elles – finissent par s'affiner. Les pixels rapetissent, se multiplient et la définition augmente. On est dans un univers de contact entre une multitude d'espèces extraterrestre, au sein duquel s'est construit la station : une zone où les espèces les plus éloignées vivent ensemble grâce à une adaptation technologique gérée par les Paramètres, multiforme, commerciale, bouillonnante. Une zone où les mélanges génétiques sont la norme, où les êtres qui y naissent contiennent des parts majoritaires et minoritaires d'espèces « pures » ; une sorte de monde opposé à notre éthique génétique. La station est un symbole : celui de la communication et du vivre ensemble possibles entre espèces jusqu'au niveau de l'ADN. Mais la face génère son profil, et les fanatismes se développent aussi, soit pour aller vers plus de mixité, soit pour refuser le mélange.

Le lecteur est plongé dans ce monde hallucinogène à travers le point de vue d'une héroïne Majo humania (aux gênes majoritairement humains), entre présent au présent et flashbacks à l'imparfait. Qui est-elle ? Sa jeunesse a été borderline, entre drogues, danses et contacts avec d'autres Majo-Minos. Elle a travaillé au dépeçage des astéroïdes. Elle a aussi joué les courtisanes. Elle a rencontré des êtres de tous bords politiques et génétiques.
Et peut-être a-t-elle appris des secrets qu'elle aurait mieux fait de ne pas connaître.

L'histoire est fascinante, complexe dans la façon dont elle est contée, imprévisible dans ses rebondissements. Mais c'est le décor de la station et ses habitants qui sont véritablement hors normes, dignes des plus grands auteurs de SF à l'imagination débordante. Et pourtant si peu abordés, seulement effleurés dans ce format court. J'en ressors avec une envie d'y revenir.

Je ne peux pas affirmer que vous apprécierez, vu la diversité des ressentis. Mais pour moi, Audrey Pleynet est désormais une auteure à suivre au GPS.
Tentez votre chance ?
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Pour une fois, une lecture de la collection Une Heure Lumière du Bélial ne m'aura pas vraiment emballé. Il est vrai que j'en attendais beaucoup, sans doute trop, la déception est d'autant plus cruelle.

On est sur une station spatiale gigantesque, on pense à Point Central de la série Valérian et Laureline, une station où l'on accroche quelques astéroïdes pour en exploiter les ressources minières, mais surtout une station où les différentes espèces de la galaxie se côtoient. L'écriture est recherchée, travaillée, fine et élaborée. Bref, il y aurait tout pour me plaire mais cette lecture a été assez laborieuse, j'ai traîné des pieds, quelque chose ne passait pas, j'étais un peu perdu dans cette station, je n'y ai pas trouvé mes marques, elle est en fait assez peu décrite, les non humains sont eux aussi très peu présentés, il ont des noms, des noms qui s'accumulent et on ne saisit vraiment bien leur spécificités.

L'écriture se concentre presque essentiellement sur les sensations et sentiments du personnage central, est-ce un effet pour ménager le suspense ou pour allonger le texte, on subit donc maintes migraines, nausées et états d'âmes avant d'entrer dans le vif du sujet, dans le dernier cinquième du livre, c'est un peu long, j'ai eu de longs moments d'ennui, pour un texte pourtant assez court, c'est un comble.

La plume d'Audrey Pleynet est pleine de qualité, c'est indéniable, les idées développées dans le récit sont intéressantes, mais le rythme manque d'allant et l'avalanche de sensations instaure l'ennui. Bref, j'en ressort avec un sentiment de frustration.
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Utopie dans l'espace.

La station est un lieu à part. Des espèces de toute la galaxie s'y trouvent. Ils cohabitent en bonne entente en grande partie grâce aux Paramètres. Ceux-ci permettent d'adapter l'environnement à tous. Mais un conflit menace de rompre la paix de la station.

C'est un coup de coeur. Audrey Pleynet place cette novella dans un univers incroyablement créatif servi par une plume d'une immense poésie. de très nombreuses espèces intelligentes vivent au sein de la station. Celle-ci est spécialisée dans l'extraction minière. Mais la spécificité de la station ne réside pas là. Non il s'agit d'un véritable havre de paix.

En effet, de nombreux individus y résidant sont des hybrides inter-espèces. Rejetés sur leurs mondes d'origines, ils sont venus s'installer sur la station. Néanmoins deux factions vont troubler cette quiétude. Les uns refusent le métissage, quant les autres le veulent à tous prix. Les Paramètres, contrôlant les conditions de vie dans la station, sont l'enjeu majeur de ce conflit.

La narratrice va se retrouver au centre de ce dernier. Humania avec 16 % de gênes d'autres espèces, elle ne se voit pas vivre ailleurs. La narration alterne entre sa vie d'avant le conflit, permettant un focus sur la vie dans la station et les espèces qui la peuplent, et sa situation présente lors du conflit. le modèle de la station est-il pérenne ?

En somme, une magnifique surprise d'une nouvelle venue dans la SFFF française. Je suivrais la suite de ses publications avec intérêt.

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En France, c'est par l'auto-édition que se fait connaître Audrey Pleynet dans le milieu de l'imaginaire. de son premier roman, Noosphère, on ne gardera le souvenir que d'un roman inabouti, au mieux médiocre et ennuyeux. Par la suite, on la retrouve dans la revue Bifrost avec la nouvelle Encore Cinq ans qui rassure sur la sensible amélioration de sa plume mais aussi sur le traitement de ses thématiques science-fictives. À présent, c'est dans la collection Une Heure Lumière du Bélial' que l'on retrouve la française pour un titre aussi doux qu'évocateur : Rossignol.
Que vaut cette nouvelle incursion dans le genre de la science-fiction ?

Pour tout dire, l'immersion est difficile. Rude même.
Audrey Pleynet choisit de balancer le lecteur au beau milieu de son univers et cela sans ménagement. Raccrochons-nous à donc ce que nous pouvons…
D'abord, le lieu : une sorte de station intergalactique créée suite aux guerres (la rencontre entre les espèces différentes se soldent souvent par ce genre de désagrément apparemment ) par des déserteurs et contrebandiers de races diverses, qui phagocyte les civilisations extra-terrestres comme elle consomme les astéroïdes.
La singularité de ce lieu, hormis son florilèges de peuples différents, c'est d'être capable de s'adapter aux multiples physiologies et capacités de ses habitants pour que tous puissent vivre ensemble. Une technologie appelée Paramètres…mais que plus personne ne sait guère contrôler.
Ensuite, les personnages, où, devrait-on dire, le personnage puisque c'est une narratrice qui va nous guider dans ce dédale civilisationnel, une « Humania » Majo… comprenez que ses gênes sont majoritairement Humania, une race que l'on devine assez proche de l'humain.
Enfin, l'intrigue qui tourne autour d'un conflit politique entre deux factions, les Fusionnistes et les Spéciens, les premiers voulant poursuivre cette intégration multiraciale plus avant tandis que les autres veulent imposer un régime plus « pur » en termes génétique.
Ainsi résumé, Rossignol semble assez simple à comprendre dans son versant « Utopie en péril ». Ce qui n'est pas du tout le cas car la lecture demande une attention de tous les instants puisque le lecteur apprendra cela par petites touches.
L'univers, au fond, est solide, bien que présenté de façon fouilli. Autre bon point, l'écriture d'Audrey Pleynet continue sa marche en avant et s'avère, cette fois, particulièrement convaincante et solide.
Rossignol est-il pour autant une réussite ?

À ce stade, il faut bien comprendre que beaucoup d'éléments concourent à saluer le travail de la française mais que c'est le format choisi qui va, de façon surprenante, la desservir. le lecteur est littéralement noyé sous les espèces et les variations génétiques dans cet univers où tout repose finalement sur vos pourcentages de telle ou telle race.
Si quelques rares extra-terrestres sont particulièrement bien exploitées (notamment les ‘Has), la plupart ne font que passer et la succession des noms étranges devient un catalogue plus qu'autre chose. Ce qui manque ici, c'est l'incarnation des personnages qui gravitent autour d'une narratrice qu'on devine pourtant émouvante et sincère dans sa quête d'un amour maternel et filial.
Audrey Pleynet a du mal à gérer l'aspect émotionnel de la relation de sa narratrice avec son enfant, Joshua, tout en jonglant avec une sorte de révolution conservatrice qui en dit long sur les thématiques sociales exploitées ici, parabole sur le vivre ensemble et la tolérance qui, pourtant, semble particulièrement bien trouvée.
Ce qui déçoit en réalité, ce n'est ni le style ni l'univers ni l'ambition, c'est cette constante sensation de frustration qui naît du trop peu.
Dès lors, les races comme les personnages semblent effleurés, sous-exploités, comme si Adam-Troy Castro avait voulu résumer l'univers d'Andrea Cort en une novella de 130 pages ou comme si la Nouvelle-Crobuzon de China Miéville se survolait au lieu de s'explorer.
Le résultat, dès lors, semble bancal et l'on peine à trouver des prises émotionnelles véritables sur ce que l'autrice met pourtant une grande énergie à construire. N'est pas Ken Liu qui veut…

Infusé de sense-of-wonder, intelligemment pensé mais malheureusement bien mal agencé, Rossignol est une tentative de science-fiction qui se loupe en touchant pourtant ses objectifs du bout des doigts. On espère que l'univers ici effleuré sera un jour exploité à sa juste valeur.
Lien : https://justaword.fr/rossign..
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3ème critique présente ici pour le moment sur cette novella signée Audrey Pleynet : La 1ère à 5 étoiles, la 2ème à 4, la mienne à 3...
Oui, cela peut être brillant, oui, c'est très bien écrit, oui, les différentes formes de vie évoquées et présentes dans cette station sont intéressantes, oui, le style est beau, mais je ne suis jamais rentré dans ce récit : trop alambiqué, scénario très faible, histoire peu convaincante, flash back trop systématiques, descriptions des lieux flous voire incompréhensibles, bref je n'adhère pas du tout à son récit. Question de goût ...
Dommage, la couverture (comme toutes celles d'Aurélien Police) est magnifique.
Lien : https://laniakea-sf.fr/
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Une plume féminine pour un roman SF, autrice française de plus, et récit lauréat du prix des Utopiales 2023.... Ce texte cumule tous les attraits qui me font me tourner vers un roman plutôt qu'un autre.
Notre jeune héroïne vit sur une station spatiale construite comme une utopie.
Toutes les espèces cohabitent en effet sans différence grâce à une technologie révolutionnaire qui permet aux morphologies de s'intégrer dans la station sans être embarrassées par leurs besoins différents de gravité, de pression et d'atmosphère.
Une belle utopie à laquelle elle est heureuse de contribuer.
Tout irait donc pour le mieux dans le meilleur des mondes sans compter les deux factions rivales, l'une souhaitant la mixité des espèces par l'intégration des gènes et l'autre prônant la pureté des races et la nécessaire conservation des gênes purs.
Un beau bazar en perspective...
L'autrice nous entraîne avec brio dans ce récit aux allures de polar SF.
Un bon rythme, une belle plume, une station comme une oasis dans le désert, un rêve trop beau, trop parfait pour les esprits chagrins qui rêvent de conquêtes et de domination.
Alors chante Rossignol, chante. Car toi tu as le coeur gai.
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Évidemment que Rossignol faisait partie de ma liste d'achats de l'année ! En plus dans la très bonne collection d'UHL. Audrey Pleynet est une autrice qui brille dans la SF au format court. Jusqu'ici auto-éditée (j'ai également son recueil Ellipses en PAL), j'avais hâte de découvrir son entrée dans le monde de l'édition traditionnel. Alors que pensez de Rossignol ?

Audrey Pleynet nous entraîne dans un futur lointain, au sein d'une Station abritant des centaines d'espèces extra-terrestres différentes. L'autrice déploie une grande imagination pour nous décrire des individus complètement différents, aussi bien culturellement que biologiquement. Chaque espèce n'a pas besoin des mêmes éléments pour survivre, de la même température et la composition chimique de l'air nécessaire à l'un peut tuer l'autre. Mais comment est-il dès lors possible de cohabiter ? La vidéo de la chaîne du Nexus VI résume très bien la problématique. La Station est dotée des Paramètres, une solution technologique présente dans les pièces comme au sein de combinaisons que portent les habitants. A chaque nouvel environnement, la pièce comme la combinaison produit les adaptations nécessaires pour que tout le monde soit à peu près à l'aise et puisse survivre. La Station de Rossignol est donc un lieu de brassage culturel et technologique unique dans la galaxie. Il y un véritable effort pour créer des individus complètement éloignés des standards anthropocentriques : écailles, plumes, tentacules, nature des yeux, absence de bouche ou de corps complet, capacités psychiques ou physiques… Certaines descriptions tiennent plus du Grand Ancien là où d'autres oeuvres de SF proposent des êtres extra-terrestres toujours très proches de notre physionomie pour favoriser l'empathie, Rossignol pose la question du vivre ensemble à un degré d'autant plus poussé.

Un lieu unique dans une galaxie où les espèces ont tendances à se replier sur elles-mêmes. Une vision qui se transmet à la Station, où de plus en plus d'individus se montrent fiers de leur grande pureté génétique. En effet, avec autant d'espèces présentes, la Station se transforme en laboratoire génétique et complexifie encore la gestion d'autant d'extra-terrestres différents : il est très rare que des individus ne soient pas un minimum hybridés. Audrey Pleynet met en scène un monde où la Majo, Majorité génétique, joue un rôle culture prépondérant, ainsi que les différents pourcentages. Il y a une opposition idéologique forte entre les Fusionnistes, partisans des mélanges génétiques, et Spéciens. Une opposition qui a lieu jusque dans l'enfance du personnage principal. Légèrement métissée, elle a grandi sur la Station parmi des espèces variées, tentant de partager les mêmes expériences malgré les limites physiques. Sa mère, également métissée mais née sur un monde humain qui l'a rejetée, est du coté Spécien. Ce conflit intime permet de mieux comprendre les tournants et aboutissants du conflit qui secoue la Station, un conflit vu de très près grâce au statut ambivalent de la protagoniste, à la Majo très humaine mais à l'expérience universaliste.

Audrey Pleynet est réputée pour être particulièrement brillante sur le format court, et je me suis demandée comment elle est arrivée à proposer un texte aussi riche sur une novella ! Elle a opté pour un choix narratif qui ne plaira pas à tout le monde : une narration qui ne suit pas d'ordre chronologique mais le cheminement de la pensée de la protagoniste. Avec le nombre de races évoquées, les conflits politiques ou philosophiques et les spécificités des Paramètres, le lecteur pourra être vite enfoui sous l'information. D'autant plus que le début du récit, à la première personne, ne prend pas par la main et nous enjoint de raccrocher les wagons petit à petit. Mais je n'ai pas été gênée outre mesure puisque c'est le jeu de la novella, qui peut parfois donner l'impression de ne pas laisser la place à un univers de se développer. Mais cette narration permet également de donner de l'amplitude au récit en jonglant entre passé et présent, introspection et action, pour porter le message de manière riche. Cette complexité permet de mettre en scène dans son universalité l'expérience et les ressentis de la protagoniste de manière plus entière, qui m'a très légèrement rappelé du Nouveau Roman dans sa façon de mettre en scène l'expression de la pensée individuelle dans ce qu'elle a de plus personnelle.

En effet, le style de l'autrice est très travaillée, souvent beau et poétique. La diversité des espèces offre à la plume la possibilité de construire un texte organique, tout en textures et émotions. Même si on parle d'individus très différents, le récit met en avant le point de commun de tous : un besoin et la recherche d'Amour au sens large. On parle aussi bien de la recherche de connexion avec ses semblables, qui pousse ainsi au rejet de l'altérité. le lien amical, qui permet de trouver des âmes similaires. Bien sûr, l'Amour filial, qui se traduit aussi bien à travers la relation difficile que la narratrice entretient avec sa mère, et celle bien plus fluide et évidente avec son fils Joshua, enfant au métissage complexe. L'émotion est symbolisée à travers une ritournelle terrienne qui transcende les générations, « à la claire fontaine », qui donne également son titre à l'oeuvre. Finalement, malgré la forme complexe, le récit touche juste en se dirigeant vers une vérité simple et universelle.

La novella est un texte intelligent sur un thème d'actualité. Rossignol pose la question du vivre ensemble, mais de manière extrême en mettant en scène un environnement adaptable capable d'accueillir une grande variété d'espèces, mais un fragile écosystème mis en danger par les velléités de pureté de certains individus. Audrey Pleynet met en scène un univers vaste en peu de pages, admirable mais qui pourra parfois perdre le lecteur. Une prouesse réalisée en partie grâce à la narration éclatée, qui permet d'alterner entre passé et présent pour bien comprendre le cheminement de la narratrice, qui se tient en équilibriste entre les différentes parties en conflit. Mais l'apparente complexité est transcendée par un message universel porteur d'espoir, bien exécuté, sur l'Amour sous toutes ses formes, celui qui transcendent les différences, le temps et les générations.
Lien : https://lageekosophe.com/202..
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La collection Une Heure Lumière des éditions le Bélial', consacrée aux romans courts, a publié quelques auteurs français. Audrey Pleynet est la première femme française à intégrer cette collection, avec Rossignol, paru le 18 mai. C'est la première publication de l'autrice chez cet éditeur, après quelques nouvelles et un roman en autoédition et des nouvelles dans des anthologies.

Rossignol nous entraine dans un futur lointain, d1ns lequel l'humanité a colonisé les étoiles, et y a rencontré d'autres espèces. Les différentes formes de vies se sont mélangées et des hybrides sont nés. L'histoire est racontée par une jeune femme dont on ne connait pas le nom. Elle vit sur une station spatiale un peu particulière. Celle-ci vit du commerce des minerais extraits d'astéroïdes minés, et comporte en son sein des personnes de toutes les origines. L'environnement s'adapte en permanence pour que la vie soit possible pour tous. La narratrice est née sur la station et ne l'a jamais quitté. Elle y vit avec sa mère et son fils. Elle est humaine majoritairement, même si, au désespoir de sa mère, elle a 18 % de gènes aliens. Elle aime sa vie sur la station, son melting-pot, ses amis, ses amours avec des écailles, des plumes ou encore des membres surnuméraires. La station était un lieu d'utopie consensuelle, un lieu où cohabitaient harmonieusement les espèces. Malheureusement, l'idéal de la station est mis à mal par des conflits raciaux et la narratrice va devoir choisir son camp.

Le récit est fait entièrement par la narratrice, elle nous raconte son histoire, sa vie à la première personne. Elle nous apporte son témoignage en entremêlant différents moments de son existence de manière non linéaire, un souvenir appelant une explication ou un autre souvenir. Ce mode de narration permet une vision globale de la destinée de la station au travers du regard de la protagoniste principale, de son enfance à sa vie adulte. Mais cet éclatement chronologique est parfois difficile à suivre et il faut un peu de temps pour remettre les événements dans le bon ordre.

Audrey Pleynet arrive à créer dans un roman court une multitude d'espèces extra-terrestres aux capacités différentes, comme celle d'accéder aux pensées, ou des capacités liées à leur morphologie. Elle arrive à explorer en peu de pages différents thèmes et à exposer comment la station bascule d'un monde presque idyllique, où la liberté et la tolérance sont lois, au conflit. Deux courants en viennent peu à peu à s'affronter : un fusionniste partisan du mélange des espèces et un spécien, partisan de la pureté génétique. La narratrice est un personnage qui a connu l'évolution de la station, elle a grandi avec ce mélange d'espèces et l'apprécie grandement, elle comprend les sentiments des autres et essaye de faire au mieux dans ce conflit. C'est un personnage très attachant qui devient tragique, tant son destin est lié à celui de la station.

Audrey Pleynet fait montre d'un talent remarquable dans Rossignol. Elle arrive à créer un monde et des espèces extra-terrestres variées, une histoire prenante, des personnages attachants, des thématiques actuelles et qui nous questionnent en peu de pages. Une entrée marquante au sein de la collection une Heure Lumière!
Lien : https://aupaysdescavetrolls...
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